Colère des agriculteurs : les prix alimentaires, "c'est du vol" estime le président de la FDSEA de l'Isère

  • il y a 9 mois

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00:00 A 7h46, vous avez la parole et ce matin Théo, on discute agriculture.
00:05 Oui, de la colère paysanne et des barrages routiers aussi qui l'expriment, cette colère,
00:09 est-ce que vous la comprenez ? Les barrages routiers sont-ils une bonne manière de l'exprimer ?
00:13 Venez témoigner et poser vos questions Mathieu.
00:15 Voilà, si vous êtes agriculteur, si vous êtes paysan, appelez-nous pour nous raconter votre quotidien.
00:20 Et puis vous, en tant que consommateur, est-ce que vous soutenez ce mouvement ?
00:24 Est-ce que vous le comprenez ? Et puis qu'est-ce que vous faites peut-être pour aider les agriculteurs au quotidien ?
00:29 Un numéro 0476 46 45 45.
00:31 Et pour nous éclairer ce matin, notre invité Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l'ISER,
00:37 Principal Syndicat Agricole. Bonjour M. Crozat.
00:39 Bonjour.
00:41 Merci d'être avec nous. Alors, on l'a appris hier soir, la jeune fille de 12 ans renversée sur un barrage routier
00:47 dans la Riège hier est décédée, sa mère agricultrice également.
00:51 Est-ce que ces barrages routiers doivent continuer ou est-ce trop dangereux ?
00:55 Écoutez, la manifestation en France n'est pas interdite, alors il y a toujours malheureusement des risques.
01:03 Et puis on a une grosse pensée, bien entendu, pour le département de la Riège.
01:06 Et puis les deux décès consécutifs d'une mère de famille et d'une jeune fille qui venaient tout simplement
01:12 défendre leur métier, leurs conditions de vie et puis d'obtenir quand même un revenu, on va dire décent.
01:18 Parce qu'aujourd'hui si on barre, si on va manifester jeudi à Grenoble, c'est pour défendre nos métiers,
01:27 pour défendre aussi nos territoires. Alors après je ne sais pas s'il faut soutenir l'agriculture,
01:32 mais par contre reconnaître l'efficacité en termes de travail et puis la fonction nourricière
01:38 et puis aussi la fonction, on va dire, paysage. Parce que 90% des paysages dans notre département
01:44 et dans l'ensemble des départements français sont façonnés et cultivés, bien entendu,
01:49 par l'ensemble de l'agriculture française et notamment iseroise.
01:52 - Les actions vont s'amplifier, a dit hier votre président national Arnaud Rousseau.
01:57 Vous avez parlé de l'action prévue demain en Isère. C'est toujours maintenu cette action et ça va s'amplifier ?
02:04 - Tout à fait, oui. Aujourd'hui dans le Rhône, demain en Isère, dans l'Ain, dans la Loire
02:10 et puis aussi aujourd'hui dans la Drôme et Ardèche.
02:14 - Je vous propose, Jérôme Crozat, d'entendre justement ces agriculteurs. On en a un en ligne ce matin, Mathieu.
02:20 - Oui, Jérôme qui est à Brion, qui est aussi un de nos correspondants météo réguliers. Bonjour Jérôme.
02:26 - Bonjour Mathieu.
02:27 - Et justement, vous êtes agriculteur, donc vous êtes directement concerné par la situation.
02:31 - Oui, tout à fait. Je suis le premier concerné, c'est vrai. Ça fait plaisir d'entendre parler un peu de nous.
02:35 Parce que là, ça devient vraiment grave, que c'est toutes les productions qui sont touchées.
02:39 L'agriculture, il y a toujours eu des moments où ça n'allait pas bien dans un secteur,
02:44 mais là, je crois que cette fois, on est tous un peu pris par la gorge, avec toutes les charses qui ont augmenté,
02:48 les produits qu'on n'arrive pas à vendre à nos justes prix.
02:51 Cette fois, ça bouge vraiment et j'espère que ça fera bouger le gouvernement parce qu'il y en a vraiment besoin.
02:55 - Jérôme, on s'était vu, nous, cet été. J'étais venu en reportage dans votre exploitation durant la canicule.
03:01 Expliquez-moi ce qui s'est dégradé depuis, parce que cet été, c'était un peu compliqué,
03:05 mais je n'ai pas l'impression qu'on en était à ce niveau de colère. Aujourd'hui, qu'est-ce qui s'est dégradé ?
03:10 - On voit que les productions, les céréales, ont mal été vendues. Les céréaliens n'ont pas pu vendre leurs céréales à leur prix de l'année dernière, déjà.
03:18 Ils ont vraiment mal vendu. Nous, le lait, on a perdu 60 € la tonne sur les 1 000 litres par rapport à l'été,
03:25 donc par rapport à l'année dernière, alors que les charges sont toujours aussi hautes.
03:28 Et c'est ça qui ne va pas. On n'a pas compris pourquoi on nous baissait les prix comme ça.
03:31 Il y a un ras-le-bol général. Puis là, on nous parle du GNR qui vont nous détaxer, enfin enlever la taxe sur le GNR,
03:37 pour que ça coûte encore plus cher.
03:39 - Donc le gasoil ?
03:41 - Le gasoil non routier pour les agriculteurs, on ne va pas pouvoir suivre. Déjà qu'il est à un prix bien assez élevé, ça devient dur.
03:49 Le gasoil, l'électricité, l'eau, tout augmente. Le matériel, je ne dis même pas le prix du matériel quand on essaye de faire un vie.
03:54 Voilà, moi, mes bâtiments sont payés, mais il y a toujours un peu de matériel à changer.
03:58 Et ça fait peur quand on fait faire un vie, quand on voit qu'un tracteur coûte le prix d'une maison, maintenant, on ne peut plus, quoi.
04:04 - Merci beaucoup Jérôme, en tout cas, de ce témoignage. On comprend mieux, effectivement, la difficulté et la dégradation de ces derniers mois.
04:10 Merci beaucoup Jérôme.
04:11 - Merci à vous.
04:12 - A Brion, belle journée, merci.
04:13 - Il est 7h50, vous pouvez nous appeler ce matin, justement, pour revenir sur cette situation.
04:16 Alors, vous êtes agriculteur comme Jérôme, ou vous êtes "simple consommateur", entre guillemets,
04:21 et vous pouvez aussi nous donner votre sentiment sur ce mouvement. Est-ce que vous le soutenez ? Est-ce que vous le comprenez ?
04:26 C'est globalement la tendance sur la page Facebook des messages que vous nous avez laissés. Donc, appelez-nous 0476 46 45 45.
04:32 - Et je reviens vers notre invité, Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l'ISER.
04:37 Monsieur Crozat, est-ce qu'il y a des agriculteurs qui sont plus touchés que d'autres en ISER par cette dégradation, notamment des prix agricoles ?
04:44 - Eh bien, écoutez, aujourd'hui, la crise, elle est, on va dire, multifactorielle sur l'ensemble des agriculteurs de notre département.
04:53 Nos producteurs de fruits qui ont bourgeois la main d'oeuvre ont des difficultés sur la main d'oeuvre, et puis, bien entendu, sur la vente de leurs produits.
05:00 Un kilo de pomme qui est vendu bord de champ, 50 centimes, qui se retrouve à 5 euros le kilo en grande surface, où passe la marge aujourd'hui ?
05:08 Bien entendu, quand on l'achète en tant que consommateur, on trouve que c'est cher. Par contre, quand on la vend à 50 centimes en bord de champ, c'est du vol.
05:17 Honnêtement, 4,50 euros pour le conditionnement et le transport, voilà.
05:23 Aujourd'hui, il faut que les GMS arrêtent de nous faire croire qu'elles défendent les consommateurs.
05:28 Je pense que... - Les grandes et moyennes surfaces. - Les grandes et moyennes surfaces, oui, tout à fait.
05:31 Il y a ça, et puis, après, bien entendu, ce que le collègue a dit sur la filière laitière, sur la filière viande, sur la filière céréale,
05:38 et puis, le gouvernement qui en rajoute.
05:40 Enfin, aujourd'hui, je pense qu'on prend le secteur économique, puis on prend aussi le particulier pour des vaches à lait,
05:47 pour résoudre, sous la bannière du climat, du réchauffement climatique, des problèmes de trésorerie.
05:53 Je pense qu'aujourd'hui, il y a quand même une incompétence, on va dire, de gestion au niveau de l'État.
05:59 3 000 milliards de dettes, et puis, en même temps, on n'est pas capable de pouvoir trouver des solutions.
06:05 La seule solution, c'est de mettre de l'impôt, d'embuer un peu avec des plans, des programmes d'investissement.
06:12 Après Covid, France 2030, on a connu ça.
06:15 Mais enfin, je pense que c'est beaucoup de poudre aux yeux, et aujourd'hui, le secteur agricole ne peut plus supporter de charges,
06:20 parce que nous, on ne peut pas répercuter, tout simplement, quand on voit les restaurants.
06:24 - Sur les produits que vous vendez. - On a tous eu de l'augmentation, mais nous, on ne peut pas augmenter les prix.
06:30 - On va y revenir dans un instant sur vos indications et sur vos mots, très fort, ce matin, vous parlez de vol, vous parlez de vaches à lait.
06:36 On va y revenir dans un instant, d'abord, on retourne au standard, Mathieu.
06:39 - Oui, on vous donne la parole aussi, au 04-76-46-45-45. Jean-Marc est avec nous, à Entre-Deguay. Bonjour Jean-Marc.
06:45 - Oui, bonjour.
06:46 - On parlait de vaches à lait, c'est un mauvais jeu de mots, mais justement, vous, vous avez été agriculteur,
06:50 et vous étiez justement dans la production de lait pendant 40 ans.
06:53 - 40 ans chez Danone, effectivement.
06:56 - Ah d'accord, donc là, vous étiez sur une exploitation, ou vous travaillez dans l'industrie ?
07:00 - Ah non, non, non, non, j'étais producteur de lait pour Danone.
07:03 - D'accord, ok.
07:04 - Voilà. Et donc, pendant 40 ans, nous avons eu le même prix du lait.
07:07 On a commencé à 2 francs, et on a fini à 32 centimes d'euros, soit 2 francs.
07:12 - D'accord.
07:13 - N'est-ce pas une honte, ça ?
07:16 - Alors que l'inflation, j'imagine, elle a augmenté pendant toute cette période.
07:21 - Exactement. Nos parents avaient 10 vaches à lait, nous il en fallait 100 pour vivre.
07:28 - Oui, d'accord.
07:29 - Et quand vous avez terminé votre carrière, vous étiez comment ? Vous étiez rincé de ce qui s'était passé,
07:35 ou malgré tout, encore, j'allais dire, motivé ? Est-ce que finalement, c'était de plus en plus dur ?
07:42 - Non, on a aimé notre métier, on l'a fait par amour, notre métier, le producteur de lait.
07:47 Mais c'est vrai qu'il n'y a pas la rentabilité par rapport au travail demandé.
07:53 - Et…
07:54 - Ça se levait tous les jours, 365 jours par an.
07:58 C'est travailler pour une industrie qui ne nous reconnaît pas notre travail.
08:03 On n'était qu'un producteur, qu'un numéro de producteur.
08:07 Et c'est vraiment… Pour avoir 8 yaourts en cadeau pour Noël, voilà ce qu'on bénéficiait de chez Danone.
08:15 - Donc j'imagine que le mouvement actuel, vous le comprenez.
08:18 - On le comprend très bien et on soutient vraiment nos agriculteurs qui sont encore en activité.
08:22 Moi, j'ai arrêté depuis 3 ans. Et bien vraiment, c'est un soulagement d'avoir arrêté ce métier.
08:29 - Merci beaucoup Jean-Marc pour ce témoignage.
08:31 - Merci pour ce témoignage, très fort également.
08:33 Je reviens vers vous Jérôme Crozat, président de la FDSEA de l'ISER.
08:37 J'imagine que ce témoignage vous fait chaud au cœur.
08:39 Et puis, qu'est-ce que vous attendez du gouvernement maintenant qui promet des actions concrètes, rapides ?
08:44 Vous en attendez quoi ?
08:46 - On en attend qu'on a quand même un défi.
08:49 Enfin, Jean-Marc a bien décrit la situation de la production laitière.
08:53 À la fois aimer son métier, mais il faut pouvoir en vivre.
08:56 Et puis, il y a tout ce défi aujourd'hui où plus de 50% des agriculteurs sont au-dessus de la barre des 50 ans.
09:03 On a tout ce renouvellement des générations qui doit être mis en place.
09:07 Par contre, les jeunes n'accéderont pas au métier s'il n'y a pas de revenus, s'il n'y a pas aussi de considération de la société.
09:14 Parce qu'on voit aussi, comment dire, certains secteurs politiques taper fortement sur l'agriculture, sur la pollution, sur scie, etc.
09:25 Voilà, je veux dire, quand on doit vivre ensemble, vivre ensemble c'est à la fois le milieu rural, mais aussi le monde des villes.
09:31 - Vous parlez de qui concrètement ? Vous parlez des écologistes ?
09:35 - Bien entendu, des écologistes.
09:38 Aujourd'hui, si on est à Grenoble, on est content de pouvoir aussi faire notre manifestation à Grenoble,
09:43 pour pouvoir aussi échanger avec les Grenobleurs.
09:46 Parce que des décisions de dire "il ne faut plus de viande dans les cantines", c'est très bien.
09:50 Mais en même temps, autour de Grenoble, qu'est-ce qu'il y a ?
09:54 Il y a des montagnes, des alpages.
09:57 Et les alpages, si on enlève la production laitière, si on enlève la production ovine, bovine,
10:02 on va faire pousser, on va dire, de la garrigue, on va faire pousser des bois qui ne seront pas forcément entretenus.
10:09 - Et les paysages ne seront plus les mêmes ?
10:11 - Avec le réchauffement climatique, ça sera la même situation que dans les Pyrénées-Orientales.
10:16 C'est-à-dire que nos montagnes vont brûler.
10:18 Et dans les Pyrénées-Orientales, je vous garantis que là où il y avait de la vigne, ça n'a pas brûlé.
10:21 C'est-à-dire que là où il y avait de l'activité agricole, ça ne brûle pas.
10:24 Voilà, c'est ces raisonnements.
10:26 Et puis, en fait, on appuie sur l'agriculture, on critique l'agriculture
10:30 pour se faire, en fait, son fond, sa situation politique, etc.
10:35 Et ça, par contre, on commence à vraiment être agacés parce que je pense qu'un pays,
10:40 je pense qu'un département, je pense qu'un village, c'est tout le monde.
10:44 C'est le boulanger, c'est l'agriculteur, c'est celui qui est salarié, c'est celui qui est chef d'entreprise,
10:49 c'est celui qui a peut-être malheureusement pas retrouvé de boulot,
10:52 c'est peut-être celui qu'il faut qu'on aide.
10:54 Une société, c'est ça. C'est pas taper sur les autres.
10:58 - Et c'est beaucoup de témoignages au standard.
11:01 - Il y a une vallée chimique autour de Grenoble et personne ne tape sur la vallée chimique.
11:05 - Justement, tout le monde est au téléphone.
11:08 Marie-Agnès est avec nous.
11:10 Vous allez voir, on va avoir pas mal de gens qui sont autour des agriculteurs.
11:14 Marie-Agnès Sabiol est avec nous. Bonjour, Marie-Agnès.
11:17 - Bonjour. - Vous êtes femme d'agriculteur en l'occurrence,
11:19 et je imagine que vous voyez les difficultés au quotidien.
11:22 - Et là, moi, je voudrais parler en tant que consommatrice.
11:26 Je voudrais dire, enfin, donner une réflexion que j'avais.
11:34 Les agriculteurs, ils ont beaucoup de normes à respecter,
11:37 c'est pour ça que c'est très contraignant, ça leur fait beaucoup de travail.
11:41 Et j'espère que ces normes sont là, pas pour rien, mais pour la santé des Français et pour l'écologie.
11:49 Et alors, à ce moment-là, pourquoi la France accepte l'importation des produits
11:54 qui sont issus de produits dangereux ?
11:59 Il faut être logique.
12:01 Si c'est pas bien pour les Français, pourquoi on en fait venir ?
12:05 Si on en fait venir... - Préoccupation sur les importations.
12:08 - Pourquoi les agriculteurs français ne peuvent pas utiliser ces produits ?
12:14 C'est vraiment aberrant pour moi.
12:17 - On entend votre interrogation, Marie-Agnès, on passe à un autre témoignage.
12:21 Je suis désolé, je vous coupe un peu, parce qu'il y a beaucoup de monde au stand-up,
12:23 et pour que tout le monde puisse intervenir.
12:25 - Sylviane est avec nous, à Val-de-Virieux. Bonjour, Sylviane.
12:27 - Oui, bonjour. - Vous, vous êtes fille d'agriculteur,
12:29 alors je sais pas, du coup, de quel point de vue vous voyez tout ça ?
12:32 J'imagine que vous voyez vos parents travailler, mais est-ce que ça vous touche directement ?
12:36 - Oui, moi, mes parents, maintenant, sont âgés, papa n'est plus là,
12:41 mais j'ai eu toute mon enfance dans le milieu agricole,
12:45 et c'est un problème qui date de très longue date, en fait,
12:49 et je comprends tout à fait leur position actuelle pour se faire entendre.
12:54 Ils ont commencé par retourner les panneaux, et ça a fait sourire beaucoup de monde,
12:58 et puis ça n'a rien fait derrière.
13:01 Donc je comprends qu'on puisse maintenant passer à une action un petit peu plus...
13:07 - Musclée, oui. - Musclée, pour se faire entendre.
13:11 Vraiment, le métier d'agriculteur est très mal connu de la population,
13:15 parce que la population voit souvent le prix qui est affiché dans les magasins, dans les commerces,
13:21 mais ils ne voient pas le prix qui a été acheté aux producteurs,
13:26 et qui, eux, ont passé de nombreux jours et de nombreuses heures de travail pour produire.
13:33 - Merci beaucoup. On a entendu, Sylviane, l'implication,
13:39 qui n'est pas récompensée aujourd'hui, et ce qui amène cette grogne.
13:44 - Il y a un problème au niveau des intermédiaires également.
13:46 - Merci, Sylviane, de votre témoignage ce matin.
13:49 - Et merci, Jérôme Crozat, également président de la FDSA de l'ISER.
13:54 Vous nous avez bien dit une action demain à Grenoble, jeudi, en ISER, pour poursuivre le mouvement.
14:01 Merci, et on aura évidemment l'occasion d'en parler. Merci, belle journée.

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