Diane Wattrelos est devenue accro au tramadol, un opioïde prescrit par son médecin pour soulager les douleurs causées par l'algie vasculaire de la face, la maladie neurologique dont elle souffre. Dans son ouvrage Addict sur ordonnance paru aux éditions Leduc, elle raconte son combat contre la dépendance afin de sensibiliser aux risques d’addiction de ce médicament prescrit à très grande échelle.
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00:00Je pensais que j'étais la seule maman à être addicte à un opioïde et en fait je suis très très loin d'être seule.
00:06J'ai eu plein plein plein de témoignages de personnes addictes, de mamans qui sont addictes comme moi et j'avais honte et en fait il ne faut pas avoir honte.
00:17Je m'appelle Diane, je suis maman de deux enfants, Raphaël et Capucine et je suis addicte au tramadol et à la morphine.
00:24Je suis atteinte d'algévasculaire de la face, c'est une maladie qui est extrêmement douloureuse, qui donne des douleurs au niveau de la face, particulièrement au niveau de l'œil.
00:33Ça donne l'impression d'avoir vraiment un tournevis qui nous tourne au niveau de l'œil.
00:37C'est à 23 ans qu'on a commencé à me donner du tramadol.
00:39Le mot addict, je crois qu'il a fallu plus de 9 ans parce qu'on a mis des mots sur le fait que j'avais un problème au niveau du tramadol.
00:49Ça a été en 2022 où ma neurologue m'a dit que j'avais un problème avec le tramadol et après vraiment dire que c'était une maladie, c'était deux ans et demi après, donc là très très récemment.
01:03On l'a prescrit en 2013 le tramadol par mon médecin traitant.
01:05Il ne m'a jamais prévenu du risque addictif, il ne m'a rien dit, moi je ne connaissais absolument pas le tramadol, je n'avais jamais pris d'opioïdes de ma vie.
01:16En plus, j'ai été vulnérable puisque je suis atteinte d'une maladie chronique, donc je lui ai fait confiance en prenant ce médicament-là.
01:24Quand j'oubliais de prendre mon tramadol, effectivement j'avais des symptômes de manque, mais je ne mettais pas de mots sur ce que je ressentais.
01:31C'était comme une grippe x 1000, donc je me vidais, je vomissais, j'avais des diarrhées.
01:37On a vraiment l'impression qu'on va mourir quand on a des symptômes de manque.
01:40Ça fait un peu un chaud-froid, on a mal dans tout le corps, c'est vraiment des symptômes qui sont vraiment très difficiles.
01:44Je ne me voyais pas ne pas en parler, parce que je parlais de plein de sujets tabous sur mes réseaux, et je ne me voyais pas ne pas parler de ce sujet-là.
01:53Et en fait, à partir du moment où j'ai parlé de ce sujet, je me suis rendu compte que je n'étais pas seule.
01:58Je pensais vraiment que j'étais seule à avoir ce problème avec le tramadol.
02:02Je pensais que j'étais la seule maman à être addicte à un opioïde, et en fait, je suis très très loin d'être seule.
02:08J'ai eu plein plein plein de témoignages de personnes addictes, de mamans qui sont addictes comme moi, et j'avais honte, et en fait, il ne faut pas avoir honte.
02:16J'ai essayé d'arrêter à deux reprises, et ces deux reprises, c'est pendant mes grossesses.
02:21Alors j'ai surtout essayé d'arrêter lors de ma première grossesse.
02:24Mais en fait, finalement, j'ai essayé d'arrêter comme tous mes traitements, parce que pour moi, le tramadol était un peu comme tous mes traitements.
02:31Quand j'ai essayé d'arrêter, c'était une horreur.
02:33Pour la grossesse de Capucine, on a gardé le tramadol, puisque pour ma première grossesse, j'avais essayé d'arrêter, et ça avait été une catastrophe, donc on a continué.
02:41J'ai gardé le tramadol.
02:42Quand j'ai accouché, ma fille, c'est le risque, a fait un syndrome de sevrage, et donc ça a été très très compliqué pour moi à gérer au niveau de la culpabilité, et pour ma fille.
02:52Il y a plusieurs critères, en fait, au niveau du syndrome de sevrage.
02:56Il y a une échelle, en fait.
02:57On a eu cette chance, c'est que ma fille, elle n'a pas eu besoin de morphine.
03:01Le pot à pot a suffi.
03:02Ça, c'est vraiment très difficile pour la maman.
03:06Quand on prend des opioïdes pendant toute la grossesse, le syndrome de sevrage, c'est vraiment très très difficile.
03:09C'est une énorme culpabilité.
03:10Moi, je me rappelle tout cachet que j'absorbais, à chaque cachet, la culpabilité.
03:15Ça a été vraiment par étapes, c'est-à-dire qu'en 2022, ma neurologue a commencé à m'expliquer que j'avais un problème avec le tramadol,
03:22et ça a été là, en 2024, où vraiment j'ai été prise en charge dans un Xapa, et là, on m'a dit réellement que c'était une maladie, que l'addiction était une maladie.
03:32Et là, réellement, j'ai été prise en charge par un centre spécialisé dans l'addiction.
03:35Je pense que j'étais prête à entendre.
03:37Et là, les malades qui sont addicts, il faut être prêt à entendre qu'on est addict.
03:41Et je pense que moi, j'étais prête, et j'attendais que ça, d'être prête vraiment à être prise en charge et à être écoutée.
03:47Là, ça fait un mois et une semaine que je n'ai pas pris de tramadol et de morphine.
03:51J'ai encore le substitut, donc voilà, mais c'est une étape énorme d'arriver déjà au substitut.
03:56Avant, j'avais peur de faire une overdose très régulièrement.
04:00C'était vraiment des crises où je mélangeais vraiment les médicaments et j'avais peur de ne pas me réveiller le lendemain.
04:04C'était très, très, très compliqué.
04:06Je pense que pendant neuf ans, en fait, je n'ai pas réussi à comprendre que j'étais addict parce que j'avais honte.
04:09Donc, lever le tabou, c'est très important de dire que ça peut arriver à tout le monde.
04:12Vraiment, ça concerne tout le monde.
04:15Sensibiliser aussi les médecins, de vraiment informer vos patients, c'est très important.