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Transcription
00:00 Jean-E.Faiz, bonjour, faites-nous signe peut-être pour un test, vous êtes notre invité du jour.
00:03 Bonjour, vous m'attendez ?
00:06 Nous vous entendons très bien, vous êtes conseillère en plaidoyer pour l'ONG IPA.
00:09 On vient de le voir à l'instant,
00:12 nos voisins italiens, c'est juste à côté de nous, la France ne vive pas tout à fait la même séquence que nous.
00:18 À quel point ce moment qu'on va vous faire vivre en direct aujourd'hui,
00:22 ce congrès réuni à Versailles, est un temps fort historique ?
00:29 Tout à fait, je pense que nous sommes face à une décision historique qui est importante
00:34 parce qu'elle répond d'abord à une demande sociétale et à un souhait des Français et des Françaises
00:39 qui se sont exprimés en faveur à plus de 80%.
00:43 C'est aussi largement le fruit de mobilisations sans relâche du mouvement féministe,
00:48 du planning familial, de parlementaires engagés,
00:52 qui viennent donc consacrer le droit à l'avortement dans l'arsenal juridique le plus important de notre pays.
00:57 Donc ça garantit non seulement le droit des personnes aujourd'hui,
01:01 mais aussi celui des générations futures.
01:05 On le voit bien à une échelle internationale,
01:07 il existe des mouvements sociaux pluriels, larges,
01:11 tels que la marée verte en Amérique latine,
01:13 la grève des femmes en Pologne qui réclament sans arrêt l'accès à ce soin de santé essentiel,
01:20 avec un droit qui est constamment menacé,
01:23 l'éducation complète à la sexualité, le droit des personnes LGBT,
01:27 donc même lorsque ce droit existe, il est constamment attaqué, voire même réduit.
01:32 Je sais que certains critiquent,
01:34 on peut dire que cette constitutionnalisation était d'ordre cosmétique ou était purement formelle,
01:40 alors qu'elle aura un effet législatif concret
01:44 et vient tout à fait renforcer le cadre juridique actuel.
01:47 C'est d'ailleurs exactement ce qu'il ne s'est pas passé aux États-Unis.
01:52 Larry Rovey Wayne n'ayant pas été codifié dans la loi,
01:55 la Cour suprême a pu y mettre un arrêt avec l'effet absolument catastrophique
02:00 que l'on connaît aujourd'hui sur l'accès à l'avortement aux États-Unis,
02:04 avec presque 21 États qui ont totalement interdit ou presque interdit l'accès à l'avortement,
02:10 et plus d'une femme sur trois en âge de procréé
02:13 qui se retrouve dans l'incapacité d'accéder à des services.
02:16 Donc je veux juste terminer pour citer ici la sénatrice Vogel,
02:23 c'est très important.
02:24 La France montre que les droits des femmes et les droits de la santé sexuelle et reproductive
02:29 ne sont pas des sous-droits, mais bien des droits humains fondamentaux,
02:34 vraiment à l'égalité et à l'autonomie corporelle.
02:38 On restera bien sûr très vigilante quant à l'applicabilité de ce droit dans les mois qui viennent.
02:44 On entend effectivement dans votre voix votre excitation et aussi peut-être votre impatience,
02:49 alors que ce moment se profile.
02:52 Pour autant, vous venez de citer les exemples américains,
02:55 on vient de voir aussi les difficultés de plus en plus rencontrées par les femmes en Italie.
02:59 Est-on sûr pour autant que ce texte qu'on aura donc à la fin de cette journée
03:03 constituera vraiment une garantie ?
03:05 Est-ce qu'il n'y a pas un risque si une majorité plus conservatrice arrivait un jour au pouvoir ?
03:10 Quelles imposent des conditions plus restrictives à l'IVG ?
03:14 Bien sûr, de toute façon, on n'est jamais à l'abri d'un risque.
03:18 Il faudra un nouveau congrès, bien sûr, et le convenir en France.
03:26 Un énorme pouvoir est donné au Conseil constitutionnel et aux législateurs.
03:32 On le voit très bien de toute façon.
03:33 Ce qui est important, je pense, c'est de se concentrer sur le mouvement anti-avortement,
03:38 le mouvement anti-LGBT qui, effectivement, comme vous le dites,
03:41 est financé, structuré, de plus en plus institutionnalisé.
03:45 On le voit bien de toute façon depuis ces 20 dernières années.
03:49 On estime que les attaques qui sont faites sur le droit des femmes
03:52 dans les espaces nationaux, régionaux, multinationaux, sont sans précédent.
03:57 On l'a très bien vu en France aussi récemment,
04:00 notamment avec la mobilisation contre la constitutionnalisation.
04:05 Avec un discours tout à fait impré des États-Unis sur des concepts
04:09 comme celui de l'enfant à naître,
04:12 avec des lignes téléphoniques qui sont faites pour dissuader les femmes d'avorter.
04:19 Tout un arsenal, finalement, de stratégies employées par le mouvement anti-choix
04:25 pour stigmatiser non seulement les femmes qui cherchent à avorter,
04:29 mais aussi ceux qui offrent des services.
04:31 Donc, la menace, elle est là, elle est constante.
04:35 C'est pour ça qu'on reste vigilant.
04:36 C'est pour ça que cette victoire est historique, elle est protectrice.
04:39 Et elle montre aussi que l'on peut renverser la tendance contre le mouvement anti-choix.
04:45 C'est une mesure qui est soutenue par les Français.
04:48 Vous nous communiquez à l'instant des chiffres.
04:51 On a un autre sondage qui est paru ce week-end, c'est le sondage YouGov,
04:54 qui indique que 66% des Français sont favorables à l'inscription de l'IVG dans la constitution.
05:01 Un soutien particulièrement fort chez les femmes et chez les jeunes.
05:05 Ça, vous le constatez vous aussi sur le terrain ?
05:09 Absolument.
05:10 Je pense vraiment qu'on ne peut pas sous-estimer la dimension politique,
05:16 symbolique, forte de ce qui vient de se passer.
05:19 Enfin, je veux dire, l'avortement, les gens le savent peu,
05:23 c'est quand même la deuxième cause de mortalité maternelle à travers le monde.
05:26 On parle de plus de 39 500 décès sur 45% des IVG qui sont pratiqués.
05:34 Sur l'ensemble des IVG pratiqués, 45% sont faits de façon clandestine.
05:38 Et sur ces 45%, c'est 17% de pays en voie de développement.
05:43 Donc ici, on voit bien que la cause de mortalité,
05:46 elle s'adresse notamment à des adolescentes et à des femmes qui viennent des pays les plus pauvres.
05:51 Donc c'est une crise de santé publique qui est tout à fait évitable et un problème d'injustice sociale.
05:59 Donc la mobilisation qui a eu lieu en France, cette collaboration, cette force collective,
06:05 notamment grâce au travail du planning familial,
06:07 je pense sera une source d'inspiration vraiment pour des féministes à travers le monde,
06:12 comme l'a pu être l'Argentine ou l'Irlande,
06:15 et qu'elles pourront s'en saisir pour faire pression sur leur gouvernement.
06:19 Je suis actuellement à un atelier avec des féministes au Bénin qui viennent de partout d'Afrique.
06:24 L'enjeu, bien sûr, il est dans la redevabilité du droit auprès de nos instances gouvernementales,
06:32 mais aussi dans l'applicabilité et dans l'effectivité de ces droits.
06:40 Du vote de la loi Veil, on en parle beaucoup en ce moment, le 17 janvier 1975,
06:45 aujourd'hui il s'en est passé des choses.
06:47 Depuis presque 50 ans, les droits des femmes ont évolué, vous le disiez à l'instant,
06:52 à la façon des montagnes rues.
06:54 Ça veut dire quoi ? Que finalement rien n'est et ne sera jamais acquis.
06:59 Pour autant, le cas français peut avoir une résonance chez nos voisins italiens, américains aussi, non ?
07:06 Absolument, et on le voit dans notre travail tous les jours.
07:11 On est dans des solidarités féministes transnationales,
07:15 on apprend les unes des autres sur nos stratégies, de la Tunisie à la Colombie.
07:20 Ce qui vient de se passer en France, je pense, c'est vraiment une onde de choc,
07:26 et aura un effet tout à fait galvanisant pour le secteur médical,
07:34 le secteur de défense des droits humains.
07:36 Je pense qu'on n'est pas à l'abri également d'une nouvelle administration Trump en 2025,
07:42 qui causera encore une fois une fracture dans l'aide au développement international,
07:47 qui viendra stigmatiser encore une fois de plus l'avortement à une échelle internationale,
07:53 qui viendra renforcer aussi le mouvement anti-droit,
07:59 d'un leadership fort de la part de la France,
08:03 aussi pour sauver des instances multilatérales,
08:05 telles que l'Organisation mondiale de la santé, qui perdront énormément de financements,
08:10 et de créer ce bloc fort progressiste en faveur des DSSR,
08:16 et de prononcer justement le mot "avortement est droit" haut et fort dans ces instances.
08:22 Vous parlez beaucoup de ce mouvement anti-avortement aujourd'hui.
08:26 Il se trouve qu'il y a une manifestation qui est convoquée à 15h à Versailles,
08:31 juste devant le congrès de Versailles, pour tous les opposants à l'IVG.
08:37 C'est une autre partie des Français, alors plus minimes,
08:41 mais qui va essayer de s'exprimer aujourd'hui.
08:43 Oui, alors effectivement, je pense qu'en France, elle est minoritaire, bien sûr,
08:50 mais elle est déjà connectée avec d'autres mouvements qui sont très engagés
08:55 sur ce qu'on appelle l'idéologie de genre, qui n'est ni un terme académique rigoureux,
09:02 mais en gros qui vient peindre l'avortement, le droit des femmes,
09:06 le droit des communautés LGBT, comme une menace à l'État souverain,
09:11 à l'ordre naturel, à la famille.
09:15 On retrouve bien sûr ces groupes en France, comme l'a dit Laurence Rossignol,
09:20 il n'y a pas d'exceptionnalité en France à l'extrême droite.
09:25 Ces mouvements sont souvent liés à ces réseaux transnationaux dont je parlais avant.
09:33 On les a vus à travers différentes attaques qui ont été faites contre des centres du planning familial,
09:38 avec l'attaque des autocollants contre les BIB à Paris,
09:44 aussi à la manifestation contre l'avortement qui a eu lieu en Jean-Marie.
09:51 Donc ils sont là et parfois ils peuvent créer des alliances
09:56 ou avoir des résonances politiques plus fortes.
09:59 Par exemple, on a vu une grande fédération de ce mouvement conservateur,
10:04 pendant l'époque de la manif pour tous en France.
10:09 Mais il reste aussi très engagé sur des questions d'éducation complète à la sexualité.
10:14 On voit des associations de parents vigilants, très militants,
10:22 contre les droits LGBT, contre l'éducation complète à la sexualité,
10:26 qui utilisent ces débats pour avancer un agenda politique plus réactionnaire.
10:35 Je pense qu'on les retrouvera ces débats dans la scène des élections européennes en juin
10:44 et plus tard dans les élections présidentielles françaises.
10:47 Donc il y a un grand enjeu à décrypter ce discours.
10:51 Je vous laisse terminer, mais peut-être en un mot pour conclure.
10:56 Cette séquence qui débutera à 15h30 heure de Paris,
10:59 les parlementaires sont appelés à s'installer dans l'hémicycle.
11:02 À ce moment-là, il y a le Premier ministre qui va prendre la parole,
11:04 Gabriel Attal, Emmanuel Macron ne pouvant pas s'adresser aux parlementaires.
11:08 Vous allez suivre ce rendez-vous, j'imagine, peut-être en direct sur France 24 ?
11:13 Oui, tout à fait. Je serai avec d'autres féministes ici.
11:18 On est beaucoup à voir notre faux larver, dont la patience bien sûr de voir ce vote enfin avoir lieu.
11:26 Et on entend ça, ta patience. Merci beaucoup.
11:28 Nous avons accordé ces quelques minutes.

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