Assises et conditions de détention de Cédric Jubilar : Jean-Baptiste Alary, son avocat, répond aux questions de Jérôme Florin.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau du 21 juin 2024.
Regardez Les trois questions de RTL Petit Matin avec Jérôme Florin et Marina Giraudeau du 21 juin 2024.
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00:00Rtl, les trois questions du petit matin.
00:04Je reçois ce matin l'avocat de Cédric Jubilard, maître Jean-Baptiste Allary.
00:09Bonjour monsieur.
00:10Bonjour.
00:11Alors on va juste rappeler l'affaire en quelques mots.
00:14Cédric Jubilard est en prison depuis trois ans, il est donc soupçonné d'avoir tué
00:17sa femme Delphine Jubilard en décembre 2020, le couple était en instance de divorce.
00:23Lui a toujours dit qu'il était innocent et on rappelle que dans cette affaire le corps
00:28n'a jamais été retrouvé.
00:29Alors hier le parquet général a requis à son tour que Cédric Jubilard soit jugé
00:32devant une cour d'assises, ça veut dire en fait qu'après tout ce temps, après une
00:36série de nouvelles investigations dont on va parler, les procureurs ont toujours la
00:41conviction que c'est votre client qui a tué sa femme ?
00:43Oui, c'est la conviction du parquet général telle qu'exprimée lors de l'audience de
00:48la chambre de l'instruction, c'est pas franchement une surprise, c'est pas un coup
00:52de tonnerre dans un ciel sans nuages, le parquet général avait déjà eu cette position
00:57donc c'est sans aucune surprise que le parquet général lors de l'audience a de nouveau
01:03requis de renvoi la mise en accusation.
01:05Nous verrons bien si la chambre de l'instruction le 26 septembre décide de renvoyer ou non
01:10Cédric Jubilard devant une cour d'assises et si tel devait être le cas, nous discuterons
01:14strictement de tout parce que dans ce dossier ce qui est particulier c'est qu'absolument
01:17tout est discutable.
01:18On n'a pas d'éléments majeurs, il n'y a pas de traces ADN, il n'y a pas du sang
01:23essuyé sur le sol de la cuisine où on pourrait se poser des questions, il n'y a pas de corps,
01:27il n'y a pas d'aveu, mais il n'y a pas de scène de crime, il n'y a pas de preuve, on
01:31est quand même sur quelque chose de très particulier.
01:33Il y a eu ces derniers mois de nouvelles investigations, notamment ce codétenu qui avait parlé à
01:39sa mère qui semblait avoir des informations sur l'affaire, une voyante également qui
01:43disait avoir eu des signes pour retrouver le corps, les gendarmes ont vérifié, qu'est-ce
01:48que ça a donné ?
01:49Alors en réalité, la discussion entre le codétenu et sa... enfin oui, l'ancien codétenu
01:56et sa maman ont fait l'objet de vérification, c'était un coup d'épée dans l'eau, qu'importe.
01:59Concernant ensuite les vérifications faites suite à des révélations de médiums, chacun
02:05peut en penser ce qu'il en pense, il n'en demeure pas moins que la chambre de l'instruction
02:07a considéré que c'était suffisamment sérieux pour que ça fasse l'objet d'une exploitation.
02:12Mais là encore c'est comme tout ce qui a été fait dans ce dossier depuis le début,
02:17on fait une exploitation superficielle des choses et on ne va pas rentrer dans le détail.
02:22Et sur la base de cette vérification superficielle, on vous dit, écoutez, on a vérifié, ça
02:28n'a rien donné, donc par un raisonnement déductif, on nous dit, puisque ce n'est
02:33pas cette piste, puisque ce n'est pas celle-là, puisque ce n'est pas celle-là, c'est donc
02:36lui, c'est donc Cédric Jouy là.
02:38C'est le raisonnement qui est celui de l'accusation depuis le départ.
02:41Donc il n'y a pas de corps, il n'y a pas d'ADN, vous l'avez dit, mais il y a des éléments
02:45contre votre client, le fait qu'il supportait mal la séparation annoncée, Delphine Jubilard
02:51qui avait quelqu'un dans sa vie, et puis il y a quand même leur fils qui dit avoir
02:56vu une dispute violente.
02:57Alors ce que je dis, c'est que cet homme crie son innocence et qu'à preuve du contraire,
03:02moi je n'ai pas dans le dossier quelque chose qui serait susceptible à faire basculer ma
03:06propre conviction et c'est plus précisément ça.
03:11Ce qui est vraiment, à mon avis, c'est même dangereux, je vais tout vous dire, ce qui
03:17est dangereux, c'est aujourd'hui de faire reposer l'accusation sur le témoignage d'un
03:22enfant qui, à l'époque des faits, avait 6 ans et qui se trouve être le fils de la
03:26disparue et de la personne mise en examen.
03:28C'est extrêmement dangereux.
03:30Ce n'est pas un exercice qui va être extrêmement facile, d'ailleurs l'avocat général lors
03:36des premières audiences avait requis, je ne veux pas que l'on mette cet enfant au centre
03:40de l'accusation, de sorte qu'au moins aujourd'hui nous défendre de ce point-là des déclarations
03:46évolutives de cet enfant, le faire publiquement, ça me gêne énormément, vous comprenez que
03:51je suis un petit peu gêné sur cet argument-là, mais non pas parce qu'il me dérange au fond,
03:55mais simplement parce qu'on parle d'un enfant de 6 ans.
03:58L'accusation fait le choix de remettre ce pauvre enfant au centre de sa théorie, dont
04:05acte nous nous en défendrons, je ne supporterai pas que l'on fasse ça à mes propres enfants,
04:10venir les mettre au centre d'une accusation, dans une espèce de conflit de loyauté entre
04:15« je voudrais savoir ce qui est l'état de venue de ma maman » et « mon papa est en
04:18prison », voilà, et on va lui dire « maintenant tu vas prendre position là-dessus ». C'est
04:22insupportable et je trouve ça vraiment humainement intolérable.
04:25L'avocat que je suis après fera ce qu'il aura à faire.
04:27Votre client est en prison depuis 3 ans, comment est-ce qu'il suit, comment est-ce qu'il
04:32a pris les derniers rebondissements ?
04:33Alors il est incarcéré à la maison d'arrêt de Seyss, toujours dans le quartier isolement
04:38depuis 3 ans, ce qui là aussi est un traitement parfaitement inédit dans un dossier que l'on
04:44qualifie juridiquement de droit commun, c'est-à-dire que ce n'est pas un dossier politique ou
04:49de terrorisme.
04:50Et voilà cet homme qui depuis 3 ans subit un traitement très spécifique qui est celui
04:57de l'isolement, c'est-à-dire qu'il vit 23 heures sur 24 dans sa pièce, dans sa cellule
05:02qui doit faire 6 ou 7 mètres carrés et qu'il n'a de contact avec strictement personne
05:06hormis le voisin de cellule et ses avocats.
05:09En reussissant un peu le trait, on en est là.
05:11Comment le vit-il ?
05:12Eh bien il y a des moments plus difficiles que d'autres et il a été admis au SMPR pendant
05:19un temps, c'est-à-dire un service médicalisé.
05:21Mettez-vous à sa place, enfermez-vous dans 8 mètres carrés ou 7 mètres carrés, 23
05:25heures sur 24 pendant 3 ans, vous verrez si vous tournez pas un peu en rond au bout d'un
05:28moment.
05:29Le tout en supportant des accusations dont vous vous débattez.
05:33Donc oui, il peut être en difficulté psychologiquement parce que ça commence à être un peu long
05:37cette histoire.
05:38Merci beaucoup M.
05:39Jean-Baptiste Allary, je rappelle que vous êtes l'avocat de Cédric Jubilard et que
05:43donc le 26 septembre prochain, eh bien on saura définitivement si la justice demande
05:49un procès dans l'affaire Jubilard devant une cour d'assises.
05:53Bonne journée à vous.