L'invitée du jour : détrônés, vaincus, déshonorés... Et pourtant, ils ont fait l'Histoire !

  • il y a 6 mois
Retrouvez William Leymergie entouré d’experts, du lundi au vendredi en direct dès 12h30, pour une émission dédiée aux problématiques de notre quotidien.

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00:00 ...
00:02 -Bonjour, Clémentine Portier-Kattenbach.
00:05 Vous êtes journaliste, historienne,
00:08 vous dirigez un ouvrage collectif.
00:10 Ils sont combien, d'ailleurs, à avoir participé ?
00:13 -16 auteurs.
00:14 16 auteurs, mais les meilleurs sur le sujet.
00:18 -Sur le sujet.
00:19 Ca s'appelle "Les grandes romontadas de l'histoire".
00:22 Pour commencer, l'expression "romontada",
00:24 ça mérite une explication de texte.
00:27 Pourquoi l'utiliser pour parler d'histoire ?
00:29 -C'est vrai que "romontada", c'est un terme de foot.
00:32 C'est vraiment la romontada, c'est quelque chose d'assez subi,
00:36 c'est la remontée inattendue, c'est le sursaut.
00:39 Souvent, on dit qu'en sport, les Français sont les spécialistes
00:42 des romontadas. On est globalement mauvais,
00:45 et tout d'un coup, on est sublime,
00:47 et on ne sait pas pourquoi on sort du trou.
00:49 C'est très vrai, en rugby, ça l'a toujours été.
00:52 C'est notre réputation auprès des Britanniques.
00:55 Les Français sont médiocres. -C'est les Anglais qui disent ça.
00:59 -En attendant, je me suis rendue compte que ce terme,
01:01 qui est plutôt sportif, en fait, il était tout à fait approprié
01:05 pour des personnages historiques qui ont été statufiés
01:08 par leur destin, par la gloire,
01:11 mais qui tous ont connu des traversées du désert,
01:14 des passages à vide, des moments très difficiles.
01:17 Vous parliez de crises psychologiques,
01:19 mais souvent, c'est qu'ils sont en taux.
01:22 -Ah oui, le fond du trou. -Ah oui, le fond du trou,
01:24 c'est le fond du trou. -Vous allez voir.
01:27 -Le fond du trou, aussi. -On va commencer par là.
01:30 Les différentes personnalités historiques de ceux-ci,
01:33 j'en ai cité quelques-unes,
01:34 ont-ils un trait de caractère commun ?
01:37 -Le trait de caractère commun, c'est l'ambition,
01:39 l'énergie, la volonté,
01:42 c'est aussi la conviction de chacun d'eux,
01:44 c'est vrai pour Napoléon, pour De Gaulle, pour Louis XVIII.
01:48 Ils ont la conviction qu'ils sont appelés
01:50 à jouer un rôle dans l'histoire. -Et très tôt.
01:53 -Bien sûr, Bonaparte, Charles de Gaulle, l'enfant,
01:56 il y a une anecdote significative à cet égard,
01:58 c'est De Gaulle auquel on demande,
02:01 "Mon général, comment la France se porte-t-elle ?"
02:05 Et là, il prend un air préoccupé, il répond, "Mal, je vieillis."
02:09 C'est extraordinaire. Cet homme...
02:11 -Il est la France. -Il est la France,
02:13 il est littéralement la France. Bonaparte, on le voit aussi,
02:16 c'est très vrai dans le Napoléon d'Abel Gance,
02:19 on le voit solitaire, traversant la Méditerranée,
02:22 il incarne la France, il va sauver la France.
02:25 Donc il y a une certaine dose, un peu de mégalomanie, sans doute,
02:28 mais leur caractère commun aussi,
02:30 c'est que même quand ils sont au fond du trou,
02:33 ce ne sont jamais des losers, ce sont des gagnants,
02:36 et eux recyclent le désespoir en énergie.
02:39 Oui, il y a un rapport entre l'énergie du désespoir
02:42 et la remontada. Si on est au fond,
02:44 on donne le coup de jarret qui fait qu'on réapparaît.
02:47 -Ils ne sont jamais foutus. -Oui.
02:49 C'est d'ailleurs pourquoi le dessin de ces grands hommes,
02:52 avec un grand H, on inclut les dames, naturellement,
02:55 c'est pour ça qu'il nous fascine, c'est que la chute seule,
02:58 ça a quelque chose de mélancolique, de dur, de triste, de négatif.
03:03 Être à peu près au sommet, s'effondrer et revenir,
03:07 l'idée du phénix, ça, je pense que ça nous...
03:10 -On va prendre quelques exemples. -C'est le facteur commun.
03:13 -Oui, absolument. -On va prendre l'exemple
03:16 de Napoléon, vous allez comprendre ce qu'elle veut dire.
03:19 C'est une sorte... Un champion.
03:21 Il a un record qui est quand même assez particulier, Napoléon.
03:25 -A commencer par un record qui est assez peu connu,
03:27 parce que la remontada des remontadas,
03:30 c'est naturellement le retour de l'île d'Elbe.
03:33 Il est foutu, il est dans son île, il est un petit souverain fantoche,
03:37 il s'évade et reprend le pouvoir.
03:38 C'est une remontada très connue,
03:40 c'est le champion des remontadas.
03:42 Mais celle qu'il est moins, c'est que quand il est jeune homme,
03:46 il a été dans la roue des frères Robespierre,
03:49 il est du 9 Termidor, il est en prison à Antibes.
03:51 Il est encore Bonaparte, c'est un jeune officier,
03:54 et là, il se dit, dans le meilleur des cas,
03:56 si je ne suis pas guillotiné,
03:58 je vais m'embaucher comme mercenaire
04:00 auprès de l'Empire ottoman.
04:02 Il fait une demande, une proposition.
04:04 Donc, il s'en est fallu vraiment d'un chouïa
04:07 pour que jamais Bonaparte ne devienne Napoléon.
04:10 Et dans bien des cas, prenez Churchill...
04:12 Le texte magnifique a été fait par Stéphane Bern sur Churchill,
04:17 mais Churchill, au lendemain de la guerre de 14,
04:19 on lui fait endosser le massacre des Dardanelles,
04:22 300 000 morts, il perd son titre de l'ordre de la mirotée,
04:25 il est au fond du trou,
04:27 il entre dans une très profonde dépression.
04:29 -Il est fini. -Simplement, 20 ans plus tard,
04:32 il est le Premier ministre anglais.
04:34 Souvent, c'est ça, ce sont des hommes
04:36 qui ont su rebondir.
04:37 -Le général de Gaulle, lui aussi, il a vécu, j'allais dire,
04:40 des trous d'air dans sa carrière, c'est pire que ça,
04:43 avec des retours spectaculaires.
04:45 -Belle traversée du désert, après, il a abandonné le pouvoir
04:48 en pensant qu'on allait venir le chercher en 46,
04:51 puis finalement, on n'a pas besoin de lui,
04:53 il fait une tentative de créer son parti
04:56 avec d'anciens compagnons de la Libération, le RPF,
04:59 et puis 55, c'est fini, il n'est plus rien.
05:01 Il y a la guerre d'Algérie,
05:03 et on vient le rechercher comme un recours,
05:05 il a plus de 60 ans, mais il y a un moment
05:08 où il n'est plus rien, alors qu'il a 56 ans.
05:10 De la même manière, un Clémenceau,
05:12 le père la victoire de 14-18,
05:14 en 1893, il y a le fameux scandale de Panama,
05:18 il est à poil, il n'a plus rien.
05:20 -Parmi les femmes présentées,
05:21 il y en a une dont on vient de parler,
05:23 c'est Camilla.
05:25 Pourquoi vous avez choisi la reine ?
05:27 -Pour montrer que c'est "to be continued",
05:29 c'est que, bien sûr, c'est une règle générale humaine,
05:33 c'est la chute, la remontée, le désespoir,
05:35 l'espoir, le rebond. Camilla, elle a été
05:38 la personne la plus haïe d'Angleterre.
05:40 -A l'inverse des autres, elle n'a pas d'ambition.
05:43 Elle ne rêve pas de réunir sur la couronne.
05:45 -C'est vrai. Elle ne rêvait pas.
05:47 Vous avez raison.
05:48 -C'est le principe qui est incroyable.
05:51 -Mais malgré tout, c'est ça.
05:53 C'est de se dire que cette femme que Diana a appelée
05:56 le "Rottweiler", que tout le monde détestait,
05:58 elle a été sacrée reine d'Angleterre.
06:00 -C'est plus la persévérance qui est sanctionnée.
06:03 -La persévérance.
06:04 De toute façon, elle n'était pas pour grand-chose,
06:07 mais le cheminement de cet individu
06:10 et quand même, cette espèce d'aspiration,
06:12 de spirale vers le haut, est quand même stupéfiant.
06:15 Il n'y a pas forcément, si vous voulez,
06:18 l'ambition. Je dis que c'est un trait commun.
06:20 Là, on peut dire que c'est l'ambition d'aimer
06:23 l'homme qu'elle a aimé depuis toujours.
06:25 C'est sa constance et sa fidélité.
06:27 -Elle y croit jusqu'au bout.
06:29 Toujours espoir que, finalement, elle l'épousera.
06:32 Et oui. -Elle a eu raison.
06:33 -Elle a eu raison.
06:34 Merci, Clémentine Portier-Kartenbach.
06:37 Il y a plein de gens qui sont des historiens
06:40 que vous connaissez, qu'on a déjà reçus ici même.
06:42 Et puis, comme vous l'avez dit tout à l'heure,
06:45 il y a Stéphane Berde, entre autres.
06:47 Merci beaucoup. -Merci.
06:49 [Musique]

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