• il y a 7 mois
Jérémie Fontanieu, professeur de Sciences économiques et sociales au lycée Eugène Delcroix, à Drancy, en Seine-Saint-Denis, était l'invité de BFMTV ce samedi soir.

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Transcription
00:00 Vous êtes professeur de sciences économiques et sociales au lycée de la Croix de Drancy, en Seine-Saint-Denis.
00:05 Dans un documentaire en salle actuellement, qui s'intitule "Le monde est à eux",
00:09 vous racontez les coulisses de votre méthode pédagogique qui permet à 100% de vos élèves d'obtenir le bac,
00:15 c'est à peu près 10 points de plus que la moyenne dans le département de la Seine-Saint-Denis.
00:18 Ça fait 10 ans que ça dure, d'abord bravo.
00:21 Merci.
00:22 Réconciliation, c'est donc votre recette magique, c'est le nom de la méthode que vous avez fondée ?
00:28 Oui, c'est une méthode, ce n'est pas une recette magique parce qu'en éducation,
00:31 comme dans beaucoup de domaines, il n'en existe pas.
00:33 Mais c'est vrai que ce dont on a parlé sur la violence qui existe dans la société
00:37 et qui est symptôme d'une crise de l'autorité, qui ne se résoudra pas par des slogans
00:42 ou une posture un peu verticale ou des coups de menton,
00:45 comme on a pu l'entendre chez divers acteurs, comme notamment venant du gouvernement,
00:49 mais simplement l'autorité nécessite de la confiance.
00:52 Et c'est vrai que pour moi, enseignant, comme pour beaucoup d'enseignants,
00:55 la difficulté qu'on a à mettre les élèves au travail, et pas seulement en Seine-Saint-Denis,
00:59 même si la méthode est née en Seine-Saint-Denis,
01:01 nous a poussé avec un collègue, David Benoît, à élaborer cette méthode
01:05 qui a fait ses preuves au cours des années, comme on le voit dans le film.
01:07 En fait, le cœur de la méthode, c'est que nous, en tant qu'enseignant,
01:10 on est en difficulté, on souffre beaucoup d'impuissance
01:13 parce que les élèves sont des enfants ou des adolescents,
01:16 ils manquent de confiance en eux, ils ont beaucoup la flemme,
01:19 et puis ils sentent que la société dysfonctionne
01:21 et qu'il y a beaucoup de violence dans la société qui se répercute aussi chez eux.
01:25 Et donc, simplement, on n'arrive pas à les mettre au travail.
01:27 Donc, on a, par une série de chances ou de hasards,
01:31 réussi à mettre en place cette méthode qui consiste en gros
01:34 à établir une alliance entre parents et professeurs
01:37 pour qu'en gros, en tant qu'enseignant, on ne subisse plus,
01:40 qu'on arrive véritablement à mettre les élèves au travail.
01:43 Et ce qui est formidable, c'est qu'une fois que cette alliance se crée,
01:46 les parents deviennent petit à petit des partenaires,
01:48 les élèves se mettent au travail et petit à petit,
01:51 ils ont le déclic qui est fort.
01:52 C'est-à-dire ? Expliquez-nous ce lien étroit
01:54 que vous instaurez avec les parents de vos élèves,
01:57 dès le départ d'ailleurs.
01:59 C'est ça. En fait, dans l'éducation nationale,
02:01 à la fois dans notre formation et dans nos pratiques,
02:03 on ne nous dit jamais que les parents d'élèves peuvent être un levier
02:06 ou peuvent être des partenaires qui nous aident.
02:08 Donc, c'est vrai que souvent, les communications qu'on a
02:11 avec les parents d'élèves, pour nous enseignants,
02:13 c'est seulement ponctuellement et souvent quand il y a des soucis.
02:16 Donc, du coup, il y a une sorte de défiance mutuelle
02:18 à la fois parce que nous, en tant qu'enseignant,
02:19 on a beaucoup de choses à faire, c'est un métier qui est difficile,
02:21 on subit des politiques éducatives qui sont assez catastrophiques,
02:24 les salaires ne sont pas assez élevés,
02:25 les conditions de travail ne sont pas bonnes.
02:27 Donc, à aucun moment…
02:28 Et pourtant, vous allez au-delà du temps de cours,
02:30 puisque c'est l'un des éléments forts de votre méthode.
02:33 En fait, le cœur de la méthode, c'est d'une certaine manière
02:36 contourner l'obstacle du manque de bonne volonté des élèves
02:39 en arrêtant de se battre contre les élèves,
02:41 ce que beaucoup de profs, y compris nous,
02:42 il y a quelques années faisions, ce qui est très frustrant.
02:45 Mais plutôt, l'idée, c'est d'aller chercher les parents tôt,
02:47 en début d'année, avant qu'il y ait eu les problèmes,
02:49 de façon à ce que les parents acceptent de nous suivre.
02:51 Et en fait, les efforts des élèves vont venir non pas
02:54 de nos efforts et de notre épuisement,
02:55 mais de l'implication des parents.
02:57 Alors, comment ça se passe avec les parents ?
02:58 Qu'est-ce que vous faites avec eux ?
02:59 Comment vous échangez avec eux au-delà du cadre institutionnel ?
03:03 C'est vrai qu'habituellement, il y a une réunion en début d'année,
03:06 une remise des bulletins au bout de quelques mois.
03:08 Là, l'idée, c'est d'aller chercher les parents très tôt
03:11 pour leur dire que nous avons besoin d'eux d'une certaine manière.
03:13 Et puis surtout…
03:14 Vous n'hésitez pas à leur envoyer des textos ?
03:15 En fait, c'est ça.
03:16 C'est à la fois aller les chercher tôt et les chercher surtout de manière régulière.
03:19 Avoir un lien hebdomadaire, c'est l'un des symboles un petit peu de la méthode.
03:23 Il y a un SMS hebdomadaire qui leur envoie un compte rendu
03:26 et qui fait que les parents sont impliqués, nous suivent.
03:28 Et donc, il y a un petit peu de travail en plus en début d'année
03:31 pour aller chercher les familles, mais très rapidement, c'est rentabilisé.
03:33 Et la méthode, du coup, ne consiste pas à travailler plus,
03:36 mais à travailler autrement et du coup, arrêter de s'épuiser.

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