Témoins de l'Actu : Sonia POULAIN

  • il y a 5 mois
Sonia POULAIN

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Transcription
00:00 Pour le moment à 7h50, Marie Dorcet rencontrait régulièrement des détenus de la prison de Saran et le centre de semi-liberté de Montargis.
00:09 Voilà ce que font les bénévoles de l'association des visiteurs de prison dans le Loiret.
00:13 Et cette asso recherche plus de monde. Est-ce que vous pourriez le faire de l'autre côté de la télé et de la radio ?
00:18 Venez témoigner, venez poser vos questions aussi à la correspondante de l'association pour notre département.
00:23 Si vous voulez participer à l'émission, on vous attend tous. 0238 53 25 25 pour nous joindre.
00:29 Bonjour Sonia Poulain. Comment ça se passe une visite en prison quand on est visiteur de prison ?
00:34 Eh bien écoutez, ça se passe assez simplement. C'est en général un rendez-vous de domainaire d'abord.
00:41 Parfois les détenus demandent une cadence plus éloignée ou des cadences... On s'adapte. Mais c'est une rencontée de domainaire.
00:49 Nous sommes dans un local au sein du parloir Avocat, donc dans un endroit tranquille, en totale confidentialité d'échange.
01:02 Il n'y a pas de règles, de dogmes contraignants, mais en moyenne une visite, un échange, je préfère ce mot, ça dure à peu près une heure, une heure et demie.
01:17 Vous dites échange parce que le but c'est de discuter en fait, c'est ça ?
01:21 Nous en parlons très peu finalement. Bien sûr, échange, parce que ce qui me paraît important, c'est pas un visiteur qui vient rendre visite à un détenu.
01:30 C'est une rencontre en fait, parce qu'en fait les détenus qui demandent à rencontrer un visiteur sont des gens volontaires.
01:36 Ils peuvent déjà avoir des visites familiales. Pour autant, il manque d'un contact avec la société civile, avec des personnes de l'extérieur qui ont une neutralité.
01:47 Sachant que par rapport à la famille, parfois ils ne peuvent pas tout dire, parce qu'il y a une forme de protection de ce qu'ils vivent, ce qu'il y a de plus difficile à certains moments.
01:55 Donc les moments les plus durs, on les partage.
01:58 D'avoir quelqu'un d'extérieur à sa famille, à ses proches, ça peut permettre peut-être de raconter...
02:02 Des choses qu'ils ne racontent pas à d'autres.
02:04 Et puis c'est important, nous disent-ils, de sentir qu'ils sont gardés dans les yeux, quel que soit l'acte qu'ils ont fait.
02:12 Puisque nous, de toute façon, on ne sait jamais quand on nous oriente à un détenu, on ne sait pas pourquoi il est en détention.
02:21 C'est fondamentalement important.
02:23 Oui, parce que ça permet j'imagine de garder une certaine neutralité.
02:26 Neutralité, puis on ne réduit pas l'homme ou la femme à l'acte.
02:30 On n'oublie pas les victimes, on n'oublie pas l'acte, mais on ne réduit pas ça.
02:33 Mais justement, est-ce que c'est ça qui est peut-être compliqué, qui fait que vous avez peut-être du mal à trouver des bénévoles ?
02:39 Peut-être des gens qui sont un peu retenus par ça, en se disant "peut-être que je vais être face à quelqu'un qui a tué des gens".
02:46 Je prends l'exemple extrême.
02:47 Vous avez raison, il y a deux choses je pense, pour en discuter aussi avec les visiteurs débutants et qu'on accompagne.
02:53 C'est la capacité à accepter d'avoir rencontré quelqu'un dont l'acte correspond à une zone d'hypersensibilité.
03:03 C'est-à-dire ?
03:05 Il y a des personnes pour lesquelles les crimes de type inceste, par exemple, sont insupportables.
03:15 Donc ils s'imaginent mal se projeter dans un rôle de neutralité et de garder cette rencontre sans tomber dans un jugement.
03:24 Donc il vaut mieux le savoir dès le départ.
03:27 Et dans ces cas-là, on peut préciser aux services de probation que ce domaine-là est quelque chose dans lequel il faut peut-être un peu d'accompagnement.
03:38 En tout cas, ce ne sera pas tout de suite.
03:40 Mais en tout état de cause, on ne cherche pas à savoir ce qui s'est passé.
03:45 Quand on est visiteur de prison, avant sa première visite, on est formé ?
03:49 Alors oui, oui et non, je dirais.
03:53 Il y a un minimum d'accompagnement. Forcément, on n'arrive pas comme ça dans le milieu carcéral.
03:59 Il y a des codes dans l'univers carcéral aussi ?
04:02 Oui, il y a beaucoup de codes. Il y a d'abord tout un protocole de sécurité qu'il faut savoir respecter.
04:09 Donc il faut être doté d'une vraie patience, d'une vraie acceptation de ces règles,
04:14 et parfois des facteurs de temps à consacrer avant d'aller d'un point à un autre auquel on n'est pas forcément habitué.
04:24 Et puis il y a des choses que l'on ne doit absolument jamais faire vis-à-vis d'un détenu.
04:29 On ne doit jamais prendre contact avec leur famille, on ne doit jamais prendre contact avec leur avocat.
04:34 On est dans cette neutralité d'individu à individu.
04:38 On ne doit jamais rien accepter de leur part, ni leur donner quoi que ce soit.
04:42 S'ils ont un besoin, on l'écoute, on le prend en charge et on le signale au service de probation qui va faire le relais.
04:48 Dans nos journaux, on a pu entendre, il y avait un reportage avec une visiteuse de prison.
04:54 On a entendu Claire, qui est une détenue, elle bénéficie de ce service depuis quelques temps.
04:58 Elle explique que sa visiteuse l'aide pour ses papiers, lui a déjà apporté des vêtements, ça c'est autorisé ?
05:04 Alors, c'est autorisé, pas directement.
05:10 C'est-à-dire que si le détenu a besoin d'une aide administrative, on va l'orienter, nous on va l'aider à s'orienter.
05:18 Soit vers son conseiller pénitentiaire, si ça relève de son périmètre, soit vers l'écrivain public par exemple.
05:26 On a un peu ce rôle de rouage, de transmission.
05:31 Pour les vêtements, c'est exceptionnel puisqu'il y a un dispositif interne à l'établissement.
05:36 Mais quand il y a un besoin particulier de taille, d'indigence forte ou d'urgence, on peut le signaler.
05:42 Et là, il y a un protocole particulier qui peut nous autoriser, ça passe par le tribunal, ça passe par la pénitentiaire,
05:48 à déposer un sac quand la famille ne peut pas le faire.
05:51 Dans le Loiret, il y a actuellement 15 visiteurs de prison à peu près.
05:55 Il manque des gens, il en faudrait deux fois plus.
05:57 - Je vais vous donner deux chiffres. Il y a actuellement 15 visiteurs opérationnels,
06:01 des hommes, des femmes, de tous âges et de tous profils, en activité, en retraite, profession libérale ou pas.
06:08 Il y a 880 détenus en moyenne.
06:12 - Donc il manque des gens forcément.
06:14 - Donc il y a une liste d'attente et ça pour nous c'est insupportable.
06:17 - Et les détenus, peut-être que vous voyez, en tout cas vous de côté organisationnel,
06:22 ils vous disent "on attend, on a envie d'avoir des visiteurs".
06:25 - Oui, non seulement ils nous disent ce qu'ils ont attendu et que c'était un besoin,
06:29 mais parfois ils nous demandent des papiers pour que leur co-détenu ou d'autres détenus
06:35 qui voudraient bénéficier de ce type de rencontre puissent le faire.
06:40 Il y a une demande énorme, la solitude est quelque chose de terrifiant.
06:45 - Et comment vous expliquez ce manque de bénévoles ?
06:47 C'est que c'est encore trop méconnu, c'est qu'il y a encore trop de personnes qui peut-être sont inquiètes ?
06:52 - Je pense qu'il y a plusieurs choses, je vais revenir à ce que vous avez évoqué tout à l'heure
06:56 qui me paraît fondamental. Je pense pouvoir dire qu'il y a deux choses.
06:59 Il y a le fait de se sentir peut-être pas capable de gérer une rencontre par rapport à un acte
07:06 qui pourrait paraître trop insupportable.
07:08 Et il y a aussi, et c'est un des points de vigilance sur lesquels on accompagne beaucoup,
07:13 la crainte de ne pas être capable de prendre la distance suffisante
07:18 de ne pas tomber dans une relation affective.
07:20 Si la relation devient autre chose que de la bienveillance, une écoute active, sans jugement,
07:27 et qu'on tombe dans une relation à connotation affective, on ne rend pas service aux détenus.
07:32 - Et ça c'est compliqué parce qu'on imagine que quand on est visiteur,
07:35 on va voir un ou une détenue plusieurs fois, c'est la même personne qu'on va voir.
07:39 - Toutes les semaines, parfois pendant des mois, des années.
07:41 - Ça peut être très compliqué de ne pas avoir un lien affectif quel qu'il soit.
07:45 - Absolument. Ça fait partie des choses qui sont peut-être les plus subtiles à gérer, je pense.
07:52 - Il faut rappeler que pour être visiteur de prison, il suffit d'être majeur
07:55 et d'avoir un casier judiciaire vierge.
07:57 Est-ce que vous pouvez nous réexpliquer comment on fait pour être visiteur de prison
08:01 si on a des auditeurs qui sont intéressés ?
08:03 - Il faut effectivement avoir ces deux prérequis.
08:07 Et puis, même si ça demande un moment de réflexion,
08:11 n'hésitez pas à consulter notre site internet www.anvp.org
08:17 où là, il se trouve tout un tas d'informations sur les rôles et missions précises,
08:21 les codes de déontologie.
08:23 - Et c'est là-dessus qu'on postule ?
08:25 - Et puis c'est là-dessus qu'il se trouve un formuleur où en trois clics,
08:27 on peut postuler et les mails m'arrivent directement.
08:30 - Très bien. Le message est passé. Merci beaucoup Sonia Poulain-Bouff.
08:33 - Merci à vous.
08:34 - D'avoir été notre invitée ce matin. On rappelle que l'ANVP cherche des bénévoles dans le Loiret.
08:38 Merci, bonne journée.

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