Dans le podcast "Mentionné.e", la journaliste Marion Mariani donne la parole à des victimes de cyberharcèlement, afin de recueillir leur témoignage sur leur vécu, sur l'après et sur ce qu'elles pensent des réseaux sociaux.
Dans cet épisode, le témoignage d'une ancienne chroniqueuse qui a vécu un cyberharcèlement raciste pendant des années, des attaques discriminatoires qui font partie des armes les plus utilisées par les harceleurs aujourd'hui.
Tous les épisodes du podcast en audio sur le site de France Inter : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/mentionne-e
Dans cet épisode, le témoignage d'une ancienne chroniqueuse qui a vécu un cyberharcèlement raciste pendant des années, des attaques discriminatoires qui font partie des armes les plus utilisées par les harceleurs aujourd'hui.
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00:00Je reçois un courrier sur lequel on a beurré des excréments et où on m'explique « remonte
00:09à ton arbre, espèce de singe, ta place est là-bas ».
00:12Jean Messia qui m'écrit « Apsatoussi, alias Corinne, fait partie de cette immigration
00:17élevée et biberonnée par le système anti-national pour l'aider à en finir avec la France ».
00:21Un de ses followers qui répond « Apsatoussi, ici c'est la France et on a le droit de
00:25ne pas être d'accord avec toi, les fachos c'est vous ».
00:27Encore une fille de la République qui n'a pas eu sa ration de bananes.
00:30Apsatoussi, bonjour, bienvenue, merci d'être dans Mentionnées.
00:36Apsatou, vous êtes entrepreneuse et journaliste, vous avez été chroniqueuse dans plusieurs
00:41émissions de télévision, notamment dans l'émission Le Grand 8, sur C8, qui a démarré
00:44sur D8, mais après qui était sur C8 pendant quatre ans, c'est elle qui vous a révélée
00:49au grand public il y a maintenant dix ans.
00:51Pour commencer, je voulais savoir ce que vous évoque le mot « mentionner ».
00:55« Mentionner », forcément les réseaux sociaux, mais surtout quelqu'un qui te
01:01parle et tu ne lui as pas demandé de te parler, ou en tout cas qui te met dans un truc où
01:06tu ne lui as rien demandé.
01:07Donc on peut mentionner quelqu'un et il se retrouve au milieu d'une discussion
01:10qu'il n'a pas choisie.
01:11D'accord.
01:12Donc ça, un peu négatif ?
01:13Ça peut être négatif, inattendu, si c'est Joachim Fenix qui mentionne, il n'y a pas
01:19de problème.
01:20Maintenant, si c'est quelqu'un à qui je n'ai pas envie de parler, ça peut être
01:23un peu pénible, oui.
01:25Alors, Apsatou Si, vous, tout démarre en 2018, vous êtes chroniqueuse dans l'émission
01:29« Les Terriens du Dimanche » de Thierry Ardisson, une émission enregistrée la semaine pour
01:33Red, diffusée le week-end, comme ça se fait beaucoup en télévision.
01:36Et face à vous, Éric Zemmour, alors à l'époque, il n'avait pas fondé son parti Reconquête
01:41encore, il était polémiste d'extrême droite.
01:43Il y pensait beaucoup.
01:44Déjà.
01:45Et pendant un échange, il vous attaque sur votre prénom.
01:48C'est votre prénom qui est une insulte à la France.
01:51Voilà ce qu'il vous dit.
01:52Entre autres.
01:53Est-ce que vous pouvez nous raconter, revenir sur cette séquence ?
01:55C'est une séquence à laquelle je ne m'attends pas forcément.
01:58Moi, je suis dans une émission de débat, une émission d'échange.
02:01On peut ne pas être d'accord, mais on peut se respecter.
02:03Et effectivement, on arrive dans cette conversation complètement lunaire où on me reproche mon
02:10identité.
02:11C'est-à-dire qu'avoir un prénom que je n'ai pas choisi, mais que je porte très
02:14fièrement puisque c'est l'histoire de ma famille.
02:17Et effectivement, je vais être confrontée à un spécialiste de la polémique, de l'agression
02:23et de l'attaque.
02:24Et là où j'essaye de répondre avec intelligence en restant assez calme dans les échanges,
02:32je vais me retrouver assez vite dépassée par une situation complètement ubuesque où
02:36l'animateur, à l'époque, laisse faire.
02:39Et pendant cinq minutes, je vais me faire insulter parce que c'est beaucoup, comme
02:42vous dites, c'est une émission enregistrée.
02:44Et en fait, ça dure beaucoup plus longtemps que ce qui est diffusé en réalité.
02:48Et je vais être confrontée avec une extrême violence, un racisme complètement décomplexé
02:55et où on brandit à tout va le fait que c'est une émission enregistrée.
03:00Donc, de toute façon, si je dépasse les bornes, on pourra couper.
03:03Oui, mais bon, la personne en face, elle prend en pleine tête la violence de ces propos-là.
03:09Et on est aussi dans le vrai monde.
03:11On n'est pas que dans la télé et la télé, c'est surtout pas que de la télé.
03:15Donc, à ce moment-là, effectivement, je me retrouve au milieu d'une polémique que
03:19je n'ai pas choisie, qui me poursuit depuis et avec laquelle j'ai appris à vivre, mais
03:25surtout face à laquelle j'ai choisi de rester debout.
03:29Parce qu'à l'époque, du coup, la séquence est coupée au montage et vous, vous décidez
03:34de publier la séquence dans son intégralité sur vos réseaux sociaux.
03:38Ce n'est pas si simple.
03:39Je sors de cette émission et Thierry Ardisson et Stéphane Simon, à l'époque, me disent
03:43énorme scène, énorme moment de télévision.
03:48Et là, je les interpelle tout de suite en disant très bien, mais je connais vos montages.
03:52Donc, où vous passez tout, c'est-à-dire y compris ma réponse où je mets vraiment
03:56en difficulté Eric Zemmour en l'interpelant, en lui disant mais mon prénom est une insulte
04:00à la France avec le même raisonnement.
04:01Expliquez-moi ce que vous évoque le prénom des tirailleurs sénégalais et avec beaucoup
04:06de calme.
04:07Et il ne va pas être capable de répondre à une question aussi simple.
04:09Et donc, le fait d'aller dans cette direction-là ne va pas forcément être gardé au montage.
04:15Et donc, là, je dis à Thierry Ardisson et Stéphane Simon, je connais vos montages et
04:19donc il ne s'agit pas d'en favoriser un plutôt que l'autre.
04:23Où vous passez tout, où vous coupez tout.
04:25Et la chaîne, effectivement, dès le lendemain dit c'est trop violent, c'est impossible,
04:30on ne peut pas diffuser ça.
04:31Chose que j'accepte et je dis mais en revanche, vous retirez tout.
04:35Ça veut dire que vous ne passez rien du tout.
04:37Et je vais découvrir le dimanche qu'ils ont gardé, effectivement, le moment où on
04:40me rebaptise Corinne, prénom qui m'a été attribué par l'extrême droite.
04:44Je n'ai rien contre les Corinnes, mais ce n'est pas mon prénom.
04:46Et là, à ce moment-là, effectivement, je vais prendre une vague de haine parce que
04:52je décide de dire juste la vérité, c'est-à-dire non, ça ne s'est pas passé comme ça.
04:55Et je n'ai pas eu un fou rire avec Éric Zemmour, ce n'est pas mon copain et on n'a
04:59pas discuté.
05:00En riant, ça a été d'une extrême violence.
05:03Et là, n'ayant pas la parole, puisque je ne suis pas à l'antenne à ce moment-là,
05:09Éric Zemmour va faire le tour de tous les plateaux de télévision et expliquer que c'est
05:13moi qui l'ai agressé, que j'ai eu des propos déplacés et que pire encore, il va aller
05:17jusqu'à annoncer mon licenciement à la télévision, ce qui est complètement lunaire
05:22pour moi qui suis à ce moment-là sur mon canapé et qui est déjà décidé et de démissionner
05:28et de déposer plainte et à qui on a ri au nez en disant tu n'as aucune chance de gagner.
05:33Donc petit message pour les victimes, ce n'est pas parce qu'on vous dit ça et ce n'est
05:36pas parce que les gens en face ont l'air de tout savoir que c'est une réalité, le
05:39droit c'est le droit.
05:40Et donc voilà, à ce moment-là, ça va partir sur un truc incontrôlable et contrairement
05:45à ce qu'on dit, ce n'est pas moi qui diffuse et divulgue les informations.
05:50C'est révélé dans une émission qui est quotidienne où ils brandissent une pancarte
05:54en disant voilà ce qu'Éric Zemmour a dit à Psatou, votre prénom est une insulte à
05:58la France et c'est là que ça va commencer.
06:00On me disait que j'étais trop hystérique parce que le simple fait qu'il m'a appelé
06:07Corinne ne donnerait pas lieu à autant de souffrance, ne devrait pas donner lieu à
06:11autant de souffrance.
06:12Effectivement, si c'était arrêté là, ce n'est pas autant de souffrance, mais ça
06:16ne s'est pas arrêté là.
06:17Vous dites que ça devient incontrôlable, ça devient incontrôlable sur les réseaux,
06:21c'est là que ça commence le cyber harcèlement ?
06:23Parce qu'à un moment, quand vous avez des gens en face qui ont les antennes qu'ils
06:27veulent pour aller s'exprimer et que vous, vous ne les avez pas, ils ont une audience
06:30et ils racontent n'importe quoi.
06:32Et à partir du moment où ils le mettent sur la scène publique, on pense que c'est
06:35une vérité.
06:36Donc là, on me fait passer pour une fille qui a voulu créer un buzz, qui a enregistré
06:42à son insu les propos d'Éric Zemmour, c'est vous dire que je ne connais pas la
06:46performance de mon téléphone, mais enregistrer six heures d'émission, parce que les émissions
06:49de Thierry Ardisson duraient très longtemps, pour espérer choper un petit bout, c'est
06:53quand même fou.
06:54Il y a juste Génération Snap, Insta et il y a quelqu'un qui, choqué par les propos
06:58à ce moment-là, capte ce moment-là et qui va me permettre de me défendre.
07:01Et effectivement, non, ce qui se passe, c'est qu'ils font le tour de tous les plateaux
07:07télé, y compris ceux de leurs copains, je cite Morandini, où Thierry Ardisson va venir
07:13et raconter et ma vie privée et expliquer que j'invente tout de toute pièce et qu'en
07:20gros, je suis une parfaite mythomane.
07:22Et donc, à ce moment-là, je ne me rends pas compte de la puissance des réseaux sociaux,
07:26mais je décide d'appuyer sur envoyer et j'envoie la vidéo qu'on m'avait transmise
07:32à ce moment-là et tout le monde est au courant de la vérité.
07:35Et là, je vais regarder mon téléphone, c'est une scène de film, je suis dans mes
07:40bureaux avec mon équipe, je suis assez éprouvée parce que je me prends déjà beaucoup d'insultes
07:43extrêmes droites à ce moment-là.
07:45Et là, je vais voir mon téléphone qui va faire 100.000, 10.000, 100.000, 1.000.000,
07:512.000.000 et jusqu'à 15.000.000 rien que sur un réseau social, c'est-à-dire Instagram
07:55ce jour-là.
07:56Et ça va être pareil sur Facebook et ça va devenir une spirale complètement hallucinante
08:01et j'ai tous les journalistes qui vont commencer à m'appeler et je me rends compte que je
08:05n'ai pas affronté un type dans la rue, non, j'ai mis le doigt dans la prise.
08:13Qu'est-ce qui se passe dans votre tête à ce moment-là quand vous voyez ça, quand
08:15vous voyez votre téléphone qui ne s'arrête pas de vibrer ?
08:17C'est comme si j'avais envie de fermer toutes les portes, toutes les fenêtres, tous
08:21les rideaux d'un coup et de dire mais qu'est-ce qui se passe ? En fait, qu'est-ce qui se
08:25passe ? Moi, je suis entrepreneur, je gère des crises.
08:28Mais alors, une comme ça, c'est une perte de contrôle absolue, on ne comprend pas ce
08:33qui se passe.
08:34Et puis là, je commence à voir toute la presse, c'est un article qui sort toutes les
08:3810 minutes.
08:39Et là, je me dis waouh, sur quoi j'ai appuyé ? Et en fait, je ne vais pas réaliser sur
08:45quoi j'ai appuyé jusqu'à ce que je me réveille chaque matin avec 3000 messages
08:49d'injures tous les jours et je me dis, ils vont se fatiguer quand même un peu, ils vont
08:54s'arrêter à un moment.
08:55Non, ils ne s'arrêtent pas.
08:56Qu'est-ce qu'on vous dit ?
08:57On me dit, je crois qu'ils sont très inspirés dans l'horreur, c'est j'ai le droit à
09:05dire que le beau est la bête, mon mari c'est le beau, moi je suis la bête, je suis singe,
09:10mes enfants sont des bâtards, appel à mon viol, c'est tous les mots qui qualifient
09:19ma couleur de peau.
09:21Je commence à recevoir des courriers avec des excréments beurrés sur des propos qui
09:27m'invitent à remonter dans mon arbre parce que je serais un singe et je me dis, c'est
09:32d'une bassesse.
09:33Je ne veux pas accorder d'attention à ça mais un moment quand ça arrive même dans
09:36vos courriers de votre boîte et que vous arrivez le matin et que vous voyez vos collaborateurs
09:39qui pleurent parce qu'ils n'ont pas choisi ça mais ils sont confrontés à une telle
09:44violence.
09:45Je me réveille, j'ai des milliers de messages sur YouTube, sur Instagram, sur Facebook,
09:50sur Twitter, sur n'importe quel réseau social où j'existe et à l'époque, je travaille
09:54avec mes réseaux sociaux, que ce soit ma marque, mon business, tout est lié aux réseaux
09:58sociaux.
09:59Donc on me dit, vas-y, ferme, etc.
10:00Et puis c'est tout.
10:02C'est facile mais non, je ne peux pas.
10:03Donc même si j'essaye, en tout cas, eux travaillent la nuit, ils sont très organisés,
10:07c'est des brigades.
10:08Ils sont la conséquence d'un donneur d'ordre et dès le lendemain, vous vous retrouvez
10:14avec tellement de messages au réveil qu'ils savent que vous n'avez pas d'autre choix
10:18que de fermer vos réseaux sociaux pour pouvoir faire le ménage.
10:21Et donc vous y passez la journée et rebelote le soir et ce qu'ils veulent, c'est vous
10:25faire disparaître, c'est vous anéantir, c'est vous pulvériser et pour ça, ils sont
10:31très inspirés et ils y vont avec la pire des violences.
10:33Et c'est quelque chose que je vis dans le virtuel, que je vis peu dans le réel, mais
10:39quand même, j'ai des séquences où j'ai ma fille de deux ans dans les bras, je fais
10:42mes courses dans un supermarché, puis j'ai un taré qui me poursuit en m'expliquant,
10:46en m'appelant Corinne, Corinne, Corinne, ça finit avec les agents de Sécu, avec une
10:50gamine de deux ans qui ne comprend pas trop, donc ça, c'est vraiment les moins courageux.
10:55Mais en général, ils sont… Non, c'est les plus courageux, je dirais, parce qu'en
10:59général, ils ne sont pas très courageux, dans la vraie vie, ils ne vous attaquent
11:01pas.
11:02Et qui y sont, ces harceleurs ? Vous regardez leur profil à ce moment-là ?
11:05Ils sont des fans d'une France qui n'existe pas, ils sont des fans d'Éric Zemmour et
11:12de tout son entourage, ils sont complètement endoctrinés, ils vomissent quand ils parlent
11:20tous les propos portés par ces gens-là et ils sont complètement lobotomisés, c'est-à-dire
11:28que quand Eric Zemmour dit, on fait, et donc quand il attaque quelqu'un, on l'attaque,
11:35sans savoir pourquoi et sans être d'accord ou pas, on ne réfléchit pas, on n'a pas
11:40cette capacité de réfléchir et ils vont juste dupliquer ce que leur gourou dit et
11:47fait.
11:48Et donc, c'est là que je dis qu'il y a un donneur d'ordre, c'est que ceux qui
11:51font ça, ils savent très bien ce qu'ils font, donc ils savent que quand ils s'attaquent
11:54à quelqu'un, derrière, il y a une meute qui se lance sans réfléchir, parce qu'on
12:01a dit attaque, c'est le code pour dire attaque et là, ils sont incontrôlables.
12:07Donc là, le donneur d'ordre suprême, c'est Eric Zemmour.
12:10C'est Eric Zemmour et pas que, c'est toute une bande, moi je les ai appelés bande et
12:17j'assume, de toute façon, moi j'ai toujours assumé ce que je disais, mais c'est Eric
12:21Zemmour à l'époque, c'est Thierry Ardisson, qui lui donne beaucoup de force, qui refuse
12:26de me donner les images pour que je porte plainte à l'époque, qui ne va pas supporter
12:30que je démissionne, parce que c'est lui qui vire, mais on démissionne pas de chez
12:34Thierry Ardisson, encore moins quand on est une femme, c'est Stéphane Simon, le producteur,
12:40qui laisse passer quand même quelque chose d'inacceptable, c'est mon employeur à l'époque,
12:48c'est-à-dire C8, le groupe Canal+, dont je vais démissionner parce que j'animais
12:52d'autres émissions chez Canal+, mais je refuse de manger à la table de ces gens-là,
12:57groupe de Vincent Bolloré, qui sait très bien ce qu'il fait, puisqu'à l'époque
12:59je l'ai appelé à l'aide.
13:00À un moment, moi j'écris à Vincent Bolloré, à surtout Maxime Saada, et je leur dis, vous
13:08savez, il est en train de se passer quelque chose de très grave.
13:11Je suis venue travailler, il y a eu un débat, on m'a insultée.
13:15J'ai répondu par un débat, non pas par une insulte, parce qu'on attendait ça de
13:19moi et que je n'allais surtout pas leur donner ça, mais voilà ce qui se passe aujourd'hui.
13:23Et là, je lui mets une sorte de mail où je dis, voilà, j'ai été attaquée par
13:29Éric Zemmour, Thierry Ardisson, et ces deux-là ont commandé des articles à Le Point, où
13:35officie François-Olivier Gisberg, à l'époque, qui est chroniqueur de l'émission, dans
13:39les journaux, où officie Gilles-William Golnadel, qui est également, à l'époque,
13:45chroniqueur à mes côtés dans l'émission, et tous ces gens-là sont en train de se mettre
13:51ensemble.
13:52C'est que du copinage.
13:53Voilà ce qui sort me concernant, voilà le harcèlement que je subis, voilà les manettes
13:57qui sont tirées.
13:58Monsieur Bolloré, où vous bougez ? Où je me défends ? Voilà, je dis, c'est pas possible.
14:06Là, je ne peux plus subir cette pression-là, elle devient invivable.
14:10Et je pense que si je n'avais pas été élevée avec autant de force et de valeur,
14:15j'aurais pu me suicider.
14:16Il y a des gens qui se seraient suicidés.
14:18Vous y avez pensé ? Non, moi, je n'y ai pas pensé, mais mon
14:20corps, malgré moi, m'a lâchée à un moment, c'est-à-dire que moi, j'ai été un an
14:25en arrêt maladie, j'ai eu un problème neurologique, je ne dormais plus, parce que j'étais obsédée.
14:30Je me disais, il faut que j'arrive à les contrer pour que demain matin, je ne me fasse
14:33pas encore insulter.
14:34Et je me disais, et puis plus ils m'insultent, et plus les gens m'appellent, en pensant
14:38me faire du bien, en disant, t'inquiète pas, t'inquiète pas, mais c'est juste horrible
14:42d'entendre parler de ça matin, midi et soir.
14:43Et puis je me disais, à un moment, il faut que je reprenne le contrôle de ma vie.
14:46Je monte dans les taxis, on m'en parle, je descends des taxis, on m'en parle, je vais
14:49à la boulangerie, on m'en parle, sur ma table d'accouchement, on m'en parle, et on me fait
14:54une blague en m'appelant Corinne, juste avant de donner la vie à mon enfant, dans des moments
14:59qui devraient être magiques.
15:01Et donc, Vincent Bolloré et toute la clique n'hésitent pas à ce moment-là, effectivement,
15:10quand j'envoie ce message-là et que je leur dis, attention, je vais parler, et là, je
15:13ne vais pas me laisser faire, parce que je n'ai pas à me laisser faire, parce que je
15:17ne suis pas votre victime.
15:18Eh bien, à ce moment-là, ils vont sortir un communiqué presse en disant, vous avez
15:23tout le soutien qu'il faut, nous soutenons Apsatou, donc communiqué presse publique,
15:29etc.
15:30Il faut savoir que Thierry Ardisson avait rédigé lui-même un communiqué presse au
15:33nom de C8, quelques jours avant, pour dire sa vérité, mais à aucun moment, on ne m'avait
15:38laissé la parole, et on ne cherchait qu'à me convaincre de revenir dans l'émission,
15:43pour peut-être m'humilier davantage ensuite et pouvoir me virer.
15:46Et donc, moi, je refuse tout ça très, très, très, très tôt, et donc, ça ne leur plaît
15:52pas.
15:53Quelqu'un qui se défend, ça ne leur plaît pas, et donc, ils vont vous faire passer pour
15:57une bagarreuse.
15:58Sauf qu'une bagarreuse, c'est quelqu'un qui aime la bagarre, qui va aller se battre parce
16:01qu'elle a envie.
16:02Sauf que moi, je ne l'ai pas choisi, ça, en fait.
16:04Donc, je ne fais que me défendre, et ils vont s'obstiner à aller appeler tout Paris
16:09pour mettre un terme à ma carrière, démolir toutes mes boîtes, démolir ma réputation.
16:14Ça va être leur hobby, numéro un, du matin au soir, à tout ce groupe de puissants qui,
16:18pour une fois, ne sont pas puissants parce qu'ils n'arrivent pas à avoir la main sur
16:22cette personne-là, sur la personne qu'ils attaquent, et puis, ils vont m'acculer de
16:25procédures judiciaires pour que je dépense tout l'argent qui me reste en avocat.
16:29Et ils savent qu'à un moment, vous vous dites, je vais arrêter de donner des frais
16:34d'avocat partout.
16:35D'ailleurs, je remercie mon avocat, Antoine Veil, parce qu'il m'a soutenue du début
16:38à la fin, parce qu'il trouvait d'abord que le combat était injuste, et il ne s'est
16:42surtout pas enrichi dans cette affaire.
16:43Donc, il y a des gens aussi bien qui existent et qui sont contre ce genre d'agissement,
16:49mais ils sont tous restés silencieux, tous, y compris des gens avec qui j'avais travaillé
16:55et qui étaient des amis.
16:56Personne ne vous a soutenu pour vous ?
16:57Toute la presse m'a soutenue, parce qu'ils ont relayé quand même mon message.
17:00Les gens m'ont soutenue.
17:03Moi, je me baladais dans la rue, j'avais des mamies qui me prenaient dans leur bras
17:06dans le 16e arrondissement, ou peu importe, en bas de chez moi, et qui disaient, nous,
17:10on vous aime.
17:11Et puis, j'ai eu surtout beaucoup de messages de gens qui se sont sentis insultés au même
17:14titre que je l'ai été, et je crois que c'est là où j'ai trouvé et j'ai puisé
17:17ma force, parce que je me suis dit, c'est un combat qui me dépasse, en fait, ce n'est
17:21pas ma propre personne, sinon j'aurais lâché.
17:23Mais voilà, donc, ils sont très organisés et puis après, ça va encore plus loin.
17:29Et ce que je dis, je sais, il peut être considéré comme grave ou pas, mais il n'y a rien de
17:36grave aujourd'hui.
17:37Il y a des choses importantes, mais c'est toute la clique, Cyril Hanouna, les producteurs
17:47qui vont organiser ma mise au placard.
17:49Viens, on te met à l'antenne, même si tu fais des belles performances, on va te promettre
17:52une émission et une émission dans laquelle tu portes les valeurs que tu veux porter et
17:57tu fais des bonnes audiences.
17:58Mais derrière, on te remet au placard et puis après, on te dit, si tu veux exister,
18:04il va falloir que tu sois chroniqueuse chez nous et tu n'as pas envie.
18:06C'est une forme de harcèlement psychologique, en fait.
18:09C'est totalement ça.
18:10Et moi, à l'époque, j'ai une carrière assez sympa en télé, assez sympa en télé
18:15qui, moi, me surprend aussi parce que je n'ai jamais choisi de faire de la télé.
18:19J'étais entrepreneur et c'est vrai que je suis régulièrement appelé.
18:22Je danse avec les stars, j'anime TPMP le vendredi au pied levé.
18:29J'étais au Grand 8, j'ai commencé chez M6, qui était une télé très bienveillante
18:34avec Thomas Valentin, Marie Genest, des gens formidables.
18:38Et c'est une télé que j'aime, en fait, à l'époque et ça marche plutôt bien.
18:42Et du jour au lendemain, shut down, tout s'éteint, tout s'arrête.
18:46Et y compris, votre gain-pain, ça veut dire que les marques avec lesquelles je travaillais
18:50disent hop, hop, hop, on est désolés, on vous soutient, mais on arrête vos contrats
18:55parce qu'on ne peut pas se faire insulter sous nos postes et je le comprends mille fois
18:59parce qu'ils n'ont pas choisi d'avoir en followers toute l'extrême droite française
19:03qui vient s'éclater en bas de leur poste.
19:06Ça vous a coûté votre carrière, d'une certaine manière ?
19:08Ça m'a tout coûté, y compris ma santé.
19:09Ma carrière, c'est pas grave, je l'ai construite moi-même.
19:12Je suis entrepreneur depuis 24 ans, je sais me débrouiller.
19:15Je me lève, je me foire et puis je me relève.
19:18Et puis c'est un peu l'histoire de ma vie.
19:20Mais en revanche, ça m'a coûté ma santé.
19:23Oui, parce que vous êtes obsédé à l'idée de dire il faut juste que ça s'arrête
19:26parce que tout devient pollué autour de vous.
19:28Et en fait, vous n'y arrivez pas.
19:31Et puis un jour, vous arrivez à l'hôpital et puis vous n'arrivez même plus à respirer.
19:35Le médecin vous dit si tu veux voir tes enfants grandir, t'es hospitalisé tout de suite.
19:39Et ça va durer un an.
19:41C'est après la fin de ma vie que je suis en arrêt maladie un an.
19:43À ce moment-là, vous bloquez vos réseaux, vous décidez de ne plus les regarder.
19:47Déjà, je n'ai pas le choix parce que quand j'arrive, j'ai une IRM, je sors tout de suite.
19:50Il me dit si vous êtes hospitalisé tout de suite et en cinq minutes,
19:53j'ai un cathéter et je dors 36 heures, ce qui ne m'est jamais arrivé de ma vie.
19:56Je suis passée deux fois deux heures.
19:58Ça faisait deux ans que je dormais deux fois deux heures par nuit.
20:00En plus, je venais d'avoir un bébé à 36 heures d'un coup.
20:04Et donc pendant une semaine, on va me couper de tout.
20:06Et on va essayer juste de me remettre en vie à ce moment-là.
20:09Et puis après, et moi, je continue.
20:13Je crois que je suis Wonder Woman.
20:14Je me dis non, non, non, je vais tenir.
20:16Ça, c'est un passage.
20:17Non, en fait, mon corps ne tient plus.
20:19Et puis après, je vais rester effectivement un an en arrêt maladie
20:21où je vais me choisir et où je vais décider de revivre.
20:26Et je me réveille à 40 ans à la sortie de l'hôpital et je me dis
20:30c'est ma deuxième naissance.
20:32Je viens de naître là, ça y est, parce que j'ai compris ce que je voulais
20:35et surtout ce que je voulais plus jamais.
20:37Et voilà, donc je n'ai aucun regret sur tout le combat que j'ai mené.
20:41Ils ont bien abîmé mon image, bien écorné mon image.
20:43Moi, je suis une fille du dive à la base.
20:45Je rigole tout le temps, je déconne tout le temps et j'aime la vie.
20:48Et ils m'ont fait passer pour celle qui adorait les procédures judiciaires
20:51et qui aimait le conflit.
20:52Oui, parce que vous avez porté plainte contre Éric Zemmour, il faut le dire.
20:55Absolument.
20:56J'ai porté plainte contre lui.
20:58Ça a été entendu.
20:59Il a été mis en examen.
21:00Il a été jugé.
21:02Il a été condamné en première instance.
21:03Il a fait appel.
21:05Il a été condamné en appel et il est parti en cours de cassation.
21:09Et je vais prochainement l'affronter en cours de cassation et on ira jusqu'au bout.
21:12Et il n'y a pas de problème, mais il ne gagnera pas.
21:15Est-ce que c'est à ce moment-là que vous avez vu aussi la montée des extrêmes
21:20sur les réseaux ? On est en 2018 à l'époque.
21:22C'était encore une période où on n'en parlait pas trop, contrairement à aujourd'hui.
21:28Vous avez assisté à ça ?
21:29En fait, il faut juste aller sur Twitter aujourd'hui et se rendre compte
21:32qu'il n'y a qu'eux, en fait.
21:33Mais ce n'est pas parce qu'ils crient fort qu'ils ont raison.
21:35Mais ils sont, à mon sens,
21:38plus nombreux qu'on ne le pense, mais pas si nombreux que ça.
21:42Et ils laissent penser que la France ressemble à ça.
21:44Et moi, je n'y crois pas du tout.
21:46Je n'y crois pas du tout, mais je pense que les gens normaux,
21:49les gens qui vivent tous ensemble et qui comprennent que le monde, il est fait ainsi.
21:53Et ils ne prennent juste pas la parole autant que ces gens-là,
21:56parce que ces gens-là, c'est un combat, c'est une motivation.
21:59Ils ont l'impression qu'ils vont disparaître.
22:01Ils crient du matin au soir.
22:03Ils ont une énergie juste folle.
22:07Mais j'ai quand même l'impression, moi, je suis née en 81.
22:10Moi, j'habitais dans un immeuble.
22:11On descendait l'étage d'en dessous.
22:13Je mangeais chez ma voisine algérienne.
22:15En bas, j'étais chez mon meilleur ami qui était un coanime juif.
22:21Voilà. Et on passait après chez nos personnes âgées
22:25qui étaient des bons Français et on allait leur faire leurs courses, etc.
22:29Moi, j'ai grandi dans une France qui ressemblait à ça.
22:31J'ai grandi avec, mais très clairement en tête que j'étais insolente face au racisme.
22:37Ça veut dire que pour moi, il n'existait pas.
22:39Il ne devait pas exister.
22:40Et dire qu'il existait, c'était lui donner de l'importance.
22:44Et donc, j'ai toujours nié,
22:47nié, entre guillemets, qu'il existait.
22:49Ça ne veut pas dire que je ne le combattais pas.
22:50Ça ne veut pas dire que je l'acceptais.
22:52Mais ça veut dire que un con restait un con pour moi et il n'avait pas d'importance
22:57et je ne devais pas lui donner plus d'importance que ça.
22:59Je devais donner plus d'importance à l'amour,
23:02à l'union, à tout ce qui était, en tout cas, le fruit de ma génération à l'époque.
23:06Je me souviens de Marine Le Pen au second tour.
23:09Tout le monde descendait dans la rue et ce n'était pas acceptable.
23:11On ne voulait pas de ça.
23:13Et aujourd'hui, j'ai l'impression qu'en tout cas,
23:15c'est une fierté de pouvoir crier sur les réseaux sociaux.
23:19Je suis raciste.
23:21Je suis antisémite.
23:22Je suis islamophobe.
23:24Je suis, je suis, je suis, je suis tout ce dont on avait honte à l'époque.
23:29Et j'ai l'impression que ça devient la norme, ça devient.
23:32Mais non, ça n'est pas la norme.
23:34C'est juste qu'ils crient fort et qu'ils pensent que parce qu'ils crient fort,
23:37ils ont raison.
23:38Voilà. Et aussi parce que dans les débats et les échanges,
23:41on n'invite pas forcément les bonnes personnes pour les affronter.
23:44Donc, ils pensent qu'ils ont raison.
23:46Justement, Apsatou, on va s'interroger maintenant ensemble
23:49sur l'attitude des plateformes face à ce cyber harcèlement.
23:52Comment ils s'organisent ?
23:53Je vous vois lever les yeux au ciel.
23:56Mais justement, on va commencer pour vous, par exemple,
23:58qui avez vécu des vagues de cyber harcèlement,
24:01qu'il n'y a pas eu de modération.
24:03Vous avez bloqué, vous avez signalé aux plateformes.
24:06Ça veut dire quoi, modération ?
24:08Non, je plaisante.
24:09Non, mais la modération n'existe pas sur ces réseaux là.
24:13C'est faux.
24:14De toute façon, encore une fois, il faut allumer juste Twitter, Insta, Facebook.
24:17X maintenant.
24:18Oui, X.
24:21Et regardez les commentaires.
24:23Les premiers commentaires qui vous éclaboussent,
24:26ce sont des commentaires d'une haine sans nom.
24:29Et non, il n'y a pas de modérateur.
24:31On a enlevé la responsabilité des gens.
24:33On les autorise à créer des plateformes.
24:35On ferait ça sur n'importe quelle chaîne de télévision.
24:37La chaîne, elle se prendrait toutes les amendes du monde et elle serait fermée.
24:41Mais ce qu'on se permet sur les plateformes est complètement hallucinant,
24:45contraire au droit, à la loi, à absolument tout.
24:48Mais ça continue et ça existe.
24:50Et ça, c'est complètement dingue.
24:52En fait, ne dites pas ça à la télé,
24:53mais courez le dire tout de suite derrière sur X, etc.
24:56Et ça passe.
24:57Et justement, vous avez porté plainte contre Eric Zemmour.
24:59Est-ce que vous auriez pu porter plainte contre une plateforme aussi
25:02pour complicité de cyberharcèlement ?
25:05300%.
25:06Absolument.
25:07Parce que quand vous vous réveillez avec 3000 messages jour,
25:10d'abord, forcément, il y a des alertes au niveau des réseaux sociaux.
25:15Ils voient qu'il y a un fort taux d'activité sur ce compte là.
25:19Oui, parce que j'imagine que vous êtes en tendance, par exemple, sur X.
25:23Absolument.
25:24Et donc, à un moment, ils ne font juste pas leur job.
25:27J'aurais pu porter plainte parce que pour moi,
25:29ils ont fourni à mon agresseur l'outil qui lui permettait de m'agresser.
25:35Ça, c'est évident.
25:37Et j'aurais attaqué Facebook, Insta, tous, Twitter.
25:41Ils ont tous le même comportement.
25:42Pourquoi vous ne l'avez pas fait ?
25:44Parce que fatigué.
25:45Parce que fatigué.
25:47Je viens de finir ce combat qui était d'abord le premier.
25:50Je pourrais tout à fait, effectivement, attaquer aussi l'annonceur,
25:55la chaîne avec qui je travaillais à l'époque,
25:58qui a laissé passer un montage fallacieux.
26:01D'ailleurs, on y réfléchit avec mon conseil.
26:05Est-ce que j'ai perdu beaucoup ?
26:07Énormément, c'est clair.
26:10Mais oui, les plateformes, elles ont une responsabilité.
26:13Je pense que tant que la responsabilité ne sera pas engagée devant les tribunaux,
26:17et encore, c'est un peu comme un magazine de press people
26:22qui sort tout et n'importe quoi et budgète financièrement,
26:27donc budgète les conséquences de son article.
26:31Donc, il se dit, ce n'est pas grave, de toute façon, c'est budgété.
26:33Twitter, Facebook et tout, c'est pareil.
26:35Et là, on est quasiment cinq ans plus tard.
26:40Cinq, six, un peu plus.
26:41Six ans, oui.
26:42Comment vous vous sentez aujourd'hui sur les réseaux ?
26:44Je suppose que tout ça, ça a changé, votre rapport aussi.
26:48À votre utilisation des réseaux, à peut-être la façon dont vous vous mettez en scène ?
26:52Déjà, non, ça, ça n'a pas changé.
26:54Moi, j'ai toujours été très spontanée.
26:56J'ai toujours communiqué mes réussites, mes échecs, mes douleurs, mes trucs.
27:00C'est ce qu'on doit à notre communauté aussi.
27:02Si on ne veut pas être dans une communauté lisse d'influenceurs.
27:05Moi, je ne suis pas influenceuse.
27:06Je ne me considère pas comme telle.
27:09Je partage des choses et on y adhère ou pas.
27:12Mais non, je n'ai pas changé ma manière de faire.
27:18En revanche, je crois que j'accorde moins d'attention à ces gens-là.
27:22Même si, quelquefois, ça me pique.
27:24Est-ce que vous recevez encore des messages aujourd'hui ?
27:26Oui, absolument.
27:27Oui, je pense que si vous ouvrez Twitter, vous aurez encore quelques injures quotidiennes.
27:31Il y en a, ils ne se lassent pas au bout de six ans.
27:33Ils sont toujours au taquet.
27:35Mais non, non, je n'ai pas changé.
27:40En revanche, quand c'est grave, j'attaque.
27:43Et Jean Messia, par exemple, récemment, s'est octroyé le droit de refaire une tribune
27:47en me rebaptisant encore sur mon prénom et en tenant des propos qui sont pour moi,
27:53encore une fois, l'ordre donné aux meutes pour aller m'attaquer.
27:57J'ai porté plainte. Une enquête a été ouverte.
27:59Et effectivement, il devra répondre de ça.
28:03Parce qu'on n'agresse pas les gens comme ça, en fait.
28:06Il faut qu'ils l'entendent.
28:06Il a publié une tribune où ?
28:08Sur X.
28:09Sur X ?
28:09Absolument.
28:10Et j'ai porté plainte.
28:11Encore une fois, soutenue par mon avocat qui a été, qui a dit non, non, on ne laissera pas passer.
28:16Donc du coup, encore là, en 2024, vous pouvez dire que vous ne vous sentez pas en sécurité sur les réseaux.
28:22Ah, mais je ne me suis jamais sentie en sécurité sur les réseaux.
28:25Ce n'est pas un espace de sécurité sur les réseaux.
28:27Si on veut pas, si on veut être en totale sécurité, c'est comme descendre dans la rue.
28:31Il ne faut pas descendre dans la rue.
28:32Je veux dire, c'est le jeu de la vie, quoi.
28:36On peut être agressé partout.
28:38Non, il n'y a pas de sécurité sur les réseaux sociaux.
28:40Ça n'existe pas.
28:42Et non, je n'ai pas changé, en tout cas, ma façon d'être sur les réseaux sociaux.
28:47Je crois que je communique davantage avec authenticité.
28:50Comme je vous disais, le jour de mes 40 ans, je suis née parce que je me suis dit je m'émancipe complètement du jugement des gens.
28:57La vie des gens, c'est la vie des gens.
28:59Ce n'est pas la mienne.
29:00Et en fait, c'est surtout moi qui me suis mis un bouclier.
29:03Donc les balles perdues, je les prends moins.
29:05Et quand il y en a une que je n'accepte pas, je porte plainte.
29:12La loi, elle est faite pour ça.
29:13J'aimerais qu'on revienne un petit peu sur C8 et sur TPMP.
29:16Vous y avez travaillé à une époque.
29:18C'est ce que vous disiez tout à l'heure.
29:20Aujourd'hui, quand on parle de haine en ligne, de harcèlement, le nom TPMP revient assez souvent parce qu'ils ont une grosse communauté sur les réseaux.
29:28Aujourd'hui, on vous proposerait de travailler pour une émission comme TPMP.
29:32Vous accepteriez ?
29:33Sur C8 ?
29:34Moi, je n'irais même pas boire un chocolat chez C8.
29:38Ça ne m'intéresse pas.
29:39Ces gens-là ne m'intéressent pas.
29:41Ils ont contribué à construire cette haine que l'on voit aujourd'hui, qu'on sent dans l'atmosphère quand on marche dans les rues de Paris.
29:48C'est TPMP pour moi.
29:51Et Cyril Hanouna a une vraie responsabilité d'un montée de l'extrême droite.
29:54Je l'ai dit, je le redis.
29:56C'est le premier à avoir fait chanter Marine Le Pen sur ses plateaux.
29:59Je dis pas que Marine Le Pen n'a pas le droit de chanter, mais je dis, mais avoir donné une image un peu
30:04bisounours à un parti politique qui a tenu et tient des propos relativement graves et qui a été condamné à plusieurs reprises.
30:15Donc Cyril Hanouna leur a servi la soupe.
30:18Il a joué un rôle majeur.
30:19Il le sait.
30:20Il l'a dit.
30:21Quand je reçois un Jean-Messiah, j'ai la courbe qui explose.
30:25Donc, au prix de l'audience, on est prêts à tout.
30:28De l'audience et de l'audience aussi sur les réseaux et sur Pics notamment.
30:32Absolument partout.
30:32Je l'ai dit, je le redis.
30:33J'assume quand on est personne publique, on se doit aussi de dire la vérité, en tout cas de ce que l'on pense.
30:40Il ne s'agit pas juste de dire, mais il faut que je fasse attention à ce que je dis.
30:44Non, on a une responsabilité à se taire aussi.
30:46Et je pense qu'effectivement, c'est huit et pas que Cyril Hanouna.
30:51Je pousse.
30:53De toute façon, regardez la table de Cyril Hanouna.
30:56Aujourd'hui, ils débattent d'une France qui n'existe pas autour de leur propre table.
31:01Voilà ses problématiques.
31:02Lui qui a toujours dit moi, je donne la parole à tout le monde.
31:05C'est complètement faux.
31:06Il ne donne pas la parole à tout le monde.
31:08Il choisit à qui il donne la parole.
31:10Et puis après, quand vous regardez à chaque fois le chant lexical qui doit être diffusé chaque matin et repris par Pascal Praud,
31:17par même Christine Kelly, moi que j'ai connue à l'époque, qui était horrifiée parce que ce qui m'arrivait avec Zemmour et qui a été derrière la plus grande amie de Zemmour.
31:26Qui était présidente du CSA, il me semble.
31:29Absolument, absolument.
31:31Voilà, c'est Laurent Ferrari, c'est Pascal Praud, c'est tous ces gens qui tendent le micro à des propos assez nauséables.
31:44Vous êtes une femme, vous êtes une femme noire, vous êtes présente médiatiquement sur les réseaux, etc.
31:49Pour vous, on peut l'éradiquer, ce racisme systémique, cette montée en puissance qu'il y a ?
31:54En équilibrant les choses, bien sûr.
31:56En équilibrant les choses, en faisant en sorte que toutes les paroles soient représentées,
32:01en faisant en sorte de ne pas leur donner juste un micro pour amplifier leur message et leur servir de tribune.
32:09Je crois que la vraie télé, c'est ça.
32:11On n'est pas obligé d'être tous d'accord.
32:12On a des gens qui peuvent adhérer à leurs idées et c'est tout à fait respectable.
32:15Et on doit respecter d'ailleurs le fait qu'il y ait des gens qui votent pour certains partis auxquels moi je n'adhère pas et auxquels d'autres n'adhèrent pas.
32:21Ça, ça s'appelle effectivement vivre tous ensemble avec des opinions différentes.
32:27Et cette liberté d'expression, elle est importante, elle est fondamentale.
32:30Et moi, je l'aime et elle est importante au fin fond de mes tripes.
32:35Mais à un moment, si les chaînes de télévision censées porter des débats deviennent juste des tribunes où en face, il n'y a pas de réponse,
32:49il n'y a pas de répondant, il n'y a rien, c'est problématique.
32:53Et moi, je trouve qu'aujourd'hui, c'est pour ça que les jeunes, d'ailleurs, délaissent beaucoup la télévision.
32:57Ils sont sur les réseaux, ils sont sur Twitch, ils sont sur YouTube, ils cherchent.
33:00Oui, c'est pas mieux. Mais c'est vrai qu'ils choisissent la télé qu'ils regardent.
33:04Et aujourd'hui, moi, je vois la télévision publique fait des programmes formidables.
33:08Et c'est là qu'il y a encore des débats qui sont dans le respect et pas des débats où tout le monde juste crie et personne ne finit son propos.
33:14Et les propos sont que t'es. Et donc, ça ne fait plus sens.
33:19On doit pouvoir encore s'écouter, se parler. C'est ça, l'intelligence.
33:22Ils veulent qu'on les considère comme des intelligents.
33:24L'intelligence, c'est d'abord de savoir écouter l'autre et pour pouvoir lui répondre.
33:29C'est pas de déformer son propos pour pouvoir faire du buzz.
33:32Et je trouve que la télé, là dessus, ne joue pas forcément son rôle.
33:36Donc, il devrait y avoir des talks, il devrait y avoir des échanges où on entend un petit peu toute cette France qui est silencieuse
33:43et qui assiste à ce spectacle et qui ne peut que se lamenter parfois sur leurs réseaux sociaux en disant quelle tristesse.
33:50Voilà. Donc, je pense que la télé a une vraie responsabilité et une obligation de se réinventer en urgence.
33:57Vous parliez des jeunes, justement.
33:58Si vous aviez un message à faire passer à un jeune qui lui-même, aujourd'hui, est victime de cyberharcèlement, ce serait quoi ?
34:04D'abord, que la vie, ce n'est pas les réseaux sociaux, que les gens sont très courageux sur les réseaux sociaux, mais jamais dans la vraie vie.
34:10Qu'ils ne définissent pas qui tu es, que tu as le droit de te défendre, que le rôle de la victime n'est pas...
34:16La place de la victime, ce n'est pas le silence.
34:18Tu as le droit de te défendre.
34:19Et quand tu es attaqué, si tu passais dans la rue et que tu étais injurié, tu devrais te défendre.
34:24Et donc, c'est pareil sur les réseaux sociaux.
34:26Mais peut-être de passer moins de temps sur les réseaux sociaux, de retourner.
34:29On dirait une vieille qui vous parle, mais à nos bons livres, à nos belles expos et à se rencontrer entre êtres humains.
34:36Je pense que c'est la meilleure des nourritures intellectuelles.
34:39Et de ne pas imaginer que des émissions de télévision qui font un million de téléspectateurs, ce soit la France.
34:46Voilà, on parle d'un million de téléspectateurs ou un million d'eux et même un grand, grand record.
34:52Parce que j'adore leurs tweets en disant record de la saison et tout.
34:55C'est deux millions de téléspectateurs.
34:57Oui, mais on est 65 millions de Français.
34:59Donc, c'est vraiment pas beaucoup.
35:01Donc, il faut arrêter d'imaginer que le monde, c'est la télé.
35:04Le monde, c'est plus la télé.
35:05Et aujourd'hui, il y a des influenceuses très intelligentes qui font des contenus et des influenceurs très intelligents qui font des contenus à impact
35:12et qui font autant, voire beaucoup plus que ces gens là, mais qu'ils ne fanfaronnent pas absolument partout et en moins de temps qu'eux.
35:20Donc, il y a beaucoup moins de moyens, surtout.
35:22Donc, la vraie télé, c'est celle qui parle à tes valeurs, qui t'apprend des choses, qui fait que tu dors moins bête et qui t'instruit.
35:30Voilà, et pour ça, il y a des programmes formidables sur Arte, sur France Télévisions, sur plein de chaînes qu'on peut trouver aujourd'hui, même à l'international.
35:40Il y a des trucs encore top.
35:42Merci beaucoup, Absa Toussis, de nous avoir livré votre témoignage et votre vision sur le cyberharcèlement.
35:48Si vous-même, vous en êtes victime, n'hésitez pas à contacter le 30 18, le numéro national pour les victimes de violences numériques.
35:54Merci. Merci beaucoup.