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00:00 Je ne vois pas pourquoi je vivrais pour vivre en coûtant de l'argent à la société.
00:04 Alors j'ai pris la décision d'aller être tanasiée en Suisse,
00:10 puisqu'on ne peut pas le faire en France.
00:11 On l'a tous acceptée parce qu'on respecte sa volonté.
00:14 Je m'appelle Laurence et je suis la fille de Colette, qui est à côté de moi.
00:23 Je m'appelle Colette et je suis le maman de Laurence, effectivement.
00:27 C'était une enfant très vivante, volontaire, parfois capricieuse,
00:33 dévouée à la famille et pleine de gentillesse.
00:37 Maman, je la décrirais comme une femme très active, hyper sociale.
00:43 Il y avait toujours du monde à la maison, souvent des dîners,
00:45 ça dansait, etc. jusqu'à 3-4 heures du matin.
00:49 Elle n'a pas arrêté de travailler, toujours hyper active.
00:51 Son dernier bouquin remontait il y a 3 ans, donc elle devait avoir 91 ou 92 ans.
00:56 Elle surfe sur Internet, elle est au bridge tous les après-midi.
00:59 Elle n'a pas cessé d'être hyper active depuis toujours
01:02 et il y a un peu de mal à se poser, on dirait.
01:05 Je suis très proche de mes enfants.
01:06 On a la chance d'être une famille très unie.
01:09 On a souvent fait des vacances ensemble avec ma fille, toutes les trois.
01:13 C'était assez...
01:15 - Fusionnel. - Fusionnel, oui, voilà, exactement.
01:18 Et ça continue, on va dire.
01:21 Ma vie a été complète, heureuse.
01:24 Et actuellement, j'ai à la fois une DMLA,
01:29 c'est-à-dire que pratiquement je ne vois extrêmement mal,
01:33 je ne peux plus lire, je peux à peine me servir de l'ordinateur.
01:37 Enfin, il faut grossir les caractères à l'extrême.
01:41 Je n'entends pas bien.
01:42 Enfin bref, je deviens quelqu'un de très âgé.
01:46 J'ai passé 95 ans, donc ma vie n'offre plus aucun intérêt.
01:51 Alors j'ai pris la décision de m'inscrire à une société suite
01:57 qui pratique l'euthanasie.
01:59 Elle a toujours dit "moi, je ne veux pas mourir en étant un fardeau.
02:02 Dès que ça n'ira plus, promettez-moi que vous l'accepterez
02:05 et que vous ne me mettrez pas des bâtons dans les roues".
02:10 On le savait, donc c'est venu petit à petit.
02:13 C'est plutôt en fait mon frère qui me l'a dit,
02:16 en fait qui m'a dit qu'il y avait une date de prévue.
02:19 Vivian me dit "en fait maman, elle va absolument accélérer les choses,
02:23 elle veut partir fin août".
02:24 Je dis "euh, attends, on est le 15 août là, c'était hyper court".
02:28 Ça a été finalement fixé à début novembre.
02:31 Et puis il y a eu des événements qui font que maman est toujours là.
02:33 Nous avons perdu pendant l'été mon fils aîné.
02:38 C'est une des raisons pour lesquelles il était très difficile
02:42 d'accepter un nouveau deuil.
02:43 Quelque part, il y avait un peu de rébellion en se disant
02:47 "oui, préférez que ce soit naturel ou que vraiment,
02:50 que ça n'aille pas du tout et là on comprendrait mieux".
02:53 Mais bon, il n'était pas question d'aller contre le gré de Colette.
02:57 La date c'était le 2 novembre et puis plus la date approchait,
03:01 plus ça devenait un peu difficile.
03:04 Je tombais en sanglots dans les bras de maman.
03:06 C'était fin septembre parce que je voyais que ça a été 5 semaines, 4 semaines.
03:11 Je me dis "waouh, dans 4 semaines elle n'est plus là".
03:12 Et là maman, elle me dit "ah mais ma chérie,
03:16 si j'avais su que ça te faisait de la peine, il fallait me le dire".
03:19 J'ai vu que ça leur faisait de la peine vraiment
03:24 et je ne vois pas pourquoi je ne peux pas continuer.
03:26 Je ne suis pas malheureuse.
03:28 Du coup maman a dit "écoutez, je veux bien rester
03:31 mais promettez-moi que quand je vous le demande et quand ça ne va plus,
03:34 dans les deux semaines, parce que le dossier est prêt,
03:37 dans les deux semaines je pars et vous ne me retiendrez pas".
03:42 Et donc voilà, c'est ça le deal.
03:44 Ce délai c'est quelque chose de vraiment très spécial
03:47 parce que je crois que même les condamnés à mort,
03:49 ils ne savent pas la date où ils vont être exécutés.
03:52 Donc là on connaît l'heure et la date où ça va arriver.
03:54 Il y a peu de cas où ça se passe comme ça.
03:57 Et maintenant qu'on ne sait pas à nouveau, ça reste vague.
04:00 Du coup là je pars une semaine, la semaine prochaine,
04:02 alors qu'il y a un mois il n'était pas question
04:04 que je ne vois pas maman deux jours de suite.
04:08 Ça va arriver mais on ne sait pas quand, ça laisse quand même un peu respirer.
04:13 On est tous derrière toi, moi la première,
04:15 mais tu le sais de toute façon.
04:17 On est prêts, on l'accompagnera.
04:19 On a la chance d'avoir un chalet à Chamonix,
04:21 donc pas très loin de Zurich, à trois heures de voiture.
04:23 Donc on se retrouve un peu avant en famille
04:26 et puis après ceux qui veulent accompagneront maman.
04:29 Je souhaiterais que l'euthanasie, une euthanasie équilibrée et saine,
04:33 un peu semblable à celle qui existe en Suisse,
04:37 soit instaurée en France,
04:39 pour que chacun puisse suivre la voie qu'il préfère emprunter.
04:44 Et je comprends très bien que les gens qui désirent mourir tranquillement le fassent,
04:49 mais qu'on laisse la liberté à ceux qui veulent avancer un peu les choses.
04:54 - Ah ! - Ah non.
04:56 *rire*