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00:00 C'est dur de passer des journées où on se contente de jouer au bridge.
00:04 Je ne me sens plus utile à quoi que ce soit,
00:07 et qu'en plus, la vie ne présente plus d'intérêt.
00:10 Je m'appelle Colette Ménage,
00:12 et j'ai 95 ans depuis deux mois.
00:17 J'ai la chance d'avoir vécu à peu près correctement jusqu'à maintenant,
00:22 et je ne tiens pas du tout à « mourir un petit feu ».
00:27 Donc, j'avais décidé cet été de partir en Suisse.
00:31 On pratique l'euthanasie.
00:34 On ne peut pas dire « on se sent prêt »,
00:35 mais on peut avoir des problèmes tels qu'on souhaite ne plus vivre.
00:40 Ça peut être une maladie grave qui n'a pas d'issue et qu'on veut abréger.
00:45 Le grand âge, ça c'est une affaire de réaction personnelle.
00:50 J'estime que l'extrême vieillesse ne présente pas d'intérêt.
00:54 Passer des journées complètement vides, sans utilité pour personne.
01:01 Mais est-ce qu'on doit tous être utiles dans une société ?
01:03 Est-ce que là, plutôt que trop se concentrer sur l'euthanasie,
01:06 est-ce qu'il ne faudrait pas aussi et surtout mieux accompagner la vieillesse
01:10 et les personnes vulnérables ?
01:12 Je pense que l'euthanasie est une affaire totalement personnelle.
01:16 Moi, j'ai la vieillesse, en vue de l'extérieur,
01:20 la plus heureuse qu'on puisse imaginer.
01:22 Je suis dans un endroit merveilleux, j'ai une famille adorable, etc.
01:27 Je ne souhaite pas prolonger mon existence.
01:29 Ne plus rien faire, si vous voulez, me coûte énormément.
01:33 Je ne vois extrêmement mal, je ne peux plus lire,
01:37 je peux à peine me servir de l'ordinateur.
01:40 Enfin, il faut grossir les caractères à l'extrême.
01:43 Je n'entends pas bien.
01:44 Toute chose qui vous abîme la vie.
01:48 J'ai été bénévole au centre Jeanne Garnier,
01:51 un des meilleurs centres de soins palliatifs.
01:55 C'était il y a une dizaine d'années, une quinzaine même,
01:58 où je me suis occupé justement de gens en fin de vie.
02:02 Et j'ai donc vu de près des gens qui souffraient,
02:10 qu'on soignait très bien, remarquablement.
02:13 Mais bon, ça évite, ça épargne ces moments
02:18 vraiment très tristes et très durs à vivre.
02:21 Je crois qu'au contraire, c'est beaucoup moins triste
02:25 qu'une mort naturelle et lente.
02:28 Alors ma famille le sait, c'est pour ça d'ailleurs
02:31 que j'ai prolongé un peu mon séjour.
02:35 Certaines petites filles ont trouvé que c'était très courageux,
02:39 mais la majorité a été très surprise,
02:42 parce qu'évidemment extérieurement,
02:44 je n'ai pas l'air mourante.
02:48 Et évidemment, j'ai senti que je faisais de la peine,
02:51 raison pour laquelle j'ai prolongé.
02:53 Et je viens de perdre mon fils aîné,
02:57 qui est mort d'un cancer,
02:59 et avec lequel j'avais d'ailleurs même prévu d'aller en Suisse,
03:04 que nous partions ensemble.
03:06 Et c'est une des raisons pour lesquelles il était très difficile
03:10 d'accepter un nouveau deuil.
03:12 Moi je veux dire que chacun doit se sentir libre
03:16 de choisir sa fin de vie.
03:17 Et je comprends très bien que les gens qui désirent mourir
03:21 tranquillement le fassent,
03:22 mais qu'on laisse la liberté à ceux qui veulent avancer un peu les choses.
03:28 Il faut que ce soit très bien encadré,
03:30 ça c'est indispensable.
03:31 Et éviter aussi que ce soit pratiqué par une ou deux associations
03:37 qui favorisent évidemment le côté onéreux de l'opération.
03:42 Il n'y a pas de raison que l'euthanasie soit réservée
03:44 aux gens qui ont quelques moyens,
03:47 et que les gens qui n'en ont pas ne puissent pas la pratiquer.
03:50 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
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