Guinée : "On a un président qui parle de moins en moins de transition"

  • il y a 7 mois

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00:00 Et à mes côtés pour en parler, Cydie Janssen est notre confrère de Radio France Internationale,
00:04 RFI spécialisé sur la Guinée.
00:07 Bonsoir Cydie.
00:08 Aucune justification n'a été donnée.
00:10 Comment interpréter cette dissolution ?
00:13 Est-ce qu'il faut y voir la sanction d'un gouvernement face à la crise que j'évoquais ?
00:16 La sanction d'un gouvernement, la sanction peut-être de la gestion du pouvoir aussi,
00:20 parce que, quoi qu'on puisse en dire, le gouvernement a été nommé par l'agente.
00:24 C'est l'agente qui commande, quoi que le gouvernement ait pu faire.
00:27 Il y avait un mécontentement, ça c'est réel.
00:29 Mais c'est plus un mécontentement de la manière de pratiquer la gouvernance
00:33 et aussi les décisions unilatérales.
00:34 Il faut quand même voir le contexte actuel.
00:36 Déjà, extrêmement important, ça fait bientôt trois mois
00:40 que l'Internet est restreint en Guinée sans aucune raison officielle.
00:44 Pas de réseaux sociaux, pas de Facebook, pas de Twitter,
00:46 même appeler la famille.
00:47 Moi j'ai du mal à appeler ma propre famille en Guinée.
00:49 Il faut qu'ils se connaissent par des VPN.
00:50 Et tout ça sans raison officielle, mais c'est une mesure officielle.
00:53 On parle de raison sécuritaire, c'est l'argument avancé.
00:55 Non, non, non, ça c'est pour les télévisions,
00:58 mais pour les médias, non, pour les médias, voilà.
01:00 Certaines télévisions privées ont été suspendues
01:03 pour des raisons sécuritaires, là aussi,
01:05 la circuité nationale, mais là aussi, sans qu'on puisse dire
01:07 exactement en quoi ces médias sont responsables de,
01:09 enfin, mettent en danger la circuité nationale.
01:11 Mais pour l'Internet, il n'y a pas de raison.
01:12 En revanche, c'est une mesure qui est officielle
01:14 dans la mesure où le porte-parole du gouvernement l'a confirmé
01:18 en disant que l'Internet n'était pas un droit.
01:19 Celui de la justice dit carrément,
01:22 l'État a le droit de disposer de l'Internet.
01:25 Et celui du budget récemment qui a confirmé aussi
01:27 que c'était une restriction de l'État.
01:29 Mais on ne sait pas pourquoi.
01:30 Donc, il y a aussi une contestation sociale
01:32 parce que d'abord, la crise économique mondiale
01:34 touche tout le monde.
01:34 Voilà, il y a aussi, ça a été aggravé en Guinée
01:36 par ce dépôt de carburant,
01:38 le principal dépôt d'hydrocarbures
01:41 qui est exposé en décembre.
01:42 Donc, il y a une conséquence faramineuse
01:44 sur les prix en Guinée.
01:46 Et il y a aussi cette contestation,
01:47 bac politique, cette incertitude.
01:49 Donc là, en fait, on a des syndicats,
01:52 Malik l'a bien dit, qui appelaient à une grève générale.
01:54 Je pense qu'ils posent le préavis demain.
01:56 Une grève générale dans un pays
01:57 à une forte culture syndicale,
01:59 on sait dans quoi ça mène.
02:00 Généralement, c'est beaucoup de tensions.
02:01 Donc, je pense que le gouvernement a voulu répondre
02:04 aux attentes de la population.
02:05 Mais c'est l'agence, pardon,
02:08 en dissolvant le gouvernement.
02:09 Mais c'est l'agence qui commande.
02:11 Le général, il n'est plus colonel,
02:13 l'autopromu général
02:14 est celui qui commande,
02:16 qui donne le là de cette transition.
02:18 Donc, c'est à lui, en fait, finalement,
02:19 de donner des gages envers la population.
02:21 Alors, justement, cette transition,
02:23 est-ce qu'on peut s'attendre
02:23 à ce que cette dissolution la prolonge ?
02:25 On sait que le deal,
02:27 si je veux dire l'accord entre la CDAO
02:29 et les autorités,
02:30 c'est qu'elle est censée s'achever
02:32 à la fin de l'année.
02:32 Est-ce que, justement,
02:33 cette dissolution va la prolonger
02:35 ou au contraire l'écourter ?
02:36 Anthony, tu sais quoi, il y a un mois,
02:38 je pense qu'il était sur ce même plateau
02:39 et on disait déjà qu'il y avait des inquiétudes
02:41 sur le respect du calendrier électoral
02:42 avec cette dissolution.
02:44 Je ne sais pas si elle peut l'écourter
02:45 ou la rallonger.
02:46 Mais je pense que c'est un élément nouveau.
02:48 Je ne suis pas sûr qu'elle la rallonge,
02:49 cette transition.
02:50 Mais l'effet, déjà,
02:52 bon, là, il y a une bonne nouvelle,
02:53 c'est qu'ils ont annoncé la publication,
02:56 en tout cas, la fin de la constitution,
02:58 de la rédaction de la nouvelle constitution
03:00 pour le mois prochain.
03:01 C'est une très grande avancée.
03:02 Ce qui est inquiétant,
03:03 c'est qu'on ne sait pas, en fait,
03:05 quelle est la date d'un référendum
03:06 et qu'on a un président
03:07 qui parle de moins en moins de transition.
03:10 Et on a aussi ces équipes
03:11 qui parlent de moins en moins
03:12 d'un pouvoir à transmettre
03:14 à la fin de l'année.
03:14 Et qui n'a pas parlé d'ailleurs d'élection,
03:16 qui n'a pas employé le mot d'élection
03:18 lors de ses voeux pour la nouvelle année.
03:19 Oui, voilà.
03:19 Mais les élections, je crois qu'elles vont avoir lieu.
03:21 La vraie question, c'est dans quelles conditions
03:23 et avec quels candidats,
03:25 avec quels membres
03:26 participeront à ces élections.
03:27 C'est ça, en fait, la vraie incertitude.
03:28 Alors, ce qui est intéressant aussi
03:29 dans cette dissolution,
03:30 c'est la forme avec laquelle ça s'est fait.
03:32 On a vu derrière vous
03:33 ces images du secrétaire général
03:35 de la présidence entouré de militaires.
03:37 Lui-même est militaire.
03:39 Et les milices qui n'ont pas seulement été limogées,
03:42 les passeports confisqués,
03:44 des comptes bancaires gelés,
03:45 c'est la marque d'un tour de vis autoritaire
03:47 de la part du général Dumbouya.
03:49 Ce qui est assez inquiétant,
03:51 je ne sais pas si c'est inquiétant,
03:52 mais en tout cas, ce qui est assez ironique,
03:54 c'est que c'est exactement les mêmes mesures
03:56 qui ont été prises le jour du coup d'État.
03:58 Sauf que là, on renversait un gouvernement.
04:00 Donc là, on traite un gouvernement sortant
04:02 désigné par l'Agence de la même manière.
04:06 Et en plus, le chef d'État-major
04:08 Ibrahim Israël Bangoura avait dit,
04:10 donc, lors de réunions avec les secrétaires généraux,
04:12 que bon, c'est des mesures confiscatoires
04:14 parce qu'on ne sait jamais ce qu'ils peuvent faire.
04:17 C'est vrai qu'on est dans un pays
04:18 avec cette culture-là où ça faut l'admettre,
04:20 où les anciens ministres limogés
04:22 ou des gens qui ont changé de poste
04:24 parfois partent avec les meubles,
04:25 gardent certains avantages.
04:26 Ça, c'est réel. On ne peut pas le nier.
04:28 Mais le fait de le faire de cette manière
04:30 donne l'impression que l'agente
04:31 qui a désigné ce gouvernement
04:33 ne lui fait absolument pas confiance.
04:35 Et finalement, c'est comme pour dire
04:36 tous les problèmes qu'il y a,
04:37 c'est de leur faute, ce n'est pas de la nôtre.
04:39 Sauf que je ne pense pas qu'une seule seconde
04:41 que les Guinéens pensent cela.
04:44 C'est l'agente qui dirige,
04:45 c'est elle qui a pris le pouvoir.
04:46 Donc, c'est elle qui est responsable
04:47 de ce qui se passe, qui est co-responsable.
04:50 C'est vrai qu'il y avait un problème
04:51 dans ce gouvernement,
04:53 parce qu'il y a quelques semaines,
04:55 on a quand même vu, il y a quelques jours encore,
04:57 des dissensions fortes.
04:58 Un premier ministre qui est totalement impuissant
05:01 face à au moins un ministre, celui de la Justice,
05:02 qui a été premier ministre d'État.
05:03 - Charles Wright et Bernard Goumault.
05:05 - Charles Wright, qui est le ministre de la Justice,
05:06 et Bernard Goumault, qui est le premier ministre,
05:08 qui a été obligé d'écrire une lettre à la présence
05:10 pour dire "ce ministre de la Justice
05:12 ne l'obéit pas à mes ordres".
05:13 Et ce ministre de la Justice qui va publiquement
05:15 dans les médias dire "en gros, je fais ce que j'ai à faire".
05:18 Donc, c'est un gouvernement où chacun
05:21 finalement fait ce qu'il veut,
05:21 pour une raison extrêmement simple.
05:23 Celui qui nomme, celui du patron,
05:24 c'est le général Dumbouya.
05:25 Donc, ça le prouve encore, cette dissension-là.
05:28 Donc, c'est à lui, je pense, de rassurer les Guénéens
05:31 sur ses intentions réelles,
05:32 et où il compte mener ce pays.
05:34 - Merci beaucoup, Asselineau,
05:35 d'être intervenu sur l'antenne de France 24 ce soir.

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