Nupes, COP28, relaxe d'Eric Dupond-Moretti... Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie - les Verts, est l'invitée de Questions politiques, ce dimanche 3 décembre, avec Carine Bécard, Françoise Fressoz et Guillaume Daret.
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00:00 [Musique]
00:08 Bonjour, ravi de vous retrouver dans "Questions politiques",
00:12 l'émission politique du dimanche sur France Inter, diffusée sur France Info, la télé,
00:16 et en partenariat avec le journal "Le Monde".
00:18 On va parler de l'avenir de la planète aujourd'hui, avec la 28e COP ouverte cette semaine à Dubaï,
00:25 aux Émirats Arabes Unis.
00:26 - Ça fait 28 ans donc qu'on se négocie sur les climats, mais avec quels résultats ?
00:31 Est-ce qu'il faut aujourd'hui plus d'énergie nucléaire ?
00:33 Quelles sont les mesures urgentes qu'il faudrait prendre ?
00:37 Et puis, est-ce qu'il faut oser le pari d'une écologie plus autoritaire aujourd'hui ?
00:41 Pour nous répondre, la secrétaire nationale des écologistes Marine Tendelier,
00:45 notre invitée ce midi, dans "Questions politiques", en direct.
00:48 Et jusqu'à 13h, elle nous livrera dans un instant sa première réaction
00:52 sur l'attaque terroriste de cette nuit à Paris.
00:54 "Questions politiques".
00:56 Karine Bécard sur France Inter.
01:00 - Bonjour Marine Tendelier. - Bonjour.
01:04 - Merci d'avoir accepté notre invitation.
01:06 A mes côtés, pour vous interviewer, Françoise Fressoz du journal "Le Monde".
01:09 Bonjour Françoise. - Bonjour à toutes et à tous.
01:12 - Et Guillaume Darré. Bonjour Guillaume. - Bonjour Karine, bonjour à toutes et à tous.
01:14 - De France Télévisions. Alors je le disais, à l'instant, la France a vécu une nouvelle attaque terroriste
01:20 hier soir à Paris, sur le pont Bir Hakeim qui donne sur la tour Eiffel.
01:24 Il y a un mort, un touriste allemand, deux blessés.
01:27 L'assaillant est un jeune Français, né en France de 26 ans, d'origine iranienne, de par ses parents,
01:33 fiché S avec certains troubles psychiatriques.
01:36 Le parquet national antiterroriste est saisi de l'enquête.
01:38 Marine Tendelier, quelle est votre réaction à cette nouvelle attaque ?
01:42 - Evidemment le choc et la stupeur, je pense, comme toutes les Françaises et les Français
01:47 qui voient encore une fois quelqu'un mourir par des coups de couteau dans la rue,
01:51 sans aucune raison manifeste.
01:53 On a l'impression que c'est un fléau qui frappe au hasard et qui peut concerner tout le monde.
01:57 Donc oui, c'est très préoccupant.
01:59 Et puis, évidemment, ça pose des questions, parce que vous avez donné un peu les détails sur cette personne.
02:04 Ça pose deux questions.
02:05 La question des moyens et du suivi psychiatrique dans ce pays.
02:08 Et ce n'est pas la première fois qu'on en parle.
02:10 Et aussi, évidemment, la question des moyens et des priorités des services de renseignement.
02:14 Vous vous rappelez que le ministre de l'Intérieur, il y a quelques mois, avait parlé des terroristes écologistes.
02:19 Et puis après, il avait parlé des terroristes intellectuels sur la réforme des retraites.
02:23 Et quand j'avais vu Emmanuel Macron le 30 août dernier avec tous les chefs de parti,
02:27 j'étais intervenue assez soudainement là-dessus, en disant "Ecoutez, monsieur le Président, les mots ont un sens".
02:32 Le terrorisme, ça existe vraiment.
02:34 C'est un fléau.
02:35 Ça tue des gens.
02:36 Et on ne peut pas, par un amalgame, dévoyer ce terme en l'appliquant à ses ennemis politiques.
02:41 Parce que dans le monde, il n'y a personne qui fait ça.
02:43 En fait, il y en a, mais ce n'est pas dans les démocraties.
02:45 Et vous êtes en train de lui dire qu'il ne fait pas assez pour le vrai terrorisme ?
02:48 Écoutez, quand on voit le nombre de fichiers S pour des raisons d'une action écolo, devant une banque ou sur un tarmac d'aéroport,
02:55 j'ai l'impression qu'il y a une vraie dispersion des forces des services de renseignement.
02:59 Et pour discuter parfois avec eux, certains ne comprennent plus le sens de leur métier.
03:03 Parce qu'ils ont conscience des vrais risques qui sont sur notre territoire.
03:05 Et je pense que fait d'hiver après fait d'hiver, mort après mort, les Françaises et les Français voient aussi ce que c'est le terrorisme.
03:11 Et le terrorisme, ce n'est pas quand on va manifester contre une bassine
03:14 ou quand on bloque un tarmac d'aéroport pour alerter sur le changement climatique.
03:18 Donc vous dites quoi à Gérald Darmanin ce matin ?
03:19 C'est de la désobéance en civil. On peut avoir le débat.
03:22 Moi, je suis d'accord qu'on soit d'accord ou pas d'accord.
03:24 Je suis d'accord pour qu'on dise qu'il faut sanctionner si on va au-delà de la loi.
03:28 C'est comme ça, c'est la loi.
03:29 Mais qu'on qualifie de terroriste des militants écologistes,
03:32 je pense que ça dilue les services de renseignement, ça dilue les moyens, ça dilue les priorités.
03:37 Et c'est extrêmement préoccupant.
03:39 Guillaume, vous vouliez dire quelque chose ?
03:40 Gérald Darmanin, ce matin, vous lui dites quoi ?
03:42 Concentrez vos efforts sur le terrorisme islamiste.
03:45 Oui, et puis aussi ce que j'ai envie de dire, c'est qu'on voit bien cette dialectique qui s'installe.
03:49 Il y a une dialectique entre deux groupes de personnes qui en veulent à notre modèle de société,
03:54 qui en veulent à nos libertés publiques.
03:55 D'un côté, les terroristes, et de l'autre, la droite extrême et l'extrême droite
04:00 qui veulent toujours moins de liberté publique,
04:02 qui veulent aussi une rupture avec notre vivre ensemble.
04:06 Et j'ai l'impression qu'il y a un acte terroriste,
04:09 une radicalisation dans le discours de certains,
04:11 un autre acte terroriste,
04:13 une re-radicalisation des demandes de durcissement de la loi, de la justice,
04:16 des lois sur l'immigration, comme si l'immigration était le problème,
04:18 alors que vous venez d'expliquer vous-même que ce monsieur était français,
04:21 et que 20% seulement des projets d'attentats terroristes et des actes terroristes
04:25 sont commis par des personnes en situation irrégulière ou qui n'ont pas la nationalité française.
04:30 Donc on voit bien qu'on mélange tout dans le débat public,
04:32 et que ça n'aide pas à adresser sérieusement les sujets.
04:34 Moi, c'est ça que j'aimerais qu'on puisse faire dans ce pays.
04:36 - L'extrême droite réagit toujours très vite sur ces sujets.
04:39 Les réactions politiques à gauche, elles ont mis énormément de temps,
04:42 après ce qui s'est passé cette nuit, à venir.
04:45 Est-ce que vous êtes à l'aise sur ce genre de sujets ?
04:47 Parce que ça vous pose un problème, et si oui, lesquels ?
04:49 - On est des responsables politiques, on n'est pas des chroniqueurs sur CNews.
04:51 Et moi j'admire les politiques qui se rusent sur un plateau télé alors qu'ils ne savent rien,
04:56 ni de la personne qui est décédée, ni de la personne qui commet les actes,
04:59 et qui vont avec les certitudes donner leur récit de l'histoire.
05:03 Et qui d'ailleurs ont une indignation sélective selon la nature des morts et selon la nature des auteurs.
05:08 Moi je l'ai vécu deux fois, à Annecy,
05:10 où quand on a pensé qu'il était musulman,
05:13 cette personne qui avait donné les coups de couteau dans le jardin public,
05:15 c'était atroce envers des enfants,
05:17 où on les a tous vus monter au créneau,
05:19 puis tout d'un coup on a appris qu'il était chrétien,
05:21 et qu'il avait une photo de la Vierge Marie, et là on ne les a plus entendus.
05:23 Comme si du coup les morts n'avaient plus le même sens.
05:25 Et puis très récemment,
05:27 un jardinier de 27 ans qui a un coup de cutter de 15 cm,
05:32 qui a un profil de la Saillant,
05:34 a été très vite très décrit, et très précisément, par le ministre de l'Intérieur lui-même.
05:37 Oui, mais je n'ai pas entendu ceux que je vois se ruer sur les plateaux de CNews
05:40 pour dire que c'est un franco-ocide et qu'il faut virer tout le monde du pays,
05:43 réagir sur cet acte de 75 ans qui tient des propos racistes,
05:46 et qui essayent de tuer un jardinier dans la rue.
05:48 Vous voyez, on ne peut pas avoir une indignation sélective.
05:51 Une vie vaut une vie.
05:53 Un mort vaut un mort.
05:55 Et on doit bien s'occuper de la sécurité de toutes les personnes qui sont sur notre territoire national.
05:58 Allons, poursuivons, comme chaque dimanche,
06:00 avec les images de la semaine.
06:02 Qu'est-ce qui vous a marqué, vous Marine Tondelier ?
06:05 Qu'est-ce qui s'est imposé dans l'actualité pour vous, cette semaine ?
06:08 J'ai choisi une photo des inondations dans le Pas-de-Calais,
06:12 parce qu'on a l'impression que c'était au début du mois de novembre et que c'est passé.
06:14 C'est une photo de Saint-Omer.
06:16 Alors, j'y suis allée le 16 novembre dernier.
06:18 C'est votre photo sur votre smartphone ?
06:20 Alors non, c'est le smartphone de Fabrice,
06:22 qui habite à Saint-Omer,
06:24 et qui, quand nous sommes allés le voir le 16 novembre dernier,
06:26 avait 60 cm d'eau dans sa maison.
06:28 Il faut savoir qu'on est un mois quasiment après les faits,
06:32 qu'il habite toujours chez son fils,
06:34 qu'on lui a dit qu'il pourrait rentrer chez lui en mai.
06:36 Je ne sais pas si vous vous rendez compte.
06:38 Parce que l'humidité montée à 1,70 m,
06:40 c'est rester 15 jours comme ça, dans sa maison.
06:42 Et que, de toute façon, la ville n'est pas encore remise,
06:45 et qu'avec l'hiver qui arrive, ça ne va pas sécher,
06:47 et qu'il faut, même l'escalier, au bout de 15 jours, dans l'eau,
06:49 de toute façon, tout est pourri.
06:51 Et donc, c'est juste pour vous dire que le changement climatique,
06:53 ce n'est pas loin de nous dans le temps et dans l'espace.
06:55 C'est ici et maintenant.
06:57 Il se trouve que ma soeur habite à Saint-Omer,
06:59 que j'ai été là avec Éric Piolle il y a un an,
07:01 et que sur le parvis de la gare, on avait fait une conférence de presse
07:03 pour parler de la submersion marine à Saint-Omer,
07:06 et que des gens passaient en disant "Oh, les écolos, il faut arrêter".
07:08 Et qu'on est un an après, et que nous y sommes.
07:11 Et en plus, on sait qu'à Saint-Omer, c'est des terres qui sont gagnées sur la mer.
07:14 On sait que ça arrive tous les 20 à 30 ans.
07:16 Vous voyez la Seine, le fleuve de la Seine, c'est une crue,
07:18 on dit centenale, une fois tous les 100 ans.
07:20 Là-bas, on sait que c'est tous les 20 à 30 ans,
07:22 et que la dernière, c'était en 2002.
07:24 Donc quelque part, c'est assez logique.
07:26 Qui aurait pu prévoir ? Tout le monde.
07:28 Tout le monde qui suivait un peu l'actualité,
07:30 et la topologie de Saint-Omer.
07:33 Et donc, ce qui est difficile avec l'actualité,
07:36 c'est qu'une actualité en chasse une autre,
07:38 et que ces personnes, on en a parlé d'elles à la télé un petit peu,
07:40 et puis maintenant, à part dans la Voix du Nord de Saint-Omer,
07:42 on n'en parle plus, mais eux, jusque mai...
07:44 - On vous permet d'en reparler, alors que c'était le 16 novembre,
07:46 et surtout que normalement, c'est une photo de la semaine,
07:48 et que vous avez pas fait de conflit.
07:50 - Oui, et je le salue à Fabrice, je le salue d'ailleurs,
07:52 et tous ses riverains, parce qu'ils sont encore en train d'habiter dans la famille,
07:55 et de trouver des moyens de fortune.
07:57 - On passe à la photo de Françoise.
07:59 Même question, qu'est-ce qui vous a marqué cette semaine, Françoise ?
08:01 - Eh bien, moi, c'est la photo du ministre porte-parole du gouvernement,
08:06 Olivier Véran, qui va rendre hommage au jeune Thomas,
08:10 16 ans, qui a été poignardé à mort à l'issue d'un bal à Crépole, dans la Drôme.
08:15 Donc on voit le collège dans lequel était scolarisé ce jeune homme,
08:18 et en fait, ça pourrait être n'importe quel collège de province.
08:21 Et ce qui m'intéresse dans cette affaire, c'est le retour,
08:25 est-ce qu'il fallait considérer uniquement cette affaire comme un fait divers,
08:29 ou est-ce qu'il fallait lui donner une importance bien plus forte ?
08:33 Et le choix d'Olivier Véran, c'est d'avoir des mots très forts,
08:36 puisqu'il dit "il y a un risque de basculement de la société si nous ne sommes pas à la hauteur".
08:41 Et ces mots ont interpellé, parce que, comme le fait divers a été extrêmement exploité par la droite,
08:46 par l'extrême droite, par l'ultra droite, qui est même allée jusqu'à faire des manifestations
08:51 et promettre des expéditions punitives contre les présumés coupables qui étaient ici, d'un quartier à côté,
08:57 est-ce qu'il fallait entrer dans cette scénographie de quelque chose de dramatique ?
09:03 Et ce qui est intéressant, c'est qu'Olivier Véran s'en explique aujourd'hui dans la Tribune Dimanche.
09:07 Et il dit "je me suis rendu sur place et j'ai senti l'exaspération des habitants".
09:12 Je pense que là-dessus il a raison, parce que, Crépole, quand vous regardez l'activité sur les réseaux sociaux,
09:17 vous avez presque 3 à 4 millions de Français qui s'échangent leurs points de vue.
09:23 Et je pense que ça touche énormément les Français, parce qu'on a l'impression d'une violence ordinaire
09:28 qui est décrite par tous les maires. La difficulté, c'est qu'à partir du moment où vous dites "oui, il y a des faits très graves",
09:34 quelle est votre réponse ? Et là, c'est la difficulté pour Olivier Véran.
09:37 Il dit "moi j'oppose un discours rationnel en disant voilà tout ce qu'on a fait, les effectifs de gendarmerie,
09:43 la lutte contre le trafic de drogue, tout ça". Mais évidemment, quand vous rentrez dans cette société de la peur généralisée
09:49 qui est ce qui cherche l'extrême droite et la droite, c'est très difficile de répondre.
09:53 Donc je comprends la limite qu'il ait voulu peser des mots aussi lourds.
09:58 Et après, la difficulté, c'est d'apporter une réponse appropriée.
10:01 Ces mots aussi lourds, Marine Tandelier, risque de basculement, c'est une expression que vous reprendriez ou pas ?
10:07 C'est quasiment ce que je vous ai dit en introduction. Je vois cette société se fracturer, pas juste en France,
10:12 d'ailleurs au niveau international.
10:13 Il y a une différence entre la fracture et le basculement.
10:15 Oui, mais on y est. Les écologistes ont dit depuis longtemps "c'est écologie ou barbarie".
10:19 J'ai l'impression qu'on est à ce moment où on doit choisir entre soit basculer dans le chaos le plus total,
10:26 la violence, la brutalisation, soit prendre le chemin de la désescalade, mais ce qui ne fait pas appel aux mêmes émotions.
10:33 Vous n'avez pas l'impression qu'il y a quand même une partie de la France qui va bien, non ? Tout va mal ?
10:38 Bien sûr qu'il y a des gens qui vont bien, heureusement, mais on voit que tout est, comment dire,
10:43 vous savez comme dans une poudrière, la moindre allumette qui craque, c'est sa part.
10:48 C'est un jeune homme qui meurt et c'est dramatique pour un bal populaire et quelqu'un qu'on ne laisse pas entrer.
10:54 Et ça va jusqu'à la fin des expéditions punitives de l'extrême droite en toute impunité dans les centres-villes.
10:59 Et je trouve que ça fait des années, des mois, des semaines que ça s'intensifie et je crains beaucoup les étapes suivantes.
11:06 Et vous Guillaume, quelle image ?
11:08 Alors moi voici cette image. C'est une image qui illustre en réalité pas seulement le soulagement d'un homme,
11:14 qu'on voit sur cette photo, la photo d'Éric Dupont-Morettier lorsqu'il sort effectivement de la salle du Palais de Justice,
11:19 après sa relax mercredi, ça illustre en réalité le soulagement de deux hommes.
11:24 Il lève les yeux au ciel, c'est surtout ça qu'on voit.
11:26 On voit qu'il lève les yeux au ciel parce que c'est extrêmement effectivement marquant.
11:29 Il l'appelle à Dieu.
11:30 Il l'a joué effectivement.
11:32 Mais il y a quelqu'un qu'on ne voit pas sur cette photo qui était presque tout autant soulagé que lui, c'est Emmanuel Macron.
11:36 Parce que évidemment, Éric Dupont-Morettier, c'est celui qui incarne sa politique en matière de justice.
11:42 C'est aussi évidemment probablement l'un de ses meilleurs coups en matière de casting politique.
11:49 On dit qu'il y a beaucoup de gens dans ce gouvernement qui n'incarnent rien.
11:52 Parce qu'il y avait des erreurs de casting aussi.
11:53 Dont la parole ne passe pas le mieux du son.
11:55 Et on l'arrête plus.
11:56 Éric Dupont-Morettier, lui, il fait partie de ceux qui sont clairement identifiés par les Français.
12:00 Donc ça aurait été un vrai coup dur évidemment pour le chef de l'État de le perdre.
12:03 Parce que s'il n'avait pas été relaxé, s'il avait été condamné, il aurait dû selon la règle rappelée par la Première Ministre, quitter le gouvernement.
12:09 Donc on a vu effectivement que c'est un ministre qui a une relation atypique aussi avec le chef de l'État.
12:14 Parce que tout au long de la procédure, le chef de l'État a toujours repoussé l'éventualité d'une démission a priori avant le procès.
12:22 Et évidemment, le ministre aujourd'hui, le président lui-même, disent qu'ils ont eu raison.
12:26 Puisque le ministre de la Justice a été relaxé.
12:29 Ce qui plaît au chef de l'État, me dit un membre du gouvernement, c'est que c'est quelqu'un absolument atypique.
12:34 Qui a gardé les outils finalement de l'avocat et qui les applique aujourd'hui au monde politique convaincu.
12:40 Je cite "qu'il peut tout emporter par son verbe".
12:43 C'est probablement une qualité, c'est peut-être aussi un défaut.
12:46 Alors la Macronie, comme on dit, a poussé un grand ouf de soulagement cette semaine.
12:50 Mais attention puisque la justice n'en a pas tout à fait fini avec les membres du gouvernement.
12:54 Puisque le jour même où Éric Dupond-Moretti levait les yeux au ciel en poussant ce ouf de soulagement en sortant du tribunal.
13:00 Quasiment même moment, Olivier Dussopt lui était jugé.
13:04 Et la justice a requis 10 mois de prison avec sursis et 15 000 euros d'amende contre lui.
13:09 Pour des soupçons de favoritisme quand il était maire de sa ville d'Annonay en Ardèche.
13:13 Alors on va revenir sur la relax d'Éric Dupond-Moretti à la fin de questions politiques avec l'invité livre à l'avocate Laure Hénique.
13:19 Une question tout de même Marine Tendelier.
13:21 Est-ce qu'il faut la supprimer cette Cour de Justice de la République ?
13:24 Et si oui, il faut la remplacer par quoi ?
13:27 Moi je pense qu'il faut la supprimer. C'est la position d'Europe Écologie des Verts et des écologistes maintenant.
13:32 Vous savez, il n'y a pas si longtemps que ça, j'ai porté plainte contre Christophe Béchut.
13:35 Parce que Christophe Béchut il avait tweeté...
13:37 Ministre de la Transition.
13:38 Ministre de la Transition écologique.
13:39 Il me met sur Twitter "Défendre ceux qui jettent les boules de pétanque sur des gendarmes est-ce lutter contre le dérèglement climatique ?"
13:46 En gros il m'accuse de complicité avec des gens qui sont violents envers les forces de l'ordre.
13:50 Il tweet ça. Et donc dans un monde normal, c'est de la diffamation vraiment caractérisée.
13:54 Vous, portez plainte.
13:55 Et donc j'arrive du coup devant la CJR, puisqu'il est ministre.
13:59 Et l'affaire a été classée sans suite, mais sans même que j'ai été entendue qu'il y ait eu une enquête, qu'il y ait eu des auditions, rien.
14:06 Et donc je vous annonce qu'en septembre dernier, je n'ai pas encore communiqué là-dessus,
14:11 j'ai transmis ce dossier à la Cour Européenne des Droits de l'Homme.
14:14 Parce que je pense que c'est une manière finalement de priver d'un procès équitable les personnes qui sont, par exemple, victimes de diffamation par des membres du gouvernement.
14:22 Et en fait, ce n'est pas normal. Les ministres sont des Françaises et des Français. Ils ne peuvent pas comme ça échapper à la justice.
14:28 Et là, vous avez dit, voilà, il est soulagé et il n'y a pas de problème parce qu'il est relaxé.
14:32 Mais il n'est pas non plus innocenté.
14:34 Ce n'est pas un tribunal comme n'importe quel autre justiciate dans le pays.
14:40 Mais ça veut dire que pour vous, la décision de justice n'est pas légitime. Il ne faut bien respecter.
14:47 Écoutez, je pense que le ministre de la Justice ne peut pas être au-dessus de la justice qui jugerait n'importe quel autre Français.
14:54 C'est incompréhensible et ça nuit beaucoup à la confiance envers la justice.
14:57 Mais en quoi il a été au-dessus de la justice ? Il a été jugé par une institution de la République.
15:01 Il a été jugé par une institution d'exception et je pense que ça ne participe pas à la confiance en politique.
15:05 Alors, ça, il faut le dire avant parce que...
15:06 Alors, Mme Fressoz, on le dit depuis des années.
15:09 Et par ailleurs, vous avez dit qu'Emmanuel Macron, il avait dit qu'il devait démissionner, etc.
15:13 Moi, je rappelle que quelques heures, quelques instants avant la décision, il a pris la parole pour dire que même s'il était reconnu coupable, il ne devrait pas démissionner.
15:22 Alors, on peut dire après, bon, finalement, c'est bon, il a été relaxé, donc c'est OK.
15:26 Mais on voit bien qu'il y a...
15:27 Non, non, moi, c'est...
15:28 Ah bah, moi, c'est ce que...
15:29 Non.
15:30 J'aimerais juste qu'on...
15:31 Il faut se préparer à ça et en fait, il y a, je pense, un sentiment d'impunité, d'un système qui est fort avec les faibles et faible avec les forts.
15:38 Et je pense que cette Cour de justice de la République participe aussi à cela.
15:42 Et donc, du coup, soyez précise, vous demandez quoi, précisément, très concrètement, à la Cour européenne des droits de l'homme ?
15:48 Nous, nous demandons la fin de ce système et j'ai demandé à la Cour européenne des droits de l'homme de se saisir de cette affaire et de reconnaître que cette Cour de justice de la République...
15:57 L'affaire Béchus.
15:58 ...ne permettait pas un droit à un procès équitable en France et que c'était... ça ne respectait pas ce qui devrait être le cas en Europe, dans tous les autres pays d'Europe.
16:10 "Nuclear energy is back and it is an indispensable solution to the fight against climate change."
16:17 Alors, vous avez évidemment reconnu le président Macron qui s'exprime en anglais à la COP28 à Dubaï pour nous expliquer, je le traduis, que l'énergie nucléaire est de retour, "is back", il a dit,
16:28 et c'est la solution indispensable pour lutter contre le réchauffement climatique. Déclaration de la France, donc, hier, avec une vingtaine d'autres pays, dont 10 Etats européens,
16:38 qui ont appelé à tripler l'énergie nucléaire dans le monde d'ici à 2050. On a envie d'entendre votre réaction, là aussi, Marine Tendelier, vous qui êtes la secrétaire nationale des écologistes en France.
16:49 Il a tort ou il a raison ?
16:51 Alors, premièrement, je suis perplexe, parce que pour tripler les capacités nucléaires mondiales, il faudrait mettre en service plus de 70 centrales nucléaires par an,
17:01 et les dernières années, c'était entre 4 et 6 par an. Je ne sais même pas si on est capable de faire ça.
17:06 Ça veut dire aussi, se rappeler quand même que les dernières années, les 20 dernières années, il y a eu plus de réacteurs qui ont fermé dans le monde que de réacteurs qui ont ouvert.
17:15 Le nucléaire n'est pas sur une pente croissante. Depuis la France, on a l'impression qu'il n'y a que ça, parce qu'on ne parle que de ça, et que c'est la nucléocratie en France, c'est le cœur du mordor du nucléaire.
17:24 Mais vu d'ailleurs dans le monde, ce n'est pas vrai, et d'ailleurs, beaucoup ont été choqués en se disant "Mais Emmanuel Macron, est-ce qu'il est chef d'État, là, ou est-ce qu'il est VRP de la filière nucléaire, avec des intérêts financiers ?".
17:34 Tout ça est un peu compliqué. Ce que je vais vous dire aussi...
17:36 Juste, il n'est pas tout seul, il y a 22 Etats, je le redis.
17:38 Ok.
17:39 Et par ailleurs, il y a un autre enjeu qui est de sortir le plus rapidement possible du charbon, du pétrole.
17:44 Évidemment.
17:45 Non mais, vous, sur le fond, est-ce que vous dites "Au fond, oui, le nucléaire, il faut quand même y aller, parce que c'est l'alternative la plus propre possible pour aller le plus vite possible dans la sortie du charbon", ou vous contestez complètement l'analyse ?
17:59 Est-ce que vous connaissez le "Carbon Tunnel Vision" ?
18:02 Non.
18:03 Je vous montre le petit schéma, je ne sais pas si on le verra... En fait, c'est un schéma qui montre, vous voyez, on voit quelqu'un qui...
18:09 Ça, c'est toutes les choses qui participent au changement climatique. Ce n'est pas que le carbone, le changement climatique. Par exemple, 15% du changement climatique, c'est la déforestation.
18:16 Et en fait, on a tendance à voir, par le petit bout de la lignette, tout le monde est obsédé par le carbone. Et c'est important, le carbone. Mais il y a tout ça aussi.
18:23 Et quand on dit "Le nucléaire, c'est la solution pour le carbone, donc pour le climat", on oublie tous les autres impacts du nucléaire sur l'environnement et donc sur le climat.
18:31 Le danger principal de cette COP, c'est quand même bien d'essayer de sortir des énergies fossiles le plus vite possible ou pas ?
18:36 La COP, c'est le climat. La COP, c'est le climat. Ensuite, moi, ce que je veux vous dire, c'est que le nucléaire, c'est ce que j'appelle un objet transitionnel.
18:43 Vous savez, c'est comme les doudous pour les enfants. C'est pareil pour les mégabassines. C'est-à-dire qu'on dit aux gens "Il y a un problème d'eau, il y a un problème d'énergie, ne vous inquiétez pas, on a des solutions pour tout".
18:52 Et donc, c'est une manière finalement que tout puisse continuer toujours comme avant. Pas besoin de sobriété, pas besoin de revoir la société de consommation, pas besoin de se dire comment on fait avec la croissance,
19:01 parce qu'on aura de l'énergie tout le temps à l'infini. Mais c'est faux. La première chose qu'il faut savoir, c'est que les accords de Paris sur lesquels on s'est engagés, c'était pour 2030.
19:10 La crise énergétique, c'est maintenant. Et les nouveaux EPR dont parle Macron, même s'il arrivait à les construire, ce qui pour l'instant n'est pas le cas,
19:17 parce qu'à Flamanville, je vous rappelle, ça devait ouvrir en 2012 et coûter 3 milliards d'euros, qu'on est en 2023, c'est toujours pas ouvert, et on en a à 20 milliards d'euros.
19:25 On voit bien que ce nouvel OPER, plus grand monde n'y croit, c'est un fiasco industriel inédit dans l'histoire de l'industrie française.
19:32 Et là maintenant, on nous dit "On va reposer tous les espoirs climatiques de la France et tous nos espoirs de sortir de la crise énergétique sur 6 nouveaux EPR".
19:39 Sur 6 nouveaux EPR de ce genre, qui, Macron nous dit, ouvriront peut-être en 2040, mais les rapports dans le gouvernement qui ont fuité disent 2045.
19:49 C'est-à-dire qu'en plus, quand il dit "ça ouvrira en 2040", il a des rapports sous son bureau qui lui disent qu'en plus c'est pas vrai.
19:53 Mais les énergies renouvelables, c'est très long aussi. Une éolienne, c'est très long aussi à bâtir.
19:57 Mais ça veut dire que c'est un mirage de dire aux gens "le nucléaire va nous sauver". 2030, c'est demain.
20:02 Et pour déployer un mât d'éoliennes, c'est 8 ans entre la décision et le moment où l'électricité existe.
20:09 Sur un EPR, on sait même pas le calculer tellement ça coûte cher.
20:12 Mais vous avez vu toutes les réactions négatives au déploiement des éoliennes terrestres.
20:17 Mais je ne vous dis pas que c'est simple. C'est pour ça que je prône aussi la sobriété.
20:20 Ce que je vous dis aussi, c'est qu'Emmanuel Macron, le 31 décembre dernier, le soir, vous vous rappelez, des vœux aux Français, dit "Qui aurait pu prédire le changement climatique ?"
20:28 Il parlait de l'été dernier. Il n'avait pas pu prévir que l'été serait compliqué.
20:32 Mais il arrive à prédire ce qui va se passer en 2100, en 2110, en 2120, quand les EPR qu'il veut construire là seront encore en fonction.
20:39 Le débit du Rhône, en 2050, sera moindre de 40%.
20:44 Comment on fait fonctionner la centrale du budget avec 40% de débit en moins dans le Rhône,
20:53 avec des centrales qui déjà aujourd'hui, on doit faire des dérogations l'été parce que l'eau est tellement chaude
20:58 que la centrale ne fonctionne pas correctement, qu'elle rejette de l'eau trop chaude, qui flingue tout l'égo-système derrière.
21:04 Cette mécanique n'est pas du tout résiliente aux changements climatiques.
21:08 Vous voulez qu'on fasse le coup de la relance de la filière nucléaire ? Vous êtes totalement contre ou pas ?
21:11 Oui. Et moi, je ne travaille pas que pour la prochaine élection. Je travaille pour les prochaines générations.
21:16 Et le monde qu'on va laisser naître aux enfants, avec ces EPR, qu'on ne saura pas faire fonctionner avec des risques climatiques grandissants.
21:22 On parlait de Saint-Omer tout à l'heure, mais vous savez ce qu'il y a à côté de Saint-Omer ? Il y a Gravelines,
21:25 la plus grande centrale nucléaire d'Europe, qui est elle aussi construite sur un pôle d'air en dessous du niveau de la mer.
21:30 Et on est en train de remonter l'enceinte de protection de Gravelines. On ne sait pas comment ils ont calculé combien de mètres.
21:36 Ils sont en train de faire ça maintenant.
21:38 Et vous excluez qu'une part de nucléaire puisse participer à ce mix-là ?
21:41 Non, mais nous, ce qu'on a toujours dit chez Les Verts, si on avait gagné par exemple la présidentielle de 2022,
21:46 on n'allait pas fermer toutes les centrales le lendemain. On allait mettre le paquet sur le renouvelable.
21:50 Et au fur et à mesure que l'électricité renouvelable était disponible,
21:54 fermer les centrales en commençant par les plus vieilles, les plus dangereuses, les plus vulnérables, et donc Gravelines par exemple.
21:59 Mais est-ce que vous êtes toujours dans une perspective de sortie totale du nucléaire ?
22:02 Oui, parce que le risque nucléaire, ce n'est pas s'il y a une, deux, trois ou trente centrales.
22:07 C'est un risque qu'on ne peut pas faire courir à l'humanité pour des déchets qu'on ne sait toujours pas régler,
22:11 qu'on va aller enterrer à bure, là où tous les scientifiques nous disent "mais vous êtes sûrs ?
22:15 Mais comment les gens dans mille ans pourront retrouver que c'est là ? Comment ils sauront quoi en faire ?
22:20 Est-ce qu'on est sûrs que le sol va rester stable ? On ne sait pas. Il faut arrêter de croire que l'humain c'est tout,
22:25 mieux que la nature, mieux que tout le monde. Ça ne marche pas.
22:28 Mais avançons, il n'y a pas que le nucléaire. À cette COP28, il s'est dit déjà beaucoup de choses.
22:32 J'aurais à voir vous, votre avis. Qu'est-ce que vous attendez précisément ?
22:35 Quelles sont les mesures concrètes que vous voulez voir sortir de cette COP28 ?
22:39 Déjà à la fin de l'hypocrisie. Parce que je vais vous dire, j'ai l'impression qu'il y en a qui vont à la COP28,
22:45 c'est le moment où tout le monde est Greta Thunberg. Et puis après ils rentrent et ils remettent la Légion d'honneur
22:50 à Patrick Pouyanné comme l'a fait Emmanuel Macron. Et ça en fait, à un moment, ce n'est plus possible.
22:54 Total, c'est 33 mégaprojets, chacun un milliard de tonnes de CO2.
22:59 Il faut arrêter de faire semblant que tout le monde s'y est mis, que tout le monde a compris,
23:03 et que tout le monde va dans le même sens. Ce n'est pas vrai.
23:05 Il y a des forces, des lobbies lourds, puissants, qui bloquent les pétroliers, les gaziers, Total, les banques.
23:12 Vous remettez en cause l'existence des COP ou pas ?
23:14 L'existence des COP, bien sûr que non.
23:16 Vous y allez ou pas ? Comment vous sortez de ce jeu de rôle ?
23:19 Je ne vais pas prendre l'avion pour aller à Dubaï pour ne servir à rien.
23:21 Comment vous sortez de ce jeu de rôle ? Et qu'est-ce que vous attendez concrètement de cette COP ?
23:24 Je vais vous poser deux questions en même temps. La première, est-ce que les COP, ça sert à quelque chose ?
23:27 Moi, ma première expérience militante, c'est la COP15 à Copenhague en 2009.
23:31 J'y étais allée en covoiturage avec des jeunes écolos Picard, parce qu'on pensait à l'époque que manifester à la COP,
23:36 ça allait changer le monde, changer la vie. On était jeunes, utopistes, et on pensait que ça comptait.
23:41 Bon, je ne vais pas aller prendre un avion pour faire une manif devant le centre à Dubaï.
23:44 Le bilan carbone de cette opération serait négatif.
23:47 Si ça avait été quelque part où je pouvais aller en train, j'y serais sans doute allée.
23:50 Mais vous voyez, moi j'entends les débats, des gens qui disent "mais pourquoi ils vont à Dubaï, ça n'a pas de sens".
23:54 Mais d'un autre côté, moi je pense que c'est important d'avoir les pétroliers à la tête des négociations si on veut sortir du fossile.
24:00 Si on ne fait que avec moi, avec Greenpeace et France Nature Environnement, on sera d'accord, mais on ne sortira pas du fossile.
24:07 Donc ça ne vous choque pas que ce soit le patron de la principale compagnie pétrolière qui préside cette COP ?
24:10 Si, ça vient. Mais vous savez quoi, je vais faire avec.
24:13 Parce qu'en diplomatie, si vous faites l'addition de tout ce qui vous choque, vous n'allez jamais nulle part.
24:17 Et la COP, c'est le seul moment diplomatique dans le monde où tout le monde est autour de la table,
24:22 et où chaque État, quelle que soit sa population et son PIB, a le même poids.
24:25 C'est des moments où la première ministre de la Barbade peut prendre un peu le lead sur les négociations.
24:31 Je trouve que c'est une modalité qui est bonne, qui est juste.
24:34 Et je vais vous dire, si même les COP, on n'y croit plus, alors je ne sais pas à quoi on croit.
24:37 Alors il y a beaucoup de mesures très vite qui ont été annoncées, et notamment ce fonds "Perte et Dommage"
24:42 qui a été adopté pour venir en aide aux pays les plus fragilisés face au réchauffement climatique.
24:47 Là, c'est une bonne nouvelle ? Ou pas, telle que les choses ont été présentées ?
24:50 C'est une excellente nouvelle parce que les pays du Nord, qui sont très pronds à donner des leçons à la Terre entière,
24:56 oublient qu'eux, ils ont commencé en 1850 avec la Révolution industrielle.
25:00 Et que, il ne faut pas juste dire... Moi, je l'ai encore entendu du président de la République
25:04 dans les réunions entre chefs de partis. Vous savez que j'ai insisté pour mettre l'écologie à l'ordre du jour,
25:08 alors qu'elle n'y était pas. Et quand je parle du fait que la France fait passer des forts,
25:12 on me dit "Ah oui, mais par rapport à la Chine, par rapport à l'Afrique, ok."
25:15 Mais comparé sur le temps long, 1850 jusque maintenant.
25:18 Et vous verrez que les contributions ne sont pas du tout du même rapport.
25:22 Donc, ce n'est pas vrai que les pays développés sont super parce qu'ils ont compris
25:26 que maintenant, ils font des pistes cyclables, qu'ils construisent des éoliennes une fois de temps en temps.
25:30 C'est une vision très...
25:32 - Mais ça veut dire que ce sont les pays les plus riches qui doivent abonder ce fonds ou pas ?
25:35 - Qui doit les abonder ? - Les pays riches, celles et ceux qui ont bénéficié de ce mode de développement.
25:40 - Et donc, les pays pétroliers, par exemple, en priorité aussi ?
25:42 - Évidemment. Et puis, qu'il faut aider. On voit bien que les premières victimes du changement climatique,
25:47 on a parlé de Saint-Omer, mais il y a quand même des pays du monde qui deviennent, année après année, inhabitables.
25:52 Et qu'ils ne sont pas les principaux contributeurs à ce problème. Donc, c'est profondément injuste.
25:56 Et de toute manière, la lutte contre le changement climatique ne sera pas acceptable
26:01 si elle n'est pas juste socialement. Et je pense que c'est aussi l'enjeu des COP,
26:04 mais que ça, tout le monde commence à le comprendre. Et c'est une bonne nouvelle.
26:07 - Je crois bien sur ma question initiale. À quelle aune vous jugerez le résultat de cette COP ?
26:11 Qu'est-ce qu'il faut au minimum pour que ce soit une avancée ?
26:15 - C'est difficile parce qu'en fait, les COP, il ne faut pas regarder juste la décision qui est prise.
26:20 Il faut regarder ce qui en est fait. - Oui, mais prenons la décision déjà.
26:23 - Non, mais aujourd'hui, au début, on nous disait qu'il fallait maintenir la montée globale de la température
26:30 à 1,5°C, sinon ça allait très mal se passer. Aujourd'hui, à un moment, on a commencé à dire, à la COP 21 à Paris en 2015,
26:38 que bon, on allait plutôt se fixer comme objectif plus de 2°C, ça limiterait les dégâts.
26:43 On ne renonce pas à 1,5°C mais à 2°C. Aujourd'hui, quand on regarde, non pas les engagements des pays sur les plateaux télé,
26:48 mais ce qu'ils font concrètement, on est parti pour +3°C. Et que chacun soit bien conscient que les enfants qui naissent en 2023,
26:55 personne ne sait leur garantir que la planète sera encore habitable dans 30 ans. Et ce n'est pas moi qui le dit, c'est des scientifiques.
27:00 - D'accord. Donc, à partir de ce conclure, qu'est-ce que vous attendez, vous, en priorité ?
27:05 - Parce que les engagements qui sont pris ne sont pas assez forts, et parce qu'ils ne sont ensuite pas suivis d'effet,
27:09 chacun revient dans son pays, à les élections, etc. Et donc, il faut des engagements forts sur les banques,
27:15 parce que sans les banques, on n'y arrivera pas. Et aujourd'hui, les banques, ça ne se voit pas,
27:19 mais tous les investissements dans les projets qui émettent le plus de carbone, c'est aussi les banques qui décident et qui financent.
27:24 Deuxièmement, les fonds de compensation pour les populations les plus précaires.
27:28 Et puis, il y a aussi, bien sûr, la fin du charbon, pas comme un concept, avec une date et avec des engagements fermes.
27:35 Parce que la dernière fois que Macron a pris un engagement ferme, à fermer les centrales en charbon, c'était en 2022.
27:39 Il avait dit que ce serait fait avant 2027.
27:42 - Et là, c'est l'après-midi 2027. Une question concrète. Les JO d'hiver 2030, qui risquent d'être très probablement attribuées aux Alpes françaises,
27:49 vous validez ou pas ?
27:51 - Ça fera bien fonctionner les canons à neige. Je pense qu'il y a toute une réflexion à voir sur les compétitions sportives internationales.
27:59 Et comment... Parce que c'est pas un truc de les écolos contre le sport. Moi, j'adore le sport et j'adore les compétitions internationales.
28:06 J'ai été très frustrée de ne pas pouvoir suivre la Coupe du monde au Qatar, parce que ces stades climatisés dans le désert, moi franchement, ça m'a sciée.
28:12 - Mais la Légion en France vous dites que c'est pas possible ?
28:14 - De l'Asie, il faut quand même avoir lieu. En Arabie Saoudite, je sais pas qui a inventé ce concept, ça n'a aucun sens, mais c'est vrai.
28:19 Et que faire venir des gens du monde entier, faire des infrastructures qui vont détruire aussi des zones naturelles, et il en reste trop peu dans ces zones-là,
28:28 c'est une question qu'on doit se poser, tout comme on peut se la poser pour les Jeux olympiques.
28:31 - Est-ce qu'on se remet en cause la notion même de "Jeux olympiques" ?
28:34 - Bah, moi je pense que les Jeux olympiques, par exemple les Jeux olympiques d'été, là, de Paris, pour les années d'après,
28:39 en fait, on pourrait se dire que chaque pays organise une épreuve. Parce que c'est pas juste que les athlètes se déplacent, ça évidemment qu'ils doivent le faire,
28:47 mais pourquoi on prend un pays où on doit tout créer, un village olympique, pour 20 000 athlètes ?
28:52 Vous voyez ce que ça implique comme construction ? Et ça sert une semaine, deux semaines ?
28:56 Alors que si on décentralisait quelque part, partout dans le monde, et chacun envoyait une épreuve, ce serait une vraie fête pour tout le monde.
29:02 Et ce qui se passe aussi, c'est qu'il y a tellement d'enjeux financiers, tellement même de suspicions, de corruptions,
29:07 on voit bien tout l'enjeu qu'il y a autour du choix d'une ville, qu'en fait, on met trop d'impact là-dessus.
29:13 Et si chacun envoyait une épreuve, et bien finalement ce serait plus juste, parce qu'il y a des pays qui n'auront jamais les moyens d'organiser ça,
29:19 et des populations qui ne participent jamais à cette fête.
29:22 Et pour les Jeux d'hiver de 2030, les organisateurs disent que 95% des installations sont existantes, ce sera les Jeux les plus durables de l'histoire.
29:29 Pour les Jeux d'hiver, voilà, et puis il y a aussi des installations qui avaient été faites pour Albertville, et qui sont peut-être réutilisables.
29:35 Mais on voit bien qu'il y a quand même un problème de neige dans cette zone, vous le savez, qu'on doit construire des retenues collinaires et des bassines
29:41 pour avoir de l'eau, pour faire de la neige. Ils ne disent plus neige artificielle, maintenant ils disent neige de culture, parce que comme ça, ça a l'air intelligent.
29:47 C'est comme les phytosanitaires, ou les produits de soins des plantes au lieu des pesticides, mais ça va quand même causer des vives tensions sur les ressources en eau locale.
29:55 Mais ça, j'imagine que d'ici 2030, on aura l'occasion d'en reparler.
29:59 C'est Marine Tandelier, la patronne des écologistes, notre invitée ce midi sur France Inter et France Info, la télé, dans "Questions politiques".
30:04 On va réécouter, une nouvelle fois, plutôt le chef de l'État, qui s'est aussi occupé ce week-end du dossier du Proche-Orient.
30:12 Il a adressé une vraie mise en garde à l'État hébreu, lui intimant de parvenir très vite à un cessez-le-feu tenable.
30:19 Je pense qu'on est à un moment où les autorités israéliennes vont devoir définir plus précisément leur objectif et l'état final recherché.
30:28 La destruction totale du Hamas, qu'est-ce que c'est ? Et est-ce que quelqu'un pense que c'est possible ?
30:33 Si c'est ça, la guerre durera dix ans.
30:38 Marine Tandelier, vous dites la même chose qu'Emmanuel Macron ou pas ?
30:41 Je dis un peu plus que lui quand même.
30:43 Alors allons-y.
30:44 Depuis longtemps. Parce que la première chose qu'il faut que vous sachiez, c'est que le 30 août dernier, quand il a rassemblé les chefs de parti pour la première fois à Saint-Denis,
30:51 on a eu un très long point sur la situation internationale. L'Arménie, l'Ukraine.
30:55 Et quasiment personne n'a parlé du conflit israélo-palestinien.
30:58 Et je me rappelle être intervenue en disant "écoutez, moi j'ai quand même un sujet, c'est que la colonisation illégale en Cisjordanie n'a jamais été aussi intense,
31:05 que la situation de la population à Gaza n'a jamais été aussi dure, et que, contrairement aux années précédentes, personne n'en parle."
31:11 Et j'avais posé ce sujet sur la table.
31:13 On était le 30 août, hein ?
31:14 On était le 30 août.
31:15 On était le 7 octobre, d'accord.
31:16 Qui aurait pu prévoir. Vous voyez, il y a un truc quand même où évidemment qu'à un moment ça allait péter.
31:20 On le savait. Et je pense que la France, qui longtemps avait eu une voix singulière sur ce sujet,
31:24 était un soutien pour les populations civiles qui souffraient, s'est eue, et s'est eue trop longtemps.
31:30 Mais là maintenant, il retrouve les bons mots, non ?
31:32 Oui, mais il est très tard, le 7 octobre, c'était quand l'incursion terrestre a commencé.
31:35 Ça veut dire que le 7 octobre, vous pensez qu'Israël ne devait pas riposter à l'agression dont ils ont été victimes ?
31:43 Je pense que la France n'était pas obligée de soutenir de manière unilatérale toute l'incursion terrestre, les bombardements des hôpitaux.
31:51 Et vous voyez, quand il y a eu la guerre en Ukraine, tout le monde avait bien conscience qu'il y avait des règles.
31:56 Qu'on ne bombardait pas des écoles, qu'on ne bombardait pas des hôpitaux, ça paraissait logique pour tout le monde.
32:01 Alors pourquoi ça ne paraît pas logique à Gaza ?
32:03 C'est le droit international, c'est le droit humain, et c'est le droit humanitaire.
32:06 Donc c'est pas très compliqué.
32:08 Et je trouve que le Président de la République, moi je lui ai posé très directement la question à la dernière réunion des chefs de parti,
32:14 et il a dit "oui mais c'est une question d'accent tonique, parce qu'il faut attendre, l'émotion, tout ça".
32:18 Mais elle est où l'émotion ? Il faut attendre quoi ?
32:20 5 morts ? 50 morts ? 500 morts ? 5000 morts ? 50 000 morts ? C'est une question de nombre de morts ?
32:26 Et quand c'est un mort palestinien, il faut attendre plus longtemps que quand c'est un mort ukrainien ?
32:30 Je ne comprends pas ces pudeurs de gazelles.
32:33 Et ça m'a fâchée parce que je trouve que la France n'a pas joué son rôle,
32:38 et même s'est coupée d'alliés historiques dans la zone, de gens qui respectaient la France,
32:42 et qui auraient pu par exemple aider la COP 28.
32:44 Si Macron n'arrive pas à avoir un rôle important à la COP 28, c'est aussi qu'il s'est décrédibilisé dans la zone.
32:48 Et donc il a réussi à se brouiller avec l'entièreté des pays de la zone,
32:51 qui en plus ne sont d'accord sur rien, donc ils se sont mis juste d'accord là-dessus.
32:55 En France, il a été critiqué et par le CRIF, et par les défenseurs de la paix,
32:59 et par les défenseurs de la Palestine, et même au Quai d'Orsay il y a eu une mini-fronde
33:03 de gens qui ont fini par dire "en fait vraiment, ça coupe les moyens diplomatiques de la France pour la suite".
33:07 Donc c'était des tergiversations, des circonvolutions, qui n'ont pas grandi la France,
33:11 et je pense qu'ils auront des conséquences durables dans la zone.
33:15 En parlant de pudeurs de gazelles, Jean-Luc Mélenchon, hier en marge d'un rassemblement,
33:19 a estimé que la reprise des bombardements israéliens sur Gaza présentait, je cite,
33:24 "tous les indices d'une volonté génocidaire". Est-ce que vous reprendriez ces termes ?
33:28 Est-ce que vous pensez qu'il y a une volonté, je cite, "génocidaire" chez Israël ?
33:31 Moi je ne fais pas un concours de vocabulaire avec Jean-Luc Mélenchon, vous avez compris,
33:34 mais par contre ce que je peux vous dire, c'est qu'Israël a demandé aux habitants de Gaza,
33:39 qui sont déjà en état de blocus depuis 16 ans, c'est-à-dire que 50% de la population à Gaza a moins de 16 ans,
33:44 c'est-à-dire qu'ils ne sont jamais sortis de cette zone, ils sont en blocus.
33:48 On leur dit "incursion terrestre, vous devez vous déplacer dans le sud, parce que sinon on va bombarder là où vous êtes".
33:53 Et le terme de "génocide" ?
33:55 Attendez, on les fait déplacer dans le sud, et là qu'est-ce qu'on fait depuis la reprise des bombardements ?
33:59 On bombarde le sud. Là on leur a dit d'aller. Alors c'est quoi l'intention à la fin ?
34:04 C'est de vider Gaza de sa population, par les bombardements et par les morts,
34:08 parce qu'à un moment on va finir par rendre la situation tellement intenable que les gens vont vouloir partir,
34:12 et il se passera quoi après ? Il n'y aura plus de Gaza.
34:14 "Génocidaire", vous reprendriez ce terme ?
34:16 Je ne l'ai pas dit, donc ne me faites pas dire un mot que je n'emploie pas.
34:18 Ce n'est pas Marine Tondelet qui décide de qualifier de "génocide" ou pas des choses.
34:22 Je pense qu'il y a des choses très graves qui se passent, et j'aimerais qu'on puisse les qualifier avec beaucoup de certitude.
34:26 Et ce que vous demandez concrètement ?
34:27 Et donc, ce que je demande concrètement, Madame Fressoz, comme je l'ai fait dans une tribune avec François Ruffin et avec Rony Broman,
34:32 parce que ça fait des semaines qu'on porte ça, on l'a aussi dit à Emmanuel Macron,
34:36 c'est de pouvoir faire entrer dans Gaza la Cour pénale internationale.
34:41 Des enquêteurs légitimes, indépendants, comme la France l'a fait et l'a soutenue en Ukraine.
34:46 Pourquoi ce ne serait pas possible à Gaza ?
34:48 Mais il y en a déjà plein qui ont été demandés des enquêtes sur place.
34:51 Par des centaines d'associations, par des centaines d'avocats.
34:54 On n'a pas les moyens de communication.
34:56 Les journalistes sont empêchés de travailler et le font au risque de leur vie.
34:59 Et donc, d'avoir des enquêteurs de la CPI dans Gaza, ça permet, c'est la seule manière,
35:04 premièrement d'enquêter sur les otages qui sont encore,
35:07 deuxièmement d'enquêter sur les bombardements en cours,
35:09 et troisièmement, que la vérité puisse se faire un jour.
35:12 Et le simple fait que la vérité puisse se faire un jour empêche le sentiment d'impunité sur place,
35:16 et le fait que des personnes puissent prendre des décisions en disant "personne ne s'intéresse et personne ne saura jamais".
35:21 C'est ce que tous les diplomates avec qui je discute en off me présentent comme la seule solution.
35:26 Et je suis très reconnaissante à François Ruffin et à Rony Broman qui est un humanitaire reconnu,
35:30 et qui, peut-être, il aurait pu refuser de signer cette tribune avec des politiques,
35:34 mais je pense que l'heure est trop grave et que maintenant les gens doivent sortir de leurs réserves et demander ça.
35:38 Je l'ai demandé plusieurs fois au président de la République, je le referai en sortant.
35:41 Je ne comprends pas ce qui l'empêche de faire ça, c'est quand même pas très courageux,
35:43 au vu de ce que vivent les personnes sur place.
35:45 Marine Tordelier, Guillaume nous en parlait à l'instant de Jean-Luc Mélenchon, je vous propose de l'écouter.
35:49 Il était hier l'invité de la matinale de France Inter.
35:52 Il n'y a plus de nuppes, c'est un constat, mais ce n'est pas mon fait.
35:57 C'est le parti communiste qui a voté, vous entendez les gens ?
36:01 Ce n'est pas moi qui ai décidé ça.
36:03 Le parti communiste qui avait déjà maintenu sa candidature à l'élection présidentielle
36:07 et nous a fait rater le deuxième tour a voté qu'il n'y avait plus de nuppes.
36:11 Les socialistes ont voté qu'ils faisaient un moratoire dont ils ne donnent ni la raison, ni les délais,
36:18 mais ils ont retiré le mot "nupes" de l'appellation de leur groupe.
36:22 Quant au vert, ils ont décidé qu'ils interrompaient tout travail commun.
36:25 Écoutez-moi bien, je ne sais toujours pas pourquoi.
36:29 Vous avez arrêté tout travail commun avec Jean-Luc Mélenchon, Marine Tordelier ?
36:34 Je vais vous raconter une anecdote intéressante.
36:36 Hier, j'ai eu un échange avec Cyrielle Chatelain, la présidente du groupe écologiste à l'Assemblée nationale,
36:41 qui m'a dit "Marine, est-ce que tu sais de quoi il parle ?"
36:43 Je lui ai répondu "non, je pensais que toi tu saurais de quoi il parlait".
36:47 Donc à un moment, je suis fatiguée, je ne sais pas, on va demander un compte pénibilité aussi
36:50 pour les partenaires de Jean-Luc Mélenchon.
36:52 Moi franchement, je suis fatiguée, je suis triste parce qu'on le connaît, on n'est pas étonnés.
36:56 Mais là, on ne sait pas bien où il va et il s'isole, il se coupe de tout le monde.
37:01 Alors attendez, on va reprendre, est-ce que la nupe existe encore ou est-ce qu'elle est morte ?
37:06 Avant de reprendre, je peux peut-être terminer, il s'isole, il se coupe de tout le monde.
37:09 On ne sait pas où il va, moi je pense qu'à force de fracturer tout ça, je ne vois vraiment pas quel est l'aboutissement de ça.
37:14 Et surtout, ce qu'il commence à bien faire, c'est que quand on l'écoute, c'est toujours de la faute des autres et jamais de la sienne.
37:19 Moi, je suis la première à prendre mes responsabilités quand je n'ai pas bien fait un truc, mais lui jamais.
37:22 Et dans le mot "responsable politique", quel mot "responsable" ?
37:25 Et je pense qu'à force de ne jamais prendre ses responsabilités, on n'accède jamais aux responsabilités.
37:30 Ça me rend triste, ce n'est pas pour lui.
37:31 Moi, le sujet, ce n'est pas qu'il m'aime bien ou qu'il ne m'aime pas, j'ai compris qu'il ne m'aimait pas, mais ce n'est pas grave.
37:35 Mais à la fin, on se bat pour les Françaises et les Français.
37:38 C'est quoi sa faute à lui ?
37:39 C'est qu'il y a énormément de Françaises et de Français qui attendent des choses de lui,
37:43 parce que je rappelle que ce monsieur voulait être Premier ministre de la France pour la nupe.
37:46 Et que si on voulait tout ça, si on avait fait l'effort de se mettre d'accord sur un large programme et beaucoup de propositions,
37:51 c'est parce qu'on se battait pour des valeurs, pour des causes et pour des gens.
37:55 Et que depuis des mois, où moi je les vois, je ne rentre jamais dans le débat sur Twitter,
38:00 entre l'un qui répond à l'autre, qui recritique l'autre, je n'en peux plus.
38:03 Et on perd de vue les personnes pour lesquelles on se bat, pour Fabrice de Saint-Omer,
38:10 pour les gens qui travaillent dans le service public, pour les gens qui auraient besoin de service public.
38:14 Tout ça disparaît, est invisibilisé par le bruit et la fureur,
38:17 parce qu'on ne commande jamais le fond, mais l'invective, la forme et qui va tacler dans sa prochaine interview.
38:23 Et moi je n'ai pas fait de la politique pour ça.
38:25 Donc pour la gauche, il faut que Jean-Luc Mélenchon se retire, ce serait mieux pour vous ?
38:28 Mais moi je ne demande pas qu'il se retire, il y a de la place pour tout le monde.
38:31 Juste qu'il soit à la hauteur des fonctions auxquelles il prétendait accéder.
38:35 Mais c'est un atout ou un boulet ?
38:36 A votre avis.
38:38 Puis en plus vous voulez que je l'invective, et moi je ne ferai pas ça.
38:41 Et la nippeuse existe encore ou elle n'existe plus ?
38:43 Il vient de la dissoudre, on n'a pas compris.
38:45 Moi je n'en sais rien, ce n'est pas mon sujet.
38:47 Moi je parle depuis des mois d'union des écologistes et de la gauche, et ça j'ai une bonne nouvelle, ça existe encore.
38:51 On y travaille, pas sur Twitter en direct, pas comme si c'était une mission de télé-réalité.
38:56 On y travaille sérieusement, en ce moment, avec celles et ceux qui ont envie de travailler sérieusement.
39:01 C'est le signe qu'il y a des dialogues ?
39:03 Par exemple, et heureusement ça n'est pas le seul avec lequel on est capable de faire ça.
39:07 Parce qu'à la France Insoumise, je pense qu'y compris là, Jean-Luc Mélenchon est de plus en plus isolé.
39:11 Moi le responsable de la France Insoumise de Lille, celui qui était tête de liste pour eux,
39:14 qui était tête de liste aussi au municipal à Lille, au régional pour le Nord,
39:18 vient de quitter la France Insoumise, il était là au début, à la fondation.
39:22 C'est un gars remarquable, Julien Poix, que j'ai vu semaine après semaine me faire "pfff"
39:27 et là il est parti.
39:28 Et donc je pense qu'il faut donner un espoir, c'est ça la priorité qu'on doit aux Français,
39:32 leur montrer qu'un débouché est possible.
39:34 Évidemment que l'espoir là, il se voit pas bien, je suis d'accord avec vous.
39:37 Mais sachez qu'on y travaille, avec celles et ceux qui en ont envie, qui sont sérieux,
39:41 à un projet, à un candidat unique, à une manière consensuelle de le désigner.
39:45 Et que ça commence maintenant avec celles et ceux qui en ont envie.
39:47 Et puis ceux qui n'en ont pas envie tout de suite, peut-être ils viendront plus tard.
39:50 Alors là vous parlez de 2027, mais avant 2027 il y a un autre scrutin qui vous attend,
39:53 ce sont les élections européennes.
39:56 C'est un scrutin qui sourit parfois aux écologistes, notamment quand Daniel Cohn-Bendit tire la liste
40:02 ou quand vous choisissez Yannick Jadot sur une élection aussi importante.
40:05 Expliquez-nous pourquoi vous avez fait le pari cette fois d'une quasi inconnue, Marie Toussaint ?
40:10 Je vais me permettre de hacker l'émission pour faire 10 secondes de petit hommage à Michèle Rivasi
40:14 qui est décédée cette semaine, qui était députée européenne.
40:17 J'ai rarement vu dans ce mouvement en 15 ans, un décès, une disparition qui suscitait autant d'émotions.
40:23 Parce que Michèle, elle était irremplaçable, unique.
40:26 Et que pendant des décennies, elle a été intraitable avec les puissants,
40:31 et proche et accessible pour tous les autres.
40:33 Et heureusement ça faisait beaucoup de monde.
40:35 Et donc je voulais lui rendre hommage parce que, on l'a fait hier soir au meeting de Marie Toussaint,
40:38 on va le faire encore beaucoup, et c'est une disparition très brutale.
40:41 Elle faisait encore la fête avec son équipe la veille.
40:44 Et donc voilà, je voulais lui rendre hommage.
40:46 Et donc sachez que Marie Toussaint s'inscrit dans les pas de Michèle, dans les pas de Yannick,
40:49 dans les pas d'Eva Joly, de José Bové, de toutes celles et ceux qui ont fait l'Europe.
40:53 C'est une jeune fille qui est remarquable, elle en dit parfois,
40:55 elle n'est pas assez connue du grand public, ben c'est normal.
40:57 Elle est absolument pas connue du grand public.
40:59 C'est la première élection qu'elle fait, moi non plus j'étais pas connue du grand public
41:01 quand je suis devenue secrétaire nationale, et j'ai entendu ça 6 mois avant mon élection.
41:03 Et puis après les gens ont dit "ben maintenant on la connaît" et puis voilà.
41:05 - Et alors du coup vous validez sa stratégie de douceur qu'on a découvert hier à son premier meeting.
41:11 La bouti-thérapie, c'est-à-dire on danse pendant les meetings, c'est une campagne électorale ?
41:16 - Ben mais la première chose que je veux vous dire c'est que tant mieux qu'elle soit pas encore connue,
41:19 parce que ça donnera l'occasion aux Françaises et aux Français qui peut-être désespèrent un peu de la politique en ce moment,
41:24 de faire une rencontre formidable dans les mois qui viennent.
41:26 J'en suis certaine.
41:28 La deuxième chose c'est que Marie, vous ne connaissez peut-être pas son nom et son prénom, Marie Toussaint,
41:32 mais c'est elle qui est à l'origine avec d'autres, avec ses sites du Flos, avec Audrey Pulvar, de l'affaire du siècle.
41:37 2 millions de signatures pour le climat à l'époque.
41:39 Et donc c'est pas quelqu'un qui arrive comme ça en disant "tiens je vais faire de l'écologie, ça a l'air sympa".
41:43 Elle est militante depuis ses 18 ans, elle vient d'une famille datée des guerremondes,
41:46 et elle sait ce que c'est aussi que la précarité, que donner voix ou sans voix.
41:50 Moi je suis extrêmement fière qu'elle soit notre tête de liste.
41:52 - Et donc la danse, la douceur ?
41:53 - Et donc la danse, ben écoutez ce que je voulais que je vous dise.
41:55 J'ai vu sur les réseaux sociaux que certains étaient choqués qu'on ait pu se danser à un meeting.
42:01 Le monde est dur, la vie est dure, mais on va quand même pas s'arrêter de danser.
42:04 Il y a une grande révolutionnaire qui disait "si ta révolution ne danse pas, ne m'invite pas à ta révolution".
42:09 Et je pense qu'à un moment, il faut aussi être capable de cultiver la convivialité.
42:13 La deuxième chose que je voulais vous dire c'est que la boutitherapie, alors j'ai lu ces objets,
42:17 - Expliquez-nous ce que c'est parce que personne ne sait ce que c'est.
42:19 - En fait c'est Maïmouna Koulibaly qui a été victime d'excision, de viol, de violence domestique,
42:25 qui a inventé cette discipline qui est un mélange de danse, de développement personnel,
42:30 d'affirmation de soi, de reconnaissance de son corps et de toutes les formes de corps.
42:34 Et donc voilà, c'est de la danse en mini-short, on remue un peu des fesses.
42:38 Et elles ont fait une démonstration, puis elles ont appris au public à le faire,
42:40 en montrant que ça relâchait la pression, que ça donne confiance en soi,
42:42 que ça permet de s'accepter quel que soit son corps et son histoire.
42:45 Et à un moment peut-être qu'il va falloir lâcher la grappe aux femmes,
42:48 et qu'elles bougent la partie du corps qu'elles veulent dans les vêtements qu'elles veulent,
42:51 si ça leur fait du bien. Moi tous les gens que j'ai vu râler sur les réseaux sociaux,
42:55 je me suis dit peut-être que justement ils auraient dû faire la boutithérapie.
42:58 - Mais sur la stratégie, moi j'ai une interrogation, parce que la dernière fois qu'on a entendu parler des écologies,
43:03 c'était les journées d'été, il y avait la polémique avec la présence du rappeur Médine.
43:07 Et aujourd'hui vous êtes dans quelque chose de beaucoup plus apaisé, de plus doux.
43:11 Est-ce qu'il y a eu un changement de stratégie ? Est-ce que vous vous rendez compte qu'au fond l'écologie,
43:15 si elle est trop combative ou trop agressive, peut susciter des réactions de rejet ?
43:21 Avec notamment le Rassemblement National qui compte beaucoup pendant les européennes,
43:25 essayer d'incarner une écologie plus douce que la vôtre.
43:29 - C'est sûr que leur écologie est très douce puisqu'elle est invisible.
43:32 - Ils sont en train d'essayer d'évoluer.
43:35 - Non mais l'écologie douce c'est quoi ? C'est l'écologie qui vote avec les lobbies à Bruxelles ?
43:39 C'est l'écologie qui veut des OGM, qui veut que nos assiettes restent mauvaises pour nos santés,
43:44 qui veut ne déranger aucun intérêt ? C'est ça l'écologie douce ?
43:46 - Alors vous, comment vous incarner, à la fois vous faire accepter,
43:50 ne pas apparaître comme ceux qui veulent complètement changer de modèle,
43:54 ou en tout cas perturber les gens dans leur vie quotidienne, et affirmer votre...
44:00 - Je pense qu'il faut arrêter de dire ça parce que c'est dangereux.
44:02 L'absence d'écologie perturbe aujourd'hui les gens dans leur vie quotidienne.
44:05 Il y a 50 000 morts par an de la mauvaise qualité de l'air.
44:09 Il y a des enfants qui meurent de cancer pédiatrique à cause des pesticides.
44:13 - Oui mais vous voyez, dès que vous essayez de le faire un peu brutalement, ça fait des réactions très fortes.
44:15 - Mais ça c'est très brutal par ailleurs. Je pense qu'on a un problème de traitement médiatique,
44:17 de présenter les solutions comme brutales alors que les causes à la base le sont beaucoup plus.
44:22 Et puis la méthode elle est simple, c'est de fédérer.
44:25 Je pense que dans ce pays, il y a une immense majorité de personnes
44:29 qui sont déjà écologistes dans un coin de leur tête.
44:31 Qu'elles ne trouvent pas la manière de s'engager parce que l'engagement ça fait peur,
44:35 parce que Gérald Darmanin n'arrête pas de dire que chez les écolos tout le monde est terroriste,
44:38 parce qu'on a l'impression que le défi est trop grand et qu'on ne sait pas par quelle porte rentrer.
44:42 Je le conçois et c'est pour ça qu'on a créé un nouveau mouvement, les écologistes,
44:45 en disant que certains voudraient faire de la politique, être dans un parti et qu'ils auraient leur place,
44:50 et que tous les autres ceux qui veulent juste un lieu pour se former, un lieu pour s'informer,
44:54 un lieu où on leur apprenne à faire les élections municipales dans leur village,
44:57 un lieu où on leur fasse rencontrer des gens près de chez eux, un lieu où on organise des actions.
45:00 Chacun fera ce qu'il veut, on l'a organisé, ça s'appelle les écologistes, on est en train de le déployer.
45:04 Il y a même une application smartphone qui s'appelle "Ecolo !", vous pouvez télécharger,
45:08 où on vous donne y compris des conseils lifestyle pour que votre vie soit en adéquation,
45:11 comment on choisit ses vêtements, comment on mange de saison.
45:14 C'est tout ça l'écologie, ce n'est pas juste de la politique politicienne.
45:17 Et je suis extrêmement fière qu'on ait réussi à le faire.
45:20 On est déjà 160 000 dans ce nouveau mouvement, les écologistes,
45:22 dans 40 000 qu'on ne connaissait pas du tout avant ce processus.
45:25 Ça ne fait que commencer et je pense que dans les mois de campagne qui viennent avec Marie Toussaint,
45:29 on va déployer de belles manières ce mouvement.
45:32 Juste un chiffre, vous espérez faire combien avec Marie Toussaint ?
45:35 Ah mais nous on n'est pas des astrologues des élections.
45:38 Vous avez fait 3,5% la dernière fois avec Anne Hidaud, c'est pas facile ?
45:40 Non mais ce que je peux vous dire, c'est que les gens sont dans les starting blocks,
45:43 qu'il y aura un bulletin vert à l'élection, parce que je vous rappelle qu'on a vécu des mois de pression pour qu'il n'y en ait pas.
45:47 Donc oui, il y aura un bulletin vert à l'élection et que ce bulletin sera le seul
45:51 qui permet d'indiquer aux dirigeants français et aux dirigeants européens que la priorité ça doit être l'écologie.
45:56 Comment vous les convaincre que l'Europe ça sert à quelque chose quand on voit qu'il y a quelques semaines encore,
45:59 l'Europe a reconduit par exemple le glyphosate, l'autorisation pour 10 ans.
46:02 Les gens se disent "on a beau voter pour les européennes, c'est la commission, on a beau voter pour l'Europe, on a beau voter pour les écolos".
46:08 Très très rapidement, s'il vous plaît.
46:10 Il faut arrêter quand des dirigeants européens font n'importe quoi de dire que c'est de la faute de l'Europe.
46:14 L'Europe c'est aussi celles et ceux qui prennent les décisions, en l'occurrence la France a fait preuve d'une lâcheté coupable sur cette décision du glyphosate.
46:19 C'est de la faute de la France, pas de l'Europe.
46:21 Et l'Europe c'est aussi plein de solutions. Je vous donne un tout petit exemple, la déforestation.
46:26 Je vous ai dit c'est 15% des émissions de CO2 au niveau mondial.
46:28 La déforestation on pourrait s'en occuper en France très bien, sauf que ça n'aurait pas de poids.
46:33 L'Europe c'est le deuxième importateur mondial de produits issus de la déforestation.
46:37 Quand on arrive à arracher, et les écologistes l'ont fait, des mesures sur la déforestation au niveau européen en disant "on interdira les produits issus de la déforestation",
46:44 alors toutes les filières sont obligées de se réorganiser parce qu'elles veulent continuer à vendre à l'Europe.
46:48 Je pourrais vous faire cet exemple sur la réindustrialisation, sur la protection de la santé.
46:52 Marie Toussaint propose un droit de veto social.
46:54 Aucune mesure au niveau européen qui pourrait avoir un impact négatif sur les 10% des plus pauvres en Europe.
46:59 Ça peut changer beaucoup de choses l'Europe, y compris quand vos états ne sont pas à la hauteur.
47:03 Marine Taudelier, je vous laisse un peu de temps parce que vous avez besoin de retrouver de la voix.
47:06 Vous en avez de moins en moins, vous me faites peur.
47:07 On va poursuivre "Questions politiques" avec notre second invité pour le livre de la semaine.
47:13 France Inter.
47:15 "Questions politiques".
47:19 Karine Becker.
47:22 On n'arrive plus à arrêter Marine Taudelier, du coup il était grand temps de recevoir Laure Hénique.
47:27 Bonjour Laure Hénique.
47:28 Bonjour Karine Becker.
47:29 Merci de nous avoir rejoint sur le plateau de "Questions politiques" ce midi.
47:32 Vous êtes avocate et vous venez de publier un livre très dur sur notre justice, "La justice contre les hommes".
47:38 C'est le titre de votre ouvrage, paru aux éditions Flammarion.
47:42 Vous nous expliquez Laure Hénique que l'institution judiciaire va plutôt mal.
47:45 Elle est à la fois bradée et déshumanisée.
47:48 Et vous n'êtes pas tendre non plus avec le personnel politique qui vote la loi.
47:52 Des non-réformes, écrivez-vous, toujours plus déconsidérantes de la justice.
47:57 C'est dans le chapitre introductif à la page 14 précisément.
48:01 J'aurais qu'on parle pour commencer, parce que c'est une émission politique de la relax, cette semaine du ministre de la justice.
48:08 Guillaume Darré en parlait en introduction.
48:10 Éric Dupond-Moretti était donc jugé pour deux dossiers de prise illégale d'intérêt.
48:14 Alors on va revenir sur le fond de cette affaire.
48:17 Mais il est avocat comme vous, vous l'évoquez à plusieurs reprises dans votre livre.
48:21 Est-ce que vous avez été surprise, Laure Hénique, par la relax d'Éric Dupond-Moretti ?
48:27 Oui et non. C'était un peu joué d'avance ou perdu d'avance.
48:31 On avait presque envie de dire que le résultat n'avait aucune conséquence.
48:36 Le problème c'est la cour de justice.
48:39 Dès le départ, plus personne n'avait confiance dans cette institution qui est réellement politique.
48:44 On entendait même les parlementaires dire que les voix avaient été dégossiées avec la loi sur l'immigration.
48:52 Donc déjà que plus personne n'a confiance dans une justice qui n'est pas politique.
48:56 Et puis on voit...
48:58 Pourquoi il y a ces idées de la cour de justice dans la République ? Parce que c'est le seul moyen ?
49:01 Oui, parce que c'est comme ça qu'on juge les ministres. Parce que c'est la loi.
49:06 Elle avait été décriée par Emmanuel Macron lui-même. Elle lui sert aujourd'hui.
49:11 Quand on lit la décision, on voit bien que les juridictions ordinaires quant à le statut sur des prises illégales d'intérêt,
49:18 elles ne retiennent pas l'intention. L'intention est déduite de la matérialité.
49:23 Vous avez participé à une réunion, même si vous n'aviez pas eu l'intention d'être en conflit d'intérêt.
49:28 Le fait de participer à une réunion, vous êtes censé connaître la loi, peut-être encore plus quand vous êtes ministre de la justice.
49:33 Et à partir de ce moment-là, ça remporte la culpabilité. Pas cette fois-là.
49:37 Je ne sais pas si c'est bien ou pas, je sais que ce n'est pas pareil pour tout le monde.
49:39 Et ça, ça dit quand même beaucoup de choses de la justice et d'une justice de classe.
49:44 Quel regard est-ce que vous portez sur cet ancien confrère ?
49:47 Parce que c'est un avocat, comme vous l'êtes vous toujours aujourd'hui, qui est devenu ministre de la justice.
49:52 Qui est donc un homme politique. Et cet avocat, à l'époque, vous l'aimez bien.
49:56 Donc, quel regard vous portez sur lui aujourd'hui ?
49:58 On l'aimait ou on ne l'aimait pas, mais c'était un grand avocat.
50:01 C'était quelqu'un qui nous apparaissait d'une grande sincérité, qui avait des principes,
50:06 qui se battait pour ses principes, qui était, à mon sens, excellent dans les médias sur ses principes.
50:11 Moi, quand il a été nommé, j'étais ravie. Je me suis dit, au pire, il va démissionner, il va nous expliquer qu'on ne peut rien faire.
50:17 Et puis finalement, il est revenu sur tous ses principes.
50:19 Moi, j'aimerais bien qu'on m'explique ce que le pouvoir fait aux hommes.
50:22 Parce que, précisément, on se disait, et certainement, il a obtenu un budget qui n'est pas si mal.
50:28 Et on se dit, bon, il a su taper du poing sur la table.
50:30 L'autre jour, je le voyais à l'Assemblée nationale, rabrouer Marine Le Pen.
50:33 Je me disais, ah ben, quand même, voilà, il sait encore faire les choses comme il les faisait.
50:37 Mais finalement, tous les principes, que ce soit sur la cour d'assises, sur le rapatriement des djihadistes,
50:42 surtout, il a fait demi-tour, en fait.
50:46 Donc, ça nous fait vraiment du mal, et du mal à la conviction des hommes.
50:51 Est-ce que la réforme de structure qu'il a mise en place, est-ce que l'augmentation du budget,
50:55 est-ce que le recrutement des magistrats va dans le bon sens, malgré tout, ou pas ?
51:01 Oui, le recrutement des magistrats, ça va dans le bon sens.
51:04 Mais ça nous laisse encore très, très loin parmi les pays européens.
51:07 Ça laisse toujours une justice qui va, parce que les gens ont de plus en plus recours à l'institution judiciaire,
51:13 donc qui va quand même de plus en plus lentement, malgré un recrutement,
51:17 qui nous laisse quand même avec autant de magistrats qu'au Moyen-Âge.
51:20 Donc, il faut que les choses changent. Il faut arrêter de digérer.
51:25 Et puis, on fait des lois qui n'ont plus aucun sens, comme si il fallait faire du bruit, en fait, pour exister,
51:30 et faire des lois, alors que toutes les lois suffisent aujourd'hui.
51:33 Mais il faut que la justice soit mieux rendue.
51:35 Alors là, vous êtes dure avec Eric Dupond-Moretti, mais vous êtes aussi féroce globalement avec la classe politique.
51:40 Vous lui consacrez d'ailleurs tout un chapitre que vous avez intitulé "Quand les politiques dégradent la justice",
51:47 c'est pas "Champ neuf". Expliquez-nous en quoi, on poserait la question ensuite à Marine Tendelier,
51:52 si elle a retrouvé sa voix, expliquez-nous en quoi est-ce que les politiques abîment la justice ?
51:57 Mais la justice a toujours été instrumentalisée, mais instrumentalisée en fait.
52:01 A chaque fait divers, on a une loi pour dire "Si on avait la loi, ça se passerait pas comme ça".
52:07 Là, on voit ce qui se passe à Crépol, c'est terrible.
52:11 Moi, je vais vous lire, parce que, au moment de l'affaire de Patrick Henry, donc on est en 1973,
52:18 il y a quelqu'un qui écrit beaucoup mieux que moi, qui s'appelle Jean-Denis Bredin,
52:21 et qui était un grand avocat, un grand académicien,
52:26 et qui écrivait un tout petit texte dans le Nouvelle Obs, que franchement je recommande de lire,
52:31 qui s'appelle "Être avocat, messieurs", et qui est la définition de l'avocat,
52:35 et "Être avocat", il disait que c'était empêcher la haine d'être à l'audience.
52:37 Mais pourquoi là je vous lis un tout petit extrait ? C'est parce qu'il parle des hommes politiques,
52:41 parce qu'au moment de l'affaire de Patrick Henry, qui risquait la peine de mort pour avoir tué un enfant,
52:46 deux ministres, le ministre de la Justice et le ministre de l'Intérieur, réclamaient la peine de mort, rien que ça.
52:50 Et ce que disait Jean-Denis Bredin, c'était qu'on pouvait comprendre la peine des victimes, des parents,
52:56 et la peine de toutes les victimes dans l'ensemble.
52:58 Mais il disait que des ministres hurlent avec les loups, cela ne se comprend ni ne s'excuse.
53:03 Gouverner, ce n'est pas recueillir la peur qui fait perdre la raison, la haine qui rend incapable la justice.
53:09 Gouverner, ce n'est pas nous flatter et nous ressembler quand nous devenons médiocres.
53:14 Je vais réagir Marine Tondelier. Souvent, on est très durs avec les politiques,
53:19 parce que les Français poussent et vous demandent à ce que la justice soit moins laxiste.
53:24 Je n'ai pas envie de vous parler des politiques, j'ai envie de parler de la justice, parce qu'on ne parle pas souvent.
53:29 Je vous remercie beaucoup pour votre livre qui est d'utilité publique.
53:32 Quand on voit que 40% des femmes avocates arrêtent d'exercer au bout de 10 ans,
53:38 quand on voit que les avocats d'affaires ajoutent un zéro à leur chiffre d'affaires par rapport aux autres avocats,
53:45 il y a quand même un souci d'une justice qui rémunère beaucoup mieux et traite beaucoup mieux
53:50 celles et ceux qui s'occupent des grands par rapport à ceux qui s'occupent des petites gens.
53:53 Je le disais en début quand on parlait d'Éric Dupond-Moretti, vous n'étiez pas d'accord avec moi,
53:56 mais je suis contente de voir que vous dites la même chose.
53:58 On a l'impression d'une justice qui est forte avec les faibles et faible avec les forts, et ça c'est dur comme constat.
54:03 Et je pense aussi que le constat que vous faites sur la justice, on pourrait le faire pour tous les services publics.
54:07 Et qu'en fait on a quand même un système, une société qui se délite par ces services publics.
54:12 Et je trouve que celles et ceux qui continuent à s'y consacrer ont beaucoup de courage.
54:15 Alors rapidement, pour que je réponde, allez-y.
54:17 On ne peut pas laisser dire que la justice est laxiste, ça résonnait dans votre question.
54:21 La justice elle frappe.
54:23 C'est ça l'instrumentalisation, c'est de dire que la justice est laxiste,
54:28 elle frappe 8 fois plus fort quelqu'un qui est pauvre, qui est soit SDF, soit né à l'étranger.
54:34 Ils ont 8 fois plus de risques d'être condamnés à de la prison que les autres.
54:37 Merci infiniment à toutes les deux. On pourrait continuer à parler de ce livre.
54:41 Une justice contre les hommes.
54:43 Merci Lorény, merci Marine Tondelier d'être venue dans "Questions politiques" ce dimanche.
54:46 Merci à toute l'équipe. Je vous donne rendez-vous dans une semaine. Belle fin de week-end.
54:51 [Musique]