ATTAQUE À PARIS - Claire Silvestre-Toussaint est l'invitée de RTL Midi

  • l’année dernière
"Un ratage dans le suivi psychiatrique de l'assaillant" selon Gérald Darmanin. Un assaillant a donc perpétré un attentat mortel au couteau près de la Tour Eiffel samedi soir à Paris. L'homme de 26 an avait effectivement été soumis à une injonction de soins psychiatriques. Pour en parler, Claire Sylvestre Toussaint, psychologue spécialisée dans les questions de radicalisation.
Regardez L'invité de RTL Midi du 04 décembre 2023 avec Agnès Bonfillon.

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00:02 RTL midi. Agnès Bonfillon, Éric Brunet.
00:07 Il y a manifestement eu un ratage, non pas dans le suivi des services de renseignement,
00:10 mais il y a eu un ratage manifestement psychiatrique,
00:13 puisque les médecins, à plusieurs reprises, ont considéré qu'il allait mieux,
00:18 qu'il était plus normal et qu'il pouvait vivre, si j'ose dire, librement.
00:21 Un ratage dans le suivi psychiatrique de l'assaillant, selon Gérald Darmanin,
00:26 le ministre de l'Intérieur, chez nos confrères de BFM TV.
00:29 Alors, assaillant qui a perpétré un attentat mortel au couteau
00:33 près de la tour Eiffel samedi soir à Paris, ça vous le savez,
00:36 l'homme de 26 ans avait été effectivement soumis à une injonction de soins psychiatriques, Maxime Lévy.
00:42 Oui, quand il sort de prison en 2020, après avoir été condamné en 2018
00:46 pour association de malfaiteurs terroristes,
00:48 il doit réaliser trois ans de sursis mis à l'épreuve.
00:50 En mars 2022, il arrête de prendre ses médicaments, en accord avec son médecin.
00:55 C'est dans ce cadre, en plus de nombreuses obligations judiciaires,
00:58 que la justice le soumet à une injonction de soins en août 2022.
01:03 A l'époque, le médecin-coordinateur qui s'occupe de l'injonction
01:05 n'a pas conclu à la nécessité d'une reprise de son traitement,
01:08 donc qu'il avait arrêté en mars 2022.
01:11 Au terme du dernier rapport, en date d'avril dernier,
01:13 aucune dangerosité psychiatrique n'avait été identifiée.
01:16 Et puis enfin, fin octobre, sa mère alertait les autorités sur son comportement.
01:20 Il se repliait sur lui-même, selon elle, avant d'expliquer quelques jours plus tard
01:24 que la situation était redevenue normale.
01:27 En ligne avec nous, Claire Sylvestre Toussaint,
01:29 psychologue spécialisée dans les questions de radicalisation.
01:33 Bonjour madame.
01:34 Bonjour.
01:35 Cet assaillant affirmait s'être déradicalisé.
01:38 Alors, on imagine la difficulté pour des professionnels de la santé mentale
01:42 de faire la part des choses.
01:44 Oui, alors en effet, on ne peut pas effectivement détenir
01:48 la vérité des motivations d'un patient.
01:52 En revanche, on peut évaluer quand même la dangerosité de ces actes,
01:56 ça s'évalue, il y a quand même des indicateurs,
01:59 mais effectivement, les patients peuvent être tout à fait manipulateurs.
02:03 Et comment se fait, par exemple, l'évaluation dont vous parlez ?
02:07 Est-ce que l'on pose des questions précises ?
02:09 Est-ce que l'on s'appuie sur l'entourage ?
02:11 Bon, alors effectivement, s'ils sont fichés F de toute façon,
02:14 c'est qu'il y a déjà eu des contacts sans doute avec l'entourage.
02:18 En tout cas, ce n'est pas forcément le but du travail du psychologue
02:22 qui va évaluer avec des indicateurs qui ont été définis en principe.
02:26 L'idée, c'est que ça devait se faire directement au patient,
02:29 avec des termes qui sont tout à fait propices
02:33 à cette histoire de processus de radicalisation.
02:36 Mais le patient, bien sûr, peut tout à fait se montrer sous un autre jour.
02:40 C'est aussi ce qu'on rencontre dans des populations de criminels, par exemple.
02:45 Vous pouvez nous donner des exemples de questions
02:48 que vous posez à ce type d'individus ?
02:52 Eh bien, moi je dirais qu'on va interroger le rapport quand même à la société,
02:56 sans doute à l'enfance, évidemment.
02:59 L'enfance, il interroge quand même souvent avec du traumatisme.
03:03 Ça peut même être simplement une séparation parentale.
03:06 La question de la culture est très importante.
03:09 La culture, qu'elle soit religieuse ou même la culture d'un pays.
03:12 C'est-à-dire que souvent, ça fait conflit.
03:14 Vous voyez le fait que les parents soient issus de pays d'origine différente
03:20 et des pays de là où la personne a grandi.
03:23 Ça crée du conflit intérieur, avec une sorte de, parfois, de culpabilisation
03:28 par rapport à comment intégrer cette société
03:31 qui n'a pas les mêmes valeurs que mon pays d'origine.
03:34 Il y a souvent une quête de sens.
03:36 Donc ce sont les interrogations qui vont aller dans ce sens-là.
03:40 C'est-à-dire que c'est souvent des jeunes personnes,
03:43 quand même des personnes radicalisées.
03:44 C'est-à-dire qu'on a évolué, que ça peut aller au-delà de 40 ans.
03:47 Si vous voulez, c'est souvent dans un processus de maturation que ça se fait.
03:51 Parce que, justement, il y a une perte de sens,
03:54 ou en tout cas, que la personne n'a pas encore trouvé de sens à son existence.
03:57 Donc les questions vont être orientées à peu près dans cette direction.
04:02 Et pour prouver qu'ils s'étaient déradicalisés, finalement,
04:05 l'assaillant Armand Rajapour Myandohab disait qu'il rebuvait de la bière,
04:10 qu'il mangeait du porc.
04:12 Est-ce que l'on peut véritablement croire en des signes comme ça,
04:16 en changements de comportement comme ça ?
04:19 Oui, tout à fait. On peut tout à fait y croire.
04:21 Si la personne se montre convaincante, ça c'est évident qu'on peut y croire.
04:26 Maxime Lévy ?
04:27 Est-ce que, pour vous, les pouvoirs publics aujourd'hui ont pris la véritable mesure
04:31 du lien entre pathologie psychiatrique, pathologie psychologique
04:34 et radicalisation et séduction, aux thèses djihadistes ?
04:39 Oui, effectivement. C'est-à-dire que l'état politique est divisé.
04:43 C'est-à-dire qu'on a le ministère de la Santé, le ministère de l'Intérieur
04:46 qui oeuvrent pour des objectifs différents.
04:49 Mais en termes de radicalisation, l'état fait en sorte d'associer
04:53 les différents objectifs de ces ministères.
04:55 C'est-à-dire que c'est ce qu'on appelle une mission interministérielle.
04:59 C'est-à-dire que tous les ministères oeuvrent dans un objectif commun
05:02 qui serait la protection des citoyens.
05:06 Mais évidemment que le prisme est différent.
05:08 C'est-à-dire que le ministère de l'Intérieur va agir différemment
05:11 que le ministère de la Santé.
05:12 Et vous avez les moyens, vous, vous pensez, aujourd'hui,
05:15 en tant que professionnelle, de suivre correctement ces passions-là ?
05:20 Je pense que oui, on a les moyens.
05:22 Encore une fois, la problématique est quand même assez nouvelle.
05:26 Et puis, en fait, je trouve quand même qu'on s'en préoccupe
05:31 quand il y a des attentats, alors que c'est quand même une problématique
05:35 qui existe même de manière cachée, invisible.
05:38 Et c'est ça qui serait important, à mon avis, de mettre en avant maintenant.
05:43 C'est-à-dire que ça serait de former les professionnels de la santé mentale
05:47 à cette, on va dire, nouvelle problématique qui date maintenant quand même
05:51 d'une bonne dizaine d'années.
05:52 On est à la frontière, là.
05:54 Et c'est pour ça que c'est une problématique intéressante,
05:56 mais qui n'est pas encore suffisamment théorisée,
06:00 qui n'est pas encore transmise.
06:03 Il n'y a pas encore beaucoup d'écrits sur cette problématique.
06:06 Voilà.
06:07 - Gérald Darmanin dit quand même que 30% des radicalisés
06:10 ont des problèmes psychiatriques.
06:12 - Oui, tout à fait.
06:14 C'est comme tout type, si vous voulez, de criminel qui passe à l'acte.
06:17 Il y a forcément une bonne part de la population des criminels
06:20 qui a une problématique psychiatrique.
06:23 - D'où la nécessité, effectivement, de prendre en compte cette problématique
06:28 au-delà des périodes d'attentats comme nous connaissons ce week-end.
06:32 - Exactement. Tout à fait.
06:33 - Merci infiniment, Claire Sylvestre Toussaint, d'avoir été l'invité de RTL Midi.
06:36 Je rappelle que vous êtes psychologue et spécialisée dans la radicalisation.
06:40 Merci, madame.
06:42 - Je vous en prie. Merci à vous.
06:44 - Dans un instant, je retiens ma respiration, Agnès.
06:47 Dans un instant, RTL Midi, votre vie,
06:49 de plus en plus de Français se passionnent pour l'apnée.
06:52 L'apnée, mesdames, messieurs.
06:54 Et ils la pratiquent régulièrement, comme moi maintenant, à toute suite.
06:57 - Votre avis compte.
06:58 - Venez l'exprimer sur RTL au 30 de 10.
07:01 [SILENCE]

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