Témoins de l'actu : Maître Susana Madrid

  • il y a 8 mois
Maître Susana Madrid, avocate au barreau d'Orléans et référente CRA

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00:00 Il est 8h10 sur France Bleu Orléans, nous attendons vos appels.
00:04 0238 53 25 25, le centre de rétention administrative d'Olivet accueille ses premiers retenus aujourd'hui.
00:11 C'est un lieu d'enfermement où sont retenus les étrangers qui n'ont pas le droit de résider en France.
00:16 Que pensez-vous de l'ouverture de ce centre ?
00:18 Venez nous le dire, vous êtes nos témoins de l'actu, on vous attend par téléphone avec Marie.
00:21 Et pour en parler ce matin, on reçoit Maître Susanna Madride, vous êtes avocate au Barreau d'Orléans et référente CRA.
00:28 Bonjour.
00:29 Déjà en quelques mots, c'est quoi un CRA ?
00:32 Un CRA est un lieu de privation de liberté où sont effectivement placés des ressortissants étrangers
00:39 qui ont fait l'objet d'une mesure d'obligation d'équité au territoire français en général,
00:45 c'est-à-dire qu'ils n'ont plus de titre de séjour ou qu'ils n'ont pas réussi à obtenir un titre de séjour.
00:51 Ce n'est pas une prison parce que ces personnes-là n'ont pas commis des crimes ou des délits,
00:55 mais néanmoins c'est un lieu où ils ne peuvent pas sortir, donc c'est un lieu de privation de liberté,
01:00 et en cela c'est terriblement contraignant.
01:02 Donc c'est une sorte de phase d'attente entre le moment où l'administration décide qu'ils n'ont plus le droit de rester sur le territoire français et leur départ ?
01:10 Oui, en effet, c'est-à-dire qu'ils ont déjà eu cette décision administrative leur indiquant qu'ils n'ont plus le droit de rester sur le territoire français,
01:20 cette décision est définitive, et dès lors, parce que l'administration considère qu'ils n'ont pas des garanties des représentations,
01:29 c'est-à-dire qu'ils considèrent qu'ils ne sont pas suscités d'être assignés à résidence,
01:34 puisqu'il faut savoir tout de même que la rétention doit être l'exception,
01:37 ils n'ont pas commis des crimes ou des délits, donc l'enfermement doit rester l'exception au principe de liberté sous condition donc assignation à résidence.
01:47 Donc on va les placer là, pour une période qui peut être longue, puisqu'ils peuvent être placés en rétention à un droit positif actuel jusqu'à trois mois.
01:54 Qu'est-ce qui se passe à l'intérieur de ces crâts ? Comment ça s'organise ?
01:58 Pour ces retenues, l'attente est longue, ce sont majoritairement des hommes,
02:05 puisqu'à 94% les centres de rétention sont occupés par des hommes, il y avait jusqu'à présent parfois des familles ou des femmes,
02:15 la nouvelle loi prévoit, parce que la France s'est fait condamner à ce titre à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l'homme,
02:22 qu'il n'y aura plus d'enfants mineurs dans les crâts.
02:24 Donc c'est majoritairement des hommes qui sont dans ces situations, vous l'imaginez, d'angoisse,
02:29 puisqu'ils savent que le départ va être plus ou moins imminent, sans qu'ils aient quand même une date positive précise.
02:36 Et la vie au centre de rétention administrative est quand même une vie avec des règles,
02:44 il y a un règlement intérieur, ils ne peuvent pas non plus vaquer à leurs occupations comme ils veulent,
02:48 donc le temps est long et cela peut être source de stress, d'angoisse, de découragement.
02:54 Donc je pense que ce sont des conditions tout de même qui restent des conditions d'angoisse.
03:00 Et les conditions de vie concrètes dans ces centres de rétention sont souvent dénoncées par les associations.
03:05 On a entendu l'assimade dans nos journaux ce matin, est-ce que les risques sont les mêmes à Olivier ?
03:10 On parle de difficultés d'hygiène, ce genre de choses.
03:14 Alors j'encourage nos auditeurs à aller sur les rapports que font les associations qui sont bien placées,
03:21 parce qu'il faut savoir que les associations telles que l'Assimade, à Orléans, Nousorant, France Terre d'Asile,
03:26 sont à l'intérieur de ces crâts, donc ils sont des observateurs tout de même avertis,
03:33 et tous les ans il y a un rapport qui est publié, celui de 2023 va bientôt sortir,
03:37 il y a déjà accessible celui de 2022, et effectivement les conditions indignes de rétention sont souvent dénoncées.
03:46 Alors le crât d'Olivier, il est tout neuf, j'ai eu l'occasion de visiter en tant que représentante de Montbarreau,
03:52 une chambre aux témoins, et le crât, bien évidemment on n'aura pas des problèmes d'hygiène dans un premier temps,
03:58 puisque c'est effectivement un crât tout neuf, néanmoins, un point d'inquiétude par exemple, c'est l'aspect médical.
04:06 Vous savez que nous sommes dans un département qui connaît une crise médicale importante,
04:11 parmi les critères pour un fonctionnement du crât, il y a le critère médical,
04:16 c'est-à-dire qu'il y a des médecins, des infirmières, des psychologues,
04:19 face aussi à des personnes qui ont souvent des problèmes psychologiques ou psychiatriques,
04:25 compte tenu de ce que c'est aussi des personnes qui ont subi des mauvais traitements dans leur pays d'origine,
04:30 il y a des déboutiers de droits d'asile parce qu'ils ont fui leur pays du fait des guerres civiles, des maltraitances, etc.
04:37 Et il y a un point d'inquiétude, c'est dans quelles conditions ils auront accès notamment aux soins médicaux, par exemple.
04:43 Parce qu'il y a les contraintes physiques, mais il y a aussi les contraintes psychologiques.
04:47 - Que pensez-vous de l'ouverture du centre de rétention administrative d'Olivier aujourd'hui ?
04:52 Voici nos témoins de l'actu, nous vous attendons pour réagir par téléphone.
04:55 Vous nous rejoignez dès maintenant au 02 38 53 25 25.
04:58 - Vous parlez de la prise en charge médicale, il y a aussi une prise en charge juridique,
05:02 ils ont droit à des avocats, c'est retenu.
05:04 Concrètement, comment ça fonctionne ?
05:07 - Alors, c'est un contentieux d'urgence, c'est-à-dire que ces personnes,
05:12 quand elles arrivent au centre de rétention, afin que leur placement soit maintenu,
05:18 doivent passer très rapidement, dans les 48 heures, devant un juge de la liberté de la rétention.
05:24 Donc ce nom-là vous dit quelque chose, puisque c'est exactement le même juge
05:27 qui va statuer aussi, par exemple, en matière de détention provisoire.
05:30 Et c'est là que l'avocat intervient, aux côtés du retenu,
05:34 pour vérifier que toutes les conditions légales sont réquises,
05:39 que le dossier ne comporte pas d'irrégularité,
05:43 et va défendre ce retenu devant le juge de la liberté de la rétention,
05:49 et c'est en précisant que, bien évidemment, il y a la possibilité de faire appel,
05:52 et dans ces cas-là, on accompagne également le retenu devant la cour d'appel.
05:57 Et pour ne pas faire trop compliqué, sachez qu'il y a aussi une possibilité de passage
06:02 devant le tribunal administratif, puisque cette décision de placement en rétention
06:08 est également une décision administrative, et donc susceptible des recours
06:11 devant le juge administratif.
06:13 - Et on l'entend, vous le dites, il y a des avocats, il y a des procédures
06:16 qui doivent aller rapidement, ça veut dire qu'il faut du monde.
06:19 Est-ce que le tribunal d'Orléans a les moyens, la capacité d'absorber
06:23 ces nouvelles procédures ?
06:26 - Nous n'avons dénoncé absolument pas, puisque vous savez que le tribunal
06:31 et la cour d'appel d'Orléans, c'est un tribunal de taille moyenne.
06:35 Nous avons dénoncé par le biais des motions, également dans les organes des presse,
06:40 la radio, et nous nous sommes joints également à la conférence des presse
06:45 qui a été donnée il y a quelques mois par les magistrats de l'ordre judiciaire
06:51 qui se sont énormément inquiétés de l'ouverture de secrets sous Orléans.
06:55 Il faut rappeler que ce centre de rétention a été ouvert à Orléans
07:01 sans aucune concertation entre le ministère de l'Intérieur et le ministère de la Justice.
07:07 C'est-à-dire que Orléans a été choisi uniquement pour sa géographie,
07:12 on est au centre de la France, on a la chance d'avoir un tribunal administratif
07:16 et une cour d'appel, on n'est pas trop éloigné d'Aina Aéroport.
07:20 Donc le ministère de l'Intérieur s'est dit que c'est un lieu géographiquement
07:23 adapté pour recevoir ce type de centre.
07:26 - Mais il n'y avait pas ce qu'il fallait en termes de moyens humains du côté de la justice.
07:30 - Exactement, et non seulement il n'y en avait pas, mais il n'y en a pas de nouveau.
07:34 C'est-à-dire qu'à partir du moment où on nous a annoncé l'ouverture de secret,
07:38 bien évidemment des moyens supplémentaires ont été sollicités par le tribunal judiciaire notamment,
07:44 qui est déjà en difficulté à l'heure actuelle.
07:47 Ces moyens ne sont pas arrivés.
07:49 Du côté des avocats, nous sommes encore une fois en barreau des tailles moyennes, 220 avocats.
07:54 Nous faisons face à toutes nos missions, étant précisé que nous avons fort à faire
07:59 puisqu'il y a un centre de détention, vous savez, le CEPOS.
08:03 - Il y a du travail effectivement.
08:04 - Voilà, il y a le centre Georges de Maison, il y a la vie judiciaire de la cité.
08:08 Ce contentieux, c'est un contentieux 7 jours sur 7, du lundi au dimanche.
08:13 - Il faut des permanences.
08:14 - Et il faut des permanences, il faut du monde.
08:16 On fera bien évidemment ce qu'il faut, mais nous craignons une dégradation importante
08:21 de la justice du fait de cette mobilisation qui est nécessaire pour faire face aux audiences cras.
08:28 - Très rapidement, Susanna Madrid, on a entendu dans nos journaux le syndicat SGP Police
08:32 qui dénonce une ouverture à marche forcée.
08:34 Il explique que le centre n'est pas prêt.
08:36 Vous l'avez visité ?
08:37 Pour vous, le centre est prêt à recevoir ses premiers retenus aujourd'hui ?
08:40 - Alors, je l'ai visité il y a une quinzaine de jours.
08:42 C'était encore le chantier.
08:45 Voilà, donc je ne sais pas en 15 jours ce qui a pu être fait.
08:49 Nous avons effectivement eu l'impression d'une ouverture à marche forcée.
08:53 Ce que je souhaite vraiment indiquer, c'est que nous nous sommes inquiets du fait que
09:01 l'ouverture de ce cras se fasse vraiment au détriment de la justice du quotidien.
09:06 - Merci beaucoup, maître Susanna Madrid.
09:08 Je rappelle que vous êtes avocat au barreau d'Orléans et référente cras.
09:11 Merci beaucoup, très belle journée à vous.
09:13 - Merci beaucoup, au revoir.

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