"Super Tuesday" : Biden/Trump, primaires sans suspense

  • il y a 6 mois

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Transcript
00:00 Dans l'histoire américaine, le Super Tuesday est le grand rendez-vous électoral des primaires.
00:05 Cette année, aucun suspense, Donald Trump sortira vainqueur du rendez-vous, idem pour Joe Biden.
00:10 D'ailleurs, le vote a commencé, il se poursuivra toute la journée, du Maine à la Californie,
00:14 du Texas à la Virginie, de l'Alaska à l'Alabama.
00:17 Des millions d'électeurs sont attendus.
00:19 Bilal Tarabi.
00:20 Le Super Tuesday, ou Super Mardi en français, un mardi très grand format.
00:28 Des dizaines de millions d'Américains votent pour les primaires démocrates et républicaines.
00:34 Cette année, dans une quinzaine d'États à travers le pays.
00:37 Minnesota et Iowa au nord, Alabama, Tennessee au sud, le Vermont, l'Utah,
00:43 et les deux poids lourds, le Texas et la Californie,
00:46 pour désigner leur candidat préféré dans chacun des deux partis
00:50 qui s'affronteront le 5 novembre pour la Maison Blanche.
00:55 Le premier Super Tuesday date de 1988.
00:58 A l'époque, les États du sud, conservateurs, ont souhaité organiser leur primaire le même jour
01:04 pour se donner plus de poids dans l'élection.
01:07 Car ignorer un État est possible, mais en ignorer 5, 10 ou 15 qui votent le même jour
01:13 est extrêmement périlleux dans la course au nombre de délégués et donc à l'investiture.
01:18 Cette année, 35% des délégués républicains et 36% des délégués démocrates
01:24 sont en jeu ce 5 mars.
01:27 Le Super Tuesday permet donc pour un candidat de creuser l'écart ou bien de rattraper son retard.
01:33 Ce fut le cas de Bill Clinton en 1992 qui fit entrer le Super Tuesday dans la légende
01:39 après une remontada spectaculaire lors de ce scrutin avant de remporter la présidentielle.
01:46 Notre invité Pierre Gervais, bonjour, professeur de civilisation américaine à l'université Sorbonne-Nouvelle.
01:54 Êtons à la veille du sacre de Donald Trump ?
01:56 Est-ce qu'à l'issue de ce Super Tuesday, Nikki Haley peut encore résister ?
02:02 Bonjour, oui, on est au lendemain du sacre de Donald Trump.
02:06 C'est un sacre qui date de déjà quelques mois.
02:10 Nikki Haley n'a jamais eu la moindre chance contre lui.
02:12 Elle représente environ un tiers du parti.
02:14 Tout ce qu'elle peut espérer, c'est que Donald Trump ait un accident cardiaque
02:18 ou quelque chose de ce genre et à ce moment-là, elle sera extrêmement bien placée.
02:22 Mais elle continue quand même à résister. Pour quelle raison à votre avis ?
02:26 Parce que si effectivement, pour une raison quelconque, Donald Trump exclut de la course
02:31 ou disparaît de la course, il faut qu'elle reste dans cette course pour pouvoir profiter
02:36 des délégués qu'elle aura engrangés et être en position idéale pour ramasser l'investiture.
02:42 Et un ticket avec Trump, c'est envisageable ou pas ?
02:46 Non, Trump était extrêmement rancunier. Trump est quelqu'un qui n'apprécie que les gens
02:52 qui lui ont démontré une loyauté totale. Et donc, plusieurs personnes pour l'instant,
02:59 comme Ronald McDonald, l'ancienne responsable du comité électoral des Républicains,
03:06 sont en course pour le poste de vice-président, mais certainement pas Nikki Haley.
03:12 Bon, il n'y a pas d'enjeu non plus côté démocrate, puisque pour Biden, ce Super Tuesday,
03:16 c'est une formalité.
03:18 Alors oui, Biden avait encore moins de concurrents dans le parti démocrate.
03:24 Les concurrents Dean Phillips et Marianne Williamson n'ont jamais réuni plus de quelques pourcents
03:29 de l'électorat et encore. En revanche, il y a un enjeu pour Biden, c'est la mobilisation
03:33 de la base démocrate, qui, dont une partie, est tout à fait furieuse de l'attitude américaine
03:40 par rapport au comportement israélien à Gaza.
03:43 En tout cas, les démocrates restent unis derrière Biden. Il y a la guerre à Gaza, vous le rappeliez.
03:50 Il y a aussi ces doutes sur ses capacités cognitives.
03:53 Alors, vous n'êtes pas totalement d'accord avec moi. Je vous vois hésiter.
04:00 Non, non, non. Oui, il y a une donnée tout à fait précise qui montre que c'est un petit peu
04:07 plus compliqué que cela. Il y a une semaine, le Michigan a voté pour les primaires et la gauche
04:14 du parti démocrate avait organisé une campagne de "uncommitted", c'est-à-dire que les gens,
04:18 au lieu de voter Biden, cochaient la case sans partis ou sans partisans.
04:23 Et vous avez eu plus de 100 000 voix "uncommitted", qui représentaient donc la partie de la base
04:29 qui était prête à manifester publiquement au moment des primaires son opposition à Biden.
04:34 C'était un nombre important. Pour le mettre en perspective, Trump avait gagné le Michigan
04:38 à 10 000 voix près en 2016 et Biden l'avait gagné à 140 000 voix.
04:43 Donc, 100 000 voix qui disent qu'elles ne sont pas contentes, c'est quelque chose qui est risqué
04:48 pour les démocrates et ça explique évidemment l'intervention de Kamala Harris dans le débat avec Israël.
04:53 Oui, ça pourrait expliquer l'inflexion américaine en quelque sorte sur Gaza.
04:58 Vous parliez de Kamala Harris, la vice-présidente, qui appelle pour la première fois à cesser le feu immédiat.
05:04 Et puis, les Américains font savoir qu'ils larguent de manière continue maintenant de l'aide humanitaire sur l'enclave.
05:11 Oui, alors évidemment, c'est insuffisant pour calmer la colère des Arabes américains,
05:16 de cette partie de la communauté juive américaine qui estime qu'effectivement Israël commet des crimes de guerre
05:21 et donc les Américains doivent s'y opposer, et d'une bonne partie de la gauche du parti démocrate.
05:27 Mais c'est un début, c'est un changement assez considérable.
05:30 Et Kamala Harris était certainement au service commandé quand, dès la semaine dernière,
05:34 elle a fait sa communication au moment de la cérémonie sur le pont de Serma,
05:38 appelant à cesser le feu immédiat, et hier ou aujourd'hui, en rencontrant Benny Gantz, qui est un opposant à Netanyahou.
05:47 Je parlais aussi des capacités cognitives et de l'âge de Joe Biden.
05:51 Il y a certains spécialistes qui estiment qu'il ne pourra pas aller jusqu'au bout,
05:55 qu'il y aura un coup de théâtre, il mise sur un remplacement de dernière minute.
05:59 Est-ce que vous partagez ce sentiment ?
06:01 Alors un remplacement de dernière minute, non.
06:03 Il ira jusqu'aux élections, il est suffisamment en bon état pour tenir au moins jusqu'aux élections,
06:09 et probablement quelques années après.
06:11 Je rappelle que Reagan a fait l'essentiel de son deuxième mandat avec un Alzheimer déjà bien avancé,
06:16 et évidemment Donald Trump est lui-même en très mauvais état, à la fois physique et mental.
06:22 Donc Biden est en bonne compagnie. Ce qui est vrai, c'est qu'il n'est pas du tout sûr d'arriver à la fin de son mandat,
06:27 et le fait que Kamala Harris soit en position de lui succéder, évidemment, ne plaît pas à tout le monde.
06:32 C'est une femme africaine-américaine, enfin, africaine-américaine, ses parents sont d'origine immigrée,
06:37 tamil et jamaïcaine, mais enfin, elle est quand même une femme racialisée, comme on dit,
06:42 et donc il est évident que ça renforce l'opposition de certains cercles à la candidature Biden.
06:48 L'état cognitif de Biden est difficile à estimer, il n'est pas en excellent état, il a 84 ans,
06:54 autant qu'il m'en souvienne, mais il est relativement cohérent quand il parle,
06:59 quand il discute avec les journalistes, plutôt plus que Trump dans l'ensemble, Trump étant très bas.
07:08 Il aura 84 ans s'il remporte, en tout cas à la fin de son deuxième mandat potentiel, il a juste 81 ans.
07:16 Un mot peut-être de Donald Trump, puisqu'il est cerné par les affaires judiciaires,
07:22 son premier procès au pénal commence dans 20 jours, il fait valoir son immunité présidentielle,
07:29 ça reste encore à prouver, et ça c'est la Cour suprême qui va devoir trancher sur cette question ?
07:33 Alors en fait, elle a déjà tranché, elle a tranché hier en réalité,
07:37 et elle a tranché sur le plan de la possibilité pour Trump d'être jugé non apte à candidater aux présidentielles.
07:49 Cette partie-là de ce qui était possible pour condamner Trump a disparu depuis hier,
07:54 il peut candidater à la présidentielle, même si une loi qui remonte à la guerre de sécession
07:59 interdisait en principe aux gens qui sont soulevés contre le gouvernement américain
08:03 de candidater à des charges publiques.
08:06 La deuxième partie, effectivement, c'est celle dont vous parlez, c'est l'insurrection.
08:09 Il y a une demande de jugement de la Cour suprême sur ce plan,
08:13 qui a été prise par la Cour suprême en contradiction avec les règles habituelles
08:17 du déroulement des tribunaux américains,
08:21 donc il s'agit probablement pour la Cour suprême de jouer la montre.
08:24 Elle a donné d'ailleurs deux mois aux différentes parties pour présenter les arguments,
08:29 alors que par exemple, par comparaison, Bush vs. Gore avait été décidé en trois jours.
08:33 Donc c'est véritablement quelque chose pour renvoyer le procès de l'insurrection
08:38 et forcer le juge Shotgun à en fait différer le procès jusqu'après les élections.
08:43 La Cour suprême est bien tenue par une minorité tout à fait radicale d'extrême droite
08:48 nommée par les républicains et qui a tout à fait l'intention d'utiliser tous les moyens
08:52 pour protéger autant que possible légalement Donald Trump au moins jusqu'à l'élection.
08:56 Et ça, ça fait les affaires de Donald Trump.
08:58 Pour lui, retarder le processus judiciaire après la présidentielle, c'est tout bénef.
09:02 C'est ce qu'il a toujours fait.
09:04 L'objectif serait d'arriver après la présidentielle élue,
09:07 ce qui lui permettrait de mettre fin immédiatement à toutes les procédures fédérales contre lui.
09:11 Il y a des procédures d'État qui resteront en cours.
09:14 Il doit toujours 450 millions.
09:16 Il a toujours une procédure en Géorgie pour tentative de subversion du vote.
09:21 Mais évidemment, avec une procédure d'État contre un président en exercice,
09:25 ce serait beaucoup plus compliqué.
09:27 Donc ce serait une manière de s'autogracier en quelque sorte.
09:30 Tout à fait. Il s'autogracierait dans les premières secondes de son mandat probablement.
09:35 Une dernière question. On est à huit mois de la présidentielle.
09:38 On a ces sondages nationaux qui sont plutôt favorables à Donald Trump.
09:42 Est-ce que ça vaut quelque chose ?
09:44 Ou est-ce que les électeurs américains sont déjà dans le bain de la campagne ?
09:47 Alors c'est très compliqué. Vous avez deux indicateurs pour ce genre de choses.
09:51 Alors les sondages, d'abord, il ne faut jamais les prendre en isolation.
09:54 Il s'agit de sondages globaux.
09:56 Biden a perdu un petit peu de terrain récemment.
09:58 Mais les élections partielles pendant toute l'année 2023 et même une partie du début de 2024
10:04 sont restées très favorables, voire favorables aux démocrates.
10:08 Donc c'est compliqué à l'heure actuelle de dire qui est vraiment en tête de la course.
10:13 Merci en tout cas Pierre Jarvée de vous avoir parlé.

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