• l’année dernière
L’accord conclu, mercredi 22 novembre, entre le gouvernement israélien et le Hamas prévoit l’échange de cinquante femmes et enfants détenus par le groupe islamiste contre des prisonniers palestiniens, ainsi qu’« une accalmie [dans les] combats » durant quatre jours. Une trêve est entrée en vigueur vendredi 24 novembre à 7 heures. Pour Etienne Dignat, chercheur associé au Ceri, spécialiste des négociations lors des prises d’otages, cet accord satisfait à la fois le Hamas, Israël, et les Etats occidentaux. Il explique pourquoi il a fallu un mois et demi pour y parvenir, et en quoi on peut espérer voir là un premier pas vers un accord plus large.

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Transcription
00:00 Cette négociation a satisfait tout le monde.
00:26 Vous ne pouvez pas finalement libérer des Palestiniens à échelle de 1 pour 1 000.
00:31 Ça supposerait de libérer 200 000 Palestiniens.
00:34 C'est évidemment impossible en termes de nombre.
00:36 Les Israéliens n'ont pas autant de prisonniers.
00:38 Il y a une grande peur sécuritaire aujourd'hui en Israël,
00:43 une moindre confiance dans les services de renseignement,
00:46 ce qui évidemment rend impossible la libération de prisonniers très dangereux,
00:49 comme ça a été le cas par le passé, et de prisonniers en nombre.
00:55 Tout le pari qui a été fait par les Israéliens a été d'envahir la bande de Gaza,
01:00 de mettre la pression sur le Hamas pour l'acculer
01:03 et pour l'obliger à négocier dans des termes qui sont plus égalitaires.
01:08 Aujourd'hui, le Hamas doit cacher des dizaines, des centaines même, d'otages
01:12 alors qu'il subit de lourdes frappes et de lourdes repères.
01:15 Évidemment, cela complique la donne, cela pousse à la négociation plus rapidement.
01:22 Le Hamas a satisfait les Israéliens parce qu'ils obtiennent la libération
01:25 de 50 de leurs otages, des femmes et des enfants,
01:28 tout en libérant 150 prisonniers qui sont également des femmes et des enfants.
01:32 Donc Israël arrive à obtenir le retour de ses otages
01:35 sans accroître considérablement le risque sécuritaire.
01:37 C'est un accord qui arrange aussi les Occidentaux
01:39 puisqu'ils obtiennent le retour de certains de leurs otages,
01:41 mais ils n'ont pas eu à négocier directement,
01:43 puisqu'on rappelle que les Occidentaux prétendent ne pas négocier
01:45 avec des organisations terroristes, ils ne sont plus passés par le Qatar,
01:47 et surtout ils n'ont pas eu, eux, en leur nom, à outroyer des concessions.
01:50 C'est un accord qui arrange aussi le Hamas, qui retrouve du souffle.
01:52 Le Hamas montre qu'il n'est plus dans une position de soumission,
01:55 où il subit la riposte israélienne, mais qu'il peut aussi obtenir des concessions.
02:00 Vous devez d'abord identifier les ravisseurs.
02:10 Vous devez ensuite créer un canal de communication, ce qui est très compliqué.
02:12 Vous devez passer par les bons intermédiaires,
02:14 par les bons interlocuteurs parmi les ravisseurs,
02:16 et établir une relation de confiance.
02:18 Ensuite, vous avez la négociation qui se met en place en tant que telle,
02:21 avec des hauts et des bas, avec de la manipulation,
02:23 avec du mensonge, avec de l'intimidation.
02:25 Cela peut durer plusieurs jours, plusieurs mois, voire plusieurs années.
02:29 Et ensuite, une fois que vous êtes accordé sur des concessions de part et d'autre,
02:32 vous devez mettre en place la libération au sens le plus logistique du terme.
02:36 Cela suppose de rassembler les otages, cela suppose de les acheminer,
02:39 et c'est à ce titre-là que la trêve est très importante.
02:45 Le Hamas, qui détient certains otages mais qui ne détient pas tous les otages,
02:48 doit négocier avec d'autres groupes, par exemple le jihad islamique,
02:51 ou d'autres sous-groupes dans Gaza qui détiennent des otages
02:53 et qui n'obéissent ni au jihad islamique ni au Hamas.
02:55 Il doit se déplacer dans la bande de Gaza,
02:57 il doit aller retrouver les otages qui sont notamment dans les souterrains.
02:59 Cela suppose que les combats cessent.
03:01 Il faut par exemple rappeler que le Hamas a demandé à Israël
03:05 de ne pas placer ses drones au-dessus de Gaza.
03:08 Pourquoi ? Parce que le Hamas ne veut pas être repéré
03:11 quand il va chercher les otages dans les caches.
03:13 Il y a aussi enfin un rôle à jouer de la part d'autres intermédiaires
03:17 comme le CICR, la Croix-Rouge,
03:20 qui va finalement établir un point de contact
03:22 pour aller chercher les otages et les transférer hors de la bande de Gaza.
03:26 Le Hamas comme Israël nourrit une profonde défiance l'un vis-à-vis de l'autre.
03:34 Libérer ses otages en plusieurs celles, c'est garantir que la trêve
03:37 va véritablement durer quatre jours, car si les otages sont libérés en une seule fois,
03:41 rien ne garantit que les deux protagonistes ne vont pas reprendre le combat aussitôt.
03:45 Il faut espérer qu'un canal de discussion puisse être maintenu,
03:53 ce qui amènera ensuite à de nouvelles discussions.
03:56 On a vu par le passé, par exemple dans d'autres pays, comme en Colombie,
03:59 que certains intègres d'otages ont pu mener à des discussions plus amples
04:02 pour un accord politique.
04:04 Se parler, c'est toujours un signe très positif dans un conflit.
04:07 [Musique]

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