Les infirmières et infirmiers libéraux demandent une revalorisation de leurs actes médicaux et manifestent le jeudi 16 mai, à 20h, place du théâtre à Dijon. Muriel Bonnet, infirmière libérale, était l'invité du 6/9 de France Bleu Bourgogne.
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00:00Neuf heures, toute la Côte d'Or se réveille.
00:02Vous vous souvenez, pendant le confinement, à 20h, on tapait des mains bêtement pour
00:08soutenir les infirmiers.
00:10Ce soir, on viendra à 20h, place du théâtre, pour soutenir encore une fois les infirmiers
00:15libéraux, les infirmières libérales, une nouvelle mobilisation pour réclamer une meilleure
00:20rémunération.
00:21Pour en parler, Stéphanie, on reçoit ce matin Muriel Bonnet, donc elle est infirmière
00:25libérale à Dijon.
00:26On le disait, la profession est en train de crever, c'est en tout cas ce que disent
00:29bon nombre de soignants, si rien ne change.
00:33Au final, c'est le lien avec vos patients qui pourraient casser, vous nous l'avez bien
00:36décrit.
00:37Comment faire pour ne pas en arriver là ? Qu'est-ce que vous réclamez aujourd'hui ?
00:41Ça fait 15 ans que notre acte médical infirmier, la base du calcul de nos revenus, n'a pas
00:48bougé.
00:49Personne ne travaille sans augmentation de salaire pendant 15 ans, je crois.
00:52Là, actuellement, on se retrouve à travailler plus pour gagner la même chose qu'il y a
00:57quelques années.
00:58Et pour certains, on a plus de travail, pour d'autres moins.
01:00Notre vindication, c'est l'augmentation de cet acte médical infirmier pour revaloriser
01:05nos actes dans un travail qui est effectivement difficile, pénible, qu'on aime fort, qu'on
01:09est passionné.
01:10Mais il mérite salaire, il mérite qu'on puisse nourrir nos enfants, payer nos logements
01:14comme tout un chacun, payer nos retraites aussi.
01:16Certains ont l'image d'une profession qui gagne bien sa vie, qui fait beaucoup d'heures,
01:21et qui gagne bien sa vie.
01:22Est-ce que c'est une fausse idée ?
01:23Ce n'est pas forcément une fausse idée dans le sens où on peut gagner bien sa vie
01:28si on fait énormément d'heures.
01:30En taux horaire, on gagne moins qu'à l'hôpital.
01:32On ne le sait pas forcément et on l'oublie, mais effectivement, il y a certaines personnes
01:37qui gagnent très bien leur vie, mais qui travaillent énormément.
01:41Moi, la dernière fois, en deux jours, j'ai travaillé 36 heures, l'équivalent d'une
01:44semaine de quelqu'un d'autre.
01:45Alors effectivement, moi, j'ai des enfants, donc je ne travaille pas 7 jours sur 7, ce
01:50n'est pas possible.
01:51Ma vie à la maison me prend aussi du temps.
01:54Donc voilà, si on travaille normalement, on ne gagne pas aussi bien qu'à l'hôpital.
01:59On est écrasé par des charges, on a plus de 60% de charges parfois, pas plus, 60% de
02:04charges.
02:05Du coup, malgré tout, et puis tout a augmenté en 15 ans, le carburant a augmenté de 85%,
02:10je crois.
02:11Nos assurances, parce qu'on n'a pas maintenant un peu, mais pour être en arrêt, pour être
02:16en invalidité, il faut qu'on paye une assurance, sinon on n'a pas de revenu.
02:19Ils ont augmenté de 150%.
02:22Je m'étais noté, nos prévoyances, 138%, notre matériel, notre matériel pour avoir
02:29des gants, pour faire nos soins, c'est nous qui les achetons, 230% en quelques années.
02:33Tout ça, ça nous impacte forcément.
02:35Il faut travailler plus pour pouvoir payer nos charges avant de pouvoir vivre.
02:38Justement, vous le disiez, les semaines sont très longues.
02:41Ça ressemble à quoi une semaine d'une infirmière libérale ici à Dijon comme vous ?
02:45Alors, nous, on soigne minimum, on fait 40 soins par jour, parfois 60, parfois plus.
02:51Ça fait beaucoup de monde quand même à voir à domicile.
02:53Donc, ça veut dire qu'on commence très tôt et qu'on finit très tard.
02:55Oui, on commence vers 6h, parfois 7h, mais vers 6h du matin, on finit à 20h, 21h.
03:00On peut encore être appelé la nuit, c'est ce que je disais.
03:02Oui, on est payé pour ça, mais n'empêche, il faut pouvoir tenir le rythme.
03:06Certaines personnes travaillent 7 jours d'affilée pour avoir des repos derrière.
03:09On travaille un week-end sur deux en moyenne, parfois moins si on travaille plus dans un
03:13cabinet.
03:14Les jours fériés, on les travaille aussi.
03:15Encore une fois, en alternance, si on a des collègues, il y a des infirmiers qui travaillent
03:19seuls à leur cabinet.
03:20S'ils n'ont pas de remplaçant, ils travaillent tous les jours.
03:21Ça, c'est le quotidien d'une infirmière libérale, c'est Muriel Bonnet qui est avec
03:25nous ce matin en direct sur France Bleu et France 3 à 7h49.
03:28Donc, forcément, on l'imagine, c'est compliqué financièrement vu que le coût de la vie
03:33a très largement augmenté et que les actes n'ont pas été revalorisés.
03:37On l'entend, c'est la principale revendication.
03:39Est-ce que ça veut dire que ça pourrait se traduire par la fermeture de cabinets médicaux
03:44ici en Bourgogne ? Est-ce que c'est déjà le cas ?
03:45Alors, il y a des cabinets qui ferment quasi quotidiennement dans toute la France.
03:49On annonce 58% de fermeture en cinq ans parce qu'effectivement, la motivation a beau être
03:55forte, le Ségur a augmenté, les infirmiers à l'hôpital et en clinique, tant mieux,
03:59c'était nécessaire.
04:00Nous, on a été oubliés du Ségur.
04:02Notre profession est de moins en moins attractive parce qu'effectivement, comme on gagne moins
04:07bien notre vie pour toutes les heures, tout ce que ça impacte, je l'ai dit, c'est une
04:10profession patient, on aime nos patients, mais à un moment donné, il faut vivre à
04:13côté.
04:14Si on ne gagne pas notre vie en rapport aux efforts, on part ailleurs, on va voir ailleurs.
04:18Est-ce que la vie à côté, justement, elle existe pour vous qui êtes infirmière libérale ?
04:22Vous l'avez dit, j'ai des enfants, j'ai une famille et puis on peut, sans avoir d'enfants,
04:26avoir une vie à côté.
04:27Est-ce qu'elle existe aujourd'hui quand on est infirmière libérale ?
04:29Et le fou, on fait en sorte que malgré tout, effectivement, pour prendre des vacances,
04:34il faut un remplaçant.
04:35Pour être en arrêt maladie, il faut un remplaçant, sinon on continue à se lever malade, mal
04:39au dos.
04:40On y va quand même.
04:41C'est une organisation autour de ça.
04:43Vous pouvez en parler à mes enfants et à mon conjoint.
04:45Quand je pars le week-end, quand je pars les fériés, quand je dois repartir la nuit
04:48ou repartir à 23h, personne ne rigole chez moi.
04:51Maintenant, c'est mon métier, je l'aime.
04:53Vous avez déjà songé à arrêter parce que c'était trop dur ?
04:56Oui, comme beaucoup d'entre nous, oui, j'y ai déjà pensé.
05:00Après, encore une fois, c'est un métier passionnant, ça m'a tenue.
05:03Maintenant, aujourd'hui, il faut que les choses évoluent.
05:05On mérite que les choses évoluent pour qu'on puisse perdurer et préserver les soins à
05:10domicile parce que si les cabinets ferment, les patients n'auront plus de soins à domicile.
05:14En un mot, avant d'entendre nos auditeurs, auditrices, à quoi est-ce qu'il faut s'attendre
05:18ce soir à Dijon avec cette action ?
05:20On essaye de mobiliser, de faire réagir.
05:23Ça a fonctionné pour certaines choses.
05:25Il y a des choses qui bougent.
05:26On en est heureux.
05:27Effectivement, il y a une signature de tribune hier qui a eu lieu entre plusieurs syndicats
05:32majoritaires.
05:33On espère que les choses bougent.
05:34On aimerait qu'elles bougent plus vite.
05:35On le rappelle, c'est ce soir à 20h, place du Théâtre à Dijon.
05:39Si vous avez envie de venir soutenir ces infirmiers libéraux et infirmières libérales.
05:43Et maintenant, on va vous écouter justement sur ce rapport avec ces soignants.
05:46Et oui, ce lien dont on parle depuis tout à l'heure, l'humain, c'est Chantal qui va
05:49nous en parler.
05:50Elle habite à Chauneuf.
05:51Bonjour, Chantal.
05:52Bonjour.
05:53Bienvenue, Chantal.
05:54Vous écoutez France Bleu Bourgogne.
05:56Vous êtes avec nous pour tout simplement nous parler de ces relations que vous avez
06:00peut-être avec des infirmiers, des infirmières.
06:03Oui, avec mon infirmière que je connais depuis plusieurs années et qui soigne toute la famille
06:08sur Chauneuf et qu'on considère vraiment comme une personne à part entière de la
06:13famille.
06:14Quand on a des besoins ou quand on la croise pendant les courses, c'est rare, mais ça
06:19nous touche.
06:20C'est quelqu'un d'indispensable.
06:21Ça veut dire que c'est quelqu'un que vous voyez très régulièrement, avec qui vous
06:26avez tissé un lien fort.
06:28Et comment ça se traduit, ça ?
06:30Ça se traduit quand j'étais enceinte, c'est elle qui est venue.
06:35Quand j'ai eu des besoins après, c'est elle aussi.
06:38C'est bien que mes beaux-parents, qui se font soigner aussi, en ont la même infirmière,
06:48qui s'appelle Dunia sur Chauneuf, et même les piqûres, vous savez, pour la grippe,
06:53elles ne le font plus chez le pharmacien, mais c'est nous deux qui passent.
06:56Il y a une vraie complicité et une vraie confiance qui s'est installée.
07:00Chantal, est-ce que vous avez conscience de ces difficultés éprouvées par ces soignants
07:08aujourd'hui ? Leurs difficultés financières, leurs difficultés d'organisation ? Est-ce
07:13que c'est quelque chose que vous avez ressenti vous aussi ?
07:16Oui, tout à fait.
07:19Quand on la voit, elle est toujours en spin, même si elle prend le temps avec ses passions.
07:23Pour vous dire, nous dans notre famille, on est très choqués par rapport à ce qu'a
07:30fait le gouvernement après Covid.
07:32Avec mes enfants, on a cassé des cuillères en bois pendant des semaines, et qu'après,
07:40il y ait ce retour de bâton pour eux, justement, ça nous a choqués.
07:44Oui, c'est ce que je disais tout à l'heure, quand je disais bêtement, on applaudissait
07:47bêtement, mais aujourd'hui, ça parait bête par rapport à la situation des infirmes et
07:52des infirmières.
07:53Qu'est-ce que vous voudriez dire au gouvernement, peut-être même aux élus de Bourgogne qui
07:57nous écoutent là ce matin ?
07:58Qu'il ne faut pas attendre qu'on soit dans la maladie, qu'on voit la valeur du métier
08:05des gens.
08:06Il n'y a pas que les infirmières, mais ce sont des métiers régaliens qu'il faut porter
08:11en avance.
08:12La société ne pourra pas s'en sortir sans ces métiers-là, que ce soit les infirmières,
08:17les soignants, les éducateurs, les américains, les enseignants, les policiers, ce sont des
08:22valeurs sûres.
08:23Mais on n'est pas le fric où il faut.
08:26Merci Chantal de nous avoir rejoints ce matin en direct sur France Bleu Bourgogne, merci
08:32également à Murielle Bonnet qui était avec nous, infirmière libérale, qu'on retrouvera
08:36donc ce soir à 20h place du Théâtre.
08:38Absolument, j'y serai, merci de nous avoir reçus.
08:40Une action, on le disait, qui est nationale mais qui se passe à Dijon.