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00:00 Vous l'utilisez peut-être déjà dans votre entreprise, on parle intelligence artificielle ce matin dans l'éco d'ici et de la place qu'elle prend dans votre vie.
00:07 Notre invité est un scientifique directeur de recherche Alinria Bordeaux,
00:10 l'Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique. Thomas Cognac.
00:15 Bonjour Thierry Boudeiller.
00:16 Bonjour.
00:17 Commençons par ce sondage Ipsos fait pour la remise aujourd'hui du prix du livre d'économie.
00:21 Avec l'intelligence artificielle, près de 50% des français craignent pour leur emploi. Est-ce qu'ils ont raison ?
00:27 Alors effectivement l'intelligence artificielle est en train aujourd'hui
00:30 d'avoir un impact très grand dans beaucoup de secteurs, dans le domaine de l'industrie, dans le domaine des services
00:37 et puis aussi même dans le domaine de l'éducation.
00:39 Il y a une enquête américaine qui montre qu'il y a 50% des 12-18 ans qui ont déjà utilisé
00:45 par exemple des modèles de langage comme ChatGPT pour leur devoir et donc la population dans toutes les classes d'âge
00:50 commence à utiliser...
00:51 Qui est un logiciel, pardon, je vous interromps pour recontextualiser, qui permet d'écrire des poèmes, de répondre à des questions, de faire des rétablissements,
00:57 de faire des rédactions à votre place.
00:57 Voilà, c'est ce qu'on appelle en fait un agent conversationnel, un logiciel qui a été entraîné sur
01:03 beaucoup beaucoup de textes, qui a vu beaucoup beaucoup de textes et notamment beaucoup de dialogues sur beaucoup de sites web très variés
01:09 et puis qui est ensuite capable de simuler, de faire semblant de jouer le rôle
01:13 d'une personne dans une discussion et donc on peut discuter avec ce genre de système.
01:19 Mais est-ce qu'il faut s'inquiéter pour son emploi ? Est-ce que moi, égoïstement,
01:21 je peux m'inquiéter que ChatGPT, demain, fasse l'interview à ma place ?
01:24 Alors, je dirais qu'une certaine manière, le rôle des journalistes va être de plus en plus important et peut-être justement à cause
01:30 d'une des limites et aussi de l'importance de l'intelligence artificielle.
01:34 Ce sont des systèmes aujourd'hui qui sont utilisés très souvent pour aider à écrire du texte, aider à fabriquer des images
01:41 et ce sont des systèmes qui ne fabriquent pas forcément des textes ou des images qui reflètent, par exemple, un fait objectif.
01:47 Ce sont des systèmes qui, parfois, vont inventer
01:52 des faits nouveaux et aujourd'hui, malheureusement, ils sont beaucoup utilisés
01:56 par des
01:58 organisations pas toujours les mieux intentionnées pour produire des informations fausses, ce qu'on appelle les "fake news".
02:03 Donc, il y a un travail de vérification.
02:05 Et du coup, il y a aussi beaucoup de gens qui ne comprennent pas tellement
02:08 tous ces systèmes et n'ont pas forcément conscience que les informations peuvent être totalement fabriquées.
02:13 Et du coup, ça devient de plus en plus important de comprendre que les journalistes qui font leur travail et qui vont vérifier sur le terrain,
02:21 qui font une analyse, et bien voilà, leur voix est très très importante.
02:25 Mais au-delà des journalistes, est-ce que les personnes qui, par exemple, travaillent en traitant beaucoup de données, celles-là, peuvent
02:30 demain ou après-demain être remplacées par une intelligence artificielle ?
02:33 Alors, de la même manière, en fait, les systèmes d'intelligence artificielle peuvent aider un certain nombre de tâches, par exemple, traiter beaucoup de données.
02:41 Par exemple, quand il s'agit de synthétiser des données économiques ou des données environnementales
02:45 qui sont
02:47 dans des centaines ou voir des milliers de documents et on a envie de faire une petite synthèse,
02:51 ce genre d'outils, ça peut être très utile pour faire un résumé, donner des pointeurs.
02:55 Mais néanmoins, il peut y avoir des erreurs et même pour les systèmes les plus avancés, il peut
02:59 toujours y avoir des erreurs. Et donc, c'est important qu'il y ait toujours cette œil critique, ce regard critique qui va pouvoir vérifier.
03:04 Pierre Evodeye, notre invitée ce matin dans l'écho d'ici sur France Bleu Gironde,
03:09 est directeur de recherche à l'INRIA, à bord de l'Institut National de Recherche en Sciences et Technologie du Numérique.
03:14 Et avec l'INRIA, vous avez envoyé ces dernières semaines une note à l'Élysée sur l'intelligence artificielle. Qu'est-ce qu'ils voulaient savoir ?
03:20 Alors, c'était, on va dire, dans un processus pour mieux comprendre, mieux s'approprier un petit peu ces nouvelles technologies qui évoluent vite.
03:27 Et l'idée, c'était surtout d'expliquer que ce sont aussi des technologies
03:31 de ce qu'on appelle le transmission culturelle, c'est-à-dire qui peuvent influencer ce que pensent les gens de manière variée.
03:38 En fait, ce sont, comme je le disais tout à l'heure, des sortes d'agents conversationnels qui vont refléter
03:43 les valeurs, les opinions
03:47 qui sont les plus fréquentes que dans les textes qu'on voit sur internet.
03:50 Et donc, ça peut contenir tout un tas de biais, par exemple, des idées, des clichés, en fait, par exemple,
03:57 peut-être que la plupart du temps, dans les textes ou les discussions sur internet,
04:01 le président d'une entreprise, ça va plutôt être un homme blanc et pas tellement une femme de couleur.
04:07 Et l'intelligence artificielle récupère nos biais à nous, en fait.
04:09 Et l'intelligence artificielle va encoder ça et puis, du coup, va se mettre
04:12 à reproduire ces biais dans des discussions
04:17 avec des gens dans leur usage quotidien au travail, avec
04:21 des enfants qui vont faire une recherche pour faire un
04:23 exposé sur un sujet. Et ça, ça peut être embêtant parce que parfois, ces biais, eh bien, ils sont le reflet
04:30 d'une culture de valeurs, d'opinions qui ne sont pas forcément ceux qu'on a envie d'avoir, par exemple, dans notre pays.
04:35 Il se trouve, par ailleurs, que ces systèmes, aujourd'hui, sont fabriqués surtout par des entreprises anglo-saxonnes
04:41 qui ont une vision particulière du monde.
04:43 - Et qui a un vrai enjeu de souveraineté là-dessus.
04:45 - Exactement. - Pour faire une intelligence artificielle à la française.
04:47 Merci beaucoup, Pierre-Yves Dehier, de venir nous en parler ce matin, directeur de recherche à l'INRIA Bordeaux.
04:51 Bonne journée à vous. - Merci.