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00:00 Et moi je vais te poser la première question, histoire de lancer un petit peu l'opération. On sait qu'il y a beaucoup de souffrance chez les marins.
00:07 50 jours, il faut se donner beaucoup de mal pour arriver ici à Brest. Même s'il y a eu une petite pause du côté des Açores, les corps souffrent, les bateaux également.
00:17 Alors moi je me pose la question, est-ce que le bateau a tant souffert ? Est-ce que tu es en mesure peut-être maintenant de nous dire s'il y a eu beaucoup de problèmes sur le headband de Rothschild ?
00:26 Si t'as le droit de le dire, si déjà t'as envie de confier tout ça. - Je crois qu'on peut en parler. De toute façon on peut les voir.
00:32 Les deux amarilles majeures, je crois que c'est le bras d'abord qui a cassé très rapidement.
00:38 Donc là on a vite trouvé les solutions et on savait que cette partie n'est pas structurelle sur ce bateau.
00:44 C'était la bonne idée qu'a eu Guillaume Verdier quand il a conçu ce bateau. Il s'est dit je veux pas que ça soit...
00:50 En général c'était une partie structurelle donc quand tu casses ce carénage, là c'est purement aérodynamique.
00:56 On l'avait cassé une fois, ceci dit les dernières, mais sinon je n'avais jamais abîmé cette partie-là.
01:02 Mais là la vague était vraiment violente et à 45 nœuds ça n'a pas pardonné.
01:07 Donc voilà, ça c'était les premières amarilles. Après j'ai eu pas mal de problèmes avec les enroulages de voile, des choses comme ça.
01:16 J'ai cassé des vis, je me suis retrouvé avec les voiles à l'air et je savais pas trop comment les rouler mais on a trouvé des solutions.
01:21 Et puis derrière on a pu réparer parce qu'on avait quand même beaucoup de matériel à bord.
01:27 Pas assez d'ailleurs, on s'est dit à un moment, d'habitude on n'utilise pas trop la caisse à outils sur le Maxi, mais là je sais pas pourquoi.
01:34 Ça a commencé très tôt et ça s'est enchaîné. Qu'est-ce qu'on a eu d'autre ? On a eu des problèmes de dessinalisateur.
01:40 J'avais des problèmes d'eau salée rapidement, ça m'a gêné. D'ailleurs j'étais pas très bien, j'avais mal à la tête souvent.
01:46 Donc on comprenait pas pourquoi et en fait on a vite identifié qu'il y avait un dessal qui déconnait et puis l'autre qui était pas terrible.
01:54 Ça aurait pu me faire arrêter la course puisque sans eau douce évidemment pas de...
02:00 Voilà et après il y a eu le deuxième problème majeur, c'est arrivé plus tôt après le Horn, puisque finalement ça a été déchiré cette grande voile.
02:08 Et puis là, on partait pour un arrêt en Uruguay ou au Brésil en fonction de la météo.
02:17 Et puis 24 heures après la casse, donc je naviguais sous deux rilles du coup, la voile a été déchirée sous un rille.
02:23 Et puis on s'est rendu compte que moi je trouvais que c'était pas très gros et puis au début quand ils ont reçu les photos ils ont eu peur.
02:29 Et puis quand on m'a mesuré, quand j'ai mesuré, je me suis dit mais c'est pas une grosse déchirure.
02:34 Et ils sont revenus avec une idée, Cyril m'a appelé, il m'a dit écoute on a une solution pour réparer et on a vu ça et on pense que ça peut tenir.
02:43 Et on est confiant, au début je n'y croyais pas trop et puis la solution elle a été géniale et ça m'a pris quelques heures de boulot.
02:50 Mais ça n'a pas cédé quoi, donc incroyable.
02:56 Ça c'était les trucs principaux, je pense que j'en oublie plein parce que j'ai l'impression d'avoir passé mon temps à bricoler mais je me retiens sur tout celle là.
03:07 J'ai perdu un plan porteur aussi de Safran, un tribord à partir de l'océan indien.
03:13 Donc ça c'est un petit handicap, on n'a pas bien compris pourquoi mais voilà, ça nous était jamais arrivé.
03:19 Mais donc sur un côté je volais moins bien puisque sans ce plan porteur c'était plus difficile de voler.
03:25 Et le foil, heureusement tout s'est mis du bon côté, c'était un tribord, le foil aussi était un petit peu abîmé.
03:31 Bon ça c'était plus de la performance, j'ai cassé aussi mes systèmes de stockage de foils.
03:39 C'était en l'air qu'il fallait faire quelque chose.
03:42 Alors ça c'est ce qui nous était arrivé aussi à la Jacques Vabre, donc on était un peu préparé.
03:48 Voilà, il y a plein de petites choses comme ça mais finalement les choses essentielles non,
03:54 le système de direction, de gouvernail, heureusement qu'il y a eu la Jacques Vabre j'ai envie de vous dire,
03:59 puisqu'on avait un problème qui nous cessait d'augmenter depuis quelques années et on ne le trouvait pas.
04:04 Et à la Jacques Vabre, ça nous a coûté dès le départ des problèmes.
04:08 On pense qu'on finalement n'a pas tapé grand chose au départ là, c'est plus des soucis.
04:12 Et on a réussi à identifier ce problème là quelques jours avant de remettre à l'eau et l'équipe a été très réactive et on a pu le corriger.
04:19 Et comme on naviguait comme ça depuis des années, ça ne nous posait pas de problème.
04:23 Et le fait d'aller de plus en plus vite, de tirer de plus en plus sur le bateau, ça avait des conséquences.
04:27 Merci Charles. Question de Philippe Eliez.
04:30 Charles, est-ce que tu as maintenant conscience pleinement que tu fais partie des plus grands marins de la course au large française, voire au monde,
04:36 que tu as encore ce syndrome parfois d'espèce de modestie de ne pas te rendre compte qu'on a regardé ton palmarès ?
04:44 Oui, c'est sûr que si je regarde, les lignes, elles sont belles.
04:48 Après, je crois que dans chaque adulte, il y a un enfant qui ne s'est pas vu grandir.
04:52 Et moi, je me vois encore sur mon premier Figaro et des fois, j'ai du mal à oublier ça.
04:56 Mais c'est vrai que maintenant, à 50 ans, je ne peux plus faire l'adolescent.
05:00 Quand les hommes l'appellent, je m'appelle le vieux. Je me dis merde, là, j'ai changé de catégorie.
05:08 Donc voilà. Mais oui, je me rends compte que les lignes, elles sont dingues.
05:19 Ce n'était pas celle que j'avais imaginée. Elles sont même peut-être presque plus belles que ce que j'imaginais.
05:23 Je n'aurais pas imaginé cocher la cache Volvo Ocean Race.
05:26 J'aurais pas imaginé cocher la case Multicock, même si je la cherchais depuis longtemps.
05:32 Et je n'ai pas cassé la case Vendée Globe.
05:36 Et voilà, ça sera, mais je ne peux pas avoir de regrets par rapport à tout ce que je fais.
05:42 Et puis, ça s'est toujours enchaîné. C'est vrai qu'il y a du travail.
05:48 Il y a un peu de talent, mais aussi de chance de chaque fois de tomber au bon endroit au bon moment.
05:55 Mais après, c'est des opportunités que je me suis créées. Je ne me suis pas retrouvé dans ces équipes-là par hasard.
06:01 Et voilà. Et tout a démarré par la solitaire du Figaro.
06:04 Quand Marc Guimaud me fait confiance, c'est parce que j'ai gagné la solitaire du Figaro.
06:08 Quand Bidégory me fait confiance, c'est parce que j'ai prouvé mes choses au Figaro.
06:12 Quand Franck m'appelle à ses côtés, c'est aussi parce que j'ai fait les choses avant.
06:17 Et puis quand Gidane a Tim, on m'appelle, c'est parce qu'il s'est passé des choses.
06:22 À chaque fois qu'on m'a donné ma chance, pour avoir attendu parfois, je me suis dit, quand tu as une chance, tu dois tout donner.
06:30 Et c'est ce que j'essaie de faire. On peut toujours travailler plus.
06:33 Mais en tout cas, le fait que je puisse réparer ce bateau, le comprendre, c'est parce que je suis tous les jours avec les gars, quasiment, au bureau.
06:42 Il ne se passe pas un truc sur le bateau sans qu'on en parle, quasiment.
06:46 Et même si je ne suis pas tout dans les détails, il n'y a pas grand chose sur le bateau que j'ignore, en tout cas.
06:53 Question d'Axel Capron. Axel.
06:55 Oui Charles, bonjour. Franck, je suis devant toi.
06:58 Franck Cammas disait la semaine dernière que te connaissant, il imaginait que tu avais dû un petit peu t'ennuyer pendant ce tour du monde, connaissant ton âme de compétiteur.
07:07 Est-ce que ça a été le cas ?
07:09 Je pense qu'il a réfléchi avec son cerveau. Parce que lui, effectivement, je pense qu'il n'aurait pas aimé. Je le connais.
07:17 Il s'ennuie plus vite que moi en bateau. Il passait beaucoup de temps sur les réseaux à regarder l'actualité.
07:23 C'est quelqu'un qui a tout le temps besoin de se nourrir d'informations. Et je voyais bien que des fois, dans la longueur, il n'aimait pas trop ça.
07:28 Oui et non. C'est vrai que quand ça s'arrête avec Tom, je me suis éclaté. C'est vrai que les 15 premiers jours, je ne les vois pas passer.
07:36 Ils sont fatigants. Mais après, j'étais venu chercher ça. J'avais envie de me retrouver dans une situation où je gère le bateau, où je prends soin du bateau, où je gère ma course.
07:48 Et je me suis retrouvé là-dedans. Et ça a été très animé. Mais c'est vrai qu'à partir du moment où il a fallu passer le cap Horn, là, j'ai trouvé ça long.
07:58 Parce qu'on pense que c'est fini. Et je le savais dans ma tête. Je m'étais dit ça ne sera pas fini. Mais il y a eu un enchaînement de météo pourri, de problèmes avec la grand voile.
08:08 Tout ça. Et il y a eu un petit moment où clairement, je pense que j'ai un peu disjoncté. Si je déchire la grand voile, c'est parce que je suis impatient.
08:15 Je ne prends pas mon riz. Je prenais mon riz une heure plus tôt et tout allait bien. Et j'attends. Il n'y a aucune raison d'attendre.
08:22 Les gars me disent il faut tuer du temps. Et non, je n'arrive pas à réduire la toile. Et je continue. Et puis à un moment, je me retrouve face à du vent.
08:31 Et je dis bon, maintenant, il faut réduire. Je n'ai pas le choix. Et c'était trop tard. Donc, il y a eu un petit peu d'ennui sur la fin.
08:39 Mais il y a eu tellement de bricolage, de choses à réparer. Il y a une liste énorme. En fait, j'en oublie plein.
08:45 Mais je pense que les gars, ils ont une liste monstrueuse. J'ai l'impression d'avoir souvent passé du temps. Mais ça fait partie de ce genre de course.
08:52 Je crois que c'était Michnet qui disait c'est une emmerde par jour. Je pense qu'on n'est pas loin du compte.
09:00 Jacques Bigadère peut-être.
09:02 Oui Charles. Qu'est-ce qu'il faut faire pour faire un tour encore plus parfait que celui-là ? Si tu devais repartir la prochaine fois, qu'est-ce que tu retirerais déjà de tout ce qu'il y a à faire pour ne pas justement avoir toutes ces emmerdes ?
09:21 Il y a des choses qui sont presque inévitables. Les choses qu'on ne peut pas y contrôler, les chocs, les choses comme ça.
09:28 Mais c'est sûr que ça fait réfléchir. On a fait un bateau assez costaud de notre côté parce qu'on avait cet objectif du retour du monde. C'est peut-être pour ça qu'on a fini.
09:37 Mais il faut peut-être faire encore plus costaud. Il y a plein de petits détails où on se bat sur le poids pour gagner. Je pense notamment à tout l'aérodynamisme du bateau.
09:46 A l'arrière, on fait ça avec du clisard. C'est des trucs hyper légers. On ne l'avait jamais cassé ce Citi. J'étais assez confiant. Mais c'est de la toile d'avion.
09:54 J'arrive. Tout ça, vous voyez bien. J'ai découpé. Il y a des trous partout. Mais si j'avais les quelques kilos de plus que j'aurais pu mettre pour avoir un bateau,
10:04 cette partie-là qui ne casse pas, en perf, c'est simple. Même en essayant d'aller à fond, j'étais à 80-85% de la polaire du bateau.
10:14 Et c'était quasiment purement aérodynamique, la perte. Le bras, le trou, c'est ce qui m'a inquiété au début. Je ne savais pas où j'allais.
10:22 Parce qu'au début, j'étais très inquiet de perdre en performance. Je ne savais pas tout ce qu'on allait vivre derrière.
10:27 Mais voilà, le perte-carénage, on parle d'un nœud à certaines allures. Ça va très vite. Donc, tous ces trucs-là, il faut les laisser.
10:38 Et quand c'est en bon état, tu gagnes la perte. Je pense que le prochain challenge, c'est d'arriver à passer le cap Horn avec un bateau qui peut être encore à 90%, peut-être 5% de plus.
10:47 Et on va y arriver. Il y a plein de choses, plein de détails sur les foils. On sait pourquoi on les abîme. On n'a pas encore la solution parfaite,
10:55 mais on l'a imaginé pendant ce tour du monde. Et sur le prochain bateau, je pense que les problèmes qu'on a sur ce foil-là, on arrivera à les éviter.
11:02 Mais voilà, c'est une somme de détails où parfois on veut jouer l'optimisation et ça nous coûte cher parce qu'on fait trop léger ou trop.
11:12 Voilà, on ne pense pas ça. Donc, c'est plein de petites choses comme ça qui s'accumulent.
11:17 Et puis dans la gestion aussi du bateau, je pense qu'il ne faut certainement pas aussi vite. Je pousserai certainement moins fort et je prendrai beaucoup plus de temps pour chaque manœuvre.
11:26 Parce que à chaque manœuvre, j'ai parfois été un peu vite ou un peu précipité. Un petit détail, quelque chose que tu oublies.
11:33 Et derrière, les conséquences, elles sont énormes. Donc tu perds du temps et pour le petit gain que tu as fait, tu peux perdre beaucoup.
11:40 Donc ça, c'est l'expérience. J'ai appris plein de choses. Je ne sais pas si c'est moi qui repartirai au tour du monde, mais en tout cas, j'aurais des bons conseils à donner.
11:46 Une question de François DASQUAIS de l'AFP.
11:49 Tout à l'heure, sur les pendants, tu disais que tu n'avais pas encore atteint tous tes objectifs personnels. Est-ce que c'est le cas maintenant ? Et s'il en reste des objectifs, je suis là.
12:01 Et s'il en reste des objectifs, quels sont-ils ?
12:05 Mes objectifs personnels, c'est vrai que là, j'ai un peu cassé toutes les cases. J'ai un peu promis que j'allais calmer le jeu pour mes enfants.
12:18 Et alors maman. Donc voilà, après, il n'y a pas que des objectifs personnels. Je fais partie d'une équipe et on a un bel objectif. Déjà, c'est de construire un bateau.
12:28 Et de A à Z, en étant une des données d'entrée, ça, je ne l'ai jamais fait. J'ai vécu un peu par procuration la naissance de Safran, de Groupe Amacate, de Gitana un petit peu,
12:41 parce que j'étais là quand il a commencé à construire ce bateau. J'étais pas là quand il est né. Et ça, c'est un beau challenge.
12:47 Et c'est là-dedans que je prends le plus de plaisir aujourd'hui, c'est à développer ces bateaux. C'est ce que j'ai appris chez Gitana.
12:56 J'ai fait beaucoup de monotypes, moi. Donc techniquement, j'avais quand même pas mal de complexes, même si j'avais vécu dans des belles équipes.
13:05 Donc de travailler au quotidien avec ces gens-là, c'est ce qui... Tous les talents qu'il y a autour de moi, c'est hyper riche.
13:12 Et c'est là-dedans que je m'éclate le plus. En tout cas, c'est vraiment mon objectif, c'est de m'améliorer dans ce domaine-là.
13:19 Et j'ai un énorme banc d'essais. Ça va être le Gitana 18. Et c'est une chance inouïe. Donc c'est génial d'avoir des perspectives.
13:28 Est-ce que je vais faire beaucoup de courses avec ? En tout cas, en solitaire, je ne sais pas. J'essaierai d'aller défendre mon titre au Rhum, je pense.
13:35 Mais derrière, est-ce que je ferai le deuxième tour du monde ? Ce n'est pas vraiment prévu.
13:40 - Retour avec Philippe Elies. - Oui, Charles. On n'a pas trop parlé de la peur. Je crois que tu as failli passer à la flotte un moment.
13:47 Est-ce que tu pourrais revenir là-dessus ? Tu as failli chavirer. Tu dis que le bateau est monté à 40 degrés et tu n'as pas travaillé de remonter du bon côté.
13:53 Combien de fois tu as eu peur et à quel degré as-tu eu peur ?
13:58 Peur ? En fait, ça va tellement vite, tu n'as pas le temps d'avoir peur. C'est plus après.
14:04 Finalement, le plus peur, effectivement, c'est quand j'ai eu un trou dans mon cockpit. Je ne sais pas si vous l'avez vu, mais il manque un bout.
14:12 J'ai une vague à tout arracher. Donc sous ma barre à tribord, j'ai plus qu'une feuille. Alors j'ai remis des bouts après. J'ai fait des transfilages.
14:21 Donc je pouvais marcher. Il ne restait plus qu'une feuille de carbone. Mais j'ai oublié un moment que c'était arrivé.
14:28 Par habitude, je suis marché dessus. Je me suis retrouvé enfoncé. Je me suis rattrapé sur des bouts sur les côtés.
14:35 Et là, tu te dis que ça peut vite basculer. Tu as peur après, mais sur le coup, tu n'as pas peur.
14:40 La peur qui était au fond de moi, qui était un truc latent, c'était la casse, la petite bêtise.
14:48 Et à la fin, c'était marrant parce que quand j'ai relancé, vous avez vu que je n'étais pas très rapide.
14:52 C'est parce que je l'avais laissé passer ce mauvais temps devant moi. Et puis je voulais arriver à deux jours. C'était plus sympa.
14:57 J'avais presque peur d'aller à 35 nœuds. C'était marrant parce que ça faisait plusieurs jours que je n'avais pas fait ça.
15:03 Mais il n'y a pas eu de grosse peur. Et le chat virage, ça a été très rapide. Et je n'ai pas eu le temps d'avoir peur.
15:09 Après, je me suis dit, merde, là j'ai failli faire une grosse connerie. J'ai eu du bol.
15:13 Et ça peut basculer vite. Donc ça a été une belle piqûre de rappel.
15:19 Dans l'ensemble, je suis en confiance sur ce bateau. Et comme j'avais promis à ma fille, je ne prends pas de risque.
15:26 Je n'ai jamais l'impression de prendre des gros risques en naviguant sur ce bateau.
15:30 Parce que je suis dans la maîtrise. Je le maîtrise parfaitement.
15:34 Et il y a tellement de systèmes derrière, de sécurité, qu'on a mis au point, qui sont hyper fiables entre le pilote,
15:39 les systèmes de largage d'écoute, qu'il ne m'a jamais trahi en 6-7 ans.
15:45 Et c'est vrai qu'avant, quand je naviguais en multicoque, j'avais cette peur au ventre.
15:48 Et sur le Maxi-Einmund Rothschild, elle n'a pas disparu. Il ne faut jamais l'oublier.
15:53 Mais elle est quand même très réduite. Et puis on s'habitue en fait. On s'habitue souvent.
15:58 D'ailleurs, on se fait plus peur début de saison, les premières naves. On retrouve les 40 nœuds et on n'est pas à l'aise.
16:04 Et puis on navigue même 24 heures. Ça va vite et on n'est pas à l'aise.
16:09 Et quand on part plusieurs jours, à un moment, tout s'habitue.
16:12 Et le cerveau s'habitue et la peur disparaît.
16:15 Puis j'essaie d'être toujours très pragmatique. C'est ce que je dis toujours aux gens.
16:21 Je me répète un peu, mais je pense qu'un coursier à Paris, il prend plus de risques que moi en naviguant sur ce bateau au quotidien.
16:28 C'est un moyen de me rassurer.
16:30 Question de Martin Lange, Europe 1. Il nous reste 10 minutes.
16:34 Une autre de tes aventures dans ce tour du monde, ça a été juste avant le Cap Horn, quand tu as dû t'arrêter en pleine course.
16:41 Ce qui ne t'était jamais arrivé. Est-ce que tu peux nous raconter un peu ce que tu as vécu à ce moment-là ?
16:45 J'ai bossé. En fait, à un moment, la météo est vraiment pas bonne.
16:53 Je pense que c'était vraiment le truc qu'on a bien fait de ne pas prendre. Il ne fallait pas y aller.
16:59 Donc on décide de s'arrêter. Et puis là, c'était particulier parce que tu es au milieu de nulle part.
17:06 En fait, tu ne te rends pas compte. C'est de l'eau. Mais quand tu regardes sur la carte, tu n'es pas loin du point Némo.
17:11 Et puis je me suis arrêté et j'ai bricolé beaucoup dehors parce que j'en ai profité.
17:14 Du coup, j'ai dit je vérifie tout le bateau et tous les doutes, je change, je répare, je modifie.
17:20 Et c'était assez sympa parce que c'était des belles journées de soleil.
17:25 Il faisait assez beau en moyenne avec des lumières, des contrastes de couleurs.
17:29 Et puis je voyais bien là où elle était monstrueuse. Mais le bateau, on était en arrière. Ça allait tout seul.
17:34 Donc c'était assez majestueux. Et c'était un moment que j'ai bien apprécié. Je ne me suis pas ennuyé.
17:39 J'ai bossé, je pense, 15 heures par jour et je dormis le reste du temps à l'arrêt un peu.
17:45 Et ça m'a permis de repartir aussi en confiance parce que j'ai fait le tour de tout le bateau, de tout.
17:51 Et du coup, après, j'étais beaucoup plus à l'aise.
17:55 - Philippe, il y a une autre... Ah, pardon, Axel, vas-y.
17:58 - Charles, est-ce que tu peux nous décrire ce que tu as ressenti à chaque fois que tu as appris qu'un de tes concurrents allait s'arrêter ?
18:04 - J'ai fait un peu le faux cul. Je dis "Ah, je suis désolé pour toi". Et puis dans le fond, je dis "Ouais, un de moins".
18:13 Quand Tom, il abandonne, je suis triste. Honnêtement, je suis vraiment triste pour lui parce qu'il fait une super course.
18:18 Et puis c'est quelqu'un que j'apprécie et c'est un régal.
18:22 Et puis, on s'est tirés vers le haut mutuellement, ce qui nous a permis de faire le trou avec les autres.
18:28 C'est parce qu'on a été plus rapides qu'eux. On est partis avec la même météo et on a juste été plus vite.
18:33 On a poussé plus fort et la météo nous a souris. Mais ça se passe souvent comme ça sur un tour du monde.
18:37 Ça peut se passer dans l'autre sens, mais on sait très bien que celui qui arrive à se mettre devant une dep,
18:42 après, il est tranquille parce qu'il a un système d'avance.
18:45 Et même si derrière, il peut y avoir des retours, tu as toujours souvent un anticyclone, une dépression entre toi et ton poursuivant.
18:51 Alors la distance diminue, mais entre les deux, il y a toujours un trou devant.
18:55 Donc le gars, il passe jamais.
18:57 Donc voilà. Quand Tom, il abandonne, il s'est un sentiment partagé.
19:03 A la fois, je dis "Merde, je vais m'ennuyer". Et puis en même temps, je me dis "Ça fait du bien parce qu'il me met la pression quand même".
19:11 Et je ne sais pas si on va pouvoir. Et j'avais peur aussi qu'on s'engage dans une course.
19:18 On poussait fort les bateaux avec Tom. On était à 100% de la polaire. On éclatait les routages.
19:24 Et je me disais "Là, c'est les autres qui vont en profiter".
19:29 Parce que on va casser. On va faire des conneries parce qu'on ne prend pas le temps des manœuvres.
19:34 Moi, j'en étais. Je pense que lui, c'est pareil.
19:37 On parlait. Je lui dis "Mais je ne vois pas quand tu changes de voile. Tu es impressionnant".
19:40 Et il me dit "Moi non plus. Je ne vois pas quand tu changes de voile parce qu'on surveille la IES.
19:44 Et je n'arrivais pas à deviner quand il faisait les manœuvres.
19:46 Et je me disais "Mais il manœuvre trop bien ou il va trop vite".
19:49 Et il me disait la même chose. Donc on était vraiment en mode régate.
19:54 Et j'avais peur de ça.
19:56 Donc quand il abandonne, c'est évidemment un sentiment partagé.
19:59 Et en même temps, un soulagement en me disant "Bon, là, j'ai un bonne avance. Maintenant, il faut que je gère le bateau".
20:04 Et puis je me retrouve dans ce contexte qui me plaisait bien d'aventure où il faut gérer.
20:10 Et quand il était là, c'est vrai que je pense qu'on ne gérait peut-être pas assez.
20:13 Je ne sais pas si un de nous deux aurait à un moment dit "Mila, hola".
20:18 Je pense qu'on aurait peut-être été trop loin. C'était le vrai risque de se retrouver à deux comme ça.
20:22 Et puis après, j'ai une bonne avance.
20:25 Mais après, les autres s'arrêtent, ont des problèmes de météo.
20:31 Je voyais bien que Sodebo avait des soucis assez rapidement.
20:34 Et puis après, Armel, lui, doit faire le grand tour.
20:37 Et puis il s'était déjà arrêté une fois.
20:40 Et c'est vrai que c'était un concurrent sérieux.
20:42 Et du coup, ça faisait forcément un concurrent de moins dangereux, en tout cas pour un moment.
20:47 Et puis il y a eu son second arrêt qui m'a un peu soulagé.
20:50 Parce qu'à ce moment-là, j'étais dans le doute avec ma grand voile déchirée, la météo qui était plutôt favorable pour lui.
20:55 Et puis en fait, évidemment, dans ces scénarios-là, moi, je vois toujours le pire.
20:59 Mon météo était pas bonne et la sienne était excellente.
21:02 Sauf que pour tenir sa météo, il fallait qu'il aille très très vite.
21:05 Et en fait, il arrivait pas à tenir les moyennes des routages pour revenir sur moi.
21:09 Donc assez vite, j'ai été rassuré.
21:11 Et puis quand il a effectivement dû s'arrêter en plus, ça nous laissait un bon break.
21:17 Il y a quelque part, il y a quand même toujours un soulagement, même si on est toujours triste de voir ses potes.
21:23 C'est quelqu'un que j'apprécie beaucoup.
21:26 Et donc pour moi, c'était comme c'est dur et je me mets à leur place.
21:30 Et quand j'ai moi, j'ai dû envisager même une escale pour ma grand voile.
21:34 J'étais vraiment. C'était dur moralement.
21:37 C'était peut être le coup le plus dur. On sait ce qu'il vit.
21:42 Comme disait Thomas au départ, je crois, on sait que je sais que tu sais que je sais ou comme ça.
21:48 Enfin voilà, on sait ce qu'on vit et on peut pas vraiment l'exprimer très bien.
21:53 Et il y a quand même des moments difficiles de question dans une de leurs.
21:58 Est ce que par rapport à ton précédent tour du monde, tu as vu une différence dans la météo, justement le climat et dans la façon dont vous avez pu.
22:07 Quand on a pu être édouter, je sais que tu as été un peu étonné du climat assez chaud au Cap Horn.
22:14 Ce qui est étonnant, c'est que le jour où j'ai eu le plus froid, c'était ce matin.
22:17 Finalement, le froid au moins, j'ai pas eu froid au moins du tour du monde.
22:20 Je suis un moment. J'étais inquiet parce que les portes étaient très sud et j'ai longé les 57 ou 56 pendant longtemps, mais j'ai jamais eu froid.
22:27 J'avais du vent plutôt de nord, donc du vent chaud pour là bas.
22:31 Mais quand même, j'ai été bluffé par les températures.
22:36 Et puis, par contre, je pense que c'est une année El Nino.
22:39 Donc El Nino, c'est ce courant qui dérègle un peu tout.
22:43 Et je crois que les modèles étaient totalement perdus parce qu'on en parlait. J'en ai même parlé avec les avec Marcel Ventriès, que je connais bien.
22:50 Et on a échangé un peu. Il m'a quand il m'a félicité qui routait Banque Populaire.
22:56 Et c'est vrai qu'il y avait des anomalies.
23:00 Donc c'est peut être parce que c'est l'année El Nino, mais la météo qu'on a tous su, c'est des scénarios qu'on voit jamais.
23:06 C'est par la Nouvelle-Zélande de s'arrêter derrière.
23:11 C'était vraiment. On a eu des scénarios catastrophiques.
23:16 Je ne suis pas sûr de dire que c'est le réchauffement climatique. J'en sais rien.
23:19 Mais ce qui est sûr, c'est que les modèles sont perdus et les modèles étaient quand même assez performants il y a quelque temps.
23:24 Et je trouve qu'ils sont moins bons qu'avant. Et c'est sans doute parce qu'il y a des dérèglements.
23:28 Quelque part, des choses qu'on ne maîtrise pas. Un modèle, ça se nourrit tous les jours.
23:32 Ça progresse régulièrement. Et là, on voit bien que je trouve qu'en tout cas, depuis 2, 3 ans, la fiabilité des modèles est moins bonne qu'elle ne l'a été par le passé.
23:42 Dernière question. Philippe Elies. Dernière dernière. Parce que derrière, on va faire couler des empreintes.
23:49 Et comme on met de la résine, il ne faut pas être trop long.
23:53 Charles, de quoi tu as envie maintenant de partir en vacances et couper ? Plus voir de bateau, plus voir de voile, de choses comme ça.
24:02 Oui, j'ai envie de couper. C'est sûr. J'ai envie d'aller en vacances. C'est prévu d'ailleurs.
24:08 J'avais prévu ça à partir de samedi pour tomber sur les dernières semaines des vacances scolaires des enfants.
24:14 Ça a un peu foiré parce que j'ai quelques obligations. On part un peu plus tard que prévu, mais on va réussir à faire cette semaine.
24:24 C'est quand même sur l'eau. Le but, c'est d'aller dans l'eau avec des voiles, avec des surfs, avec tout ce qui marche.
24:31 C'est la mer à un moment que quand je suis loin. Et puis, j'ai envie de voir. J'ai quand même envie et hâte de voir aussi le petit frère ou la petite sœur.
24:45 Parce que de Général Gitana 17, parce que ça a bien avancé. Et ça, c'est un beau projet.
24:52 Mais c'est bien d'avoir des projets derrière pour se remotiver. Dans deux semaines, je serai revenu en France et à l'école, on va reprendre.
25:00 Donc on va reprendre une routine et ça, ça va être sympa. Et j'y vais retourner voir ce que va devenir.
25:07 J'ai quand même envie de tout ce qu'on a fait là et tout ce qu'on a appris là, tous collectivement d'ailleurs,
25:16 parce qu'il y a plein de choses qui se sont passées à bord qu'on n'aurait jamais imaginé.
25:20 On a envie que ça se concrétise dans le prochain bateau. Ça nous donne plein d'idées pour le nouveau bateau, même dans la façon de naviguer.
25:27 Et j'ai hâte de partager ça avec tout le monde.
25:31 - Tu as remporté la solitaire du Figaro. Beaucoup de marins qui font la solitaire disent qu'il nous faut pratiquement un mois pour récupérer une solitaire du Figaro.
25:39 Toi, tu estimes à combien de temps le temps de récupération pour un tour du monde ?
25:43 - Je ne sais pas. C'est difficile à dire. Je n'ai pas toujours l'impression d'avoir du mal à récupérer des courses.
25:49 Et puis en même temps, cet hiver, au départ de la Jacques Vabre, toute cette période-là, j'étais crevé.
25:55 Je pense que c'était les conséquences de mon rhum, de plein de choses.
25:59 Je n'en sais rien. C'est difficile à dire. On a des hauts, des bas.
26:03 Moi, là, j'ai plutôt de l'énergie. J'en ai plein parce qu'il y a plein de choses que j'ai envie de faire.
26:09 Mais il y aura forcément de la fatigue. J'ai fait un contrôle tout à l'heure. J'ai pris ma tension.
26:15 Elle est plus basse que d'habitude. Mon corps, il a quand même vécu quelque chose.
26:21 - Tout va bien, quoi ? - On ne va pas se plaindre.
26:25 - Tant mieux. - On est parti il y a deux mois. On est revenu. Tout va bien.
26:30 - Super. Merci beaucoup, Charles Gaudrier. Tu restes avec nous parce qu'il y a une prise d'empreintes.
26:34 On a un quai. Comment s'appelle le quai ? Le Quai Tabarly, peut-être ?
26:38 - Non, non. Ça sera sur la digue La Pérouse. - La digue La Pérouse. C'est là qu'il y a plein d'empreintes, je crois.
26:43 - Non. Il faut venir à Brest plus souvent. - Je viens de temps en temps. Et on ne m'invite pas sur ce quai-là. C'est pour ça ?
26:48 - Non, non. Les empreintes actuelles sont sur le Quai Tabarly. Mais pour la course autour du monde, on les mettra sur la digue La Pérouse.
26:56 - Donc, ce sont les premières empreintes, alors. - Tout à fait. - Parfait.
26:59 - J'ai écouté. La résine est écoulée. Elle est en train de prendre. Et on va prendre des empreintes.
27:05 - La dernière fois que j'ai fait ça, ça s'est mal passé. - Ah non. Il ne faut pas dire ça.
27:08 - C'était pour la route du Rhum. - On va applaudir Charles Gaudrier encore une fois.
27:13 Merci beaucoup, Charles. Merci infiniment. On va faire la prise d'empreintes ici, je pense. Voilà. Parfait. Merci beaucoup.