Scrutin proportionnel: le débat est relancé par la présidente de l'Assemblée

  • il y a 5 mois
L'idée d'une "dose" de proportionnelle pour les élections législatives, remise sur la table par la présidente de l'Assemblée nationale, divise les députés macronistes. Cette proposition figurait dans la révision constitutionnelle abandonnée en 2018 et 2019. Et si Emmanuel Macron s'y est à nouveau dit favorable en 2022, la mesure ne figurait pas dans son programme de réélection. Pour Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée, il est "temps d'honorer cet engagement" pour que la chambre basse "ressemble davantage aux Français". Elle a entamé des consultations, avec l'objectif d'aboutir à un texte de loi "d'ici au début de l'année 2025".

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00:00 La politique Mathieu Croissandeau, revoilà le serpent de mer de la proportionnelle.
00:05 Oui c'est une idée qui revient sur la table grâce à la présidente de l'Assemblée nationale, Yael Brown-Pivet,
00:10 qui propose d'instaurer une dose de proportionnelle aux prochaines élections législatives.
00:15 Alors je rappelle qu'aujourd'hui on élit les disputés au scrutin majoritaire à deux tours.
00:19 En gros on vote pour des candidats et celui qui rassemble le plus de voix l'emporte.
00:23 Avec la proportionnelle on vote pour des listes et on répartit les sièges entre les listes en fonction de leur score.
00:28 Emmanuel Macron il l'avait promis en 2017, il avait prévu de la faire figurer dans sa grande réforme institutionnelle en 2018
00:34 et puis patatra la grande réforme institutionnelle n'avait jamais vu le jour.
00:37 On était au moment de l'affaire, je ne sais pas si vous vous en souvenez, l'affaire Benalla.
00:40 Du coup Yael Brown-Pivet s'y est attelé avec l'idée d'expérimenter ça dans dix départements les plus peuplés,
00:47 ceux qui envoient le plus de députés.
00:49 Et elle a reçu cette semaine d'ailleurs les différents patrons de groupe à l'Assemblée pour en discuter.
00:54 Ça présenterait quel avantage ?
00:55 De mieux représenter la diversité des sensibilités en France, d'avoir une Assemblée nationale plus au fait, plus conforme à la réalité du pays.
01:04 En gros d'éviter certaines aberrations démocratiques comme ce fut le cas pendant 30 ans par exemple avec le Rassemblement National
01:10 qui avait des millions de voix à la présidentielle mais qui n'avait aucun député à l'Assemblée.
01:14 Ça permettrait aussi de sortir de ce qu'on appelle la culture du fait majoritaire qui fait que pendant cinq ans la majorité a tous les pouvoirs
01:20 et l'opposition n'a rien d'autre à faire que s'opposer car avec la proportionnelle un parti n'aurait pas la majorité à lui tout seul mais serait obligé de composer.
01:28 Mais sauf que Mathieu c'est déjà le cas puisque le RN a aujourd'hui 89 députés, le camp présidentiel n'a pas la majorité à lui tout seul.
01:35 Oui alors ça c'est la particularité des dernières législatives de 2022 qui avaient surpris tout le monde.
01:40 Donc ça veut dire que sans proportionnelle on peut y parvenir.
01:42 Exactement.
01:43 C'est un accident.
01:44 D'ailleurs beaucoup avaient dit "tiens les français on fait comme si la proportionnelle était là".
01:47 C'était un accident, c'était en tout cas inédit dans le paysage et ce qui explique un peu que les opposants comme les soutiens de la proportionnelle jouent aujourd'hui un peu à front renversé.
01:56 Ceux qui la réclamaient comme le RN sont un peu moins pressés de l'avoir appliqué maintenant qu'ils espèrent pouvoir l'emporter aux prochaines législatives.
02:05 Et dans la majorité certains se disent aujourd'hui que la proportionnelle ça pourrait agir même comme un "naître don" c'est le terme qui est employé,
02:11 pour atténuer une prochaine flambée du RN.
02:13 Donc là on est vraiment à front renversé.
02:15 De ce point de vue en fait la proportionnelle c'est un peu un indicateur de bonne santé politique.
02:19 Quand vous vous en sentez fort, vous vous enfichez.
02:22 Quand vous vous sentez faible, vous la proposez.
02:24 Mais c'est pas la panacée la proportionnelle.
02:26 Non c'est pas un système parfait.
02:28 Il y a deux reproches.
02:29 Le premier reproche que lui adressent ses opposants c'est de faire des députés un peu hors sol.
02:34 Parce que plutôt que de ratisser le terrain pour espérer l'emporter dans leur circonscription,
02:37 les candidats ils ratisseraient surtout leur parti pour se faire désigner sur la liste.
02:41 Ça serait une forme de prime aux appareils chic.
02:43 Et certains disent on aurait des députés encore plus déconnectés qu'ils ne le sont aujourd'hui.
02:46 Second reproche, la proportionnelle c'est beau sur le papier,
02:49 mais en pratique ça nécessite un vrai changement de culture politique.
02:53 Un changement d'état d'esprit.
02:55 A l'étranger ça existe, dans les régimes parlementaires vous avez ce qu'on appelle des coalitions,
02:59 des partis qui se mettent d'accord, comme l'Allemagne, après les résultats des élections,
03:02 et sur un programme commun, même s'ils ne sont pas forcément d'accord sur tout, pour gouverner.
03:06 En France on est dans une culture absolument binaire,
03:09 où la majorité décide toujours que l'opposition dit des bêtises, et inversement.
03:13 On n'est pas habitué à composer, on considère les compromis comme des compromissions.
03:17 En fait on n'est pas mûrs.
03:18 La proportionnelle c'est pour les systèmes politiques un peu matures.
03:21 Et quand on voit ce qui se passe à l'Assemblée depuis deux ans,
03:25 on peut craindre en effet que la proportionnelle ne produise pas que de bonnes choses.
03:30 Merci Mathieu.

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