Corinne Lhéritier, Directrice de la Calandreta de Nîmes
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00:00Avec vous, Quentin Perez de Tudela, on va revenir avec notre invité sur ce rassemblement prévu demain devant la Maison Carré à Nîmes
00:06pour défendre les langues régionales, notre Occitan.
00:09Oui, bonjour Corinne Hérétier.
00:10Aditias, bonjour.
00:11Directrice de la Calendreta École privée et bilingue français occitan à Nîmes,
00:17vous faites partie des défenseurs des langues régionales qui appellent, c'est l'un de vos combats,
00:21à modifier la constitution pour la loi fondamentale,
00:24donc pour que l'apprentissage des langues régionales puisse se développer en France,
00:29pourquoi est-ce que vous avez besoin de toucher à la constitution
00:32pour justement que nos enfants puissent parler occitan à l'école ?
00:36Pour une question de sortir de la précarité dans lesquelles sont non seulement l'occitan
00:43mais toutes les langues régionales.
00:45Donc l'appel est lancé par le collectif Pour que vivent nos langues.
00:49Il y aura plusieurs rassemblements toute la journée, de samedi, donc de demain, le 1er juin.
00:57L'idée c'est de faire chacun une photo et de rassembler toutes ces photos pour avoir un visuel.
01:05Donc ça sera un petit peu partout pour représenter cette diversité à laquelle on tient.
01:12Mais qu'est-ce qui fait de manière simple que la loi aujourd'hui freine un petit peu
01:16l'apprentissage des langues régionales dans les écoles françaises ?
01:18C'est un vaste débat et puis c'est une histoire longue.
01:24Pour revenir plus récemment, on était déjà venu sur cette antenne.
01:28En 2021, on s'était mobilisé.
01:31Alors on, c'est ce collectif-là dans lequel sont représentées plusieurs associations
01:36de l'enseignement public comme de l'enseignement en immersion, l'enseignement associatif
01:43et aussi des associations qui ne sont pas forcément dans l'enseignement proprement parlé
01:48mais dans la défense et la promotion des langues régionales.
01:51En 2021, le 8 avril 2021, a été votée une loi qui s'appelle la loi MOLAC
01:57et qui est d'ailleurs une avancée pour l'apprentissage des langues
02:02puisqu'elle permettait entre autres l'enseignement en immersion,
02:07elle revenait sur l'usage des prénoms avec leurs signes diacritiques.
02:13Les signes diacritiques pour les auditeurs qui nous écoutent,
02:18par exemple cette sorte de vague qu'il y a sur le N,
02:23la ègne qu'on appelle en espagnol, ou peña pour les aficionades qui arriveront à visualiser ce signe.
02:30C'est plus pour les prénoms bretons qu'il est utilisé.
02:35Nous, on est plus concernés par, ça a l'air tout bête,
02:38par un accent aigu sur le I, un accent grave sur le ON
02:41qui existe sur les claviers de tous les ordinateurs
02:44sauf a priori ceux de l'administration.
02:46Le combat c'était de pouvoir mettre ces lettres notamment sur les cartes d'identité
02:51puisque les cartes d'identité seront bientôt en anglais si ce n'est pas déjà le cas.
02:55Ce qui est très bizarre c'est qu'on ne puisse pas le faire pour une langue qui est française
02:59puisque l'occitan c'est une langue du territoire français.
03:01Le combat c'est ça mais il ne se réduit pas non plus à une histoire d'accent oral ou accent écrit.
03:07Vous avez notamment parlé, je voudrais qu'on vienne là-dessus, sur l'immersion.
03:10Pour les auditeurs qui nous écoutent et qui ne savent pas ce que c'est, c'est quoi l'immersion ?
03:12L'immersion c'est, on pourrait faire le parallèle avec une famille dont chacun des parents parlerait deux langues différentes.
03:21Chacun des parents va parler sa langue à son enfant et l'enfant est en immersion.
03:27Nous à l'école on va s'inspirer de ça mais bon c'est pas égalitaire
03:33parce que le nombre d'heures passées à l'école ne balance pas le nombre d'heures passées en famille.
03:40Mais nous à l'école, en immersion, on parle toute la journée en occitan.
03:46On fait nos cours en occitan, la classe en occitan.
03:49Les maths en occitan ne sont pas plus difficiles que les maths en français.
03:54Ça passe aussi bien la géo, l'histoire.
03:57Le français est enseigné en français puisqu'on suit strictement les mêmes programmes que l'éducation nationale.
04:05À côté de ça, dans d'autres écoles, il existe un enseignement bilingue qui va être à parité horaire.
04:11Il existe de l'initiation, il existe de ce qu'on appelle l'enseignement renforcé.
04:16Tout ça, ça fait près de 3000 élèves dans le Gard. C'est pas anecdotique.
04:19Vous parliez Corinne Lheritier de cette loi MOLA qui a été votée au Parlement.
04:23Elle permet notamment, en fait elle autorise les collectivités à prendre en charge financièrement la scolarisation des enfants qui suivent un enseignement.
04:30Elle les oblige.
04:31Elle les oblige. Mais est-ce que c'est toujours le cas ?
04:34La loi existe. Dans les faits, on n'y est pas encore.
04:38Ça fait partie de ces choses-là.
04:40Il faut savoir que le Conseil constitutionnel a retoqué quand même deux articles.
04:44C'est à la suite de ça que le gouvernement nous a permis d'avoir une circulaire à l'heure actuelle.
04:52Ce qui nous permet d'enseigner en immersion de façon légale et du coup constitutionnelle, c'est cette circulaire.
04:59Une circulaire, c'est beaucoup plus précaire qu'une constitution.
05:04Et ce qu'on nous oppose, c'est l'article 2 de la Constitution qui prévoit que la langue de l'enseignement est le français.
05:10Et comment vous l'expliquez que les élus justement freinent des quatre fers un petit peu pour développer l'apprentissage de l'Occitan entre autres ?
05:17C'est tout le paradoxe parce que cette loi a permis des avancées.
05:20Il y a des conseils des groupes de travail départementaux.
05:24Il y a un groupe de travail régional qui se sont créés, qui aident à l'avancée, à l'observation des langues et de l'enseignement de ces langues.
05:33Et à côté de ça, on nous freine sur la réforme des lycées.
05:37Les langues régionales sont les oubliées de ces réformes.
05:42A l'heure actuelle, dans le Gard, on n'anime pas d'Occitan en collège.
05:47Il faut attendre le lycée, donc ça fait un gros trou.
05:51C'est tout le paradoxe, c'est que d'un côté, on nous aide à colmater les brèches dans la digue.
05:57De l'autre côté, on y creuse des trous encore plus importants.
06:01Et pour nous, ce fameux article de la Constitution est très important.
06:07Il a été fait au départ pour préserver le français.
06:10En gros, on va dire de l'anglais pour que ça reste notre langue nationale.
06:14Mais langue nationale n'est pas exclusive des langues régionales.
06:18Ce n'est pas parce qu'on apprend une langue régionale et qu'on maîtrise une langue régionale
06:24qu'on ne maîtriserait pas le français et qu'on ne serait pas français non plus.
06:28Je voudrais justement qu'on prenne Patrick, qui nous appelle de Fourques,
06:32et qui nous dit que l'occitan est une langue menacée.
06:38Absolument. La transmission familiale est de plus en plus difficile.
06:45Et la transmission dans le cadre scolaire est également de plus en plus difficile.
06:52Alors c'est la raison pour laquelle il est indispensable d'accélérer,
06:58de favoriser cette transmission dans le cadre scolaire.
07:02Vous le parlez, vous, Patrick, l'occitan ?
07:04Absolument. Je l'ai appris et aujourd'hui je le parle.
07:11Vous le parlez couramment ?
07:13Je le parle couramment.
07:14Est-ce que vous avez aussi peut-être à côté des espaces où vous pouvez parler occitan ?
07:19Peut-être des associations ?
07:21Tout à fait. Il y a des associations dans lesquelles je peux parler occitan.
07:26Mais je dois reconnaître que les occasions d'échange, de dialogue,
07:33d'interagir avec des locuteurs occitanophones se font de plus en plus rares.
07:38Et c'est vrai que c'est quelque chose qui manque.
07:41D'où Corinne Héritier l'importance de développer ces apprentissages à l'école ?
07:45De les développer à l'école mais de les développer également dans l'espace public.
07:49A l'heure actuelle, on a quelques noms de rues en occitan, c'est important,
07:55mais nos élèves qui sortent de l'école ne sont pas suffisamment confrontés à l'occitan.
08:00On a un très bon accueil sur votre antenne.
08:04Si l'étape d'après, c'est 10 mètres de l'occitan, ça serait parfait.
08:08Il y a certains locaux de France Bleue qui mettent à l'antenne des langues régionales.
08:12Comme le dit Patrick, on peut faire le choix d'adhérer dans des associations,
08:18notamment ANIM, la MARPOC et l'Institut d'études occitanes,
08:22qui promeuvent cette langue, mais ça reste vraiment des sphères où il y a cette démarche.
08:28On n'a pas un affichage de nos langues régionales qui prolongerait cette immersion,
08:36qui afficherait une réelle volonté politique, au sens profond et premier du terme,
08:42une volonté de préserver ce patrimoine.
08:48Parce que ça fait quand même partie du patrimoine immatériel.
08:52Et ça, ça a été acté.
08:54On va remercier Patrick de Fourquet.
08:58On va accueillir Estelle.
09:00Oui, bonjour.
09:02Je voudrais vous poser une question en particulier, puisque vous scolarisez vos enfants pour qu'ils apprennent l'occitan.
09:08A quoi ça sert d'apprendre l'occitan aujourd'hui ?
09:12Alors qu'on le dit, l'occitan n'est plus parlé dans l'espace public. A quoi ça sert ?
09:16Oui, assez peu parlé dans l'espace public, mais j'ai encore mon papa qui le parle.
09:22On y tenait par rapport à des raisons culturelles.
09:26On voulait que nos enfants connaissent la langue du pays.
09:30Et contrairement à certaines familles, on n'avait pas du tout peur.
09:34Ce qu'il y a, c'est qu'il y a des parents qui peuvent s'inquiéter,
09:38se dire qu'apprendre l'occitan, ça rajoute une langue, que les enfants vont tout mélanger,
09:42qu'ils ne vont plus savoir écrire le français.
09:46Et au final, c'est le contraire qu'on voit.
09:48Moi, j'ai un peu de recul, parce que ma fille aujourd'hui, l'aînée,
09:52elle a fait toute sa scolarité à la calendrette d'Alès,
09:54mais aujourd'hui, elle est en quatrième au collège,
09:58et elle n'a aucune difficulté par rapport aux langues.
10:01Au contraire, elle a fait une option bilingue anglaise,
10:04ça a très bien fonctionné, c'est la meilleure en orthographe de sa classe.
10:10En français ?
10:11Ça ne l'a qu'aidé, en français.
10:13Donc l'occitan sert à l'apprentissage du français ?
10:16Oui, ça aide à comprendre, d'avoir deux systèmes de langues particuliers,
10:21ça aide à comprendre la conjugaison, les accords.
10:24Elle me disait, il y a quelques jours, que son professeur de français lui disait
10:28« Oui, oui, tu as très bien accordé, mais explique-moi pourquoi tu as mis EES ? »
10:32Elle ne savait pas expliquer pourquoi elle avait mis EES,
10:34mais elle avait mis EES, et c'était juste.
10:37Estelle, je vous remercie beaucoup de nous avoir appelés d'Alès,
10:40je suis obligé d'en terminer là.
10:42Je voulais juste terminer avec vous, Corine Léritier,
10:44directrice de la calendrette à Nîmes.
10:46Pourquoi est-ce qu'on oppose comme ça souvent le français et l'occitan ?
10:50Alors ça, pourquoi ? Je ne sais pas, peut-être parce qu'on a peur de la diversité,
10:54peut-être parce que ce qui est différent nous dérange.
10:59Je veux juste revenir, si je peux, sur l'utilité.
11:02C'est vrai qu'on a souvent dit « Ah, s'il faut parler en termes d'utilité,
11:05apprenons l'anglais, voire le chinois. »
11:07En fait, l'argument d'Estelle est très pertinent.
11:12Il y a des études qui ont été faites au niveau académique,
11:15et effectivement, les élèves bilingues réussissent mieux dans les langues.
11:21Le français aussi en bénéficie.
11:25Mais également, vous en parliez tout à l'heure, les mathématiques.
11:28Parce que c'est une gymnastique d'esprit, parce que c'est une ouverture.
11:32En fait, je pense que le bilinguisme, quel qu'il soit,
11:36et ça on le redit, et je crois que Monsieur le Président l'a dit aussi,
11:40il n'y a pas de petite langue.
11:43Il n'y a pas de langues de sous-langues ou de langues en dessous des autres.
11:47Et les langues régionales, à ce titre-là, sont à mettre à égalité.
11:51Elles ne sont pas une menace.
11:53Nos écoles ne sont pas là contre le français.
11:55Elles sont là pour l'Occitan, pour les langues régionales.
11:58Et les apprendre, donc développe la pétance pour toutes les autres langues.
12:01Oui, c'est cette curiosité qui meut l'être humain
12:06dans son désir d'apprendre et de grandir.
12:08Corinne Léritier, je vous remercie beaucoup d'avoir été avec nous ce matin
12:11sur France Bleu Garlosère.
12:13Et d'être avec nous demain à 10h30 sur la Maison Carré.
12:16Merci à vous Corinne Léritier, directrice de la Calandretta Anim et belle fin de semaine.
12:20Merci encore.
12:21Calandretta qui se trouve unique à Nîmes, d'ailleurs, qui se trouve sur le Mont-du-Plan.
12:24Oui, et ce soir, totale festum à partir de 18h,
12:27de la musique moderne, contemporaine.
12:30De beaux concerts. J'ai encore 20 secondes, les concerts.
12:32C'est qui les musiciens ?
12:33Un petit d'un petit pour les enfants, mais les grands, on va bouger,
12:36on va danser comme des fous.
12:37Graioli, ensuite, à partir de 20h30, je crois.
12:40Entre temps, vous mangez, vous vous régalez, c'est convivial.
12:43Et en fin de soirée, une DJ set, bien sûr, en Occitan.
12:47Voilà, ça va de ça.
12:48Merci Corinne Léritier.
12:49Si vous ne savez pas ce que c'est que le mouvement Calandretta,
12:51qui est né il y a très très longtemps en France,
12:53en tout cas sur cette partie qui nous concerne.
12:55Bientôt 40 ans.
12:56Bientôt 40 ans.
12:57Bientôt 40 ans à Nîmes.
12:58Vous allez sur les réseaux, vous verrez.
12:5940 ans sur Nîmes, c'est ça.
13:00Ouais, ça va être une sacrée fête.
13:01Et bientôt 50 ans.
13:02En fait, on passe notre temps à faire des fêtes avec vous, les Occitans.
13:04Vous êtes trop, c'est génial.
13:05Amusez !