Loi immigration rejetée : démission, abandon du texte. Quels sont les scénarios possibles ?

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Du lundi au jeudi, Hélène Zelany reçoit un invité au centre de l'actualité.
Retrouvez "L'invité actu" sur : http://www.europe1.fr/emissions/l-invite-actu

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00:00 - Europe 1 Soir, 19h20. - Hélène Zellany.
00:06 - 19h22 sur Europe 1, merci à tous ceux qui viennent de nous rejoindre sur Europe 1.
00:11 Emmanuel Macron tente donc de rebondir au lendemain de cet échec cuisant à l'Assemblée sur son projet de loi immigration.
00:17 On en parle avec Patrick Stefanini, ancien préfet spécialiste des questions migratoires.
00:21 Merci d'être en direct dans Europe 1 Soir. - Bonsoir.
00:24 - Et bonsoir également à Arnaud Benedetti, politologue et rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire.
00:31 Bonsoir à vous aussi et merci. - Bonsoir.
00:34 - Alors vous êtes avec nous tous les deux. Nous sommes également avec Jacques Serret du service politique d'Europe 1 qui est revenu dans ce studio.
00:41 - Bonsoir. - Bonsoir. Conseil des ministres ce matin, question au gouvernement à l'Assemblée cet après-midi,
00:47 dîner ce soir à l'Élysée autour d'Emmanuel Macron, journée très très dense Jacques.
00:52 Vous pouvez essayer de nous la résumer un peu ?
00:55 - Bah journée très dense qui a commencé relativement tôt pour le président suite à ce camouflet d'hier.
01:01 C'est-à-dire que la journée a commencé à l'Élysée avec une réunion de crise déjà autour du président,
01:05 Elisabeth Borne, Gérald Darmanin et Franck Riester, le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.
01:12 C'est lui qui avait un peu notamment tous les comptes des votes avant la motion de rejet hier.
01:21 Et c'est durant cette réunion de crise, avant le Conseil des ministres, qu'a été actée cette décision du président
01:29 d'aller vers une commission mixte paritaire, c'est-à-dire que jusqu'ici il y avait un peu plusieurs hypothèses,
01:36 là c'est la commission mixte paritaire, il y avait la possibilité éventuelle d'un retrait du texte, d'un abandon total.
01:44 Donc voilà, c'est ici lors de cette réunion vraiment en très petit comité qu'a été prise cette décision.
01:50 Ensuite lors du Conseil des ministres que le chef de l'État l'a annoncé auprès de l'ensemble des membres du gouvernement.
01:56 Puis Olivier Véran a fait cette annonce à l'issue lors de son compte-rendu devant la presse.
02:01 Et puis la journée s'est suivie avec une après-midi extrêmement dense aussi à l'Assemblée nationale,
02:06 retour un peu sur les lieux du crime finalement cet après-midi avec des oppositions vente-boue et très remontées.
02:15 - On l'a entendu dans le journal de 19h avant tout. - Et on l'a entendu tout à l'heure.
02:18 Et Elisabeth Borne qui a également repris la parole et qui ne l'avait pas pris depuis ce qui s'était passé hier,
02:25 qui a répondu une fois de plus aux oppositions.
02:28 Et voilà, la journée n'est toujours pas terminée puisque ce soir, vous l'avez dit, il y a un dîner politique à l'Élysée.
02:34 Le chef de l'État qui a cette fois invité de nouveau la première ministre, les principaux ministres de son gouvernement
02:42 et les chefs de la majorité à dîner ce soir à l'Élysée.
02:45 - On n'a pas trop d'idées de ce qui va se dire ce soir ? C'est quoi ? C'est un séminaire de remotivation ?
02:49 - Oui, c'est un peu ça. Je pense qu'Emmanuel Macron apprécie ces moments où il consulte énormément.
02:55 Autant il a pris une décision ce matin en très petit comité.
02:58 Généralement, lors de ses dîners nocturnes, il n'en prend pas. Il écoute beaucoup, il consulte.
03:05 Mais après, il lui faut généralement du temps pour voir un peu.
03:10 Après, on n'attend pas spécialement de décision immédiate.
03:14 En tout cas, désormais, maintenant que l'on sait où va aboutir ce texte, à savoir la commission mixte paritaire.
03:19 - Merci Jacques Serret. Patrick Stefanini, on sait donc, Jacques le disait, que le texte va partir en commission mixte paritaire.
03:25 Et a priori, il sera durci au passage. Donc pour la gauche, ça n'aura pas servi à grand chose alors ?
03:34 - Ecoutez, ça c'est l'affaire de la gauche. Il se trouve qu'il y a au Sénat une majorité solide,
03:41 qui est la majorité LR et l'Union centriste, avec deux groupes politiques qui se connaissent bien
03:50 et qui travaillent harmonieusement sous l'autorité du président du Sénat, Gérard Larcher.
03:57 Donc c'est cette majorité politique qui a réussi, lors de la discussion en première lecture,
04:05 à trouver un accord sur une mouture du texte immigration.
04:10 C'est sur ce texte que va s'engager la discussion en commission mixte paritaire,
04:16 puisque l'Assemblée nationale a refusé de délibérer.
04:20 On va partir du texte du Sénat. Il est donc très probable que le Sénat cherchera à maintenir
04:27 peut-être la totalité de son texte, ou en tout cas l'essentiel.
04:32 Et donc moi, par rapport à ce que je viens d'écouter sur la journée telle qu'elle s'est déroulée,
04:39 je ne peux qu'émettre le souhait que les responsables de l'exécutif,
04:45 le président de la République, la première ministre, le ministre de l'Intérieur,
04:49 se concertent non seulement avec les membres de la majorité présidentielle,
04:55 mais d'abord et avant tout avec Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat,
05:01 avec Hervé Marseille, le président du groupe UDI, et avec Gérard Larcher.
05:06 Parce que c'est entre les mains de ces trois hommes que se trouve très largement la solution.
05:12 - Et vous pensez que ce projet peut vraiment être voté un jour ?
05:17 Ce projet de loi immigration, il peut entrer en vigueur ? Vous y croyez aujourd'hui ?
05:21 - Oui, moi je pense qu'il subsiste une chance raisonnable.
05:26 Alors, il est possible que des parlementaires, un peu grisés par le succès de la motion de rejet hier à l'Assemblée,
05:39 cherchent à exploiter leur avantage et à mettre à nouveau le gouvernement en difficulté
05:49 en faisant obstacle à l'adoption d'un texte.
05:53 Mais enfin, le Sénat, lui, a consacré de longues heures à travailler sur ce projet.
05:59 Il est parvenu, dans les conditions que j'ai dites, à un texte qui a été voté par le Sénat,
06:08 qui est sur la table. C'est à partir de ce texte que la discussion va s'engager en CMP.
06:13 Je ne vois pas pourquoi le Sénat, qui est composé de gens raisonnables,
06:18 qui sont enracinés dans leur territoire, qui ont une longue expérience politique,
06:22 et qui, je voudrais également saluer le travail de François-Noël Buchet,
06:27 le président de la Commission des lois du Sénat, qui a une grande expérience de ces sujets,
06:34 qui s'était déjà beaucoup investi en 1998 au moment du vote de la loi Colomb.
06:40 Donc je pense que ces responsables politiques d'expérience, ils ont élaboré un texte.
06:46 Je ne vois pas pourquoi ils l'abandonneraient en cours de route.
06:49 - On va faire une petite pause, Patrick Stefanini, Arnaud Benedetti.
06:55 On vous retrouve juste après. Nous sommes également avec Jacques Serret
06:59 pour parler de cette crise politique dans laquelle Emmanuel Macron semble un petit peu empêtré quand même.
07:07 - 19h32 sur Europe 1, on continue à parler de la situation politique
07:20 et de cette commission mixte paritaire composée de députés et de sénateurs
07:23 qui va devoir trouver un compromis sur le projet de loi immigration.
07:27 Nous sommes toujours avec Patrick Stefanini, spécialiste des questions migratoires.
07:30 Quant à vous Arnaud Benedetti, vous êtes politologue, vous avez entendu ce qui s'est dit jusqu'ici.
07:35 Est-ce que vous aussi vous pensez possible l'adoption de cette loi
07:40 dans le contexte qui semble quand même très très compliqué pour Emmanuel Macron ?
07:45 - Ça reste toujours possible évidemment.
07:48 De toute façon l'exécutif a choisi la commission mixte paritaire plutôt qu'un retour au Sénat
07:54 parce qu'il considère certainement qu'à huis clos les parlementaires seront plus à même
08:00 éventuellement de trouver un compromis et de permettre finalement au gouvernement
08:06 de sortir du mauvais pas dans lequel il s'est mis d'ailleurs lui-même.
08:09 Mais il faudra retourner de toute façon à l'Assemblée nationale, quoi qu'il arrive.
08:13 Et tout dépendra de l'état dans lequel sort ce texte.
08:17 Si vous voulez, la grande difficulté de M. Darmanin c'est qu'il avait quand même laissé voter un texte au Sénat.
08:23 D'ailleurs il n'avait pas de toute façon les moyens de s'y opposer.
08:26 Mais en donnant quand même une approbation implicite ou explicite parfois
08:32 à la plupart des dispositions qui avaient été votées par les sénateurs
08:36 et qui allaient dans le sens finalement d'un durcissement du texte initial.
08:41 Le problème c'est que le texte est ensuite passé en commission des lois.
08:44 Et en commission des lois, une grande partie des dispositions votées par les sénateurs
08:49 ont été ensuite détricotées par la commission des lois.
08:54 La difficulté c'était de savoir quel texte défendait in fine le ministre de l'Intérieur.
08:59 Est-ce que c'était le texte tel qu'il avait été voté au Sénat
09:02 ou est-ce que c'était le texte tel qu'il avait été voté à la commission des lois ?
09:06 C'est ce qui s'appelle le compromis, c'est en même temps, c'est toute la difficulté.
09:10 Le problème c'est que le compromis, on voit bien que ceux qui avaient décidé in fine de durcir ce texte,
09:16 c'est-à-dire la majorité LR centriste du Sénat, comme l'a rappelé Patrick Stéphanini,
09:25 et le groupe LR à l'Assemblée nationale, ne l'entendaient pas de cette oreille.
09:30 Ils considéraient que le texte tel qu'il avait été voté à la commission des lois
09:34 s'écartait de trop du texte tel qu'il avait été voté au Sénat.
09:38 Donc Gérard Le Dermanin a entretenu quand même une ambiguïté qui, à mon sens,
09:45 a pesé fortement évidemment sur ensuite le vote de la motion de Roger.
09:52 Ça je crois que c'est un vrai problème.
09:54 Ensuite, le problème c'est que la façon dont sortira ce texte de la commission mixte paritaire
10:00 va aussi déterminer la façon dont l'aile gauche de la majorité à l'Assemblée nationale se déterminera.
10:12 Le problème c'est que si vous voulez on est dans un exercice d'équilibre qui est extrêmement compliqué.
10:16 En effet, M. Dermanin peut regagner à droite un certain nombre de soutiens
10:21 si la commission mixte paritaire finalement se met d'accord sur un texte
10:25 qui soit à peu près dans l'épure de celui du Sénat,
10:29 mais avec le risque en effet de perdre sur sa gauche ce qu'il gagnera sur sa droite.
10:34 Mais clairement, aujourd'hui, s'il veut une majorité sur ce texte,
10:39 c'est plutôt à droite qu'il faut aller la chercher, on l'aura compris,
10:42 vu le poids notamment, malgré tout, de LR dans cette affaire.
10:46 Alors justement, Arnaud Bédédéti, on va donner la parole à un militant LR,
10:50 à nos auditeurs, Jean-Michel, qui nous a appelés.
10:52 Bonsoir Jean-Michel.
10:53 Oui, bonsoir à vous aussi.
10:55 Alors, on parlait de LR, ça tombe très bien,
10:58 parce que vous allez nous dire ce que vous en pensez, vous, justement.
11:02 Eh bien nous, les militants LR, on est très satisfaits de la position qu'ont eues nos députés,
11:06 la grande majorité de nos députés, puisque ça fait plusieurs fois
11:10 que le gouvernement joue avec le feu, en allant jusqu'au 49-3,
11:14 ne laissant aucun débat à l'Assemblée nationale.
11:16 Donc au bout d'un moment, nous les militants, quand on croise nos députés,
11:19 et nos sénateurs, puisqu'ils travaillent ensemble,
11:22 ce sont des gens qui sont très accessibles, qui sont sur le terrain,
11:25 à l'écoute de leurs électeurs, et on leur dit très bien les choses.
11:28 On leur dit "si vous continuez dans ce sens-là, à quoi sert d'avoir des parlementaires ?"
11:32 Puisque dès qu'on commence à aller un peu à l'opposé de ce qui est ce côté,
11:36 eh bien il y a tout de suite un 49-3.
11:38 Mais pourtant vous l'avouez cette loi, vous l'avouez cette réforme ?
11:42 Donc moi je suis contrairement à ce que dit M. Darmanin et Mme la Première ministre,
11:46 qui disent "on veut cette loi", nous on veut la loi qui sortait du Sénat.
11:50 On ne veut pas d'une loi où on a détricoté des choses qui finalement
11:53 sont à l'opposé de ce qu'on souhaite.
11:55 Donc apparemment il était très content quand c'est sorti du Sénat de la loi,
12:00 en disant "voilà, vous voyez, on a discuté ensemble, on a travaillé",
12:03 et c'est vrai qu'il y a un énorme travail qui est fait par nos parlementaires,
12:08 contrairement à ce que disent les gens.
12:09 Vous savez des fois il y a des raccourcis qui sont faits par les médias en disant
12:12 "il n'y a personne dans les assemblées", "oui, ils sont", etc.
12:15 Nous on sait des gens, je les connais depuis très longtemps, qui travaillent beaucoup,
12:18 qui sont en commission, qui sont sur le terrain,
12:20 ce sont des gens qui ne sont pas payés à rien faire,
12:22 qui sont quand même responsables de l'évolution du pays,
12:25 et des choix qu'il faut faire pour l'avenir,
12:27 pour que notre pays reprenne un petit peu le dessus.
12:30 Et là, à chaque fois qu'arrivent des nouvelles lois,
12:32 on sent bien que la Macronie a un gros problème.
12:35 Donc il faut que ce soit déjà "le Président ce soir fait un repas",
12:38 comme vous l'avez dit, et bien aussi il faut qu'il aille voir tous ses députés.
12:41 C'est à eux derrière d'être un peu responsables et de dire
12:43 "écoutez quand même ce que vous disent les Républicains
12:46 par le message qu'ils vous ont fait passer aujourd'hui,
12:48 qu'on arrête de dire qu'on va tuer les socialistes et tuer les LR,
12:51 parce qu'après de toute façon c'est les extrêmes qui gagneront".
12:53 Donc nous on est très contents de la position qu'ont eues les LR sur cette affaire-là.
12:57 Et le Président Marlex, le Président du groupe Marlex,
13:00 qui est quelqu'un qui écoute les uns et les autres,
13:03 il sait que derrière, il y a des enjeux qui sont importants,
13:07 on est en démocratie, donc lui ce qu'il souhaite bien évidemment,
13:10 c'est qu'il prenne ses responsabilités par rapport aux attentes des Français.
13:14 Les attentes des Français, ce qui a été proposé par les Républicains
13:17 et pas par la loi détricotée dans les commissions.
13:21 - On a bien compris votre point de vue,
13:23 merci beaucoup de l'avoir exprimé sur Europe 1, Jean-Michel.
13:26 Dernière question, il nous reste très peu de temps, Patrick Stefanini.
13:30 C'est Jacques Serret qui voulait vous la poser.
13:32 - Oui, monsieur Stefanini, vous venez d'entendre ce militant, militant des LR,
13:36 et il explique qu'il veut ce texte finalement, qu'il sort du Sénat.
13:39 Et c'est aussi la position d'Éric Ciotti, le patron des députés LR,
13:43 le patron du parti LR qui est cet après-midi à l'Assemblée,
13:47 à expliquer que le texte du Sénat c'est le seul que nous soutiendrons.
13:50 Est-ce que vous estimez que les Républicains peuvent être dans cette position ferme,
13:55 finalement, en commission mixte parité, sans recherche de compromis ?
13:59 - Je dirais d'abord que c'est au président Larcher, à monsieur Retailleau
14:04 et à monsieur Marseille qui ont élaboré le texte du Sénat,
14:09 de dire s'ils sont prêts à y apporter des modifications.
14:13 Je voudrais apporter un élément technique,
14:15 mais qui peut avoir son importance dans le débat.
14:18 Dans le texte qui a été voté par le Sénat,
14:21 il y a peut-être, ou même probablement, ce qu'on appelle des cavaliers législatifs,
14:27 c'est-à-dire des dispositions qui ont été greffées par voie d'amendement
14:31 sur le texte présenté par le gouvernement,
14:34 mais qui sont sans rapport avec le texte du gouvernement.
14:38 Et comme vous le savez, les cavaliers législatifs,
14:41 ils encourt ce qu'on appelle la censure du Conseil constitutionnel.
14:44 Donc une des questions qui se pose, de mon point de vue,
14:48 c'est de savoir si le Sénat, dans sa sagesse,
14:52 décidera, au moment des discussions avec la commission mixte paritaire,
14:57 de faire un peu le ménage parmi les cavaliers législatifs.
15:01 Je pense que si le Sénat s'engageait dans cette voie,
15:05 il n'amputerait pas son texte de dispositions essentielles,
15:13 ça faciliterait le compromis,
15:15 et ça éviterait que le Conseil constitutionnel, au final,
15:19 ne censure une partie des dispositions qui ne seront votées pas.
15:23 Merci. Merci beaucoup Patrick Stefanini, spécialiste des questions migratoires.
15:28 Merci également Arnaud Benedetti d'avoir été en direct dans Repinsoir.
15:31 Et merci à vous, Jacques Serret, dans un instant, surprise.
15:36 Europe 1, vous donne la parole.
15:38 Europain. Vous donne la parole.

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