Philippe Duron, ancien député-maire de Caen, estime que le cumul des deux mandats est un bénéfice pour une ville
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00:00 8h15 sur France Bleu France 3, merci d'être avec nous.
00:03 L'heure de notre invité Didi Charpin, ce matin l'ancien député maire socialiste de Caen, Philippe Duron.
00:09 - Bonjour Philippe Duron. - Bonjour.
00:10 - Bonjour à vos auditeurs.
00:12 - Ancien député maire, ça c'est une formule qui a disparu.
00:15 - Oui, bien sûr.
00:16 - Vous l'avez connu, on vous l'a parfois reproché d'être un champion de cumul.
00:20 En quoi un député est un meilleur maire, en quoi un maire est un meilleur député ?
00:23 - Alors je voudrais faire deux petites mises au point.
00:25 La première, j'ai cumulé le mandat de maire et le mandat de député.
00:31 On ne pouvait pas faire plus.
00:32 J'entends dire que j'étais le champion des cumulats, mais non.
00:36 - J'en ai aussi.
00:37 - La loi déjà précisait ça.
00:39 De même que j'ai entendu quelqu'un dire qu'il cherche le cumul des mandats.
00:41 Alors tout à l'heure on n'a pas vu votre visage.
00:43 Ben non, parce que là aussi c'est plafonné depuis au moins une vingtaine d'années.
00:47 Donc ici, si vous avez des fonctions qui sont liées à votre mandat de maire en plus,
00:54 elles sont bénévoles, bien évidemment.
00:56 - Sur les indemnités.
00:57 Sur le fond, puisque c'est l'actualité du jour à travers cette proposition de loi,
01:02 est-ce qu'un député est un meilleur maire et est-ce que l'inverse est vrai ?
01:05 - Écoutez, il a longtemps été un meilleur maire, comme le sénateur également,
01:10 puisque 80% à peu près des députés et des sénateurs étaient maires il y a encore une quinzaine d'années.
01:16 C'était une tradition française de la troisième, de la quatrième république.
01:20 Pourquoi est-ce que c'était très recherché ?
01:23 Deux raisons essentiellement.
01:24 D'abord parce que ça vous donnait accès aux ministres toutes les semaines dans l'hémicycle.
01:28 À la fin des questions d'actualité, dans la salle des quatre colonnes
01:31 ou dans les deux antichambres de l'hémicycle,
01:35 vous rencontriez les ministres ou leurs collaborateurs.
01:38 - Vous étiez le député-maire de Caen qui venait taper sur l'épaule de M. le ministre ?
01:41 - Exactement.
01:42 - Sur quel projet par exemple ?
01:43 - Par exemple sur le projet du CHU.
01:45 La reconstruction du CHU, on l'a obtenue bien évidemment
01:48 en voyant M. Touraine assez fréquemment dans les antichambres
01:53 mais surtout parce qu'étant député-maire,
01:56 on avait aussi accès à Matignon et à l'Elysée.
01:58 Et ça s'est décidé à l'Elysée pour la reconstruction de l'hémicycle.
02:02 Alors qu'il y avait des résistances ailleurs dans l'administration.
02:06 - Donc vous sous-entendez que Joël Bruneau qui lui n'est que maire
02:09 n'aurait eu aucune chance ?
02:10 - Non, je ne sous-entends pas ça.
02:13 Parce qu'aujourd'hui tout le monde est sur un pied d'égalité.
02:17 Il n'y a plus des gens qui sont députés ou sénateurs-maires
02:20 et des gens qui ne le sont pas.
02:22 Donc on retrouve une certaine égalité
02:24 ce qui fait que le problème se pose moins que par le passé.
02:27 Je vous serais une autre exemple.
02:28 Quand j'étais président de région,
02:29 on se battait pour le dossier de la drone-thérapie avec Lyon.
02:32 Lyon a gagné. Pourquoi ?
02:35 Parce que le président de la région, Ronalp à l'époque,
02:38 Jean-Jacques Kyrane, avait été ministre
02:41 et notamment ministre de l'Intérieur.
02:42 Et bien ça a pesé dans le choix de la décision.
02:44 Et pourtant, quand a réussi à faire ce projet ?
02:47 Quand Lyon a abandonné.
02:49 Donc il y avait des choses qui étaient fonctionnelles.
02:51 Et puis il y a une chose qui me semblait très importante.
02:53 Sous la Troisième République, sous la Quatrième
02:55 et même sous la Cinquième,
02:56 ça permettait de faire émerger des leaders locaux
02:59 au niveau national.
03:01 Quand vous regardez la liste des premiers ministres
03:04 ou des présidents du Conseil en France,
03:06 un grand nombre ont été,
03:08 sont émergés du terrain parce qu'ils ont été maires.
03:10 - On partait du terrain, on montait à Paris, on cumulait dans les défunctions.
03:13 - Non, vous sortez de l'ENA et vous entrez au gouvernement
03:16 et puis ensuite vous allez prendre une mairie,
03:19 vous allez prendre un Conseil Général et ainsi de suite.
03:21 Mais regardez Pierre Moroy, regardez René Monnory,
03:25 on se moquait de lui à Paris parce qu'il avait été garagiste,
03:29 mais il a été un excellent ministre des Finances.
03:31 - Méridien Gaumont également.
03:33 - Donc ça permettait d'avoir un meilleur équilibre
03:35 entre Paris et la province, ce qu'on regrette un peu aujourd'hui.
03:38 - Philippe Duron, vous n'êtes plus député.
03:40 Horizons, le parti d'Edouard Philippe, présente aujourd'hui une proposition de loi
03:43 pour assouplir le nombril des mandats.
03:45 Les socialistes disent "on va voter contre".
03:47 Vous, vous voulez quoi ?
03:48 - Je pense qu'aujourd'hui, politiquement, ça a peu de chance d'aboutir
03:52 parce que quand vous dites aux Français
03:55 "le progrès c'est qu'il n'y ait plus de cumul"
03:58 et que dix ans après vous leur dites "on va revenir sur ce principe-là",
04:02 ils ne comprennent pas.
04:03 Je crois que c'était...
04:05 - Alors pourtant vous défendez le cumul, mais vous voteriez quoi ?
04:09 - Il fallait réfléchir avant, je crois que je m'abstiendrai.
04:11 Il fallait réfléchir avant.
04:12 De même qu'on a supprimé la réserve parlementaire.
04:15 Et j'observe aujourd'hui que beaucoup de parlementaires
04:18 aimeraient qu'on la rétablisse.
04:20 La réserve, c'était une façon d'aider un club de football
04:23 pour faire son vestiaire, c'était une façon d'aider une petite commune.
04:27 J'avais des communes dans ma circonscription
04:29 qui avaient, la plus petite, 82 habitants.
04:32 Imaginez le budget de cette commune-là.
04:34 Quand on veut faire restaurer le Lavoir,
04:36 finalement on est très content d'avoir un bout de réserve parlementaire.
04:38 - Après l'opinion publique, vous ne comprenez peut-être pas
04:40 cette réserve parlementaire qu'on distribuait,
04:42 qu'on saupoudrait à volonté.
04:45 - C'était peu de choses,
04:47 mais c'était des choses qui permettaient de faire avancer les dossiers.
04:50 Des dossiers qui autrement n'auraient jamais abouti.
04:53 - Philippe Durand, vous êtes retiré de la politique ?
04:55 - Oui.
04:56 - Définitivement ?
04:57 Ou vous avez parfois des envies de redevenir un militant socialiste ?
05:00 - Des envies non, mais des fois, je crois que
05:02 pour les élections européennes,
05:04 avec quelques amis dans la commune où je vis,
05:08 à Louvigny, où j'ai été le maire très longtemps,
05:11 je crois qu'on essaiera de faire un peu,
05:14 j'allais dire, d'effort de conviction pour...
05:18 - Vous allez distribuer des tracts, faire du porte-à-porte ?
05:20 - J'en ai toujours fait.
05:22 - D'accord.
05:23 - Et je le fais encore.
05:24 - J'en vais très loin.
05:25 - Non, c'est un engagement citoyen.
05:28 - Philippe Durand, ancien député maire socialiste de Caen,
05:32 invité ce matin au France Bleu France 3.
05:34 Bonne journée.
05:35 - Merci à vous, et bonne journée à vous tous.
05:37 - Merci.
05:38 Notre invité à retrouver bien sûr en podcast sur votre application France Bleu.