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00:00 Un spectacle rarissime dans le ciel de Dordogne ce week-end des aurores boréales.
00:04 Dans la nuit de vendredi à samedi, le ciel est devenu rose, violet, vert.
00:09 C'est extrêmement rare d'en voir autant et aussi bien chez nous.
00:12 On en parle ce matin avec le président du club d'astronomie de Saint-Médard de Mucidon, Astro 24.
00:17 Il est votre invité, Louis de Bergevin.
00:18 Bonjour Michel Favré.
00:19 Bonjour Louis.
00:20 Alors, est-ce que vous pouvez nous raconter un petit peu l'émotion que vous avez ressentie
00:24 vendredi soir en voyant ces aurores boréales ?
00:26 Le truc c'est que c'était la surprise totale.
00:28 On était dehors comme souvent le week-end avec le club pour observer le ciel avec des
00:32 télescopes.
00:33 On était en train de regarder des petites galaxies plutôt côté sud, quand notre attention
00:36 était tirée par des lumières assez fortes au nord.
00:39 Et quand on les a vues avec leur forme un peu de draperie et de mouvement, ça pouvait
00:43 être que des aurores boréales.
00:44 Et je ne m'attendais vraiment pas à en avoir en Dordogne.
00:47 Parce que quand on en voit en France, c'est plutôt dans les zones nord, la Bretagne, des
00:51 choses comme ça.
00:52 Mais à 45 degrés de latitude où on est nous, c'est rarissime.
00:55 Vous ne saviez pas qu'il y allait en avoir ?
00:57 Non, parce que comme un imbécile, alors que j'avais des applications sur ma mobile pour
01:02 me prévenir en cas d'aurore, parce que j'étais en Finlande début mars pour en voir, j'avais
01:05 tout désinstallé parce que je pensais que ça ne servait à rien en Dordogne.
01:08 Sinon j'aurais été prévenu un jour ou deux avant.
01:10 Les aurores, on peut les prévoir trois jours avant en général.
01:12 Et alors qu'est-ce que vous avez ressenti ? Le cœur qui bat, l'excitation ?
01:16 C'est un spectacle qui est extraordinaire.
01:18 C'est mouvant, c'est impressionnant.
01:20 Quand on imagine les peuples anciens qui ne savaient pas du tout ce qu'était ce phénomène,
01:25 un peu comme les éclipses aussi, c'est quelque chose de monstrueux.
01:29 Ça prend tout le ciel.
01:30 En plus là, elles étaient vraiment très très grosses.
01:32 C'est tout à fait inhabituel.
01:34 Les zones les plus hautes, c'est le rouge.
01:37 Alors à l'œil, on ne voit pas les couleurs.
01:39 On voit que des choses un peu rosées par moments.
01:41 C'est en photo qu'on voit bien les couleurs.
01:44 La partie rouge, elle montait jusque vers la grande ourse, c'est-à-dire au-dessus de
01:47 notre tête.
01:48 Ça, c'est jamais vu.
01:49 Et en largeur, ça prenait tout l'horizon nord.
01:52 Ça allait depuis le nord-ouest jusqu'au nord-est.
01:55 Ça prenait tout l'horizon.
01:57 C'était vraiment incroyable.
01:58 Et sur les photos, parce que je suis vite rentré chez moi chercher mon appareil photo,
02:03 sur les photos, on voyait du vert dans la partie basse.
02:05 Et ça aussi, le vert, c'est rarissime de les voir sous nos latitudes.
02:08 Parce qu'en fait, les aurores, ce sont des particules solaires qui viennent taper dans
02:13 notre atmosphère.
02:14 Et suivant l'altitude, ça produit des couleurs différentes suivant les atomes et les molécules
02:18 qui sont rencontrées.
02:19 Donc, la partie haute est rouge, c'est au-dessus de 200 km.
02:22 Entre 120 et 180, c'est vert.
02:25 C'est ce qu'on a l'habitude de voir dans les zones polaires.
02:27 C'est le plus spectaculaire parce que nos yeux sont plus sensibles dans le vert.
02:30 Et plus bas, c'est rose mauve.
02:31 Et vendredi, on voyait le rouge très haut, ce qui est inhabituel.
02:36 Et on voyait du vert, ce qui est aussi très inhabituel.
02:38 En France, quand on voit des aurores, souvent, c'est une vague lueur rouge à l'horizon.
02:41 Pas plus.
02:42 Et pas beaucoup de forme.
02:43 Alors que là, on voyait très nettement les draperies bouger.
02:46 - Donc, c'était exceptionnel.
02:47 Vous l'étiez à ce moment-là, on imagine que vous avez tous tourné les télescopes
02:50 vers les aurores boréales.
02:51 - Non, ça ne sert à rien.
02:52 Parce que c'est très très grand.
02:53 - Ah, on les voit à l'œil nu ? - Oui, c'est tout.
02:55 Les télescopes, c'est pour voir des toutes petites choses dans le ciel.
02:58 Des petites galaxies, des petites nébuleuses.
03:00 C'est comme une paire de jumelles, en beaucoup plus puissant.
03:02 Non, non, les aurores, ça se regarde à l'œil nu.
03:04 Il faut regarder pratiquement tout le ciel pour avoir une vision du spectacle dans son ensemble.
03:09 - France Bleu Périgord, il est 7h48.
03:11 Michel Favré, président du club d'astronomie de Saint-Ménard-de-Mucedon est notre invité.
03:15 Il répond à vos questions.
03:16 Louis de Bergevin.
03:17 - Alors, vous êtes venu ce matin avec votre t-shirt avec une aurore boréale, justement.
03:22 Mais ce t-shirt, vous l'avez acheté en Finlande.
03:24 Là où vous en avez vu d'autres, des aurores boréales.
03:26 - Voilà, c'est la troisième fois que je vais voir des aurores boréales dans les zones polaires.
03:29 Je suis allé au nord de la Norvège en 2013, en Islande en 2015, et là en Finlande.
03:33 - Parce que normalement, c'est là-bas qu'on les voit.
03:35 - Voilà, c'est là-bas qu'on les voit le mieux parce qu'en fait, ces particules solaires,
03:39 c'est des espèces de bouffées que nous envoient les éruptions solaires.
03:42 Quand elles sont dans notre direction, elles viennent vers la Terre.
03:44 Heureusement, la Terre est protégée par son champ magnétique, donc elles n'atteignent pas la Terre.
03:48 Sauf dans les zones où le champ magnétique est le plus faible, c'est-à-dire vers le pôle nord magnétique
03:52 et le pôle sud magnétique où ça fait comme un espèce d'entonnoir.
03:55 Et là, les particules arrivent à rentrer dans l'atmosphère et frapper les molécules pour provoquer cette couleur.
04:01 Et ça se produit le long d'une espèce de couronne qui, grosso modo, est à peu près au niveau du cercle polaire.
04:07 C'est-à-dire qu'en Europe, c'est à 70° Nord.
04:09 - Mais ça veut dire qu'en voir ici, c'est exceptionnel. Qu'est-ce qui s'est passé vendredi soir ?
04:13 C'était ces éruptions solaires qui étaient beaucoup plus fortes ?
04:17 - Voilà. Alors, cette activité d'aurores, de particules solaires, il y a un indice.
04:22 Je ne l'expliquerai pas parce qu'il est compliqué. On appelle ça le Kp, entre 0 et 9.
04:26 0 minimum, 9 maximum.
04:28 Quand j'ai vu des aurores en Finlande, c'était à 5.
04:31 Et on a vu en Bretagne un peu de couleur rouge.
04:33 Dans la nuit de vendredi à samedi, quand on les a vues, c'était au-delà de 8.
04:37 C'était vers 8.3, 8.5.
04:39 Donc c'est quelque chose d'exceptionnel.
04:41 D'après la NASA, ça ne s'est pas produit depuis 20 ans.
04:43 La dernière fois, c'était en 2003 où il y a eu une activité aussi forte.
04:47 - Donc c'était quasiment le niveau maximum.
04:49 Est-ce que ça veut dire qu'il y a eu des perturbations, puisque ça touche les champs magnétiques ?
04:54 - Les perturbations se produisent sur les communications, parce qu'il y a des phénomènes électriques.
04:59 - Donc le téléphone, internet ?
05:00 - Voilà. Le GPS, parce que c'est des communications par ondes radios.
05:03 Ça peut gêner la navigation des avions.
05:05 Je crois qu'il y a des avions qui ont dû être déviés à cause de ça.
05:08 Ça peut être dangereux, parce qu'il y a en même temps des radiations importantes qui arrivent.
05:12 Pas que des particules.
05:13 Donc ça peut être dangereux, par exemple, pour les astronomes dans l'ISS.
05:15 On les protège en général.
05:16 Pour vous donner un exemple exceptionnel, mais là le top du top,
05:20 c'était en 1859, en septembre 1859, on appelle ça l'événement de Carrington.
05:25 Ça a été tellement fort que les aurores ont été vues dans les zones tropicales,
05:28 vers Honolulu ou Singapour.
05:30 Et comme ça induit des courants dans les câbles électriques,
05:33 et à l'époque c'était surtout les câbles du télégraphe,
05:36 il y a eu des opérateurs de télégraphe qui ont été électrocutés.
05:39 En 1989, il y a eu aussi une bouffée assez importante, c'est bien plus près de nous,
05:44 et ça a provoqué, parce que ça fait sauter des transformateurs,
05:47 ça a provoqué une panne électrique sur tout le Québec.
05:49 - En un mot, parce qu'on a dépassé le temps, est-ce qu'on peut encore en voir ces prochains jours ?
05:53 - Oui, s'il y a à nouveau des activités aussi fortes, qui vont vers 8, 9,
05:59 ça pourrait se reproduire.
06:00 Alors le problème après c'est la météo.
06:02 - Voilà, pour l'instant on a des nuages attendus.
06:04 Donc merci beaucoup Michel Favret, président du club d'astronomie de Saint-Médard de Mucidon.
06:10 A noter que vous organisez des événements d'observation du ciel,
06:13 notamment le 14 août, le 15 juin et la nuit des étoiles le 9 ou le 10 août.
06:17 On retrouve toutes les infos sur votre site internet astro24 du Mucidannet.
06:21 Merci d'être venu sur France Bleu Périgord.