Grand témoin : Najat Vallaud-Belkacem, directrice générale de « One », Présidente de « France Terre d'asile », ancienne Ministre de l'Éducation nationale et co-autrice de « Le ghetto scolaire » (Seuil)
GRAND DÉBAT / Faut-il augmenter les fonctionnaires ?
« Le récap » par Valérie Brochard
À l'appel de 8 syndicats, les agents de la fonction publique étaient exhortés à manifester le mardi 19 mars 2024. Le résultat était en-deçà des espérances syndicales puisque moins de 10% des agents concernés ont pris part à la grève. Les enseignants de collège se sont cependant plus mobilisés, avec un taux de grévistes avoisinant les 15%, notamment pour affirmer leur désapprobation du « choc des savoirs » et de la mise en place de groupes de niveaux. Plus généralement, les manifestants réclamaient une hausse de salaires et de meilleures conditions de travail dans la fonction publique d'Etat, territoriale et hospitalière. Avec un salaire moyen de 2431 euros net par mois (chiffre INSEE), les fonctionnaires français sont statistiquement moins payés que leurs homologues allemands ou luxembourgeois. Au vu de la pénurie de recrutement, de l'inflation mais aussi de la dette publique grandissante, l'Etat français gagnerait-il à augmenter ses salariés ?
Invités :
- Céline Calvez, députée Renaissance des Hauts-de-Seine,
- Natacha Pommet, secrétaire générale CGT services publics,
- Fabien Di Filippo, député LR de Moselle,
- François Geerolf, économiste à l'OFCE.
GRAND ENTRETIEN / Najat Vallaud-Belkacem : comment éradiquer les ghettos scolaires ?
À l'origine d'une initiative nationale pour la mixité sociale au collège en 2016, alors qu'elle était ministre de l'Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem poursuit ce combat dans « Le ghetto scolaire ». Dans cet ouvrage cosigné par le sociologue François Dubet, elle dresse le constat d'une ségrégation sociale et scolaire mettant en péril l'idéal républicain. Elle montre notamment comment le système scolaire français amplifie des inégalités territoriales déjà significatives. Face à ce fléau, la socialiste propose une « révolution de la mixité » en s'appuyant sur les nombreuses expérimentations déjà menées au niveau local. Ces solutions, qui impliquent notamment la fermeture de certains collèges et une réforme de l'enseignement privé, pourront-elles résoudre une situation si dégradée ?
Grand témoin : Najat Vallaud-Belkacem, directrice générale de « One », Présidente de « France Terre d'asile », ancienne Ministre de l'Éducation nationale et co-autrice de « Le ghetto scolaire » (Seuil)
LES AFFRANCHIS
- Fanny Guinochet, journaliste économique à France Info,
- Richard Werly, correspondant France/Europe pour « Blick »,
- « Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP.
Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, soci
GRAND DÉBAT / Faut-il augmenter les fonctionnaires ?
« Le récap » par Valérie Brochard
À l'appel de 8 syndicats, les agents de la fonction publique étaient exhortés à manifester le mardi 19 mars 2024. Le résultat était en-deçà des espérances syndicales puisque moins de 10% des agents concernés ont pris part à la grève. Les enseignants de collège se sont cependant plus mobilisés, avec un taux de grévistes avoisinant les 15%, notamment pour affirmer leur désapprobation du « choc des savoirs » et de la mise en place de groupes de niveaux. Plus généralement, les manifestants réclamaient une hausse de salaires et de meilleures conditions de travail dans la fonction publique d'Etat, territoriale et hospitalière. Avec un salaire moyen de 2431 euros net par mois (chiffre INSEE), les fonctionnaires français sont statistiquement moins payés que leurs homologues allemands ou luxembourgeois. Au vu de la pénurie de recrutement, de l'inflation mais aussi de la dette publique grandissante, l'Etat français gagnerait-il à augmenter ses salariés ?
Invités :
- Céline Calvez, députée Renaissance des Hauts-de-Seine,
- Natacha Pommet, secrétaire générale CGT services publics,
- Fabien Di Filippo, député LR de Moselle,
- François Geerolf, économiste à l'OFCE.
GRAND ENTRETIEN / Najat Vallaud-Belkacem : comment éradiquer les ghettos scolaires ?
À l'origine d'une initiative nationale pour la mixité sociale au collège en 2016, alors qu'elle était ministre de l'Éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem poursuit ce combat dans « Le ghetto scolaire ». Dans cet ouvrage cosigné par le sociologue François Dubet, elle dresse le constat d'une ségrégation sociale et scolaire mettant en péril l'idéal républicain. Elle montre notamment comment le système scolaire français amplifie des inégalités territoriales déjà significatives. Face à ce fléau, la socialiste propose une « révolution de la mixité » en s'appuyant sur les nombreuses expérimentations déjà menées au niveau local. Ces solutions, qui impliquent notamment la fermeture de certains collèges et une réforme de l'enseignement privé, pourront-elles résoudre une situation si dégradée ?
Grand témoin : Najat Vallaud-Belkacem, directrice générale de « One », Présidente de « France Terre d'asile », ancienne Ministre de l'Éducation nationale et co-autrice de « Le ghetto scolaire » (Seuil)
LES AFFRANCHIS
- Fanny Guinochet, journaliste économique à France Info,
- Richard Werly, correspondant France/Europe pour « Blick »,
- « Bourbon express » : Stéphanie Dépierre, journaliste LCP.
Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, soci
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00:00 [Musique]
00:06 Bonsoir et bienvenue, très heureuse de vous retrouver dans "Ça vous regarde" ce soir,
00:10 plaidoyer pour la mixité scolaire.
00:13 Bonsoir Najat Vallaud-Belkafem, merci d'être notre grand témoin ce soir.
00:17 Vous publiez avec le sociologue François Dubé le "Ghetto scolaire" à la République des idéaux.
00:23 Ce ghetto, le mot est très fort.
00:25 Vous décrivez comment l'école de la République est devenue celle du tri entre les élèves,
00:30 fabriquant séparatisme et ségrégation.
00:33 On va y revenir dans le détail.
00:34 Vous nous direz aussi ce que vous pensez des groupes de niveau de Gabriel Attal
00:38 pour réduire les inégalités scolaires.
00:41 Dans notre grand débat ce soir, la grève des fonctionnaires, profs, soignants, agents territoriaux
00:46 à l'appel de 8 syndicats, ils étaient près de 6 millions de fonctionnaires,
00:50 rappelé à se mobiliser aujourd'hui pour de meilleurs salaires, beaucoup moins dans la rue.
00:55 Premier test avant les JO.
00:57 Au-delà des primes, ils réclament un rattrapage des rémunérations sur l'inflation
01:00 et s'inquiètent des économies annoncées.
01:03 Les fiches de paye du public sont-elles condamnées à augmenter moins vite que celles du privé ?
01:09 Nous en débattons dans un instant sur ce plateau.
01:11 Enfin, nos affranchis ce soir, l'économie, Fanny Guinochet, l'Europe, Richard Verli et puis Bourbon Express,
01:17 l'histoire du jour à l'Assemblée de Stéphanie Despierre.
01:19 Voilà pour le sommaire. On y va Najat Baloed Kassem, ça vous regarde, top générique.
01:24 Des crèches, des cantines scolaires, des centres de loisirs fermés un peu partout en France aujourd'hui.
01:42 La fonction publique de l'éducation nationale, mais aussi de l'hôpital, la territoriale,
01:46 réclame un choc des salaires face à l'inflation.
01:49 On va donc faire le point sur cette journée de mobilisation à l'appel de tous les syndicats de fonctionnaires au coeur de la colère.
01:56 Une perspective d'année blanche, c'est-à-dire sans aucune augmentation sur les rémunérations
02:02 et surtout la crainte des coupes budgétaires annoncées dans les services publics.
02:06 Bonsoir Céline Calvez.
02:08 Bienvenue sur ce plateau. Vous êtes députée Renaissance des Hauts-de-Seine,
02:11 vous êtes membre de la Commission éducation à l'Assemblée,
02:13 vous êtes aussi porte-parole du groupe macroniste à l'Assemblée.
02:16 Bonsoir Natacha Pommet.
02:18 Bienvenue, secrétaire fédérale CGT de la fonction publique.
02:22 Bonsoir Fabien Desfilippos.
02:24 Je suis ravie de vous retrouver sur ce plateau.
02:26 Vous êtes députée Les Républicains de Moselle.
02:28 Enfin bonsoir François Girolf.
02:29 Bonsoir.
02:30 Visage familier, économiste à l'OFCE, pour nous éclairer notamment sur nos voisins européens.
02:36 Pourquoi sont-ils payés mieux que nous, mieux que nos fonctionnaires ?
02:39 N'a-t-elle pas besoin de préciser que vous avez forcément un avis sur le sujet ?
02:44 L'ancienne ministre de l'Éducation connaît bien la question de la rémunération des enseignants.
02:49 On va commencer par planter le décor.
02:51 Pourquoi ils grognent, les fonctionnaires ?
02:53 C'est dans le récap de Valérie Brochard, qu'on accueille tout de suite.
02:55 Et bonsoir ma chère...
03:04 Bonsoir Valérie.
03:05 Bonsoir Myriam.
03:06 Alors, pourquoi cette grève aujourd'hui ?
03:08 Eh bien, vous savez quoi, on a posé directement la question aux responsables syndicaux qui étaient présents aujourd'hui dans le cortège parisien. On les écoute.
03:14 Nous demandons à ce qu'immédiatement des négociations s'ouvrent et qu'elles débouchent sur des augmentations collectives de salaires.
03:20 On est là ensemble en intersyndical pour revendiquer des augmentations de salaires.
03:24 Les services publics sont au bord de la rupture. La question des salaires est centrale. On paye mal les agents publics, donc les services publics fonctionnent mal.
03:31 Eh oui Myriam, 6 millions d'agents de la fonction publique étaient appelés aujourd'hui à faire grève pour, vous venez de l'entendre, de meilleurs salaires.
03:38 Selon l'INSEE, un agent de la fonction publique touche en moyenne 2431 euros net par mois.
03:44 Mais attention, c'est évidemment une moyenne, tout statut confondu.
03:47 Or, le salaire des fonctionnaires dépend des catégories A, pour les mieux payés, et puis B et C.
03:53 Et 10% des fonctionnaires, c'est-à-dire 500 000 agentes et agents, touchent moins de 1500 euros net par mois.
04:00 C'est pourquoi les syndicats demandent de nouvelles augmentations générales, après celles de 3,5% en 2022 et celles de 1,5% l'année dernière.
04:10 Alors Bercy précise que ces augmentations générales vont représenter 6 milliards d'euros pour 2024. C'est bien, mais c'est insuffisant face à l'inflation.
04:19 Quoi qu'on nous raconte aujourd'hui, ils ont perdu du pouvoir d'achat ces dernières années, et on ne parle pas de la perte de pouvoir d'achat depuis 20 ans.
04:27 On a une baisse continue du pouvoir d'achat depuis 25 ans. Les mesures des deux dernières années ne suffisent pas à combler ce déficit de pouvoir d'achat, et il est très important.
04:36 La rémunération des salariés du privé a augmenté deux fois plus vite que celle des fonctionnaires, toujours selon l'INSEE.
04:42 Entre 2011 et 2021, le salaire net moyen en équivalent temps plein dans les entreprises privées a progressé de 4,9% contre seulement 2,1% dans le public.
04:54 Et comment ça se passe chez nos voisins européens ? On va prendre l'exemple des profs.
04:59 Il et elle touchent en moyenne 30 935 euros brut par an. C'est moins que l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la Finlande, l'Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède.
05:10 Et c'est pareil pour les infirmiers et les infirmières, qui touchent moins en France que leurs homologues espagnols, allemands ou belges.
05:16 Et si nos fonctionnaires ont décidé de descendre dans la rue aujourd'hui, c'est parce que le ministre de l'Économie annonçait la couleur il y a quelques jours.
05:23 D'après les calculs de Bercy, la croissance ne sera pas aussi bonne que prévue. Alors Bruno Le Maire a trouvé une solution.
05:30 Nous avons donc décidé de réviser la croissance de 1,4 à 1% pour 2024, avec comme objectif de garder la maîtrise de nos finances publiques.
05:41 Et donc, comme nous gagnons moins, il y a moins de croissance, moins de recettes fiscales, il faut dépenser moins. On gagne moins, on dépense moins.
05:49 Très précisément, nous allons, avec le ministre des Comptes publics, réduire de 10 milliards d'euros les dépenses de l'État en 2024.
05:58 Et dans les 10 milliards d'euros, Bruno Le Maire précisera au JDD qu'il compte réduire de 800 millions d'euros le budget de la fonction publique.
06:06 Alors non seulement les syndicats craignent de ne pas être augmentés, mais aussi de voir des départs à la retraite jamais remplacés.
06:13 Bref, vous l'avez compris, le combat commence entre Bercy et la fonction publique. Et sur le tatami, les syndicats disposent d'une prise un peu spéciale, la prise des Jeux olympiques.
06:22 Ils se disent prêts à immobiliser l'adversaire, vous l'avez compris, c'est tout le pays qu'ils comptent immobiliser pendant les JO.
06:29 Sauf que Myriam, les chiffres viennent de tomber, seulement 6% des fonctionnaires étaient en grève aujourd'hui. Une manifestation loin d'être olympique.
06:38 Merci beaucoup, merci Valérie Brochard. Justement, je commence avec vous, Natacha Pommet, mobilisation peu suivie. Malgré chose rare, une unité intersyndicale bien présente.
06:47 Des 8 syndicats qui appelaient les fonctionnaires à faire grève aujourd'hui, à peine 10% dans l'éducation nationale, beaucoup moins à l'hôpital ou dans la territoriale.
06:57 Est-ce que vous êtes déçue par la faiblesse de la mobilisation ce soir ?
07:00 Je ne vais pas discuter des chiffres, c'est toujours une discussion. Moi j'aimerais savoir comment on peut sortir des taux de grévistes alors qu'il n'y a pas de retour partout dans les collectivités notamment ou à l'hôpital.
07:11 Ce n'est pas ma chiffre, vous le reconnaissez, on est loin des fonctionnaires pendant les retraites.
07:16 Bien entendu, mais c'est une première journée. Là où nous nous félicitons, c'est que la fonction publique ne s'était pas mobilisée depuis 2019 face à la loi du SOPT, de transformation de la fonction publique.
07:28 Donc plus de 5 ans après, la fonction publique enfin se mobilise.
07:32 Aujourd'hui on se mobilise pour obtenir quelque chose, pour obtenir une augmentation de salaire.
07:37 Habituellement on se mobilise contre une réforme et c'est toujours plus facile de mobiliser contre que de mobiliser pour.
07:42 Il y a les salaires et il y a les primes parce qu'il y a cette espèce de date, un peu chantage diront certains, des JO.
07:48 Vous avez déjà déposé des préavis pour la période avril-septembre ?
07:52 On a posé beaucoup de questions lors d'une première réunion. On est loin d'avoir obtenu les réponses attendues parce qu'il y a beaucoup d'interrogations.
08:00 On est à trois mois des JO aujourd'hui et on sent une impréparation totale sur les questions qui se posent.
08:07 Je pense notamment à l'hôpital, 800 professionnels vont avoir besoin d'être mobilisés ne serait-ce qu'à la PHP aujourd'hui.
08:15 On ne sait pas où ces agents seront logés, comment ils vont se déplacer.
08:18 Ça fait beaucoup de réponses, beaucoup de questions sans réponses.
08:21 Il y a des primes qui ont été annoncées quand même en fonction de la mobilisation par le ministre.
08:26 Les primes ne font pas tout. Les primes, c'est parce que les agents ne pourront pas partir en vacances.
08:32 Mais il y a des questions sur les gardes d'enfants, sur le logement, sur les transports, sur la possibilité de travailler ou pas dans la zone protégée.
08:39 C'est beaucoup de questions sans réponses et à la place de primes, on veut surtout des réponses.
08:43 Alors justement, et après je fais circuler, mais c'est important de connaître les revendications.
08:47 La CGT parle, tous les autres syndicats parlent parce qu'ils sont tous unis sur le sujet.
08:52 Vous parlez de spirale de paupérisation de l'ensemble des fonctionnaires.
08:56 C'est un mot très fort, paupérisation.
08:58 Vous l'assumez alors qu'on l'a vu avec Valérie Brochard, l'indice a été augmenté deux fois.
09:04 Alors depuis le 1er juillet 2010, la valeur du point d'indice a été gelée jusqu'en 2022.
09:11 En 2022, il a été augmenté de 3,5 % alors que l'inflation était bien supérieure à 5 %.
09:16 Et en 2023, il a été augmenté de 1,5 % alors que l'inflation était bien supérieure.
09:22 Donc en gros, on estime depuis 2010 une perte de pouvoir d'achat de près de 20 %
09:26 et depuis plus de 20 ans supérieure à 25 %.
09:29 Donc une véritable paupérisation.
09:31 Paupérisation, moins 20 % de perte de pouvoir d'achat, c'est énorme.
09:35 Céline Calvez, est-ce que vous les entendez, ces revendications ?
09:37 Est-ce qu'elles sont légitimes déjà ?
09:39 Mais je pense que ces revendications, elles sont toujours légitimes
09:42 parce qu'on sait très bien que la rémunération et les conditions de travail des fonctionnaires
09:47 vont faire la réussite des services publics qui bénéficient à tous.
09:50 Pour autant, je trouve qu'on balaye un peu rapidement justement le dégel du point d'indice.
09:54 Vous l'avez rappelé, en l'espace de moins d'un an, finalement, entre juillet 2022 et juin 2023,
10:00 on a augmenté de plus de 5 % du coup l'ensemble des fonctionnaires.
10:05 Alors c'est un pas qui est décisif, comme le dit souvent Sainé Sass-Guérini
10:09 qui est ministre de la Transformation et de la Fonction publique.
10:12 Eh bien oui, en fait, depuis 37 ans, on n'avait pas fait autant de remontations.
10:16 C'est vrai, mais il y a eu la crise de l'Ukraine et de l'énergie,
10:19 et donc le rattrapage par rapport à la remontation n'y est pas.
10:22 Vous avez raison de le dire, c'est un rattrapage.
10:24 On part d'assez loin, mais pour autant, le curseur qui a été bougé à partir de 2022-2023, il est à saluer.
10:32 Alors on parle aussi de la mobilisation pour les JO.
10:35 La mobilisation, ce n'est pas dans la rue, c'est déjà la mobilisation
10:38 des fonctionnaires qui vont assurer la sécurité, l'accueil, et donc déprime son...
10:43 Gérald Darmanin a donné 1900 euros aux policiers.
10:45 Est-ce qu'il n'a pas donné trop trop tôt ?
10:47 Parce que tous les autres, ils attendent la même chose,
10:49 alors que pour l'instant, c'est une fourchette entre 500 et 1500 pour tous les autres.
10:53 Je ne peux pas donner tort à un ministre qui fait, pour assurer le caractère serein
11:01 de l'ensemble de ces forces qui sont utiles au jour le jour et qui sont utiles là,
11:05 de pouvoir leur dire, les rassurer sur la prime.
11:08 En fait, il avait commencé quelques mois avant en leur disant
11:10 "vous ne pourrez pas prendre vos congés", il était aussi nécessaire
11:12 de pouvoir arriver avec une histoire de prime.
11:14 Après, j'entends, ce n'est pas forcément suffisant,
11:18 mais reconnaissons quand même les efforts qui sont faits,
11:20 reconnaissons aussi que tout n'est pas qu'une question de revalorisation.
11:24 Je voyais par rapport à l'infographie sur la revalorisation du privé et du public.
11:29 On ne peut pas comparer les deux, puisque là où dans le public
11:32 vous allez avoir une offre et une demande et on va avoir des salaires
11:37 qui vont être tirés par certaines catégories ou certains secteurs,
11:40 or pour la fonction publique, l'idée est de le faire à chaque fois de manière...
11:44 Sur le graphique, il ne s'agissait pas de comparer les salaires
11:48 entre le public et le privé, mais la progression de la hausse.
11:51 Ça monte plus vite dans le privé, et ça c'est un fait.
11:54 C'est un fait, donc de comparer, c'est oublier quels sont les paramètres
11:58 pour l'augmentation dans la fonction publique.
12:00 On n'est pas en train de faire justement une distinction,
12:04 c'est que le mouvement est en général le même.
12:07 Donc il est massif, mais on voit...
12:09 -La voix de la majorité présidentielle, c'est de dire "on a fait des efforts".
12:14 Ça veut dire que 2024 sera une année blanche.
12:17 -En fait, une année blanche... -Pour les fonctionnaires.
12:20 -Quand on parle de prime, ce n'est pas complètement une année blanche.
12:23 Je pense que ce serait vraiment ne pas laisser place aussi aux négociations
12:28 qui se font lieu, qui auront lieu aussi prochainement,
12:32 mais il faut rappeler qu'on est dans un contexte où on cherche des économies.
12:36 Donc en fait, de dire aujourd'hui que ce serait...
12:38 Oui, bien sûr, tout va augmenter, ce serait aussi irréaliste et irresponsable.
12:42 C'est pas notre discours. -C'est pas le moment.
12:44 Il faut trouver 10 milliards pour cette année, par décret,
12:48 et puis le double pour l'année prochaine.
12:50 Très clairement, les caisses sont vides,
12:52 et nos finances publiques sont dans le rouge.
12:54 On peut pas imaginer des hausses de salaires
12:56 pour les fonctionnaires en ce moment.
12:58 -Ca donne l'impression qu'on n'a aucun choix politique.
13:01 Je pense que tout est affaire de choix politique.
13:03 On pourrait décider, par exemple, d'augmenter moins fortement
13:06 les retraites, comme on l'a fait au début de l'année.
13:08 Ca pourrait être un paramètre sur lequel le gouvernement joue
13:10 pour faire des économies.
13:12 Le gouvernement pourrait aussi décider, peut-être,
13:14 de réduire le déficit moins rapidement.
13:16 Je pense que c'est des affaires de choix politique,
13:18 beaucoup plus que ce qu'on le dit.
13:20 Après, c'est vrai que quand même, la rémunération des fonctionnaires,
13:23 comme vous l'avez dit, on n'a jamais vu une telle augmentation
13:26 en nominels, c'est-à-dire en euros,
13:28 de 3,5 % puis 1,5 %.
13:30 Mais en réalité, la baisse de pouvoir d'achat
13:33 n'a jamais été aussi rapide,
13:35 parce que l'inflation rogne ces gains de pouvoir d'achat.
13:38 Sur trois ans, on a une inflation de l'ordre de 15 %,
13:41 alors que la hausse de la rémunération des fonctionnaires
13:43 est de 5,1 %.
13:45 Dans le privé, ils ont des hausses de 10 %.
13:47 Donc c'est vrai qu'il y a quand même une baisse
13:49 de pouvoir d'achat des fonctionnaires au global,
13:52 mais c'est un choix politique.
13:54 -Pour bien comprendre, c'est compliqué, les fonctionnaires,
13:56 parce qu'il y a plein de statuts,
13:58 il y a un maquis de situation très différente,
14:00 mais n'empêche que si on prend les profs,
14:02 les enseignants, qu'on commence ou qu'on termine,
14:04 on est mieux payé en Allemagne qu'en France.
14:06 Pourquoi ?
14:08 -Parce que, en fait, depuis 25 ans,
14:10 on a décidé de gagner des marges de manœuvre budgétaire,
14:13 en grande partie sur la fonction publique,
14:15 c'est-à-dire on a décidé de sanctuariser
14:17 les dépenses de retraite de santé,
14:19 d'autres dépenses qui venaient en premier,
14:22 et comme, en même temps, on voulait réduire
14:24 les déficits publics, la seule marge de manœuvre
14:27 qu'on a trouvée, c'est de réduire
14:29 les rémunérations des fonctionnaires.
14:31 -Ca, c'est Nicolas Sarkozy,
14:33 la fameuse RGPP ?
14:35 -Ca a commencé sous François Pillon.
14:38 La révision générale, la logique,
14:40 c'est de diminuer le nombre de fonctionnaires,
14:42 d'augmenter l'efficacité de la fonction publique,
14:44 c'était pas forcément de joler le point d'indice,
14:46 mais depuis 2011 et la crise de la zone euro,
14:48 on est dans une logique de faire des économies budgétaires,
14:51 et du coup, la baisse du point d'indice,
14:55 du pouvoir d'achat du point d'indice,
14:57 a été extrêmement rapide.
14:58 -Alors, Fabien de Philippot,
15:00 je me tourne vers les Républicains.
15:02 On a tous compris qu'il y a un lien
15:04 entre rémunération et qualité de service public.
15:06 On se plaint tous de la crise de l'hôpital,
15:08 des difficultés massives de l'école,
15:11 et évidemment que c'est lié au pouvoir d'achat
15:14 et aux perspectives, il y a des grosses pénuries
15:16 de recrutement dans les deux.
15:18 Vous, aux affaires, vous avez quand même coupé.
15:20 Vous le reconnaissez ? Est-ce que vous le referiez ?
15:22 -Alors déjà, vous savez, moi, aux affaires,
15:24 je pense que j'étais encore à l'école
15:26 quand c'est arrivé, et il y a quand même
15:29 plusieurs présidents qui se sont succédés depuis.
15:31 J'aimerais poser vraiment le débat
15:33 d'une manière structurelle et voir les choses à long terme.
15:35 -Je vous en prie.
15:36 -La France n'a jamais autant dépensé d'argent public.
15:39 Cette première année d'Emmanuel Macron,
15:42 c'est 900 milliards d'euros de dettes en plus,
15:44 et les Français commencent à en assumer la facture.
15:46 On n'a jamais dépensé autant d'argent
15:48 pour la masse salariale des fonctionnaires.
15:50 C'est 12 % de la richesse nationale.
15:52 En moyenne, dans les autres pays européens, c'est 10 %.
15:54 Mais ils sont aussi beaucoup plus nombreux
15:56 que dans les autres pays européens.
15:58 Donc, il faut mettre tout ça à un moment donné en perspective.
16:00 Vous venez de parler de l'exemple des enseignants.
16:02 C'est très intéressant.
16:03 Pourquoi est-ce qu'ils sont mieux payés en Allemagne ?
16:05 Dans les années 80, encore, en France,
16:07 ils faisaient partie de l'échelle haute des revenus.
16:10 Et c'était très attractif, et ils avaient un statut
16:12 qui était différent d'aujourd'hui.
16:14 Regardez comment les choses ont évolué.
16:16 C'est vrai pour l'hôpital, j'y reviendrai.
16:17 C'est vrai pour la police, j'y reviendrai.
16:19 Est-ce qu'aujourd'hui, vous avez...
16:21 Comment se passe l'évolution du nombre de personnels enseignants
16:25 et du nombre de personnels administratifs non enseignants ?
16:28 Eh bien, le nombre de personnels non enseignants,
16:30 purement administratifs, a augmenté en 10 ans de 50 %,
16:35 environ 200 000 à environ 300 000 personnes.
16:37 Aujourd'hui, ils représentent plus d'un quart
16:39 des effectifs de l'éducation nationale.
16:41 -Donc quoi ? Il faudrait plus de profs mieux payés,
16:43 moins d'éducateurs, moins de... -C'est le coup, tout ça.
16:46 -De surveillance ? -Cette paupérisation
16:48 dont vous parliez de la fonction publique,
16:50 c'est le corollaire inévitable d'une bureaucratisation
16:53 qui devient massive.
16:54 Regardez ce qui se passe pour les infirmières.
16:56 Je cite les études universitaires.
16:58 70 % de leur temps pour du travail administratif.
17:01 Et donc, ça veut dire seulement 30 % au contact des patients.
17:04 Ce n'était pas le cas il y a quelques années.
17:06 Temps administratif des médecins, ils disent 30 % aujourd'hui.
17:09 Ils en déclaraient 15 % il y a 10 ans.
17:11 Pour avoir le même service public...
17:13 -Donc, vous réduisez l'administration,
17:15 la fonction publique de l'administration
17:17 autour des services publics. -Pour avoir
17:19 la même qualité de service public,
17:21 il vous faut davantage de gens aujourd'hui qu'avant.
17:24 Donc, vous les payez moins bien.
17:26 Et ça, c'est notre responsabilité, effectivement,
17:28 de diminuer cette bureaucratie.
17:30 Si vous voulez avoir des fonctionnaires
17:32 qui soient mieux payés, il faut qu'ils soient concentrés
17:35 sur les missions de service au contact du public.
17:38 Tout le monde veut des fonctionnaires mieux payés.
17:40 Tout le monde vous dira, ici, il faut augmenter les fonctionnaires.
17:43 Maintenant, il y a ceux qui sont capables de dire
17:45 comment on le finance. -Alors, on y va.
17:47 -Parce que si on ne le finance pas, la dette va augmenter.
17:49 Et donc, l'inflation va encore augmenter.
17:51 Et donc, vous aurez des gens, vous les payerez un peu mieux,
17:53 mais ils auront moins de pouvoir d'achat
17:55 et vous aurez des services publics qui continuent de se dégrader.
17:57 -Alors, comment ? -Et après, j'espère,
17:59 on aura la possibilité de parler. -On y est, dans plein débat.
18:01 Amna Jadwal, au Balkacem, vous voulez intervenir ?
18:03 Natacha Pommet, comment on fait pour augmenter
18:05 les salaires des fonctionnaires, des enseignants, de l'hôpital,
18:08 dans la contrainte que l'on connaît ?
18:10 -Peut-être juste une intervention pour rebondir
18:12 sur ce que vous venez de dire, parce que vous disiez
18:14 qu'il faut beaucoup plus de fonctionnaires aujourd'hui
18:18 pour assurer la même qualité de service.
18:20 D'abord, une précision.
18:22 Quand vous dites, à propos de l'école,
18:24 "Distinguons le personnel enseignant et le personnel non enseignant",
18:27 il faut faire très attention à cette façon de présenter les choses,
18:29 parce que dans le personnel non enseignant,
18:31 vous avez les CPE, vous avez les infirmières,
18:33 scolaires, infirmiers,
18:35 vous avez les psychologues de l'Education nationale.
18:37 Auquel de ces différents postes voulez-vous renoncer ?
18:40 Donc le personnel non enseignant est très important.
18:42 -On peut parler des académiques.
18:44 Il augmente 50 fois plus vite que le personnel enseignant.
18:47 -J'en viens à mon deuxième propos.
18:49 C'est qu'à un moment donné, il faut accepter
18:51 que la société évolue.
18:53 Elle évolue à la fois vers plus de liberté,
18:55 ce qui est une bonne chose,
18:57 et plus de vulnérabilité.
18:59 Je vous en donne un exemple pour que vous compreniez.
19:01 Par exemple, nous avons aujourd'hui, par rapport à il y a quelques décennies,
19:04 beaucoup plus de familles monoparentales.
19:06 Ça a des effets en termes d'accompagnement social.
19:08 Il va y avoir plus de besoins que par le passé.
19:10 En termes d'accompagnement des enfants à l'école,
19:12 il va y avoir plus de besoins que par le passé.
19:14 Donc ce n'est pas forcément une mauvaise chose
19:16 de prétendre avoir davantage de fonctionnaires.
19:19 -Est-ce que vous donnez des coups de pouce
19:21 à tous ces fonctionnaires dans cette société
19:23 que vous décrivez très bien, tout en réduisant les dépenses ?
19:26 Est-ce que c'est possible ?
19:28 Natasha Pommet, c'est une calvaire.
19:30 -Il y a des choix de façon politique à faire.
19:32 Aujourd'hui, le gouvernement fait plutôt d'autres choix,
19:34 notamment l'aide aux entreprises, sans aucune contrepartie.
19:37 Là, aujourd'hui, un budget de l'armement
19:40 qui augmente de façon considérable.
19:42 Or, les services publics, nous en avons besoin.
19:44 Nous avons des exemples,
19:46 ne serait-ce qu'à l'hôpital,
19:48 de familles désespérées parce qu'on n'a pas soigné à temps,
19:51 on n'a pas pris en charge à temps des patients qui décèdent.
19:54 Est-ce que c'est la France du XXIe siècle que nous voulons aujourd'hui ?
19:57 Les enseignants du 93, qui étaient très fortement mobilisés sur Paris,
20:01 qui dénoncent l'état de dégradation des établissements...
20:04 -On va en reparler, d'ailleurs, avec Nathalie Balocches.
20:07 -C'est un choix de société.
20:09 -Céline Calves, c'est une question de priorité.
20:11 Je retiens la fameuse aide aux entreprises.
20:14 C'est vraiment le socle de la politique économique d'Emmanuel Macron,
20:17 sans contrepartie.
20:19 On pense à la flat tax sur les entreprises,
20:21 les impôts de production.
20:23 Est-ce qu'il n'est pas temps de revoir, au fond,
20:26 la philosophie économique pour mieux partager, redistribuer ?
20:29 -Mieux partager, mieux redistribuer,
20:31 on a aussi mis des choses en place pour essayer de le faire,
20:34 notamment dans l'éducation nationale.
20:36 Je voulais revenir plus précisément sur la fonction publique
20:39 et rebondir sur ce que disait M. Di Cileppo.
20:42 En fait, c'est quelle est mon efficacité
20:45 et le sens que je donne à mon action.
20:47 Si, effectivement, j'étais auprès des élèves,
20:51 auprès de personnes à soigner,
20:53 et que j'ai l'impression de passer 30 % de mon temps
20:56 à quelque chose qui ne va pas aller dans le sens de l'efficacité,
20:59 il faut qu'on se pose la question plus globalement
21:01 autour de la rémunération, de la façon dont on peut le faire.
21:04 -Vous êtes d'accord avec M. Di Cileppo ?
21:06 -Je suis d'accord sur le constat que, parfois,
21:08 on a aussi des personnes de la fonction publique...
21:11 -Il faudrait réduire au niveau des effectifs
21:13 en fonction des missions ? -Non.
21:15 -C'est mal compris, alors.
21:17 -Il est nécessaire de réorienter sur la qualité,
21:21 l'efficacité du service public.
21:23 Peut-être que, parfois, on a fait trop de reporting
21:26 qui n'était pas forcément au bénéfice de nos citoyens.
21:29 -Le reporting, c'est quand la personne,
21:31 hiérarchiquement au-dessus, doit rendre compte...
21:34 -Rendre compte et finalement être...
21:36 Parce qu'on a du contrôle à chaque fois,
21:38 et pour le contrôle...
21:40 -Plus de liberté, plus d'autonomie.
21:42 -L'esprit d'initiative, je viendrai là-dessus,
21:45 qui peut être donné à tous les champs de la fonction publique.
21:48 C'est ça qui manque dans le sens.
21:50 J'ai l'impression, non seulement d'être pas bien payée,
21:53 mais qu'on me met des barrières à chaque fois que je prends
21:56 des initiatives, ou quand je demande un peu d'aide...
21:59 -En attendant, il y a 800 millions d'euros d'économie
22:02 dans la fonction publique, dans les 10 milliards.
22:05 -Mais... -Ca, c'est un fait aussi.
22:07 -Mets-lons le sens de la confiance qu'on peut donner
22:10 à l'initiative de la fonction publique.
22:12 Ce qu'on affronte, c'est quoi ?
22:14 On a aussi une crise des vocations.
22:16 On gère l'entrée dans la fonction publique
22:18 et même la sortie de la fonction publique.
22:20 Dans les années 90, quand j'étais jeune,
22:22 les gens voulaient être fonctionnaires
22:24 car il y avait beaucoup de chômage.
22:26 Aujourd'hui, je ne suis pas sûre que ce qui anime
22:28 dans l'entrée de la fonction publique,
22:30 ce soit la sécurité de l'emploi.
22:32 C'est aussi le sens de pouvoir servir la société.
22:35 Il faut avoir une manière de bien s'y asserrer.
22:38 -Vous parlez des conditions de travail,
22:40 de la revalorisation du sens de la mission.
22:42 -C'est l'essentiel, et ça va avec le budget.
22:44 Avec l'efficacité, on aura plus de confiance.
22:47 -François Girold ?
22:49 -On est tous d'accord avec le fait
22:51 qu'il faut que la bureaucratie diminue,
22:53 qu'il y ait moins de gens qui font
22:55 de l'administration administrante.
22:57 Le problème, c'est qu'une des raisons
22:59 pour lesquelles on a mis en place
23:01 les ARS, les administrations qui contrôlent,
23:04 c'était pour faire des économies budgétaires.
23:07 Il y a une forme de paradoxe.
23:09 On a créé cette bureaucratie
23:11 en partie pour contrôler les médecins,
23:13 pour les empêcher de prescrire ce qu'ils voulaient.
23:16 -Aujourd'hui, c'est elle qui pèse sur les comptes publics.
23:19 -Exactement. C'est un peu facile de dire...
23:22 -C'était aussi pour déconcentrer,
23:24 mais on n'a pas réussi à le faire.
23:26 -On a fait des doublons.
23:28 A chaque fois qu'on fait une réforme,
23:30 on a l'impression qu'on s'enferme
23:32 dans le problème qu'on a essayé de résoudre.
23:34 -Je voudrais qu'on aborde,
23:36 et je vous redonne la parole,
23:38 une solution mise en avant par le gouvernement,
23:40 très loin de faire l'unanimité
23:42 des syndicats de fonctionnaires,
23:44 c'est la rémunération au mérite,
23:46 autant dire une petite révolution.
23:48 Dans les cortèges, on ne veut pas en entendre parler.
23:51 En témoigne ce sujet de Maïté Frémont.
23:53 -La prime au mérite, c'est la mesure phare
24:00 de cette réforme de la fonction publique.
24:03 Mais dans le cortège, elle suscite le rejet.
24:06 Une mauvaise idée pour Yann,
24:08 infirmier depuis 14 ans.
24:10 -Si demain, le mérite, c'est le rendement,
24:13 c'est quoi ?
24:15 Ca veut dire que l'infirmier, l'aide-soignant
24:17 qui vont voir 20 patients par jour
24:19 ont plus de mérite que celui qui aura tenu la main
24:21 pendant 3 heures d'un patient en fin de vie
24:23 dans un service d'oncologie
24:25 après 6 mois de cancer ?
24:27 Lequel est le plus méritant ?
24:29 Qui va décider du mérite ?
24:31 C'est un non-sens.
24:33 -Des primes d'implication des agents ?
24:35 Pas cohérents, répond Sébastien et Gouthier
24:37 depuis 15 ans.
24:39 -On doit tous avoir la même chose.
24:41 Qu'on soit à la propreté,
24:43 qu'on soit dans les gymnases,
24:45 qu'on soit dans la petite enfance,
24:47 qu'on soit dans les bibliothèques.
24:49 -Erwan est agent pénitentiaire.
24:51 Pas question de diviser avec des récompenses individuelles
24:54 et de libéraliser le service public.
24:57 -Je pense qu'avoir un seul modèle complètement libéral,
25:00 c'est pas la solution.
25:02 Je pense qu'aujourd'hui, le fonctionnariat
25:04 a aussi montré ses qualités.
25:06 -Pour le gouvernement, cette prime permettrait
25:08 de donner plus de visibilité aux agents
25:10 et d'attirer des candidats
25:12 là où il existe des pénuries de main-d'oeuvre.
25:15 Laure et Hélène, assistantes sociales à l'Académie de Paris,
25:19 en souffrent tous les jours.
25:21 Mais pour autant, elles ne croient pas
25:23 à l'utilité d'un tel bonus.
25:25 -En fait, ça va nous diviser d'avoir 100, 200 euros de plus
25:28 parce qu'on prend des stagiaires.
25:30 Nous, ce qu'on veut, c'est avoir des grilles dignes.
25:33 Des salaires dignes.
25:35 -Faire venir du monde,
25:37 c'est reconnaître notre travail.
25:39 -Dernier avantage à ce dispositif, selon le gouvernement,
25:43 donner plus de latitude aux chefs de service,
25:46 aux élus locaux qui emploient des agents dans les collectivités,
25:50 puisque ce sont eux qui auront la main
25:53 pour distribuer ces primes.
25:55 -Fabien Diffilippo, il va y avoir une réforme,
25:58 elle sera soumise aux législateurs que vous êtes.
26:01 En gros, il y aurait des négociations
26:03 confiées aux syndicats annuels
26:05 pour définir des systèmes de primes par service, par mission.
26:09 On pense à la transition écologique,
26:11 souvent donnée en exemple par le gouvernement.
26:14 Est-ce que vous pourriez voter sur la philosophie
26:17 de cette idée de prime au mérite ?
26:19 -Je me méfie.
26:20 Comme de la peste, de ce type d'usine à gaz,
26:23 vous allez dire "on va voter le principe",
26:26 mais derrière, les choses se négocieront
26:29 entre les partenaires sociaux ou se feront par décret.
26:33 Si on pense résoudre par ce biais-là
26:35 la question de la rémunération des fonctionnaires,
26:38 je n'y crois pas, car il y a la question des moyens.
26:41 Je réinsiste là-dessus, mais c'est capital,
26:44 900 milliards de dettes en plus,
26:46 plus mauvais élève de l'Union européenne.
26:49 A un moment où on emprunte à 3,5 %
26:51 et non plus à des taux négatifs,
26:53 la charge de la dette va devenir le premier budget de l'Etat
26:57 à la fin du 2e quinquennat d'Emmanuel Macron.
27:00 -Cette dénonation, c'est pour la fin du mois d'avril.
27:03 -Et loin devant l'éducation nationale.
27:06 Donc aujourd'hui, quand vous dites "mérite des agents",
27:09 qu'est-ce que ça veut dire ?
27:11 Comment on le récompense et comment on le finance ?
27:14 Je vois des critères.
27:15 Vous disiez que les Allemands sont mieux payés.
27:18 Ils ne travaillent pas 35 heures.
27:20 Le volume du travail peut être un critère objectif.
27:23 Ensuite, la question de la présence et de l'absentéisme.
27:26 Il y a 80 % de jours d'arrêt maladie, d'absence pour arrêt maladie
27:30 en plus dans le public par rapport au privé.
27:33 Les conditions de travail ne sont pas 80 % plus mauvaises...
27:37 -Et Bruno Le Maire veut y mettre fin.
27:39 -Dans le public.
27:40 -Et ont été manifestement.
27:42 -Je vais en conclure par là.
27:44 Si on veut financer des revalorisations
27:47 du travail de nos fonctionnaires
27:49 et de tous les salariés en France,
27:51 parce que ça concerne la différence
27:53 entre le salaire brut, le salaire net,
27:55 les entreprises et les salariés du privé,
27:57 il faut avoir le courage de remettre en cause
28:00 des dispositifs sociaux qui coûtent extrêmement cher à l'Etat.
28:04 Comment vous expliquer que dans la période qu'on connaît,
28:07 où il faut trouver des milliards d'euros d'économie,
28:10 ne serait-ce que pour garder la trajectoire de la dette sous contrôle,
28:14 on soit capable de mettre 16 millions d'euros sur la table
28:17 pour que les enfants aient une pièce de 2 euros en souvenir des Jeux olympiques ?
28:21 -C'est pas le moment de faire des chèques.
28:23 -On a besoin de 4 millions d'euros
28:25 pour financer les gens qui font réparer leurs pantalons
28:28 chez le couturier.
28:29 Comment expliquer qu'on donne une prime de Noël
28:32 pour les gens qui sont au RSA,
28:34 alors qu'on veut les inciter à reprendre une activité ?
28:37 Ça représente plus de 400 millions d'euros par an.
28:40 -Le programme des Républicains pour trouver des économies.
28:43 -J'ai bien compris.
28:44 La prime au mérite, la rémunération au mérite.
28:47 Ce qu'on sait, c'est que ce seraient les syndicats
28:50 obligatoires annuels, les fameuses NAO,
28:52 comme dans le privé.
28:53 -Pas exactement comme dans le privé,
28:55 car au bout du bout, c'est le gouvernement qui décide.
28:58 Il n'y a pas d'accord patronat-syndicat
29:00 comme dans le privé.
29:01 C'est une première chose.
29:03 La deuxième des choses, encore faut-il que le ministre nous reçoive.
29:07 Pour rappel, dans le cadre du préavis de grève,
29:10 aujourd'hui, il doit nous recevoir,
29:12 dans le cadre d'un préavis de grève,
29:14 il ne nous a pas reçus.
29:16 C'est quand même une deuxième remarque.
29:18 Ensuite, concernant les primes au mérite,
29:21 déjà, la question des primes, c'est problématique,
29:24 car elles ne sont pas calculées dans le calcul de la retraite.
29:27 Aujourd'hui, les primes dans le salaire de la fonction publique
29:30 représentent entre 15 et 25 %,
29:32 donc vous imaginez, lorsque les fonctionnaires partent à la retraite,
29:35 la perte de pouvoir d'achat.
29:37 Ensuite, le mérite.
29:38 On a déjà un système qui s'appelle le RIFSEP,
29:41 qui était déjà une rémunération censée valoriser le mérite.
29:45 On voit que c'est un échec total.
29:47 Comment veut-on voir...
29:49 En termes de gestion du personnel dans les services publics,
29:53 très vite, on se rend compte qu'on ne peut pas mettre en place...
29:56 Comment calculer le mérite ?
29:58 C'est ce que disait très bien l'infirmier dans votre reportage.
30:01 Comment on le calcule ?
30:02 Vous parliez tout à l'heure de reporting.
30:04 Effectivement, le reporting a été mis en place
30:06 pour pouvoir juger le mérite.
30:08 Donc, à un moment, c'est antinomique.
30:10 Nous sommes là pour rendre un service au public,
30:12 être disponible pour le public.
30:14 Il peut y avoir dans un lieu les urgences,
30:17 d'un seul coup, 30, 40, 50 malades en une heure,
30:20 et le lendemain, personne en une heure.
30:22 Ca veut dire quoi ?
30:23 Ca veut dire que les agents qui sont là ne sont pas méritants
30:26 et ne sont pas au service du public.
30:28 C'est totalement antinomique.
30:30 -Bon courage !
30:31 On a envie de vous dire "bon courage" pour faire passer une telle réforme !
30:33 -On ne nous manque pas.
30:34 Pour parler de mérite, c'est pas un mauvais mot, le mérite.
30:36 Déjà, le mérite, on peut le reconnaître,
30:38 et on peut déjà reconnaître celui qui est mis en oeuvre au jour le jour
30:42 sur toutes les fonctions publiques.
30:44 Et je pense que malheureusement, si on ne le reconnaît pas assez,
30:46 on passe plus de temps sur la quelque minorité de personnes
30:49 qui ne sont pas forcément les plus méritantes.
30:51 Là, de dire "on va poser la question du mérite",
30:54 et pas seulement pour les prix, mais aussi pour une partie de la rémunération,
30:57 et pas seulement sur le côté individuel,
30:59 mais l'idée aussi, c'est pourquoi pas un intérêt collectif.
31:04 -Mais on a déjà compris qu'il y aurait une enveloppe budgétaire
31:07 prévue dans la loi de finances,
31:09 et qu'il y aurait des négociations.
31:11 Mais qui va décider à la fin des augmentations d'une prime ?
31:14 -Voilà, l'évaluation, qui fait ça ?
31:16 -C'est qui ? -Comment on va définir ?
31:18 -Le méritant est celui qui désigne celui qui met.
31:20 -Non, mais en gros, c'est à qui on va donner la liberté
31:23 de pouvoir mieux rémunérer ces agents les plus méritants ?
31:26 Est-ce que ça va être un responsable de collectivité publique ?
31:32 -Non, Manon serait les élues à ce stade.
31:34 -On a des maires qui disent "moi, j'aimerais bien pouvoir honorer
31:37 "et vraiment remercier de la façon dont ils se défoncent
31:41 "au jour le jour, mais sauf que pour remercier une personne,
31:44 "il faudrait que je puisse faire rentrer deux autres personnes,
31:47 "donc ça ne fonctionne pas."
31:49 -Des élus locaux qui auraient la main sur ces primes
31:52 pour les distribuer ?
31:54 -Aujourd'hui, on est en train de se poser la question,
31:57 pas seulement du principe, et j'espère qu'on va arriver
32:00 au-delà du principe de se dire que le mérite ne devrait pas être
32:03 une question posée sur le statut de la fonction publique.
32:06 Il faut aussi qu'on se dise à quel niveau de liberté
32:09 on donne le pouvoir d'apprécier ça.
32:11 J'ai une suggestion, c'est qu'à un moment, nous,
32:14 en tant que citoyens et en tant qu'usagers du service public,
32:17 on puisse aussi être partie prenante de cette évaluation,
32:20 que ça ne reste pas forcément sur un rang hiérarchique.
32:23 -Les usagers notent les fonctionnaires
32:25 et en fonction, on rémunère ou pas au mérite.
32:28 -Ce n'est pas forcément une notation, mais c'est intéressant
32:31 de prendre l'avis du public.
32:33 C'est le mot de la fin, François Girold.
32:35 C'est l'économiste qui parle, mais il y a une question
32:38 de culture et de mentalité sur cette question du mérite.
32:41 -Il y a aussi une question très pragmatique
32:43 de savoir si c'est faisable.
32:45 Si on pense à un professeur des écoles,
32:47 qui va noter le professeur des écoles ?
32:49 Une grande partie du travail des fonctionnaires
32:52 se fait à la maison, dans ce cas-là.
32:54 Même si on donne des heures supplémentaires,
32:57 quelqu'un qui fait plus d'heures supplémentaires,
33:00 pour préparer ses cours ou pour corriger ses devoirs,
33:03 je pense que c'est très difficile
33:05 de mesurer la production dans la fonction publique.
33:08 Je pense que ça va être très difficile
33:10 pour le gouvernement de mettre en place
33:12 une partie de mérite qui soit supérieure à ce qu'elle est.
33:15 -On s'arrête là. On verra ça, puisqu'il va y avoir
33:18 un débat à l'Assemblée nationale.
33:20 Merci d'être venu sur LCP.
33:22 Vous restez avec moi, Najat Vallaud-Belkacem.
33:25 Dans une dizaine de minutes, les partis prient de nos affranchis.
33:28 La femme, grande oubliée des étoilés du Michelin,
33:31 ce sera dans "Le coup de gueule" de Fanny Guinochet.
33:34 À quoi joue Thierry Breton ?
33:36 C'est la question du billet Europe de Richard Verli.
33:39 Et de quoi nous parlez-vous, Stéphanie Despierre,
33:42 ce soir, dans "Bourbon Express" ?
33:44 -Le coup de pression de l'opposition de gauche
33:47 qui en a marre d'attendre une grande loi sur le grand tal.
33:50 -On va plonger dans votre livre, Najat Vallaud-Belkacem,
33:53 vous publiez au Seuil, dans la collection "La République des idées",
33:57 sur la logue de l'éducation François Dubé,
33:59 comment la ségrégation scolaire est devenue le fléau
34:02 de l'école de la République et que faut-il faire
34:05 pour en finir avec ce que vous nommez comme du séparatisme.
34:08 On voit cela dans l'invitation de Marion Becker.
34:11 Interview, juste après.
34:13 -Si on vous invite, Najat Vallaud-Belkacem,
34:18 c'est parce que vous lancez un appel à briser le ghetto scolaire
34:22 qui mine l'éducation nationale.
34:24 Avec le sociologue François Dubé, vous publiez un plaidoyer
34:28 pour la mixité, contre l'école d'uterie et de la ségrégation.
34:32 Ce n'est d'ailleurs pas la première fois.
34:35 En tant que ministre de l'éducation nationale, il y a 10 ans,
34:38 vous aviez lancé des expérimentations en faveur de la mixité scolaire.
34:42 -L'idée, c'est de travailler en lien étroit avec les familles du territoire
34:45 pour définir les critères qui sont les plus légitimes
34:48 pour décider de l'affectation des élèves en fonction des collèges
34:52 et donc assurer davantage de mixité sociale,
34:54 mais une mixité sociale qui soit comprise des familles.
34:57 -Avant de quitter pour quelques années la politique
35:00 et de prendre la direction générale de l'ONG One en France.
35:03 Votre dernier ouvrage, Najat Vallaud-Belkacem,
35:06 percute l'actualité.
35:08 Depuis un mois, les enseignants et les parents d'élèves de Seine-Saint-Denis
35:12 réclament un plan d'urgence pour l'éducation dans le 93.
35:16 Il manque plus de 5000 enseignants dans le département le plus jeune
35:20 et le plus pauvre de l'Hexagone.
35:23 Il demande également de l'aide pour rénover les collèges et les lycées.
35:26 -On espère être surtout écoutés. On en a marre de se faire ignorer,
35:29 abandonner par le gouvernement. On veut vraiment qu'ils nous entendent
35:32 parce qu'on a des demandes et c'est pas normal qu'ils nous écoutent pas.
35:35 -C'est ce sentiment de ghettoïsation que vous pointez,
35:39 le développement des inégalités scolaires et une rupture civique.
35:43 Pour vous, il existe un lien entre les inégalités sociales et scolaires
35:47 et les violences urbaines de l'été dernier, après la mort de Nae.
35:51 Alors, vous proposez des solutions.
35:55 Vous revenez sur les expérimentations lancées en 2015 sous votre tutelle.
35:59 Vous êtes allé chercher des modèles, comme celui de Toulouse,
36:03 où deux collèges ont été fermés et les élèves des quartiers scolarisés
36:07 en centre-ville. Car vous l'affirmez, il faudra fermer 100 collèges ghettos
36:11 pour relancer la mixité.
36:15 Alors, on a une question pour vous, Najat Vallaud-Belkacem.
36:19 Éradiquer les ghettos, n'est-ce pas un combat perdu d'avance ?
36:23 -C'est pas trop tard pour réparer, Najat Vallaud-Belkacem ?
36:27 -C'est pas l'angle de ce livre. L'angle de ce livre,
36:31 il est résolument déterminé, volontariste,
36:35 et il démontre qu'en fait, c'est tout à fait possible d'agir,
36:39 même si on a perdu beaucoup de temps, indéniablement, mais il y a des solutions.
36:43 -Ca pourrait être complètement apocalyptique,
36:47 comme situation de séparatisme, de ségrégation scolaire.
36:51 Il faut se souvenir que 10 % des établissements scolaires
36:55 de notre pays concentrent les populations les plus pauvres
36:59 et au bout de l'échelle, 10 % des établissements
37:03 concentrent les plus riches. Il y a un embourgeoisement d'un côté
37:07 et une précarisation de l'autre. -Revenons sur le mot que vous choisissez.
37:11 "Ghetto", ça fait penser à la Seconde Guerre mondiale,
37:14 aux Etats-Unis, les années 70 et la période de la ségrégation.
37:18 Pourquoi vous l'avez choisi, ce mot-là ?
37:21 Est-ce qu'on en est là, en France, aujourd'hui ?
37:23 -C'est pas par esprit de provocation, c'est pas trop notre style,
37:26 à François Dubé et à moi-même, mais c'est simplement
37:29 qu'à un moment donné, même si c'est pas comparable,
37:32 les quartiers populaires en France et les ghettos américains,
37:35 comme le disait le regretté sociologue Didier Laperroni,
37:39 il y a du ghetto dans les quartiers français,
37:42 dans le sens où, à force de se sentir ainsi relégué,
37:46 et s'agissant des élèves, de sentir que les dés sont pipés,
37:50 qu'ils n'ont pas les mêmes chances, le même parcours
37:53 qu'on leur décrit et que vivent d'autres élèves ailleurs,
37:56 se développe une espèce de culture de ghetto,
37:59 une contre-culture scolaire. -C'est quoi, cette rupture ?
38:02 -Les professeurs seraient les mieux placés pour vous en parler.
38:05 Malgré leurs efforts immenses aux professeurs en question,
38:08 ils constatent bien qu'il y a des ambitions scolaires
38:11 qui sont ajustées, que le rendement de l'effort scolaire
38:14 est moins bien perçu, que le climat scolaire en souffre,
38:17 et que même, il fait pas forcément bon être un bon élève
38:20 dans des établissements dans lesquels on va justement
38:23 retrouver une espèce d'estime collective
38:26 en rejetant les normes scolaires.
38:28 -Cette contre-culture, c'est parfois de la violence.
38:31 -C'est évidemment de la violence.
38:33 -Vous en parlez après ce qui s'est passé fin juin.
38:36 -C'est pas toujours de la violence.
38:38 Je voudrais pas qu'on laisse croire que forcément,
38:41 les élèves vont traduire le ressentiment en violence.
38:44 Ca arrive parfois, à chaque fois que s'embrase une situation
38:47 dans un quartier populaire, les observateurs regardent
38:50 méduser une école, être prises d'assaut et se disent
38:53 "mais comment, le seul lieu de leur émancipation,
38:56 "comment peuvent-ils s'y attaquer ?"
38:58 Mais en fait, c'est peut-être pas que le lieu
39:01 de leur possible émancipation, c'est peut-être aussi
39:04 la question de la qualité, mérite.
39:06 Certains élèves se rendent bien compte que c'est pas normal
39:09 d'être concentrés en communautés qui sont à la fois
39:12 des communautés de précarité sociale,
39:14 mais aussi d'origine et d'ethnies différentes.
39:17 -Il y a un point de bascule, il y a un moment pour dater
39:20 ce processus de séparation entre les établissements scolaires.
39:24 Est-ce que le fait qu'on ait passé à une école de masse
39:27 où quasiment tous les élèves arrivent en terminale au bac,
39:31 a contribué à créer des poches de séparatisme et de ségrégation ?
39:37 -Vous avez raison de poser la question comme ça,
39:40 c'est bien raconté dans le livre.
39:42 En réalité, pendant longtemps, cette question ne se posait pas.
39:46 Dans les années 50, 60, honnêtement, les élèves,
39:49 leur destin était gravé dans le marbre en fonction
39:52 qu'ils étaient en forme d'ouvriers ou de classe plus aisée.
39:56 Du coup, beaucoup des élèves venant des classes populaires
39:59 n'allaient pas au-delà de l'école primaire et encore moins au lycée.
40:03 La question ne se posait pas.
40:05 C'est en effet à partir des années 70-80,
40:08 quand on a commencé à installer le collège unique,
40:11 que les élèves se sont mélangés dans ces établissements
40:14 et qu'il est devenu normal et naturel
40:16 que tout le monde aille le plus loin possible dans ses études,
40:19 notamment avec l'ambition d'avoir 80 % d'une classe d'âge au bac.
40:23 Tout ça, c'est des bonnes choses, je ne les déplore pas,
40:26 mais on n'a pas accompagné ça d'une bonne gestion
40:29 de cette hétérogénéité scolaire
40:31 qui allait se retrouver dans les salles de classe.
40:34 Les professeurs n'ont pas été suffisamment accompagnés, formés,
40:38 pour avoir traité des élèves qui venaient de milieux si différents.
40:42 C'est ainsi que s'est creusé petit à petit, en effet,
40:45 ce système à deux vitesses,
40:47 avec des écoles très en difficulté,
40:49 ou des collèges surtout très en difficulté,
40:52 qui étaient fuis par les parents qui pouvaient les fuir.
40:55 Ce qui fait que dans des territoires,
40:57 on va se retrouver avec des établissements scolaires
41:00 qui sont surségrégés par rapport à l'état du territoire.
41:03 -C'est très intéressant, car c'est là où on manque de tout
41:06 en termes de services publics, de sécurité,
41:08 où il y a des discriminations,
41:10 qu'il y a des inégalités scolaires très fortes,
41:13 une forme de ségrégation.
41:15 Mais un incubateur à l'école amplifie encore plus
41:18 dans ces territoires-là les problèmes.
41:20 -Oui, pour quelles raisons ?
41:22 -Il y a quand même une culture scolaire française
41:25 avec une espèce d'emprise du diplôme.
41:27 Vous vous rendez compte quand vous vous comparez avec d'autres pays,
41:30 vous vous dites que c'est fou comme le diplôme compte dans notre société.
41:33 Même à 60 ans, vous continuez de dire ce que vous avez fait
41:36 comme études supérieures, etc.
41:38 Dans d'autres pays, vous avez d'autres modes de reconnaissance
41:41 de vos mérites, de valorisation de vos parcours.
41:44 Ici, l'école porte un poids énorme sur elle.
41:46 Dans ce contexte-là, par définition,
41:48 les parents, et on leur jette pas la pierre,
41:51 vont voir l'école comme un lieu de compétition, de triscolaires,
41:55 et donc se dire à un moment donné qu'ils doivent veiller
41:58 à sortir leur enfant de la masse.
42:02 Dès qu'il y a un problème qui se passe quelque part,
42:05 surtout ne pas le mettre en difficulté,
42:07 surtout lui offrir le meilleur, une forme de préférence
42:10 pour l'inégalité, en quelque sorte.
42:12 Donc c'est au pouvoir public de créer les conditions
42:15 pour que dans tous les établissements de France,
42:18 on ait des chances de réussite.
42:20 - On revient aux solutions, la fameuse révolution
42:22 de la mixité scolaire dont vous parlez.
42:24 Je vais vous montrer cette vidéo TikTok.
42:26 Je suis sûre que vous l'avez déjà vue.
42:28 Collège Blais-Sandrard de Sevran, dans le 93,
42:30 où les profs et les élèves ont pris la parole.
42:33 Vidéo devenue virale depuis quelques jours.
42:35 Regardez.
42:36 - Je suis une élève à Blais-Sandrard dans le 93.
42:39 Évidemment que ça fait un an que l'ascenseur ne marche plus.
42:42 Sympa.
42:43 Je suis prof de français dans le 93.
42:45 Évidemment que quand j'étais enceinte,
42:47 mes élèves n'ont pas eu cours de français
42:49 et je n'ai pas eu de chance.
42:50 Je suis une élève à Blais-Sandrard.
42:51 Bien évidemment que le chauffage ne fonctionne pas.
42:53 On est à Blais-Sandrard.
42:54 Évidemment qu'on n'a pas de plafond dans nos toilettes
42:56 et qu'on fait pique dans le noir.
42:57 On est à Blais-Sandrard.
42:58 Évidemment qu'on n'a pas de serviette,
42:59 pas de charbon, ni de papier.
43:01 On est à Blais-Sandrard.
43:02 Évidemment qu'on a un saut pour les fuites
43:04 parce qu'on n'a plus de plafond.
43:06 - Voilà, les profs qui ont été dans cette vidéo
43:09 ont été convoqués par leur direction.
43:11 Mais depuis, il y a quand même une prise de conscience,
43:14 le 9 avril 2013, qui est en grève.
43:16 C'est guetto scolaire, là on y est.
43:19 Le ministre de l'Éducation nationale
43:22 veut y installer des groupes de niveau.
43:25 Et pas seulement, d'ailleurs, dans ces établissements-là,
43:28 repérez plus, mais dans toutes les sixièmes
43:31 et toutes les cinquièmes de France à la rentrée prochaine.
43:34 Qu'est-ce que vous en pensez ?
43:35 - D'abord, ce qu'il faut comprendre,
43:37 c'est que ce qui permet que des établissements
43:40 se retrouvent dans cet état de déliquescence absolue,
43:43 c'est précisément le fait que n'y soit pas mélangé
43:46 des élèves de catégories sociales différentes.
43:48 Comme il n'y a, je vais le dire simplement,
43:50 que des enfants de pauvres,
43:52 en gros, on n'a pas la même considération
43:55 que l'on peut avoir face à des familles plus favorisées
43:58 qui ont les moyens d'aller voir le rectorat,
44:00 d'insister pour qu'un prof, par exemple,
44:03 au congé maternité, soit bien remplacé, etc.
44:06 - Alors comment on fait ?
44:07 - Donc la mixité sociale...
44:08 - On parlera des groupes de niveau après, mais comment on fait ?
44:10 - La mixité sociale, c'est... - Les catégories sociales
44:13 plus aisées, plus favorisées, dans ces endroits-là.
44:16 Vous n'allez pas forcer les parents.
44:18 - Tout à fait. Donc déjà, on veille à ce que des établissements
44:21 ne se retrouvent pas dans cette situation,
44:23 parce que quels parents voudraient y envoyer son enfant,
44:25 franchement, s'il n'a pas le couteau sous la gorge
44:27 et personne ne veut lui mettre le couteau sous la gorge ?
44:29 Donc on ne laisse pas des établissements tomber
44:31 dans cette pauvreté-là.
44:32 S'ils sont vraiment dans des situations
44:34 si catastrophiques, vaut mieux les fermer, franchement.
44:37 Deuxièmement, le mélange des élèves,
44:40 il faut qu'on donne à voir à quel point, en fait,
44:43 sur un plan scolaire, c'est positif.
44:45 Alors que très longtemps, le discours politique,
44:47 et d'ailleurs, les histoires de groupe de niveau, etc.,
44:49 - Justement, parce que c'est lié d'une certaine manière.
44:51 - ...laissent entendre que c'est une menace.
44:53 Le discours politique, lorsqu'il laisse entendre
44:55 que le mélange des élèves est une menace,
44:57 éloigne les parents qui le peuvent de l'idée de mixité sociale.
45:00 - Ablaissant de radre un groupe de niveau,
45:02 ce serait pire que le mal actuel ?
45:04 - Les groupes de niveau, ça pose une question autre,
45:06 qui est celle de la mixité scolaire.
45:08 - Oui. - Donc, c'est pas seulement sociale,
45:10 c'est scolaire. - Mais qui parfois se superpose
45:12 à la question sociale. - Qui recoupe souvent
45:14 la question sociale. Moi, je suis en défaveur
45:16 des groupes de niveau, soyons clairs. Pourquoi ?
45:18 Parce qu'à chaque fois que vous créez, finalement,
45:21 des classes de relégation, parce que soyons honnêtes,
45:24 même si le gouvernement vous dit "c'est du temporaire,
45:26 "c'est du provisoire", le système scolaire,
45:28 interrogez les historiens de l'éducation,
45:30 a toujours vécu sur des systèmes provisoires
45:32 qui se sont pérennisés.
45:34 Donc, quand vous créez des classes de relégation
45:36 où vous mettez les plus faibles,
45:38 d'abord, eux-mêmes intériorisent l'idée
45:41 qu'ils ne sont pas suffisamment au niveau,
45:44 et donc l'estime de soi,
45:46 justement, la compréhension de l'effort,
45:48 mais oubliés pour ces élèves-là.
45:50 Et puis, deuxièmement, ça veut dire
45:52 que vous recréez du séparatisme
45:54 au sein d'un même établissement.
45:56 Donc, ça, c'est pas possible,
45:58 puisque ce qu'on essaye de démontrer dans le livre,
46:00 c'est que non seulement les écoles ont à gagner
46:02 au mélange de ces populations,
46:04 sociales comme scolaires,
46:06 mais en plus, la société tout entière a à y gagner.
46:08 On a un problème, aujourd'hui,
46:10 avec la sécession des élites, soyons clairs,
46:12 parce qu'on parle que du bas,
46:14 mais parlons du haut.
46:16 S'il y a ce séparatisme, c'est aussi parce que tout là-haut,
46:18 on est dans un entre-soi qui ne cesse de s'aggraver.
46:20 -Et qui met ses enfants en recherche.
46:22 -C'est important qu'on parle du privé
46:24 pour terminer cette interview.
46:26 Il y a une rupture de confiance,
46:28 vous le reconnaissez, de beaucoup de parents,
46:30 d'élèves vis-à-vis du public,
46:32 et pas seulement, d'ailleurs, et ça,
46:34 les enquêtes le prouvent,
46:36 même si c'est largement parmi les familles les plus favorisées.
46:38 Comment vous allez faire
46:40 pour embarquer dans cette révolution
46:42 de la mixité sociale
46:44 que vous appelez de vos voeux, le privé ?
46:46 -Alors, d'abord, un constat,
46:48 le privé, il faut vraiment avoir conscience
46:50 que ces dernières années, la situation
46:52 s'aggrave en termes d'entre-soi
46:54 et d'embourgeoisement.
46:56 Un chercheur a démontré récemment que ces cinq dernières années,
46:58 le privé dans notre pays
47:00 avait gagné cinq points de IPS,
47:02 c'est-à-dire indice de positionnement social,
47:04 en bourgeoisement.
47:06 -Qui permettent d'être...
47:08 -De comptabiliser, en gros, d'évaluer
47:10 quel est le niveau social des élèves accueillis.
47:12 -Le métier des parents, pour le dire vite.
47:14 -Exactement. Le métier des parents,
47:16 l'exposition à la culture, au lieu de culture,
47:18 à la lecture, etc.
47:20 -Vous voulez diminuer cet IPS, c'est ça ?
47:22 -On veut tout simplement que les établissements privés
47:24 accueillent une plus grande mixité de populations.
47:26 Il n'y a aucune raison,
47:28 alors que quand même,
47:30 ils sont financés à plus de 75 %
47:32 par les pouvoirs publics,
47:34 qu'ils se réservent la crème de la crème
47:36 et qu'ils, finalement,
47:38 aggravent le mal
47:40 qu'on est en train de décrire depuis tout à l'heure.
47:42 Car se réservant la crème de la crème,
47:44 par définition, il crée
47:46 d'autres établissements où il n'y a que...
47:48 -Mixité scolaire dans le privé sous peine
47:50 de couper les financements publics,
47:52 c'est ça, l'idée ?
47:54 -On n'est pas obligés de réveiller
47:56 de guerre scolaire.
47:58 Je ne fais pas partie de ceux qui disent
48:00 qu'il ne faudrait plus d'enseignement privé
48:02 dans notre pays.
48:04 Je trouve que c'est bien qu'un système dual coexiste.
48:06 Par contre, je dis qu'il y a
48:08 une injonction de service public
48:10 qui est de dire
48:12 qu'on doit tous viser
48:14 une meilleure mixité sociale
48:16 dans nos établissements,
48:18 que l'enseignement privé fait partie
48:20 du service public de l'éducation nationale.
48:22 C'est normal qu'on attende de l'enseignement privé
48:24 qu'il joue le jeu lui aussi.
48:26 Et en effet, dans les financements
48:28 qui lui sont versés par l'Etat
48:30 mais aussi les collectivités locales,
48:32 on peut imaginer une modulation
48:34 d'une partie de ces financements
48:36 en fonction du respect
48:38 qui est celui de la mixité sociale.
48:40 -C'est passionnant, ce petit livre.
48:42 C'est très documenté, ça ouvre beaucoup de solutions.
48:44 Et c'est très politique, forcément,
48:46 comme sujet, le ghetto scolaire,
48:48 pour finir avec le séparatisme.
48:50 -C'est un livre qui appuie sur des réalisations concrètes.
48:52 Vous me disiez comment on convainc les parents.
48:54 C'est raconté à travers des réalisations locales
48:56 qui ont été menées, évaluées scientifiquement
48:58 et qui donnent des résultats vraiment formidables.
49:00 Il faut le lire pour les voir.
49:02 -Allez, c'est à lire au seuil
49:04 dans la très belle collection
49:06 de "La République des idées".
49:08 Vous restez avec moi, Najat Vallaud-Belkacel.
49:10 Place au parti pris de nos affranchis.
49:12 On accueille tout de suite.
49:14 ...
49:22 -Fanny Guinochet, de France Info
49:24 et la tribune pour l'économie,
49:26 Richard Verly du quotidien suisse Blik
49:28 pour les questions européennes.
49:30 On commence avec vous, Fanny.
49:32 Hier, le célèbre Guy de Michelin
49:34 a décerné ses étoiles
49:36 pour récompenser les meilleurs chefs en 2023,
49:38 mais vous êtes très agacée par ce palmarès.
49:40 Pour quelles raisons ?
49:42 -L'économie française, finalement,
49:44 est encore un vieux monde,
49:46 un monde ancien,
49:48 très, très masculin,
49:50 à tel point que le directeur lui-même
49:52 du Guy de Michelin,
49:54 Gwénaëlle Poulénec, s'en est offusqué hier
49:56 lors de la remise de ses prix
49:58 en disant "Où sont les femmes ?"
50:00 Et effectivement, quand on regarde le palmarès
50:02 sur les 52 nouvelles premières étoiles
50:04 attribuées hier soir,
50:06 eh bien, il y a seulement 6 femmes.
50:08 Ça fait 10 %, un peu plus.
50:10 On est loin de la parité.
50:12 Et surtout, quand on regarde
50:14 plus précisément parmi les femmes récompensées,
50:16 eh bien, le plus souvent,
50:18 celles qui sont récompensées
50:20 le sont en binôme avec un homme.
50:22 -Rassurez-moi, il y a bien des femmes
50:24 seules récompensées dans ce palmarès, non ?
50:26 -Il y en a une seule, Eugénie Béziat,
50:28 de l'Espadon.
50:30 Donc, il faut aller au Ritz
50:32 pour goûter sa cuisine à Paris.
50:34 Sinon, c'est trois duos
50:36 composés d'un homme et d'une femme,
50:38 souvent des couples
50:40 qui sont des couples aussi à la ville.
50:42 Et enfin, il y a un seul et rare
50:44 duo de chefs de ZEF-ES,
50:46 avec donc Manon Fleury
50:48 et Lorraine Barjoup,
50:50 pour le Datil à Paris.
50:52 Bref, ça n'est pas brillant du tout.
50:54 -Et après, sur les attributions,
50:56 les 10 qui ont eu 2 ou 3 étoiles,
50:58 est-ce qu'il y a des femmes ?
51:00 -Aucune, zéro pointé. Quand on regarde,
51:02 il y a une seule femme en France
51:04 qui a 3 étoiles, c'est Anne-Sophie Pic.
51:06 Par contre, vous avez Hélène Darroze
51:08 et Stéphanie Le Guelec
51:10 qui conservent leur 2e étoile,
51:12 mais c'est tout.
51:14 -Et le Guinness-Line qui se vante
51:16 de mettre en avant les jeunes,
51:18 ça veut dire qu'il n'y a pas de femmes ?
51:20 -Justement. On peut se dire que c'est bien
51:22 qu'il y ait des jeunes, qu'il y ait une relève
51:24 française de la gastronomie,
51:26 mais c'est d'autant plus rageant,
51:28 puisque même quand on fait monter cette relève,
51:30 ces jeunes chefs de moins de 40 ans,
51:32 on n'a pas prévu de vivier de femmes.
51:34 Or, on le sait,
51:36 pour avoir des modèles,
51:38 c'est important d'avoir des modèles féminins.
51:40 D'ailleurs, Eugénie Béziat
51:42 dit qu'elle a eu envie
51:44 de devenir cuisinière
51:46 après être allée au restaurant
51:48 d'Hélène Darroze.
51:50 Donc, vous voyez,
51:52 c'est important, on rejoint l'idée
51:54 de la mixité dont on parlait tout à l'heure,
51:56 mais finalement, les femmes,
51:58 elles sont dans la cuisine,
52:00 invisibles, dans les brigades,
52:02 mais elles ne sont pas mises en avant,
52:04 elles ne sont pas récompensées,
52:06 et le risque, c'est que, finalement,
52:08 ça ne change pas beaucoup,
52:10 et je terminerai avec le président
52:12 du Guide Michelin qui a dit hier
52:14 qu'il y a trop peu de femmes à la tête des cuisines
52:16 alors qu'elles sont toujours plus nombreuses,
52:18 justement, dans les cuisines et les formations,
52:20 à croire, finalement, que là aussi,
52:22 la seule solution, c'est d'imposer des quotas.
52:24 - Voilà. Allez, la parité
52:26 parmi les chefs-fesses
52:28 ou les chefs des FES.
52:30 - Les chefs des FES.
52:32 - Une réaction ? Ca vous étonne,
52:34 ou pas, ce palmarès ? - Oui, j'avoue que ça m'étonne,
52:36 parce que moi, j'avais l'impression qu'elles étaient
52:38 de plus en plus nombreuses, donc c'est quand même...
52:40 - Mais elles restent encore à l'arrière.
52:42 - Mais la question du mérite, elle se pose
52:44 dans tous nos sujets.
52:46 - Allez, on enchaîne avec vous, Richard.
52:48 Les élections européennes, c'est dans quelques mois.
52:50 Vous nous parlez ce soir du commissaire européen
52:52 Thierry Breton, on le sait, c'est le chef d'orchestre
52:54 de la mutualisation des achats
52:56 industriels de vaccins.
52:58 Il est maintenant sur la stratégie
53:00 défense.
53:02 Il fait entendre très haut
53:04 sa petite musique et sa différence
53:06 avec Ursula von der Leyen.
53:08 A quoi joue-t-il et pour qui roule-t-il ?
53:10 - Oui, on est en campagne électorale pour les européennes
53:12 et on peut se poser la question, est-ce que
53:14 Thierry Breton est l'atout maître
53:16 européen d'Emmanuel Macron ou est-ce qu'il joue
53:18 effectivement sa partition avec son talent
53:20 médiatique et avec un bilan ?
53:22 Alors la question, elle est tout sauf anodine
53:24 parce que Bruxelles se prépare au grand
53:26 chambardement rituel après les élections
53:28 européennes qui auront lieu du 6 au 9 juin.
53:30 Thierry Breton, c'est un ancien
53:32 ministre des Finances, il a 69 ans
53:34 et il coche trois cases. La première,
53:36 c'est sa capacité à discuter
53:38 avec les industriels, il l'a fait pour la Pharma,
53:40 il le fait maintenant pour la Défense. La seconde,
53:42 c'est qu'il est sans arrêt sur les plateaux
53:44 de télévision et il est plutôt très bon.
53:46 La troisième, c'est qu'il justement
53:48 veille à ne pas être trop associé
53:50 à Ursula von der Leyen qui vient d'être
53:52 reconduite comme candidate par le Parti
53:54 Populaire Européen, mais de justesse
53:56 et il n'a pas manqué de le faire savoir.
53:58 Il se rêve en nouveau Jacques Delors,
54:00 il en a les moyens Thierry Breton ?
54:02 Jusque là, il est plutôt resté en retrait
54:04 mais c'est certain, il se positionne en recours.
54:06 Alors il a un problème en France avec
54:08 la déconfiture d'une entreprise que Fanny connaît bien,
54:10 Atos, qu'il a dirigée dans le passé.
54:12 Il fait attention à ne pas se trouver
54:14 piégé par la surenchère d'Emmanuel Macron
54:16 sur les fameuses troupes au sol, c'est assez
54:18 bien joué parce qu'il sait en outre
54:20 que sur le papier, Thierry Breton, il n'a
54:22 aucune chance d'avoir un des fameux top job,
54:24 la tête de la commission, la tête du conseil,
54:26 parce qu'il y a une dame, une française,
54:28 Christine Lagarde, à la tête de la Banque Centrale
54:30 Européenne et normalement le quota français
54:32 est bien rempli. Mais néanmoins,
54:34 on sait jamais ce qui peut se passer et
54:36 vous citiez Jacques Delors, et bien il y a
54:38 une recette, c'est le tandem franco-allemand,
54:40 c'est un peu cela qu'essaie d'être Thierry Breton,
54:42 le français qui sait parler avec Berlin,
54:44 l'homme de l'industrie qui conclut des
54:46 contrats et ne fait pas de politique,
54:48 c'est pas étonnant de la part de quelqu'un qui lorsqu'il était
54:50 écrivain avait intitulé un de ses romans
54:52 "Sauve-toi, la guerre douce".
54:54 - Merci, vous l'avez croisé,
54:56 déjà, Thierry Breton. - Ça m'est arrivé, oui.
54:58 - Et alors, un ambitieux,
55:00 il en a les moyens. - Je ne m'y connais pas suffisamment
55:02 pour me prononcer honnêtement.
55:04 - On enchaîne avec
55:06 Bourbon Express, la petite comme la grande
55:08 histoire à l'Assemblée, c'est tout de suite.
55:10 ...
55:12 ...
55:14 ...
55:16 Bonsoir Stéphanie Despierre.
55:18 - Bonsoir. - L'histoire du jour
55:20 à l'Assemblée nous emmène dans l'hémicycle, je crois.
55:22 - Oui, je vous raconte le coup de pression
55:24 de l'opposition sur le grand âge, la politique
55:26 à l'égard de nos aînés. Alors, tout devait bien se passer
55:28 cet après-midi pour la majorité,
55:30 pour la validation finale d'une proposition
55:32 de loi sur le bien vieillir.
55:34 Après un parcours sinueux,
55:36 elle avait été votée à l'unanimité
55:38 en novembre 2023. Il y a quelques jours,
55:40 il y a eu un accord entre députés et sénateurs.
55:42 Le passage en hémicycle cet après-midi
55:44 devait donc être une formalité,
55:46 sauf que Myriam, l'opposition,
55:48 toute l'opposition sauf le Rassemblement national
55:50 a mis un gros coup de pression ce matin.
55:52 Regardez cette lettre au Premier ministre.
55:54 Alors, ce n'est pas souvent que la signature
55:56 de la patronne des Insoumis,
55:58 Mathilde Panot, jouxte celle du député,
56:00 du patron des députés, les Républicains,
56:02 Olivier Marlex, eh bien, neuf présidents
56:04 de groupe, côté Assemblée comme côté Sénat,
56:06 ont écrit ensemble à Gabriel Attal
56:08 pour lui demander de s'engager
56:10 à proposer une loi d'envergure
56:12 sur le grand âge avec un calendrier précis.
56:14 -Pourquoi l'opposition s'impatiente ?
56:16 Il faut dire que c'est vrai que ça fait longtemps
56:18 qu'on l'attend, cette grande réforme.
56:20 -D'abord parce que ça devient urgent,
56:22 la démographie est implacable.
56:24 Dès 2030, les plus de 65 ans seront plus nombreux
56:26 que les moins de 15 ans en France.
56:28 Et puis, parce que vous l'avez dit,
56:30 cette loi grand âge, c'est un serpent de mer.
56:32 C'était une promesse d'Emmanuel Macron
56:34 dès juin 2018. En 2020, à la sortie du confinement,
56:36 il annonce à nouveau un plan massif
56:38 pour nos aînés. En février 2022,
56:40 rappelez-vous, le scandale Orpea
56:42 a été annoncé par l'opposition.
56:44 En 2023, c'est Elisabeth Borne
56:46 qui promet une loi avant fin 2024.
56:48 Il y a quelques semaines, la nouvelle ministre
56:50 de la Santé, Catherine Vautrin,
56:52 fait pareil, mais pour l'instant,
56:54 les députés n'ont aucun projet de loi
56:56 sur leur tablette avant l'été.
56:58 -Fairplay, l'opposition devrait quand même
57:00 laisser une dernière chance au gouvernement, c'est ça ?
57:02 -Les députés de l'opposition ont posé
57:04 plusieurs questions au gouvernement
57:06 pour lui permettre de confirmer
57:08 ou pas la préparation d'une loi
57:10 déléguée aux personnes âgées,
57:12 qui a répondu "pas très précisément".
57:14 -Nous débattrons bien ensemble
57:16 et nous nous sommes engagés
57:18 avec Catherine Vautrin sur la stratégie,
57:20 il y a les questions de gouvernance
57:22 et bien sûr la question
57:24 du financement.
57:26 Nous souhaitons débattre
57:28 avec vous et nous prendrons
57:30 les mesures nécessaires,
57:32 y compris les mesures
57:34 législatives. Je vous remercie.
57:36 -Vous l'avez vu à l'image,
57:38 les socialistes n'étaient pas très convaincus
57:40 et à la sortie, ils brandissent
57:42 la menace d'une motion de rejet
57:44 sur le vote final du texte.
57:46 -Ca nous dit qu'il n'y aura pas de loi grantage
57:48 et ça c'est très problématique.
57:50 Ca nous rend furieux, on va présenter
57:52 une motion de rejet avec cet argument
57:54 qui est de dire que ce n'est pas le deal
57:56 qui a été passé avec l'ensemble des parlementaires
57:58 unanimes. La mort dans l'âme, je dirais,
58:00 nous ne voulons pas de cette loi pour solde
58:02 de tout compte, parce que c'est vraiment
58:04 pour amuser la galerie et ce n'est pas
58:06 le deal qui a été passé avec l'ensemble des parlementaires.
58:08 -Coup de semonce, c'était il y a quelques minutes
58:10 dans l'hémicycle, finalement la motion de rejet
58:12 n'a pas été adoptée, les Républicains
58:14 ne l'ont pas votée, donc ça c'est la motion de rejet,
58:16 ça veut donc dire que le texte continue,
58:18 ce sera après le dîner, est-ce qu'il sera
58:20 adopté définitivement ou pas ?
58:22 Il y a du monde dans l'hémicycle,
58:24 a priori c'est plutôt bien parti pour la majorité.
58:26 -On va suivre ça et suivre ça
58:28 sur les réseaux sociaux, bien sûr,
58:30 des LCP, lcp.fr.
58:32 Il faut donner encore un petit peu
58:34 de temps à ce gouvernement
58:36 pour cette grande réforme.
58:38 -Cette loi ou de manière générale ?
58:40 -Non, sur le grand âge,
58:42 sur le bien vieillir.
58:44 -On n'a pas le choix.
58:46 -Et pour cette loi,
58:48 je pense que c'est un sujet tellement important
58:50 et tellement sérieux que oui,
58:52 il faut continuer
58:54 à faire pression et à espérer
58:56 qu'on accouchera d'un texte,
58:58 mais j'ai l'impression en effet que c'est un serpent
59:00 de merde d'en entendre parler depuis si longtemps.
59:02 Voilà.
59:04 Donc c'est très bien que les socialistes
59:06 soient mobilisés là-dessus.
59:08 -Merci beaucoup. Merci, Najat Balou-Barkhassel.
59:10 Merci à vous, les Affranchis,
59:12 pour vos partis pris et merci Stéphanie Despierre.
59:14 Je rappelle le titre de votre livre,
59:16 coécrit avec le sociologue
59:18 de l'éducation François Dubé,
59:20 professeur émérite à l'EHESS,
59:22 "Le ghetto scolaire",
59:24 pour en finir avec le séparatisme,
59:26 c'est-à-dire au seuil.
59:28 Merci à vous de nous avoir suivis.
59:30 Soirée documentaire qui commence à présent
59:32 avec Jean-Pierre Gracien.
59:34 À demain.
59:36 ...
59:48 *bruit de clavier*