Diplomatie en Action : L'ONU sous Kofi Annan œuvre pour la Paix par la Sécurité Collective

  • il y a 9 mois

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00:00 Après « faire la paix par les traités », nous allons aborder un autre aspect de la paix, faire la paix par la sécurité collective.
00:10 Et on va s'intéresser en particulier à l'organisation des Nations unies sous son secrétaire général Kofi Annan.
00:17 L'ONU a été créée en 1945 dans le but de construire une paix universelle. C'est à la fois son utilité et sa légitimité.
00:27 Une paix par la sécurité collective, c'est-à-dire par la coopération et le dialogue entre les différents États qui composent l'ONU.
00:35 En 1945, ils étaient une cinquantaine. Aujourd'hui, près de 200. Le paradoxe de l'ONU, c'est qu'elle n'a pas réussi à empêcher
00:45 la récurrence des guerres, le recours à la violence dans les relations internationales. Toutefois, elle a été marquée dans son histoire
00:53 par des secrétaires généraux comme Kofi Annan. C'est pour ça qu'on va s'intéresser à lui, couronné par le prix Nobel de la paix
01:01 en même temps que l'institution en 2001. Donc des secrétaires généraux qui ont marqué de leur empreinte, par leur action,
01:07 par leur charisme, l'organisation des Nations unies. Kofi Annan, c'est – on va le voir – un idéaliste. Mais pas seulement.
01:18 Comme Hubert Védrine, l'ancien ministre des Affaires étrangères français de l'époque de Kofi Annan, le dit, c'est avant tout
01:27 un pragmatique efficace. Donc entre idéalisme et pragmatisme, comment a-t-il réussi à insuffler un nouvel esprit,
01:39 faire renaître l'ONU dans l'après-guerre froide ? Kofi Annan est un Ghanéen de naissance. Il est devenu fonctionnaire international
01:48 après des études d'économie aux États-Unis et en Suisse. Et d'une certaine manière, son action diplomatique se confond avec celle de l'ONU,
01:56 parce qu'il a passé plus de 30 ans dans l'organisation. Et c'est le seul secrétaire général de l'ONU qui a accédé
02:04 aux plus hautes responsabilités par la promotion interne. Donc d'une certaine manière, son long engagement au service de la paix
02:10 se confond avec l'histoire de l'ONU des années 60 aux années 2000. Avant d'être secrétaire général entre 1997 et 2006,
02:20 donc il a enchaîné deux mandats, il a été entré dès les années 60 dans l'organisation. Il a grimpé petit à petit les échelons.
02:28 C'est quelqu'un qui est, dès le démarrage, très sensible aux questions de développement, puisque ses premières missions
02:34 lui donnent des responsabilités plutôt économiques. Et dans les années 90, il s'engage au service de la paix,
02:41 alors que le monde est marqué par de très graves conflits militaires. Il a été très marqué dans sa carrière par le génocide des Tutsis
02:50 au Rwanda en 1994 et par la guerre de Bosnie. C'est ce qui fonde un engagement à partir de 1997 résolu au service du développement,
03:02 mais aussi de la paix. Donc deux mandats de 5 ans, entre 1997 et 2006, qui lui valent en 2001 le couronnement par un prix Nobel
03:12 pour lui ainsi que pour l'organisation. Lorsqu'il a été nommé secrétaire général, il a dit qu'il voulait faire renaître l'ONU,
03:21 insuffler un nouvel esprit. Et on se rend compte que c'est ce qu'il a fait à travers une action décisive pour les droits humains,
03:30 ce qu'on va voir dans un deuxième temps. Alors repartons du prix Nobel de la paix de 2001. Lorsque le comité suédois Nobel
03:37 lui remet ce prix, c'est au nom d'une action qui a consisté à donner un nouveau souffle aux Nations unies, comme je le disais.
03:45 Lui-même, son programme de 1997 était de rénover les Nations unies. Alors dans le détail, qu'est-ce qui a été fait ?
03:54 D'abord, premier axe, son action a consisté à prévenir les conflits armés, notamment en Afrique et au Moyen-Orient,
04:04 puisque la décennie 1990 peut être caractérisée comme une décennie du chaos en Afrique, avec des conflits en Afrique de l'Ouest,
04:13 dans la Corne de l'Afrique, dans l'Afrique des Grands Lacs, le Rwanda, le Burundi. Et puis dans les années 90,
04:19 vous avez aussi au Moyen-Orient le conflit irakien, par exemple. Son action a contribué à faire reconnaître en 2005,
04:27 au nom de la protection des populations civiles, un droit des Nations unies et des États des Nations unies
04:33 à intervenir dans les conflits pour protéger les populations civiles. Ça, c'est le premier axe. Et ça détermine tous les autres,
04:41 à savoir mettre les humains et les populations civiles au cœur de la politique de l'ONU. Alors ça recouvre d'autres dimensions.
04:51 La deuxième dimension, c'est la fixation des objectifs du millénaire, qui sont des objectifs de réduction de la pauvreté
04:58 et de développement pas seulement économique mais social, humain. Il avait fait par exemple de la lutte contre le SIDA,
05:06 en particulier en Afrique – il est ghanéen d'origine – une affaire vraiment personnelle, d'engagement personnel.
05:13 Toujours dans la même optique de mettre l'humain au cœur des préoccupations, il a fait signer des partenariats entre les entreprises,
05:21 les ONG et les États, qu'on appelle le Global Compact, le pacte mondial, lancé en 2000 pour que tous les acteurs
05:31 de la communauté internationale – États comme entreprises comme ONG – travaillent dans le même sens. Ça, c'est le troisième axe.
05:38 Le quatrième axe, c'est une action en faveur de la rédaction d'un nouveau droit international, d'une nouvelle législation internationale
05:47 à travers de nouvelles institutions. Par exemple, il a contribué au début des années 2000 à la création de la Cour pénale internationale,
05:55 qui a été instituée en 2002 dans le cadre de l'ONU, pour juger des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.
06:03 Il a aussi poussé à la création au sein de l'ONU d'un Conseil des droits de l'homme. Voilà. Tout ça a débouché sur une nouvelle approche
06:13 des conflits par l'ONU, une approche moins passive et plus active, avec donc le vote dans l'Assemblée générale en 2005
06:23 d'un droit d'intervention pour protéger les populations. Voilà le nouveau souffle instillé par Kofi Annan jusqu'en 2006.
06:34 Alors son action a quand même rencontré des limites. Ce sont les limites de l'action de l'homme. Ce sont aussi les limites de l'ONU.
06:42 Première limite à son action, il faut remonter aux années 1990, quand il était responsable du maintien de la paix
06:51 et de la reconstruction dans les pays en guerre. On lui reproche notamment sa gestion du conflit en Irak, de la reconstruction en Irak,
07:01 avec le programme pétrole contre nourriture, qui a été entaché de malversations et d'erreurs de gestion financière assez graves.
07:09 On lui reproche aussi sa passivité lors du conflit au Rwanda, puisque l'ONU a mis du temps à comprendre les tenants et les aboutissants
07:17 des massacres qui avaient démarré en 1994 et qui allaient déboucher sur un génocide de 800 000 Tutsis.
07:26 D'autre part, d'autres reproches lui ont été faits, plutôt du point de vue des Américains, puisque lors du déclenchement
07:33 de la deuxième guerre en Irak en 2003, Kofi Annan a eu des mots très durs contre les Américains en déclarant la guerre illégale.
07:41 Mais il n'a rien pu faire pour empêcher que les Américains sortent de la légalité internationale, c'est-à-dire partent en Irak
07:48 sans mandat de l'ONU, organisent une coalition d'une cinquantaine d'États, comme on le verra dans la prochaine séance,
07:55 et portent la guerre contre le régime de Saddam Hussein. Alors ça lui a aliéné le soutien des Américains,
08:01 qui se sont comportés de manière de plus en plus unilatéraliste au sein de l'ONU et qui, à sa suite, ont porté à la présidence
08:09 par leur influence très forte le Sud-Coréen Ban Ki-moon, qui était lui très très docile par rapport à l'attitude des Américains.
08:18 Dernière limite de son action, après son départ, comme il était une autorité morale charismatique au service de la paix,
08:26 on lui a confié une mission de paix en Syrie en 2012, au moment où se déclenchait la guerre civile. Et il en a démissionné,
08:36 parce qu'on lui avait pas donné les moyens de pouvoir s'interposer entre les belligérants. Bon, tout ça fait tout de même
08:47 un bilan exceptionnel. C'est un homme qui, à sa mort en 2018, a été célébré comme sans doute le secrétaire général le plus influent,
08:56 le plus charismatique de l'ONU depuis sa fondation et les premiers secrétaires. Voilà. Et son œuvre au service de la paix a été reconnue
09:07 internationalement. On peut dire sans hésiter qu'il a réveillé l'ONU d'une certaine manière. Et il a lancé des pistes de réforme
09:14 qui n'ont pas encore totalement abouti. La première, c'est une participation élargie de la société civile à l'ONU à travers les ONG.
09:24 Ça, on l'a vu. La deuxième piste, c'est une attention beaucoup plus grande au développement humain et social. Ça aussi, on le voit.
09:34 Et la troisième piste, c'était aller vers une force d'intervention, une sorte d'armée de l'ONU, une force d'intervention permanente
09:41 qui aurait eu un poids beaucoup plus grand dans les conflits. Et ça, c'est une réforme qui n'a pas encore abouti.
09:47 [Générique]

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