Abdou K Fofana : "Macky Sall a sacrifié son image pour permettre au Sénégal de passer cette étape difficile"
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00:00 On commence ce journal au Sénégal, secoué par le report controversé de la présidentielle.
00:05 Elle devait initialement se tenir le 25 février prochain.
00:09 Le président Makisal a annoncé samedi 3 février dernier l'annulation du décret portant convocation du corps électoral.
00:16 L'Assemblée nationale a ensuite voté le report de l'élection au 15 décembre prochain.
00:21 Et depuis, la contestation enfle dans la rue.
00:24 Nous sommes en direct donc de Dakar avec Abdou Karim Fofana.
00:28 Bonjour à vous. Vous êtes ministre du commerce et porte-parole du gouvernement sénégalais.
00:33 Ce vendredi, des manifestations ont été réprimées par les forces de l'ordre un peu partout dans le pays.
00:40 Bilan donc 3 morts dont au moins un tué par balle à Dakar.
00:44 Quelle est la réaction de votre gouvernement ?
00:46 Oui, la réaction du gouvernement du Sénégal c'est de regretter cette situation, ces morts.
00:55 Les forces de défense et de sécurité ont vocation à préserver l'ordre public.
01:03 Donc c'est ce qu'ils ont fait.
01:05 Et il y a malheureusement des responsables politiques de l'opposition, de la société dite civile,
01:12 qui appellent des jeunes, des enfants à aller sur le terrain parce qu'il n'y a jamais de manifestation spontanée.
01:18 À aller manifester, attaquer les forces de défense et de sécurité et ce qui est recrétable.
01:22 Nous inclinons devant la mort de ces personnes et l'état du Sénégal,
01:28 comme vous le savez, le procureur s'est suicidé pour exlucider les causes réelles de ces décès.
01:35 Comment faire en sorte que ces drames ne se reproduisent pas ?
01:39 Oui, c'est ce que le président Makisal a indiqué.
01:45 Tout d'abord l'apaisement et le dialogue.
01:48 Vous savez, aujourd'hui, le système démocratique sénégalais est comparable à un ordinateur
01:52 qui a fonctionné pendant 60 ans avec des hauts et des bas, comme le connaissent toutes les grandes démocraties.
02:00 Toutes les grandes démocraties sont à l'épreuve. On parle même de la crise de la démocratie.
02:04 Mais au bout de 60 ans, il y a un blocage, le blocage institutionnel entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel.
02:12 Donc un ordinateur, quand il bug, il faut le redémarrer, il faut le réinstaller.
02:17 Le Sénégal a un mécanisme qu'on appelle le dialogue national qui permet d'apaiser l'espace public,
02:22 qui permet aux acteurs politiques de se concerter et de s'entendre sur des modalités d'organisation de ces prochaines élections.
02:29 Parce que pour le président Makisal, ça aurait été simple d'avoir une attitude d'opportunisme politique
02:36 en laissant le problème pourrir, en quittant le 2 avril, laisser le pouvoir.
02:40 Parce qu'avec l'aura qu'il a, le bilan qu'il a, en 12 ans, il n'a pas à chercher 8 mois de plus.
02:45 Mais il a assumé sa responsabilité pour régler ce problème avant son départ.
02:49 — Mais justement, comment mettre en place ce dialogue national dont vous parlez au moment où il est rejeté par les principaux opposants
02:56 comme Sonko ou Khalifa Sale ?
02:59 — C'est ce qui est totalement faux, puisque le report, c'est d'abord l'initiative de l'opposition.
03:05 N'oubliez pas qu'à l'Assemblée nationale, c'est un groupe parlementaire de l'opposition
03:12 qui a 27 députés sur les 165, qui estime que son leader a été invalidé de façon injuste, qui a demandé le report.
03:20 Avant cela, 49 candidats recalés ont demandé le report, sont venus voir le président de la République.
03:26 Le président de la République leur a dit : « Écoutez, les décisions du Conseil constitutionnel s'imposent à nous tous.
03:32 On n'a qu'à les assumer et avancer ensemble pour ne pas perturber notre démocratie ».
03:36 Mais après, si ce report et ce conflit ou cette mésentente entre le Conseil constitutionnel et une partie de l'Assemblée nationale
03:43 conduit à une résolution d'enquête parlementaire sur le Conseil constitutionnel, si ce conflit conduit à une loi constitutionnelle
03:52 qui reporte la date de la présidentielle, on est obligé, quand même, le président est obligé de se soumettre à cette décision de l'Assemblée nationale.
04:00 Maintenant, j'entends partout les communiqués des institutions internationales, des personnalités politiques bien pensantes au Sénégal.
04:08 On doit choisir aujourd'hui entre décaler une élection ou bien avoir un processus électoral décrédibilisé qui n'est pas consensuel
04:16 et qui va nous créer des contestations postélectorales. Et on ne sait pas cette spirale sur quoi ça va nous mener.
04:22 Donc mieux vaut régler le problème maintenant que de le reporter à plus tard. Et je pense que c'est plus responsable.
04:28 Et c'est ce que le président Makissa l'a fait parce que vu son bilan à la tête du Sénégal, vu son aura international,
04:34 il a sacrifié son image pour pouvoir permettre au Sénégal de passer cette étape difficile mais qui mérite tous les sacrifices.
04:42 Les ONG, la société civile et une partie de l'opposition s'alarment des violences survenues durant ces mouvements de contestation.
04:50 Une grande manifestation est prévue ce mardi, mardi prochain à Dakar à l'appel de la société civile et de la plateforme "Protégeons notre élection".
04:57 Allez-vous autoriser cette manifestation ?
05:00 Vous savez, le principe au Sénégal, c'est d'autoriser toutes les manifestations si elles ne comportent pas de violence,
05:10 si les enquêtes administratives préalables montrent que la volonté des manifestants, c'est de faire une manifestation pacifique,
05:17 une manifestation sans bavure. Mais lorsque vous avez dans des manifestations des gens qui s'attaquent au BRT,
05:24 qui s'attaquent au train express régional, qui s'attaquent aux infrastructures vitales, c'est-à-dire les infrastructures de fourniture d'eau et d'électricité,
05:33 c'est autre chose. Donc si les manifestations ont comme pour but d'exprimer une opinion politique de façon pacifique, de façon calme, il n'y a aucun problème.
05:41 Mais si l'objectif est de perturber, de mettre des enfants de morts pour qu'ils attaquent les forces de défense et de sécurité,
05:48 vous conviendrez avec moi que le rôle de l'État, c'est de préserver la paix publique et de faire en sorte que des hommes politiques,
05:56 une société dite civile, n'utilise pas des enfants et des manifestants pour un peu créer le chaos à Dakar.
06:04 Mais donc à l'heure où l'on se parle, est-ce que cette manifestation est autorisée, oui ou non ?
06:12 C'est du ressort du préfet, de l'autorité administrative qui appréciera, d'après les informations qu'il aura recueillies auprès des manifestants
06:20 et des enquêtes qui seront faites, comme ça se passe dans tous les pays démocratiques dans le monde.
06:24 Le président Macky Sall a donné une interview à nos confrères de l'agence de presse américaine, AIP, dans laquelle il appelle les oppositions à un dialogue national.
06:33 On en parlait il y a un instant. Je vous propose de l'écouter. On revient vers vous tout de suite après.
06:39 Si les politiques ne sont pas capables de s'entendre sur l'essentiel, d'autres forces organisées le feront à leur place.
06:47 Et là, ils perdront tous le pays avec.
06:50 Abdou Karim Foufana, à qui pense Macky Sall précisément ?
06:55 Quelles sont les forces organisées qui pourraient menacer la stabilité du Sénégal aujourd'hui ?
07:02 Oui, mais nous savons depuis le départ, depuis qu'il y a du pétrole et du gaz, que le Sénégal est la cible de beaucoup d'organisations terroristes et djihadistes.
07:11 Nous savons la ceinture de feu que nous avons. Tous nos voisins ont été attaqués, ont été un peu malmenés à l'intérieur de leur pays, leurs institutions, la République, la stabilité.
07:21 Et le Sénégal résiste depuis longtemps. Mais qu'est-ce qui nous a permis de résister ?
07:25 C'est parce que nous avons un État organisé, une scène politique stable avec des alternances.
07:31 Vous voyez, les dernières élections locales, l'opposition a gagné beaucoup de grandes villes.
07:35 Le pouvoir a maintenu beaucoup de communes ou de collectivités rurales à l'intérieur du pays.
07:41 Aux élections législatives, nous avons un Parlement qui est équilibré.
07:45 Donc la démocratie, la vie électorale, elle marche.
07:48 Nous avons plus de 500 médias qui fonctionnent tous les jours.
07:52 Il n'y en a qu'un seul qui est sanctionné pour appel à l'insurrection ou à la violence.
07:56 Donc la liberté d'expression est une réalité.
07:58 Cependant, si sur la scène politique, nous ne nous entendons pas sur la métaphore de l'ordinateur qui a buggé,
08:05 notre démocratie pour laquelle il y a des problèmes d'entente entre institutions,
08:09 eh bien ça va faciliter à ceux qui sont hors du Sénégal, qui rêvent de mettre la main sur notre pétrole, notre gaz
08:15 ou qui rêvent d'un Sénégal qui s'embrase comme d'autres pays.
08:18 Et c'est la raison pour laquelle le président Macky Sall a bien fait de rappeler que si nous ne nous entendons pas sur l'essentiel,
08:23 c'est-à-dire les règles du jeu politique, les modalités de pacification de l'espace public,
08:28 eh bien d'autres organisations qui ont envie de voir le Sénégal être compté dans la liste des pays non démocratiques
08:36 ou qui ont des difficultés parce qu'ils ont subi des invasions terroristes ou djihadistes, seront satisfaits de leur souhait.
08:46 Abdou Karim Fofana, ministre du Commerce et porte-parole du gouvernement sénégalais, merci à vous.