Florent Lemonnier, président de l'association des cinémas de proximité de la Gironde
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00:00 Il est 8h moins le quart, le petit cinéma de Pompignac dans l'Entre-deux-Mers est en difficulté.
00:03 Alors il lance une cagnotte pour s'acheter un projecteur et continue à diffuser des films.
00:07 Son exemple est-il révélateur de difficultés pour nos petits cinémas ?
00:11 Eh bien nous recevons justement ce matin Florent Lemoynier, c'est le directeur du cinéma luxe à Cadillac
00:15 et président de l'association des cinémas de proximité de Gironde, Marie.
00:19 Bonjour Florent Lemoynier.
00:20 Bonjour.
00:21 Un cinéma comme celui de Pompignac qui lance une cagnotte,
00:25 est-ce que c'est quelque chose qui est révélateur de l'état des cinémas de proximité en Gironde ?
00:30 Non, pas vraiment. C'est un cas très spécifique et pas représentatif de l'ensemble des salles.
00:35 Alors il est représentatif parce que c'est un mono-écran,
00:38 comme la grande majorité des salles de proximité de la Gironde.
00:41 Donc une seule salle pour les gens qui ne sont pas au travail.
00:43 Donc une seule salle, mono-écran, exactement.
00:45 Mais en réalité c'est ce qu'on appelle, nous dans le jargon, un point de tournée.
00:49 C'est-à-dire que c'est un lieu qui est géré au quotidien par une équipe de bénévoles,
00:55 là où les cinémas sont plutôt gérés de proximité par des professionnels
00:59 et le secteur l'exige et on insiste un peu là-dessus.
01:04 Mais un opérateur privé vient leur fournir du matériel,
01:09 en l'occurrence du matériel de projection,
01:10 pour pouvoir fonctionner au quotidien.
01:12 Il y a aussi une mise à disposition technique
01:14 afin de pouvoir assurer les séances au quotidien.
01:18 Donc cet opérateur a décidé de se désengager pour des raisons qui lui sont propres.
01:24 Donc effectivement je comprends la problématique qui est celle de devoir acheter,
01:28 renouveler du matériel qui est relativement onéreux.
01:30 - Alors on parle évidemment ce matin de ces petits cinémas,
01:33 ces cinémas de proximité.
01:34 On le disait tout à l'heure, il y en a 30 en Gironde.
01:36 On a demandé à nos auditeurs ce matin,
01:38 s'ils préfèrent se rendre dans leur cinéma, dans leur commune ou dans les grands complexes.
01:42 On va écouter la réponse de cette bordelaise.
01:45 - Bonjour, je m'appelle Catherine.
01:47 Petit cinéma, je préfère autant.
01:48 Je partage le film, même si les personnes je ne les connais pas.
01:51 En sortant, on arrive toujours à se dire un petit bout.
01:53 Les séances me conviennent mieux que ces grandes salles,
01:56 où déjà il n'y a pas grand monde.
01:57 Voilà, je ne me sens pas bien.
01:59 - Et puis nous avons aussi la réaction en direct ce matin de Jacqueline,
02:01 qui nous appelle de Villeneuve d'Ornon,
02:03 pour nous parler du cinéma du genre francophone, Salé-Ognon.
02:07 - Bonjour Jacqueline.
02:08 - Oui bonjour.
02:10 - Alors vous préférez donc petit cinéma, cinéma de proximité ?
02:13 - Absolument, oui oui tout à fait.
02:15 - Alors expliquez-nous pourquoi.
02:16 - Parce que j'habite Villeneuve d'Ornon,
02:19 et j'ai été effectivement au grand complexe UGSC de Villeneuve d'Ornon,
02:23 où à plusieurs reprises, j'ai été un petit peu agressée,
02:27 subie des attouchements pendant les séances.
02:32 Et donc je me refuse complètement aujourd'hui,
02:35 parce que j'allais, bon moi je suis retraitée,
02:37 j'allais à des séances un petit peu décalées,
02:39 et à ce moment-là, il y a très peu de monde dans les salles,
02:42 et il y a une espèce de stress,
02:44 qui fait qu'on fait des rencontres qui sont quand même très déplaisantes.
02:49 - Donc pour des raisons de sécurité.
02:51 Donc c'est le choix Jacqueline,
02:54 pour des raisons un petit peu extrêmes on l'admet,
02:56 mais quand même, même sur notre page Facebook,
02:58 on a eu quelques commentaires,
02:59 beaucoup de plébiscites quand même pour les cinémas de proximité.
03:02 J'imagine que c'est quelque chose qui vous fait chaud au cœur.
03:05 Qu'est-ce qui fait l'atout de ces cinémas de proximité aujourd'hui, Florent Lemoynier ?
03:08 - Oui alors c'est l'attachement des spectateurs à leur salle,
03:12 et une fidélisation accrue qui sanctionne un petit peu un modèle,
03:15 un modèle qui est mis en place par ces salles,
03:18 où il y a beaucoup d'animations, beaucoup de rencontres,
03:20 faire de ces salles un lieu de vie, un lieu d'échange,
03:22 un vecteur social d'attractivité aussi pour le territoire.
03:26 Donc c'est surtout la fidélisation et l'attachement des spectateurs
03:29 qu'on favorise à leur salle,
03:31 qui est un peu le levier, le nerf de la guerre.
03:34 - On l'a dit souvent, le cinéma en général n'a pas retrouvé sa fréquentation d'avant Covid.
03:39 Comment se portent nos cinémas de proximité en Gironde ?
03:42 - Alors effectivement au niveau national,
03:44 nous on différencie la petite exploitation à laquelle appartient la majorité des salles de proximité de la Gironde
03:49 et la grande exploitation, à laquelle appartiennent plutôt les grands complexes.
03:53 La petite exploitation se porte au niveau national mieux que la grande exploitation,
03:58 qui a plus souffert de cette période, et encore aujourd'hui,
04:01 parce qu'il y a un déficit de grandes productions de films américains,
04:04 liées à la grève des scénaristes aux Etats-Unis en particulier.
04:07 Ce dont on ne se réjouit pas,
04:09 parce qu'effectivement, quand les cinémas se portent mal,
04:12 ça a un impact sur l'ensemble du secteur et l'ensemble des cinémas.
04:16 Et les salles de proximité de la Gironde,
04:18 en fait on arrive à une stabilisation des chiffres par rapport à la moyenne 2017-2019,
04:23 donc pré-Covid,
04:24 donc on a un niveau équivalent en termes de fréquentation pour les cinémas de proximité.
04:28 Donc on peut dire qu'il y a une vraie dynamique qui s'est remise en place,
04:31 que les spectateurs ont retrouvé leurs salles de proximité,
04:35 et donc on s'en réjouit.
04:36 Donc elles se portent plutôt bien.
04:38 7h50 sur France Bleu Gironde,
04:39 notre invité ce matin, Florent Lemoynier,
04:41 le directeur du cinéma luxe de Cadillac,
04:43 mais aussi le président de l'association des cinémas de proximité de la Gironde.
04:46 Alors dans les temps actuels, si on peut dire ça comme ça,
04:49 il y a plusieurs enjeux évidemment pour les cinémas de proximité.
04:51 On sait que les coûts de l'énergie ont beaucoup augmenté,
04:53 ça ne peut pas épargner les salles de cinéma,
04:57 il y a aussi une question de pouvoir d'achat.
04:59 Comment est-ce que vous travaillez sur ces questions
05:01 pour continuer à attirer des spectateurs dans vos salles ?
05:03 Oui, alors effectivement, la question du ticket est très importante,
05:07 et c'est vrai que le tarif moyen d'un cinéma de proximité,
05:10 il doit être autour de 5,50€,
05:13 là où la moyenne nationale est plus élevée.
05:16 Et c'est beaucoup moins cher que dans les grands complexes.
05:18 Et c'est beaucoup moins cher,
05:19 donc il y a une vraie réflexion à mener,
05:21 y compris pour les grands complexes là-dessus,
05:23 à l'aube de la question du pouvoir d'achat.
05:27 Et il y a la question effectivement du coût énergétique des salles,
05:31 qui au moment du pic du prix énergétique,
05:34 en particulier en 2022, a été assez urgente.
05:37 Donc il y a plusieurs leviers sur lesquels on essaie de jouer.
05:42 On a une matinée destinée aux élus jeudi prochain au département,
05:46 pour réfléchir ensemble sur ces questions,
05:48 qui passent d'abord par une rénovation thermique des bâtiments,
05:52 qui est le levier le plus efficace,
05:54 mais aussi une question autour de la sobriété
05:57 en termes de fonctionnement des cinémas.
05:59 La dame tout à l'heure, je l'entendais évoquer,
06:01 les séances sur lesquelles il y a très peu de monde.
06:04 C'est le cas aussi dans les cinémas de proximité,
06:06 il y a des horaires sur lesquels les séances sont très peu fréquentées.
06:10 En journée par exemple ?
06:12 En journée, en début d'après-midi,
06:13 alors c'est des séances qui sont plutôt destinées aux personnes âgées,
06:16 aux personnes retraitées, qui ont le temps de venir à ces journées,
06:18 mais c'est des séances qu'on peut interroger
06:22 au regard du coût de fonctionnement des salles,
06:27 ou aussi pour penser la question d'un masse salariale des cinémas.
06:32 Donc il y a toute une problématique autour de ces questions
06:35 qui émerge aujourd'hui.
06:37 Est-ce qu'il y a aussi un moyen de moderniser peut-être l'équipement
06:40 pour devenir plus vertueux en termes d'écologie,
06:43 et aussi réduire les coûts, l'un va souvent avec l'autre ?
06:45 Oui, tout à fait, il y a ce qu'on appelle la question du design énergétique,
06:49 qui passe par repenser les espaces, par exemple,
06:52 les flux de spectateurs dans différents lieux
06:55 qui seront plus ou moins chauffés.
06:57 Et effectivement, il y a la question du matériel en particulier,
06:59 puisqu'on a parlé du matériel de projection.
07:01 Aujourd'hui, on sait qu'un projecteur laser a un coût énergétique
07:06 qui est trois fois moins important qu'un projecteur numérique classique
07:10 qui a émergé il y a dix ans.
07:12 Et ce sont de gros investissements.
07:14 Et ce sont de gros investissements, et le cas de Pompignac,
07:16 un exemple éloquent à ce propos, oui.
07:18 Merci beaucoup, Florent Lemoynier, d'avoir été avec nous ce matin,
07:21 directeur du cinéma Luxe de Cadillac et président de l'association
07:24 des cinémas de proximité de la Gironde.
07:26 Bonne journée à vous.
07:27 Merci.
07:28 Et pour écouter cette interview en vidéo, rendez-vous sur l'application.
07:30 Ici, l'appli par France Bleu, par France 3 Nouvelle-Aquitaine.