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Style de vieTranscription
00:00 Je retourne près du corps de la dame et j'ouvre la bouche de la dame et là il y a un bouchon de queue qui sort.
00:06 C'est une espèce de champignon de mousse qui fait comme ça.
00:09 La bouche et le nez.
00:12 C'est une jeune fille.
00:18 Elle n'aime plus trop son père et elle décide de le buter.
00:21 Elle veut le tuer avec une arme à feu. Pourquoi ? Parce que son père lui a appris à tirer.
00:25 La fille sait comment on se sert de l'arme, elle le connaît très bien et son père estime même que c'est une excellente tireuse.
00:31 Donc clairement, elle est prête à mener l'arme.
00:34 Prête à tuer son père c'est autre chose, mais elle est convaincue.
00:36 Elle veut le faire et elle vient chez son père la nuit.
00:39 Alors la nuit, elle débranche le système d'alarme, elle a le code donc c'est pas très compliqué.
00:43 Elle sait où est l'arme, elle va la chercher dans le tiroir, elle l'arme, le flingue est prêt.
00:47 Elle traverse la pièce, c'est un living et en fait c'est une maison un peu short.
00:53 Le living donne dans la chambre à coucher, en fait toutes les pièces donnent dans le living, c'est la pièce centrale.
00:57 Et elle rentre dans la chambre à coucher de son père en faisant le moins de bruit possible, en allumant pas les lumières.
01:01 Et à travers les rideaux, il y a quand même suffisamment de lumière qui passe pour lui permettre de voir où est le corps de son père,
01:06 comment il est couché, dans quel sens.
01:09 Il est couché comme à peu près tout le monde, dort sur le côté droit.
01:13 Et là, le flingue est armé, elle est devant le corps de son père et elle tire.
01:18 Elle vide tout le chargeur dans le corps de son père.
01:20 Elle dépose le flingue et elle s'en va.
01:23 Et le lendemain matin, quand la femme d'ouvrage arrive, elle découvre la scène, elle découvre le papa mort dans son lit.
01:27 Il y a un flingue à côté, elle ne parvient pas à le réveiller, elle panique et elle appelle la police.
01:31 La police arrive, elle constate effectivement qu'il y a un défunt, elle voit qu'il y a un flingue, elle voit qu'il y a du sang.
01:37 Donc clairement, ce n'est pas un suicide, quelqu'un qui se suicide d'autant de coups de feu, puis qui dépose le flingue et se remet en position du dormeur, ça, ça n'existe pas.
01:44 Donc ce n'est pas un suicide.
01:45 Et là-dessus, la police prévient le procureur.
01:48 Le procureur me téléphone en me disant écoute, on pense que c'est un meurtre, je préviens le juge d'instruction.
01:53 Donc j'ai 100 sur place.
01:55 J'attends, j'attends que le labo ait fini tous ses prélèvements, fini tout le travail qu'il a à faire.
02:00 Et puis je m'approche du corps.
02:02 Je constate qu'effectivement, il y a des coups de feu.
02:04 Et je me dis, ben écoute, de toute façon, l'autopsie est donc, je vais faire l'examen correctement en salle d'autopsie, bien à l'aise sur ma table.
02:11 Ce sera top.
02:12 Et on emmène le corps en salle d'autopsie.
02:14 Et là, je commence l'autopsie comme d'habitude, en faisant un examen extérieur, c'est-à-dire en regardant l'enveloppe externe.
02:19 On n'ouvre pas encore, quoi.
02:21 Et là, je constate que les lésions ont une drôle de tronche.
02:23 C'est-à-dire qu'elles ne sont pas saignantes.
02:26 Quand quelqu'un vit et qu'on lui crée une lésion cutanée, la lésion saigne tout de suite.
02:32 Quand quelqu'un est mort et qu'on fait une lésion cutanée, la lésion, elle ne saigne pas.
02:36 C'est ça, la différence.
02:38 Là, je constate que les lésions ne saignent pas.
02:40 Je me dis, de toute façon, on va ouvrir.
02:41 Je vais mieux voir à l'intérieur.
02:43 Et quand j'ouvre à l'intérieur, je constate qu'aucune lésion n'est saignante.
02:47 Si, le cœur a été traversé, donc le cœur a saigné.
02:50 Mais la lésion, celle de la balle qui traverse la porte à bras cardiaque, elle n'est pas saignante.
02:56 Ça veut dire que la balle a traversé le cœur alors qu'il était déjà mort.
03:01 Donc, je termine mon autopsie et je me rends compte qu'en fait, quand j'ouvre la boîte crânienne,
03:06 je retire la boîte, je me rends compte que là, le type a saigné dans sa boîte crânienne.
03:09 Donc, en fait, je constate qu'il est mort d'une hémorragie cérébrale
03:13 avant que sa fille ne lui tire dessus.
03:15 C'est dingue.
03:16 Donc, la fille n'a pas tué le père parce que pour pouvoir tuer quelqu'un,
03:18 il faut d'abord qu'il soit vivant, sinon on ne tue pas.
03:21 Ce n'est pas possible.
03:22 Légalement, elle n'est pas coupable.
03:24 Elle n'est pas coupable de meurtre.
03:26 On lui a couru après pour lui dire, écoutez, mademoiselle, arrêtez de cavaler, ça ne sert à rien.
03:30 Vous n'avez pas tué votre père.
03:32 Au départ, elle ne croyait pas.
03:33 Il a fallu qu'on la convainque un petit peu et elle n'a finalement jamais été condamnée.
03:37 Procureur de droit me téléphone.
03:39 C'est toujours comme ça.
03:40 C'est le procureur de droit qui m'appelle en me disant Philippe, viens un peu, on a un mort.
03:44 Écoute, je suis vraiment désolé de t'envoyer là-bas.
03:47 C'est visiblement un suicide, mais franchement, on a un ordre qui vient d'en haut,
03:53 qui nous dit que quand il y a un problème avec une arme à feu, on doit vous envoyer.
03:57 Je dis, écoute, il n'y a pas de problème.
03:57 Je suis là, je suis prêt, j'y vais.
04:00 J'y vais. Et quand j'arrive sur place, les policiers me font le même ramedam.
04:03 Ils me disent écoutez, docteur, on est vraiment désolé.
04:05 On vous dérange pour rien.
04:06 C'est un suicide. Enfin voilà.
04:08 Et je rentre, je rentre dans la maison et c'est des maisons ouvrières.
04:11 Maisons ouvrières, c'est des maisons qui n'ont pas de vestibule.
04:13 Donc quand vous rentrez, vous êtes tout de suite dans la pièce de vie.
04:17 Et là à gauche, il y a le corps.
04:18 Il est assis dans un fauteuil et il tient encore l'arme de la main gauche,
04:23 tout près comme ça, tout près de l'orifice d'entrée qui est juste là.
04:28 Donc l'arme est là, l'orifice d'entrée est là.
04:30 Ils sont tout près l'un de l'autre.
04:31 Ça, ça ne peut pas arriver.
04:33 Quand on tire avec une arme à feu, il y a toujours un recul.
04:35 Alors que je retrouve l'arme dans sa main un peu plus bas,
04:38 par exemple, qui serait tombée comme ça.
04:39 Oui, d'accord. Pourquoi pas ?
04:41 Mais là, hauteur de la tempe,
04:44 pas bon. Vraiment pas bon.
04:46 L'orifice d'entrée est bon.
04:47 C'est-à-dire que quand vous tirez sur quelqu'un avec une arme à feu
04:50 et que l'arme est au contact de la peau,
04:51 tout ce qui sort du canon de l'arme va en dessous de la peau.
04:53 Donc ça, c'est génial.
04:55 On voit tout de suite si l'arme est au contact de la peau ou pas.
04:58 Et personne ne se suicide en mettant l'arme à un mètre de distance
05:00 et en se disant "j'espère que je vais me toucher".
05:02 Ça, ça n'existe pas. L'arme est toujours au contact de la peau.
05:05 Et puis, deuxième truc qui me chipote,
05:07 c'est que c'est une main gauche.
05:10 Or, il y a 10 à 15% de la population qui est gauchère.
05:14 Ça, ça ne tient pas la route.
05:18 Je me dis, c'est suspect.
05:20 Je sors et sur le trottoir, il y a la femme qui est là,
05:22 il y a la famille, il y a plein de monde, plein de monde.
05:25 Et je demande à la femme qui pleure toute l'arme de son corps.
05:29 "Madame, votre mari, il était gaucher ou droitier ?"
05:32 Et la femme répond "je ne sais pas".
05:34 Alors ça, pas bon.
05:36 Une femme qui ne sait pas si son mari est gaucher ou droitier.
05:39 Moi, je connais des hommes qui ne connaissent pas la couleur des yeux de leur femme.
05:42 Mais je ne connais pas une femme qui ne sait pas si son mari est gaucher ou droitier.
05:45 Ça, ça n'existe pas.
05:47 Donc je me dis, toi, t'as quelque chose à cacher.
05:49 Et c'est la fille qui me répond.
05:50 Elle me dit "papa est droitier".
05:51 OK, c'est bon, fini.
05:53 Fini pour quoi ?
05:54 1. L'arme est trop près.
05:55 Et 2. On tire, en général, quand on se suicide, avec sa main dominante.
06:00 Donc mon idée, c'est qu'il y a un droitier armé qui est approché du gars,
06:04 qui a mis l'arme en contact de la temple.
06:06 De toute façon, on ne peut pas bouger.
06:07 L'arme est au contact de la temple.
06:09 Il a tiré, il l'a tué.
06:10 Donc je suis à peu près persuadé que c'est un meurtre.
06:12 L'élément qui va nous convaincre, il y en a eu deux,
06:15 mais l'élément principal, c'est que quand on tire avec une arme à feu,
06:19 on voit ça dans les films, tout ce que je vous raconte là, on voit ça dans les films.
06:23 Il y a de la poudre qui vient se déposer sur les mains.
06:26 Parce que l'arme, elle n'est pas totalement étanche.
06:28 Il y a toujours de la poudre qui sort quand on tire.
06:30 Et la poudre s'est déposée sur les mains.
06:31 Normalement, oui, quand on a tiré, quand on n'a pas tiré, il n'y a pas de poudre.
06:34 Eh bien, chez lui, on n'a pas trouvé de trace de poudre.
06:36 C'était donc bien un meurtre.
06:39 Et le deuxième élément qui nous a convaincus, c'est quand on a pu mobiliser le corps.
06:43 On s'est rendu compte que la balle qui était pourtant en sortie du crâne
06:46 n'était pas dans le dossier du fauteuil, elle était dans le siège.
06:49 Or, en étant assis, il ne pouvait pas se mettre une balle dans le siège.
06:52 Ce n'est pas possible.
06:53 Donc il devait être debout au moment du tir.
06:55 Et s'il avait été debout au moment du tir, la main ne serait jamais restée au contact de la face.
07:00 Donc, il n'y a rien de collé dans cette histoire.
07:03 C'est un montage, clairement.
07:04 Et effectivement, c'est la dame qui pleurait tant.
07:07 Il ne faut jamais se fier aux gens qui pleurent.
07:09 Il ne faut jamais se fier aux réactions des gens.
07:11 Les gens ont des réactions, parfois, mais complètement inouïes par rapport à ce qui est arrivé
07:16 et qui ne correspond pas à ce que nous, on attendrait de quelqu'un qui souffre le décès de quelqu'un.
07:21 Donc voilà, c'était la femme et son amant qui ont mis fin au jour du mari.
07:25 Le procureur de droit m'appelle.
07:27 C'est toujours comme ça que ça commence.
07:28 C'est un coup de téléphone.
07:29 Il m'appelle pour aller voir une dame qui est morte chez elle.
07:33 Alors, c'est une histoire un peu spéciale parce que ce n'est pas le médecin qui a appelé le procureur de droit.
07:40 Ce ne sont pas les policiers non plus.
07:42 C'est carrément les pompes funèbres.
07:44 Donc, vous avez une dame qui meurt chez elle, un médecin qui est appelé et qui constate le décès, mort naturelle.
07:50 Et les pompes funèbres qui viennent, puisqu'ils ont le certificat de médecin, ils peuvent embarquer le corps.
07:54 Les pompes funèbres, en constatant l'aspect du corps, se disent il y a un problème.
07:58 Et là, croyez-moi, quand des pompes funèbres vous disent il y a un problème, vous avez intérêt à les écouter.
08:03 Parce qu'ils voient tellement de corps, beaucoup plus que moi, moi tous les jours, ils voient tellement de corps qu'ils savent, ils ont l'habitude.
08:11 Et on ne fait bien que ce qu'on fait d'habitude.
08:12 Donc, il faut leur faire confiance.
08:14 Et quand ils appellent, moi, je suis très, très interloqué.
08:17 En général, je fais très gaffe.
08:19 Le procureur de droit est prévenu par les pompes funèbres et j'arrive sur place.
08:22 Et les policiers sont là.
08:24 Forcément, on les a envoyés.
08:26 Et ils disent voilà, les pompes funèbres ont trouvé la situation suspecte.
08:30 Je rentre et je vois une dame qui est couverte.
08:32 Elle est dans un divan et elle est couverte par une couverture de métalline.
08:35 La métalline, c'est une couverture en métal que les services dont les services de secours disposent et qui mettent sur les gens pour qu'ils ne perdent pas leur température.
08:42 Voilà. OK.
08:44 Et je vois qu'elle est toute nue dans le divan et qu'elle a les cheveux trempés.
08:48 Et le mari était pas très loin.
08:50 Et je dis votre femme, qu'est ce qu'elle fait toute nue dans le divan?
08:54 Elle a eu très chaud pendant la nuit et donc elle est descendue se coucher dans le divan.
08:59 Bien, ça lui arrive souvent.
09:00 Elle a souvent très chaud.
09:02 Ah bon? Et là, les cheveux très mouillés.
09:04 Oh oui, écoutez, elle transpire vraiment beaucoup et c'est normal qu'elle ait les cheveux mouillés.
09:10 Je vais dans sa chambre parce que si quelqu'un transpire beaucoup régulièrement, qu'est ce qui se passe?
09:15 Le matelas prend un matelas qui est humide, il pourrit.
09:19 Donc, soit on a mis une naselaise, c'est à dire une protection au matelas pour pas qu'il pourrisse, soit il pourrit.
09:24 Je dois trouver l'un ou l'autre et je ne trouve ni l'un ni l'autre.
09:26 Donc, je sais qu'il me ment. Ça commence très mal.
09:30 Je descends, je retourne près du corps de la dame et j'ouvre la bouche de la dame.
09:36 Et là, il y a un bouchon miqueux qui sort.
09:38 Alors ça, c'est une espèce de champignon de mousse qui fait comme ça.
09:42 Prends comme ça la bouche et le nez, qui est un mélange d'air qu'il y a dans les poumons,
09:46 du surfactant, soit un produit qui tapisse la peau des poumons et de l'eau qui est rentrée.
09:51 Donc, il y a forcément de l'eau qui est rentrée dans le poumon.
09:54 Et ça, c'est typique d'une noyade. C'est ce que l'on voit chez les noyés.
09:57 Vrai, dans les 24 premières heures qui suivent la noyade, on trouve régulièrement ce bouchon miqueux.
10:03 Et là, il était là. Et le mari qui me regardait de loin, normalement, il aurait pu être là.
10:08 Enfin, il était encore plus ou moins dans la pièce.
10:10 Il me dit ça, écoutez, je l'ai déjà effacé plusieurs fois.
10:14 Ça revient tout le temps. J'ai dit écoutez, monsieur, ça va revenir pendant à peu près 24 heures.
10:18 C'est la preuve que votre femme est morte noyée.
10:21 Et là, il est devenu blanc comme la mort.
10:25 Les policiers l'ont pris. Ils n'ont pas eu besoin de l'interroger beaucoup.
10:29 Il a fini par expliquer qu'en fait, c'était disputé avec sa femme.
10:32 Elle était en train de prendre son bain et l'a attrapé par les pieds en même temps qu'il lui poussait la tête sous l'eau.
10:36 Il l'a effectivement noyé. Aucune trace de la pression de la main sur le crâne.
10:41 Il n'y a pas donné des coups. Il a poussé. Aucune trace, mais quand même une trace de noyade
10:45 qui permettait de dire qu'elle était morte noyée et ce avec une certitude totale.
10:49 [SILENCE]