• il y a 4 mois
"Séguéla, une page de pub" est un documentaire français diffusé en 2024 qui se concentre sur la carrière et l'héritage de Jacques Séguéla, une figure emblématique de la publicité française. Le documentaire, d'une durée de 52 minutes, offre un aperçu de l'évolution des spots publicitaires à la télévision à travers le prisme de l'expérience de Séguéla. Il met en scène des échanges entre Jacques Séguéla et de jeunes aspirants publicitaires âgés de 18 à 22 ans, qui partagent leur vision du secteur et discutent de l'avenir de la publicité. Points clés du documentaire :

Rétrospective : Séguéla revient sur sa carrière prolifique dans le monde de la publicité

.
Évolution : Le programme explore les changements dans l'industrie publicitaire, en particulier dans le domaine des spots télévisés
.
Dialogue intergénérationnel : Des jeunes intéressés par une carrière en publicité échangent avec Séguéla, offrant un contraste entre l'expérience et les nouvelles perspectives

.
Réflexion sur l'industrie : Le documentaire aborde probablement les défis actuels et futurs du secteur publicitaire.

"Séguéla, une page de pub" a été diffusé sur plusieurs chaînes, notamment Canal+ Docs et potentiellement d'autres plateformes. Il offre un regard à la fois rétrospectif et prospectif sur l'industrie de la publicité, à travers le parcours d'une de ses figures les plus connues en France.

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Transcription
00:00Je suis fils de pub, j'aime la pub, elle m'a enfanté, elle m'a donné à la fois ma
00:25raison de vivre et ma raison d'aimer.
00:27Mon métier, je suis amuseur public, la publicité c'est pour ça qu'elle est faite, je n'aurais
00:37souhaité aucun autre métier au monde pour révéler ce qui m'intéresse, c'est-à-dire
00:43les autres, les gens, la pub c'est d'aimer les gens et de leur faire aimer les produits
00:49qu'on leur propose.
00:51Juste arriver au bon moment, avec un talent, le talent des mots, qui m'a permis de faire
00:55avancer les choses, c'est tout, moi ce qui m'intéresse c'est d'être marchand de bonheur.
01:10Je n'étais pas tellement attiré par la publicité, je ne m'étais jamais mis à la publicité,
01:15c'est elle qui m'a sauté dessus, qui m'a agrippé et qui m'a projeté dans ce monde-là.
01:21Je me suis aperçu que peu à peu, c'est elle qui menait le monde et c'est pour ça qu'elle
01:26était tellement jalousée, mais qu'il fallait lui apporter autre chose et cette autre chose
01:31pour moi, ça a été le spectacle.
01:45Jacques Seguela pour moi c'est le Bernard Tapie ou le Michel Polnareff ou la publicité,
01:59c'est le personnage qui pour moi symbolise les années 80, les années 90, cette période
02:05où la publicité est extirpée de cette forme de réclame qu'elle était depuis toujours
02:12pour devenir une forme de genre à part entière.
02:15C'est ça que je retiens d'abord de Jacques Seguela, c'est ce talent publicitaire qui
02:19a arraché la publicité, qui a fait parler la marchandise.
02:23Pendant très longtemps, les marchandises n'avaient pas de valeur, n'avaient pas de personnalité
02:27et d'un coup, des marques comme Décathlon, des marques comme Danone, on leur a collé
02:31des valeurs, des récits, des mises en scène et ça c'est une nouveauté écrasante.
02:42Jacques Seguela il est apparu dans les années 70, il était l'un des 10 ou 12 publicitaires
02:48jeunes qui changeaient la publicité avec audace, avec beaucoup de culot, avec beaucoup
02:55de créativité provocatrice.
02:57On a oublié le nom des autres pratiquement et globalement on se souvient de Jacques Seguela
03:02parce qu'il a remarquablement fait sa propre publicité.
03:05Je crois que le métier d'un publicitaire c'est de secouer.
03:10Secouez-moi, secouez-moi, nos slogans disent ce que nous sommes.
03:13Jacques c'est quelqu'un qui a toujours défendu la création et qui a toujours défendu
03:43les créatifs et c'est essentiel.
04:00C'est important de rencontrer les jeunes parce que c'est leur avenir dont on va discuter.
04:04Le monde du demain leur appartient.
04:07Je suis sûr que c'est pas moi qui vais leur apprendre des choses dans cette interview
04:12et c'est eux qui vont m'apprendre des choses et j'en ai tellement besoin.
04:18Waouh, waouh, waouh, waouh, waouh, bienvenue.
04:21Bonjour.
04:22Quel bonheur.
04:23Bonjour.
04:24Quel honneur.
04:25Bonjour monsieur.
04:26Alors règle numéro un, on se tutoie et les prénoms.
04:29Règle numéro deux, pas de nœuds papillons, pas de cravate et vous avez tous les droits,
04:34le droit de toutes les questions, y compris de me dire que quand j'ai été nul, j'ai été vraiment nul.
04:41En fait moi j'aimerais savoir si, pour beaucoup de personnes, quand on pense à Jacques Seguéla,
04:45c'est quelque chose qui se trouve autour du poignet, c'est une montre, notamment une Rolex.
04:49Ecoute, regarde mon poignet, j'ai pas de Rolex.
04:55Non mais j'aimerais savoir en fait si tu avais pu maîtriser la phrase à laquelle on pense
05:00quand on s'imagine si à 50 ans t'as pas une Rolex, ça veut dire que t'as raté ta vie ?
05:04Oui.
05:05On est en campagne, Sarkozy, moi je défends Sarkozy, je suis le matin à la télévision sur Télématin
05:11et les journalistes accusaient Nicolas Sarkozy d'avoir une Rolex et des Ray-Bans.
05:18Comment peut-on reprocher à un président d'avoir une Rolex ?
05:21Une Rolex, enfin, tout le monde a une Rolex.
05:23Si à 50 ans on a pas une Rolex, on a quand même raté sa vie.
05:26On accusait cet homme d'avoir une Rolex et une paire de Ray-Bans, des lunettes à deux balles.
05:32C'est la force du slogan. En meilleur et en pire.
05:37Parce que cette phrase qui était pas contrôlée, qui était pas ce que je voulais dire,
05:41qui était immonde, qui était stupide, qui était ridicule,
05:46qui était tout ce que tu voudras, qui était tout le contraire de tout ce que j'ai pu dire
05:50et de tout ce que j'ai fait dans ma vie,
05:52bon, m'était finalement accroché comme un poisson d'avril dans le dos.
05:55Sauf que ça dure pas une journée, ça dure une vie.
05:58Elle vous a beaucoup servi cette phrase, finalement.
06:00C'était un coup de pub, en réalité.
06:02Oui et non, j'aurais préféré m'abstenir, mais c'est comme ça, donc il faut le gérer.
06:06Et puis j'ai été libéré quand, six mois après, je descendais les Champs-Elysées,
06:10il y a deux petits jeunes qui s'approchent de moi, qui me disent
06:13« Monsieur, monsieur, regardez ».
06:15Et il y en a un qui me montre ici son poignet,
06:18et à la pointe de bique, il avait dessiné une Rolex.
06:21Il a dit « Moi je l'aurais avant 50 ans ».
06:24J'ai dit mais finalement, dans ce slogan, il y a le pire et il y a le meilleur.
06:27Il faut prendre le meilleur.
06:29Le meilleur, c'est qu'il faut tous avoir un rêve.
06:32Alors la connerie, c'était de parler de Rolex.
06:34Mais oui, mais pour moi, elle fait partie de votre carrière, cette phrase.
06:38Je comprendrais que vous en tiriez un côté positif.
06:42Elle a certainement servi, c'est un peu mégalo ce que je vais dire,
06:47ma notoriété, je dis ça avec dépitié.
06:49Honnêtement, je pense, oui.
06:52Est-ce que c'est pour le meilleur, est-ce que c'est pour le pire ?
06:55Moi j'ai le sentiment que finalement, ça a été pour le pire au départ,
06:58que c'est pour le meilleur à l'arrivée.
07:00Je ne sais pas pourquoi peut-être.
07:02En tout cas moi, les gens que je vois, ils ne me suivent pas.
07:04Ça fait rire, je pense tellement que c'est...
07:06Mais ils me disent « Mais quelle heure est-il ? », mais en se marrant.
07:08Ils me font ça, dans les restaurants, ils me font ça, etc.
07:11Mais je vois bien que ce n'est pas pour m'agresser.
07:13Ce n'est pas gentillesse, ce n'est pas tendresse.
07:16Ceci dit, j'aurais mieux fait de me taire, évidemment.
07:19Pour exister, il faut aller dans les médias.
07:21Pour être reconnu par les médias, il faut être agressif.
07:24Alors j'ai été agressif, mais l'agressivité se paye.
07:26Mais vous êtes surexposé un peu aussi.
07:28Je me suis surexposé, mais je me dis après tout qu'on a fait notre chemin.
07:32Et tous les matins, je me dis que mieux vaut être beau, riche et s'égalomane
07:37que laid, pauvre et s'égaga.
07:41Les tableaux, ils ont leur musée.
07:44La publicité, elle a tous les écrans du monde.
07:47C'est le plus grand musée du monde.
07:49Les centaines de millions d'écrans qui proposent cette publicité.
07:56Donc elle a l'obligation d'être artistique,
07:59l'obligation d'être culturelle, l'obligation d'avoir du cœur.
08:03La publicité, c'est du cinéma.
08:06Et il faut jouer ce cinéma-là.
08:09La vie est trop dure.
08:11La vie est trop pesante.
08:13La vie est trop incertaine.
08:15Pour que de temps en temps, il n'y ait pas quelques gouttes d'amour.
08:19Et c'est ce qu'il faut faire.
08:21C'est ce qu'il faut faire.
08:23C'est ce qu'il faut faire.
08:25C'est ce qu'il faut faire.
08:27C'est ce qu'il faut faire.
08:29Pour que de temps en temps, il n'y ait pas quelques gouttes d'amour
08:32qui nous tombent du ciel.
08:47J'ai fait, avec bonheur,
08:49la dernière annonce libre d'une femme.
08:53C'était pour la CX, avec Grace Jones.
08:57C'est un film de Jean-Paul Goude.
09:00Un film de musée.
09:02Avec une violence artistique incroyable.
09:05Elle disait « j'aime, j'aime, j'aime ».
09:08C'était sur une musique de Julien Clerc.
09:10Et ça a été la dernière fois qu'on a pu parler de vitesse
09:15et avoir cette agressivité artistique, poétique.
09:20D'ailleurs, on en parle encore.
09:22C'est toujours pareil, 40 ans après.
09:27J'aime, j'aime, j'aime.
09:38Le génie des créatifs,
09:40c'est d'être capable, en quelques secondes parfois,
09:42de raconter des histoires qui vont changer les choses.
09:45Alors qu'en réalité, c'est des histoires extrêmement sensibles,
09:47extrêmement complexes.
09:48Ils ont quelques secondes pour faire passer un message hyper fort.
09:51C'est ce qui me fait dire aussi
09:53que c'est une discipline artistique créative, la publicité.
09:57Parce que savoir comme ça, inventer une histoire, poser un décor,
10:02faire travailler d'ailleurs énormément de techniciens
10:04et énormément de disciplines artistiques autour de soi
10:07pour faire en sorte de passer en quelques secondes un message qui soit puissant,
10:10oui, c'est tout un art.
10:13La publicité, c'est l'étonnement.
10:16La publicité, ça tire la langue, ça fait des pieds de nez.
10:19Ça doit vous toucher.
10:21Vous savez, c'est horrible d'être en concurrence avec un film
10:24qui, derrière nous, a deux heures, des millions de dollars,
10:28l'espace et E.T. pour vous faire rêver.
10:30Moi, j'arrive avec mes 30 secondes, j'ai un paquet de lessive.
10:33Quand j'ai une bagnole, c'est déjà un peu pire.
10:35Quand j'ai une voiture, c'est déjà pire.
10:37Quand j'ai une voiture, c'est déjà pire.
10:39J'ai un paquet de lessive.
10:41Quand j'ai une bagnole, c'est déjà un peu plus facile.
10:43Ou j'ai un paquet de café.
10:45C'est pas facile de casser la gueule à Spielberg.
10:47Est-ce qu'aujourd'hui, vous pensez que les publicitaires
10:50sont moins des artistes qu'ils l'étaient avant ?
10:52Non, il y a des très grands créatifs.
10:55Quand je parle d'art, parce que je la ramène,
11:01c'est un art mineur.
11:03Comme le cinéma, on parle de 7e art.
11:06C'est pas du Picasso quand même.
11:09On essaye de faire du cinéma à travers nos publicités.
11:12Quand on est briefé sur un film et qu'on a envie de transmettre une image,
11:15de toucher les gens, de les faire rire,
11:17quand j'écris un script, j'imagine un mini-film.
11:20Bien sûr, mais tu as raison, il faut se raccrocher à ça.
11:23Il y a une image de créativité dans la publicité,
11:26et il y a une image d'artiste qui fascine tout le monde.
11:29Le métier est difficile parce qu'il faut concilier
11:32l'envie de créer quelque chose d'original
11:35et la nécessité d'être compris,
11:38entendu et apprécié
11:41par une masse de population ou par une cible de population
11:44plus précise et plus étroite.
11:47La frustration permanente du publicitaire,
11:50c'est des artistes refoulés.
11:53Et comme tout artiste, ils ont envie de laisser leur oeuvre.
11:56Et ce qu'ils pensent, ce qu'ils conçoivent, c'est sacré.
11:59J'ai ramassé sur le chemin
12:02cette petite plume, je vais en faire une oeuvre d'art
12:05avec mon photocopieur.
12:08Cette plume, je vais la faxer.
12:11Je compose un numéro au hasard et je vais la me voir
12:14au bout du monde, parce que mon art,
12:17il est à tout le monde, précis, pointu, sharp.
12:20Il y a effectivement un côté créatif,
12:23voire même qui invoque le cinéma,
12:27mais j'ai l'impression que c'est l'alliance de tout ça
12:30qui a été mise en oeuvre pour créer du mensonge,
12:33pour donner cette idée capitaliste
12:36que c'est du mensonge.
12:39Vous êtes beaucoup comme ça, à essayer de me fracasser ?
12:42Non, mais c'est créer de belles images
12:45pour donner envie et le besoin aux gens d'acheter quelque chose
12:48et en soi, c'est du mensonge.
12:51On fait croire, grâce aux belles images,
12:54mais ça, c'est la mauvaise publicité.
12:57Mais c'est vrai du cinéma.
13:00Combien de films de cinéma a-t-il envie de quitter
13:03avant la fin de la séance, avant qu'ils n'étaient nuls ?
13:06C'est comme la littérature.
13:09Pour un livre qui va être privé, il y en a combien de nuls ?
13:12C'est pour ça que la publicité fait partie de l'art.
13:15Il faut la juger comme de l'art.
13:18Il y a tellement de croûte et tout d'un coup, il y a un Picasso.
13:21C'est pareil, la publicité, bien sûr qu'il y en a à foison.
13:24Je me bats contre ça.
13:27Je dis à mes créatifs, et à tous les créatifs du monde,
13:30mais battez-vous, ayez des idées nouvelles.
13:44Je pense qu'évidemment, en tant que publicitaire,
13:47on va faire appel à des artistes pour amener une certaine patte,
13:50et une identité forte.
13:53En revanche, la publicité, c'est d'être sûr que le message passe et compris.
13:56On peut ajouter quand même cette dimension du beau
13:59que la publicité ne recherche pas toujours.
14:02Parce que le sens prime quand même sur l'image.
14:05Oui, tu as raison, la publicité doit s'adresser à tout le monde.
14:08Tout le monde doit la comprendre.
14:11Ce n'est pas le cas de l'art.
14:14L'art est justement là pour t'éveiller,
14:17pour te choisir, pour aller plus loin.
14:20La publicité n'a pas le temps de faire ça.
14:23Elle est obligée d'aller tout de suite à l'immédiatité de la compréhension.
14:37J'ai été mené par le bout de nez de la chance.
14:40Parce que les journalistes se sont tués à dire
14:43que j'avais fait Elia-François Mitterrand.
14:47C'est François Mitterrand qui m'a nommé petit roi de la publicité.
14:52Une campagne, c'est un slogan.
14:55Un slogan, c'est très personnel.
14:58J'avais écrit La Force tranquille comme ça sur un petit papier blanc.
15:01J'ai vu son regard rentrer dans le slogan.
15:06J'ai réussi mon rêve qui était d'offrir à la France
15:09la première campagne pour le mettre sur le droit chemin.
15:17En avant-première sur TF1, voici l'affiche de François Mitterrand.
15:20Vous la retrouverez un peu partout dans les prochains jours.
15:23La photo a été prise à quelques kilomètres de Château-Chinon.
15:26Et d'ailleurs sous la neige.
15:29Ce sont les merveilles et les mystères de la technique.
15:32Cette affiche a été testée aujourd'hui à Paris.
15:35Une troisième est prévue entre les deux tours.
15:38Moi, si j'étais un homme politique, je réduirais les impôts.
15:41Je régulariserais les sans-papiers.
15:45Je donnerais de l'orangina gratuit à tout le monde.
15:48François Mitterrand vous appelle un jour.
15:51Il vous dit qu'il va être candidat à la présidence de la République.
15:54Vendez-moi. Vendez du rêve.
15:57Non, il ne dit pas vendez-moi.
16:00Il dit expliquez-moi ce qu'est la communication moderne.
16:03C'est quelque chose que je connais mal.
16:06Vous allez me donner ce que vous savez sur la publicité.
16:09Et moi, en échange, je vais vous donner ce que je sais sur la politique.
16:13C'est super comme programme.
16:15Lorsqu'on glisse de la pub commerciale à la pub sociale
16:18et à la pub politique, c'est le même mécanisme.
16:21Sauf qu'on ne s'adresse plus à l'individu consommateur.
16:24On s'intéresse à l'individu citoyen.
16:27Et on le persuade de voter, d'accepter un programme
16:30ou de défendre la personne qui se présente.
16:334, 3, 2, 1.
16:36François Mitterrand est élu président de la République.
16:42Générique
16:48À l'heure où je m'exprime, annonce que les Françaises
16:51et les Français ont choisi le changement
16:54que je leur proposais.
16:57François Mitterrand, c'est le premier homme politique français
17:00qui a eu l'intelligence de comprendre les enseignements
17:03et le talent publicitaire de Jacques Seguéla.
17:06Jacques Seguéla qui était profondément mal aimé
17:09par le Parti socialiste, qui était rejeté,
17:12c'est quelque chose de très vulgaire de faire la communication
17:15de quelqu'un qui était dans le paysage politique.
17:18Quand vous faites la pub pour Mitterrand,
17:21on vend une idée du vivre ensemble, une idée de la société.
17:24Oui, mais c'est fait pour ça, c'est un moyen de communication
17:27qui n'empêche pas le choix de chacun.
17:30Il n'y a pas de raison qu'on utilise la publicité
17:33pour vendre des voitures ou des yaourts
17:37pour différencier les hommes politiques, pour qu'on comprenne
17:40et pour qu'il y en ait qui sortent du lot.
17:43La publicité, la force tranquille, c'était un espèce de jaillissement
17:46qui a fait que François Mitterrand, qui a été un des plus grands présidents
17:49en France, soit élu.
17:52François Mitterrand a reconnu dans cette formule
17:55un habit qu'il devait endosser et qu'il devait lui incarner
17:58cette force tranquille. Au fond, les mots ont un pouvoir
18:01et ils ont eu d'abord un pouvoir sur lui.
18:05Ce que Jacques Segueulat lui avait prescrit, c'est de devenir,
18:08d'incarner cette force tranquille. C'est ça, la force d'un grand slogan.
18:11C'est effectivement cette résonance combinée entre un individu,
18:14un peuple et une nation.
18:17L'intérêt de cette publicité, c'est d'avoir présenté une image
18:20rassurante, pépère, je dirais presque pétainiste,
18:23conservatrice de Mitterrand. Et je crois que ça a servi
18:26à quelque chose dans le déplacement des 5%
18:29de voix de gens qui ne sont pas idéologiques,
18:32qui n'ont pas de conviction, qui n'ont pas de tradition,
18:35qui ne sont pas encartés et qui votent en disant
18:38au fond, est-ce que cette personne, on peut lui confier les clés du camion ?
18:41Et avoir cette photo, on pouvait lui confier les clés du camion.
18:44Tu as fait beaucoup de déclarations
18:47et beaucoup de choses différentes dans la politique.
18:50Est-ce que tu penses
18:53que tu sers la démocratie ? En France notamment,
18:56en ayant fait des campagnes de pubs
18:59pour des politiciens de la gauche à la droite
19:02et en les ayant favorisés, puisque tu disais que c'est comme ça qu'on pouvait
19:05distinguer les hommes politiques en leur faisant des publicités.
19:08Est-ce que ça, c'est démocratique et est-ce que c'est servir la démocratie ?
19:11Écoute-moi, je ne mélange pas
19:14la publicité et la politique,
19:17même si je crois pouvoir apporter
19:20à la publicité politique le talent
19:23de la publicité, ce qui n'existait pas
19:26avant les campagnes de Mitterrand et tout ce qui s'est passé.
19:29Moi, je n'ai jamais aimé les partis.
19:32Je n'ai jamais voulu appartenir à aucun parti, etc.
19:35J'ai toujours voulu ma liberté.
19:38La seule chose qui m'intéresse, c'est quel est le candidat
19:41qui peut le mieux faire avancer la France
19:44en démocratie, en économie,
19:47en culture, en tous les sujets du monde.
19:50Qu'il soit de gauche, qu'il soit de droite, à condition que ce ne soit pas un dictateur, bien sûr.
19:53Qu'il soit de droite, qu'il soit de gauche,
19:56tenez à devant.
20:14Bonjour mes enfants.
20:17Bonjour Jacques, excuse-moi, Jean-Michel demande
20:20quand est-ce que vous allez tourner la film
20:23Porte-Avion pour la Visa ?
20:26Il faut demander à Jean-Luc.
20:29Équipe 4 sur le pont.
20:36J'ai pris ma petite valise, le script
20:39et je suis allé voir le Président de la République.
20:42Je lui ai dit, Monsieur le Président, est-ce que vous nous autoriseriez
20:45à utiliser un porte-avion atomique et un sous-marin
20:48le temps d'un tournage ?
20:51Je suis persuadé que ça ferait aussi bien l'image
20:54de la marine et de l'armée que celle de Citroën.
20:57Et puis Citroën c'est quand même une grande société française.
21:08Je vais vous montrer des images.
21:11Ça c'est l'image, la Visa va prendre son envol
21:14et elle va passer de 0
21:17à 203 km à l'heure en 3 secondes.
21:20Jamais plus une voiture ne fera ça dans sa carrière.
21:23Elle va d'ailleurs aller plus vite que le jet
21:26qui est là, parce qu'elle est plus légère.
21:36Découpez-moi, j'arrache !
21:39Aïe, aïe, aïe !
21:42Oh, le blouson, dis donc !
21:48Aïe, aïe, aïe !
21:51François Mitterrand vous a permis...
21:54Aujourd'hui, c'est...
21:57Ça ne se reproduira plus jamais ?
22:00C'est très douteux ce que vous dites.
22:03Vous travaillez sur la campagne d'un président
22:06et juste après il te prête un porte-avion.
22:09J'espère que ça ne se reproduira plus,
22:12parce que c'est quand même très étrange.
22:16Pourquoi ? En quoi ça gêne ?
22:19Ça fait beaucoup de bien à l'armée.
22:22Quand j'ai amené le script
22:25au président François Mitterrand,
22:28il m'a dit que j'étais un très mauvais publicitaire.
22:31Les Français n'achètent pas les voitures qui coulent
22:34et les nuls ont trop de marketing sur la voiture.
22:37Mais moi, mes porte-avions et mes hydravions marchent.
22:40Et donc cette publicité, puisque vous me l'offrez,
22:43je vais la faire pour faire aimer l'armée.
22:46Comment tu peux reprocher un film aussi drôle,
22:49aussi extraordinaire ?
22:52Il n'y a rien à reprocher.
22:55On en parle 40 ans après.
22:58Vous avez des liens très étroits avec François Mitterrand
23:01et ça vous a permis de faire des choses
23:04qu'on ne pourra plus jamais refaire.
23:07C'est pas moi, c'est lui.
23:10Aucun autre président n'osera jamais faire ça
23:13parce qu'il va avoir les critiques que tu as.
23:16Très curieusement, quand le film est sorti,
23:19il n'a pas eu de critique.
23:22Il a des critiques, mais ce n'est pas la même génération.
23:25D'ailleurs, c'était les années 80,
23:28les bloussements de la mode, des bloussements de la pude.
23:31On ferait bien d'en retrouver un peu,
23:34mais aussi en gardant toutes les critiques que vous avez pu faire
23:37et pour lesquelles je me bats en permanence.
23:40Il a l'argent.
23:43Il a le pouvoir.
23:46Il a une Audi.
23:49Il aura la femme.
23:52La pub, elle s'inspire de la pop culture
23:55et elle inspire la pop culture.
23:58Elle s'inspire de la société et elle inspire la société.
24:01Quand on regarde les publicités d'il y a 30 ans,
24:04on voit l'image de la femme dans les sociétés à cette époque-là.
24:07Heureusement, aujourd'hui, on fait extrêmement attention.
24:13Mon film le plus extraordinaire,
24:16c'est un film pour Citroën.
24:19Le grand patron de Citroën m'appelle et me dit
24:22« J'ai enfin réussi à voir la qualité des voitures allemandes,
24:25mais il faut que vous fassiez un film pour prouver ça. »
24:28C'est là revenu dans 15 jours.
24:31Les créatifs ont dit « On va faire un crash test. »
24:34Les créatifs disent « Tu es nul.
24:37On a déjà fait les crash tests. »
24:40« Oui, mais mon idée, c'est que dans la voiture pour le crash test,
24:43il y a la plus belle fille du monde. »
24:46« Ah bon ? Mais tu ne l'auras jamais. »
24:49« Mais pourquoi je ne l'aurai pas jamais ? Je vais aller la voir. »
24:52C'était Claudia Schiffer à l'époque qui était la superstar.
24:55Je demande à Carla Bruni de me donner son téléphone
24:58et je l'appelle.
25:01Je vais la voir à Londres et je lui dis
25:04« Je sais que dans un an, tu arrêtes le mannequinat pour faire du cinéma.
25:07Moi, dans un film de 30 secondes,
25:10je vais pouvoir prouver que tu es une actrice
25:13et que tu es une cascadeuse. »
25:16C'est les deux demandes d'Hollywood.
25:19« Est-ce que tu es prête à prendre le risque ? »
25:22Elle réfléchit à peine deux minutes.
25:25« Je ne te garantis rien, mais je te garantis qu'en tout cas, ça se saura. »
25:28Elle me dit « D'accord, on le fait. »
25:37Moi, je demande à une cascadeuse de faire l'essai.
25:40Elle fait l'essai, elle sort blanche et elle dit
25:43« Claudia ne peut pas faire ça. »
25:46Elle ne va pas mourir parce qu'évidemment,
25:49elle a les airbags, etc.
25:52Quand on arrive à 40 à l'heure dans une voiture comme ça,
25:55on a un petit geste.
25:58Moi, je suis paniqué.
26:01Je vais voir Claudia et je lui dis
26:04« Claudia, je crois qu'on ne peut pas continuer avec ça. »
26:07Elle me dit « Pardon, mais quel petit blanc bec que tu es.
26:10Tu m'as promis que j'allais être d'un film. »
26:13À la fois une cascadeuse et une artiste,
26:16on fait le film. Elle fait le film.
26:19Personne ne le refera plus jamais.
26:22Un mannequin n'osera reprendre une voiture pour faire un crash test.
26:25C'est ça la pub.
26:42J'imagine qu'en 1998, quand cette publicité sort,
26:45on n'a pas l'habitude de voir autant de femmes
26:49Est-ce que pour vous, il y avait un message ?
26:52Est-ce que c'était seulement du beau et que vous avez voulu prouver une idée créative ?
26:55Ou est-ce que c'était aussi une manière pour vous de mettre une femme au volant
26:58et une sorte de féminisme à travers cette publicité ?
27:01Bien sûr.
27:04Je me suis toujours battu pour que les femmes aient leur place dans la publicité.
27:07C'est toujours une figure de la femme objet ?
27:10Une femme objet qui rentre à 40 à l'heure dans un truc ?
27:13C'est une femme objet, toi ?
27:16Tu te racontes le courage qu'il faut avoir pour faire ça ?
27:19Et la volonté qu'il faut avoir pour faire ça ?
27:22Vous avez dit vous-même, on va prendre la plus belle femme du monde pour le faire.
27:25C'est ça précisément qui fait l'effet de la pub.
27:28C'est l'effet, mais ça c'est le côté publicitaire.
27:31Si c'était la presse, elle aurait prié à une femme normale.
27:34Pourquoi pas un homme ?
27:37Parce que tu apportes justement la partie poésie,
27:40tu apportes le look, tu apportes l'imaginaire, tu apportes le rêve.
27:44Chérie !
27:47À l'époque, et encore maintenant malheureusement,
27:50les femmes, elles n'ont pas vraiment la parole.
27:53Et dans ces publicités-là, elles existent seulement par leur corps.
27:56C'était aussi le cas pour les publicités pour Danone,
27:59où on a des femmes qui sont totalement nues pour vendre un truc.
28:02Elles n'ont pas vraiment la parole.
28:05Elles n'ont pas vraiment la parole.
28:08Elles n'ont pas vraiment la parole.
28:11Elles sont totalement nues pour vendre un yaourt.
28:14Danone a créé Bio, de Danone.
28:21Au bifidus actif.
28:24Bio.
28:27Ce qu'il fait à l'intérieur se voit à l'extérieur.
28:30Alors que les femmes sont dotées de paroles, d'intelligence, etc.
28:33Et on n'est pas que des fervoloires,
28:36on n'est pas seulement des corps, etc.
28:40Qu'est-ce que vous pensez de ça et de cette sexualisation
28:43des femmes qui existent très peu ?
28:46Leur corps est morcelé dans cette position très vulnérable
28:49puisqu'elles sont nues.
28:52Je trouve ça dégradant.
28:55Est-ce que vous considérez que ces publicités sont dégradantes
28:58pour l'image de la femme ou pas ?
29:01Tout dépend de la publicité.
29:04Mais il faut bien partir de la donnée que 80% des consommateurs
29:08C'est la femme qui mène la ronde de la publicité.
29:11Pour autant, on n'a pas l'impression que ces publicités
29:14leur sont adressées.
29:17Les personnes qui sont mises en avant dans ces publicités
29:20sont des canons de beauté.
29:23C'est un vieux discours.
29:26C'est vraiment la femme qui est la première observée,
29:29la première choyée, la première mise en place, etc.
29:32Sauf les mauvaises pubs essayent de dénigrer la femme.
29:35L'exemple de Julie, c'est dans la publicité.
29:38Pour donner envie aux hommes d'acheter cette voiture,
29:41on utilise une femme en disant
29:44« Cette femme qui est sexy, qui fait très bien la quiche Lorraine,
29:47elle a cette voiture. »
29:50Pour vendre une voiture, je préfère utiliser
29:53un sous-marin et un porte-avions.
29:56Ça marque plus les choses.
30:05...
30:24On voit une femme qui a une voix assez charnelle,
30:27très séduisante, avec sa voix off.
30:30Elle se rend sexy.
30:33On a plein d'arguments pour donner envie à un homme
30:36d'acquérir cette voiture.
30:39Il ne faut pas croire qu'une femme nue
30:42va faire vendre plus qu'une femme habillée.
30:45C'est des vieux réflexes.
30:48Tout ça arrive de la pin-up solaire
30:51des années 60.
30:54La publicité a démarré.
30:57Les choses ont bien évolué depuis.
31:00C'est une société qui a fait un bien considérable au monde.
31:03Il faut saluer les femmes.
31:06C'est formidable la communication
31:09et la prise de conscience qui a été faite.
31:12Elle est faite avant tout par les publicitaires.
31:15...
31:18Quand on n'a rien à cacher
31:21On le montre, on le montre
31:24Je kerne rien à cacher
31:27Je casse tout pour son jeu de fruit
31:31Il faut se garder d'avoir un regard anachronique.
31:34Juger avec les normes du présent
31:37sur ce qui était produit à l'époque.
31:40Les publicitaires de l'époque, des années 80-90,
31:43étaient le miroir de leur propre époque.
31:46On aurait tort de leur jeter la pierre.
31:49Il faut être très sévère sur le discours publicitaire
31:52très exigeant sur ce qui est produit aujourd'hui.
31:55On ne peut plus faire ce type de discours publicitaire.
31:58Mais attention à ne pas juger avec les normes du présent
32:01sur ce qui était produit autrefois.
32:04La publicité a des répercussions monstres.
32:07En termes de représentation, quand tu es matraquée
32:10depuis toute ta vie, tu vois des femmes nues
32:13qui n'ont pas la parole, qui sont ultra sexualisées
32:16qui ne te ressemblent pas.
32:19Comment est-ce que tu te construis en tant que femme ?
32:22Les personnes noires, maghrébines, arabes, asiatiques...
32:25Ces personnes-là n'existaient pas dans la publicité
32:28jusqu'au moment où ces personnes-là
32:31ont certainement commencé à avoir du pouvoir d'achat
32:34et à intéresser la publicité.
32:37Ça peut être dangereux à la longue
32:40d'être confrontée à des représentations
32:43aussi superficielles.
32:46Les personnes noires, il y avait des publicités
32:49qui étaient représentées, mais mal.
32:52Si tu habilis la femme, tu fais une mauvaise publicité
32:55et ton client va te virer avec raison.
32:58Il y a de moins en moins de dérapages.
33:01Et s'il y a un très gros dérapage,
33:04tu as les réseaux sociaux qui s'en mêlent
33:07et qui le font interdire dans le quart d'heure.
33:10Bravo à tout ça !
33:13Quand j'entends des gens dire
33:16qu'il y avait des choses qu'on faisait avant
33:19qu'on ne peut plus faire,
33:22il y a des choses qui appartiennent au passé.
33:25Je ne crois pas qu'à l'époque, c'était plus libre.
33:28Je crois que c'était une époque différente.
33:31Aujourd'hui, on est libre de faire des choses
33:34qui choquent, qui heurtent, qui bousculent,
33:37qui peuvent émouvoir, qui peuvent faire rire.
33:40On peut faire beaucoup de choses,
33:43mais c'est quand c'est une pub qui ne fait pas n'importe quoi
33:46sous prétexte de vendre un produit.
33:54La publicité est le miroir de la vie.
33:57Mais c'est un miroir qui a un peu d'avance.
34:00Il faut savoir qu'une campagne,
34:03il faut un an pour la préparer.
34:06Il faut un an pour la voir.
34:09Un message doit être vu au minimum 3 fois
34:12Si c'est vu 7 fois, ça te rentre vraiment dans la tête.
34:15Il faut avoir la perception, l'intuition
34:18de ce que sera devenu le consommateur
34:21dans 2 à 3 ans.
34:28On parle ce soir de la banlieue,
34:31le paysage est sombre, quartier défavorisé,
34:34quartier ghetto, quartier pauvre.
34:37On les appelle les grands ensembles,
34:40on les appelle aussi les villes dortoirs.
34:47Et à longueur de journée, puisqu'on ne travaille pas,
34:50on s'ennuie ferme.
34:53Et pour eux, ce n'est pas toujours enthousiasmant, loin de là.
34:56La pub est un miroir de la société.
34:59On peut dire, regarde la publicité,
35:02tu comprendras un peu la société.
35:05Mais c'est un miroir qui ne reflète pas la réalité vraie.
35:08Il reflète les stéréotypes, il reflète les a priori,
35:11il reflète les caricatures.
35:23Le moins qu'on puisse dire de ces grands ensembles,
35:26c'est qu'ils manquent d'âme.
35:32Il y a un effet miroir.
35:35On peut pousser des choses, valoriser des choses,
35:38montrer des comportements qui sont nouveaux.
35:41On peut aussi pousser des choses, oser montrer des comportements
35:44qui, parfois, sont encore un peu tabous,
35:47qui ne sont pas complètement majoritaires.
35:50Et ça permet aussi parfois, comme ça, à la publicité
35:53d'être assez progressiste, assez sensible, même assez humaniste.
35:56Je trouve qu'il y a beaucoup de pubs
35:59qui véhiculent des stéréotypes,
36:02des communautés, disons, noires et arabes.
36:05Je pense que c'est vraiment très stéréotypé,
36:08surtout dans les années 80, 90,
36:11et que ça entretient vraiment de mauvaises choses.
36:14La publicité n'a pas le droit de faire ça.
36:17C'est trop touchy, c'est trop dangereux.
36:20C'est le contraire de ce qu'elle est.
36:23Elle n'a pas le droit, mais elle l'a quand même fait.
36:26C'était même quasiment systématique.
36:29Et à la fois, il ne faut pas nier le problème.
36:32Il faut le faire avec beaucoup de talent.
36:35Il faut le faire avec énormément de retenue.
36:38Il faut le faire artistiquement.
36:41Ce que je trouve bizarre, c'est qu'on dit qu'il faut le faire artistiquement.
36:44C'est juste normal. Il y a des gens et des communautés qui sont normaux.
36:47Je pense que c'est facile à trouver et à mettre en scène.
36:50Déjà, la loi s'est mêlée de ça.
36:53Il y a une obligation dans toutes les publicités
36:56de faire des choses de différentes typologies.
36:59C'est très contrôlé.
37:02On te demande de retirer ta publicité si jamais tu as fait une faute.
37:21Vous êtes un monsieur qui est à l'écoute de la société.
37:24Vous êtes rapide.
37:27Tout de suite, vous savez quelles vont être les aspirations de l'année des dix ans à venir.
37:30Quelle est ma question ?
37:33Je crois que mon métier, la communication,
37:36c'est de faire du surf sur les flux socioculturels.
37:39Et donc de cueillir le vent des modes, de l'histoire, de la sociologie
37:42juste un petit peu avant l'ensemble de la foule qui est là
37:45et d'arriver plus vite qu'elle sur la plage.
37:48Tu disais que la publicité,
37:51elle devait toujours avoir plusieurs années d'avance.
37:54Ce que j'ai du mal à comprendre, c'est que littéralement dans les années 80-90,
37:57elle avait des trains de retard pas possibles.
38:00Dans la manière de montrer les femmes comme on l'a dit,
38:03dans la manière de montrer les personnes noires, arabes, asiatiques,
38:06à mes yeux, la publicité aimerait croire
38:09et faire croire qu'elle a un train d'avance,
38:12mais c'est faux.
38:15Je trouve que ça fait écho à ce que tu disais tout à l'heure
38:18quand tu parlais d'une pub, comment tu avais réussi à la mettre en place.
38:21Elle s'appelait Carla Bruni.
38:24En fait, ça donne juste l'impression que c'est vraiment un autre soi
38:27de personnes qui ont beaucoup d'argent et qui ont certaines valeurs.
38:30Et donc ça fait que c'est très compliqué pour peut-être les publicistes,
38:33peut-être qu'ils essayent vraiment, mais que c'est tellement un milieu fermé
38:36que c'est très compliqué pour vous de juste faire des choses normales.
38:39La publicité n'est pas un métier de riche.
38:42Ce qui était formidable dans les années 80,
38:45formidable pour les créatifs, c'est qu'on pouvait faire n'importe quoi,
38:48les gens applaudissaient et on ne les choquait pas.
38:51Peut-être qu'on les choquait.
38:54Ils ne faisaient pas retirer la publicité, pas du tout.
38:57On les prétestait, tout était prétesté et on faisait très attention à ça.
39:00Il y a eu des publicités vraiment très déstabilisantes,
39:03certaines très choquantes.
39:06Et si on prenait un exemple parmi tout ça,
39:09ça serait Benetton.
39:12Benetton, qui à la fois est un message social vachement important,
39:15très très important pour l'époque,
39:18qui est bien sûr un message commercial en même temps,
39:21et qui était fondé à la base sur l'antiracisme.
39:24Benetton a ouvert la voie à beaucoup de choses pour nous.
39:27C'est vrai que c'était extrêmement puissant, extrêmement créatif,
39:30ça avait un impact, ça faisait parler, ça avait de l'influence.
39:33Et là aussi, ça ouvrait des champs de bataille culturelle assez intéressants.
39:36Je voulais te parler de la publicité Benetton.
39:39Est-ce que tu penses qu'aujourd'hui, une publicité
39:42dans laquelle on voit des hommes politiques s'embrasser,
39:45est-ce que tu penses que ce serait encore possible aujourd'hui ?
39:48Non, totalement impossible, totalement interdit.
39:51À la fois, Toscany, c'est un artiste,
39:54c'est un très grand photographe,
39:57des campagnes qui ont marqué leur époque.
40:00Je trouve du plus mauvais goût quand un prêtre qui embrasse sur la bouche une sœur,
40:03c'est inadmissible, surtout venant d'un Italien.
40:06Quand tu as un enfant blanc qui est porté par une mère noire,
40:11c'est tellement beau, c'est tellement beau.
40:14C'est la plus belle de Toscany.
40:17Moi, j'ai beaucoup défendu Toscany, on a fait beaucoup de débats ensemble,
40:20de débats télévisés, et on s'accrochait en permanence.
40:23Et lui voulait faire avancer les choses, mais il était un peu sans foi ni loi.
40:27Et c'est là où il faut faire très attention,
40:30quand tu as des sujets scabreux, de n'appuyer sur le bouton
40:33que lorsque tu ne vas pas mettre les gens contre toi.
40:36D'ailleurs, ça a été sa dernière pub.
40:39Et Benetton a changé de publicitaire à ce moment-là.
40:43Et puis Benetton a évolué,
40:46et a vu que cette espèce de provocation sociale marchait.
40:50Et donc, ils ont été de plus en plus loin dans la provocation.
40:53Benetton a continué, et je dirais pour un sociologue, c'est positif,
40:57a continué à essayer de dédramatiser, de démystifier,
41:02de déculpabiliser des thèmes comme l'homosexualité,
41:06comme le SIDA, avec la fameuse publicité sur les fesses tatouée VIH.
41:11Et même a commencé à aborder le thème des immigrés clandestins
41:16et le thème aussi des femmes voilées musulmanes.
41:19Et là, on voit comment la publicité peut s'emparer de thèmes choquants,
41:24tabous au fond, et essayer de casser le tabou,
41:28sans aller trop trop loin, mais en le banalisant.
41:32Et au fond, les choses changent et intègrent vraiment la société
41:36lorsqu'on arrive à banaliser, dédramatiser, rendre,
41:40ouais, d'accord, banal, ce qui était autrefois tabou.
41:58...
42:09C'est quoi la vie ? C'est quoi l'amour ?
42:11Comment vivre son amitié ? Comment être heureux ?
42:14La liberté est-elle encore possible aujourd'hui ?
42:16C'est ça, la publicité, aujourd'hui.
42:17Je pense qu'il faut la prendre au sérieux
42:19et la considérer à ce niveau d'exigence.
42:21C'est un discours politique, culturel et souvent aussi idéologique.
42:24L'idée de la publicité telle que moi je me la figure,
42:26c'est pas d'être un miroir en trompe-l'œil,
42:28c'est d'être un miroir juste, légitime, authentique d'une réalité
42:33qui peut donner envie, évidemment, de consommer,
42:35qui peut donner envie de changer de comportement,
42:37d'adopter certains usages,
42:39mais de le faire avec une intelligence,
42:42en étant intéressant, en étant créatif, en étant sensible,
42:45sensible notamment aux attentes des gens.
42:47Je sais pour la fonte des glaces.
42:49...
42:51Pour la déforestation, pour la surpêche et le changement climatique.
42:56Je sais pour les cinq fruits et légumes par jour.
42:59Je sais que le lait maternel, c'est mieux.
43:02Et qu'une petite fraise en décembre, c'est une grosse empreinte carbone.
43:06Je peux pas faire comme si je savais pas.
43:09Nous sommes la première génération qui sait.
43:12La première génération qui a tous les faits.
43:14Ce n'est pas simple.
43:17Mais nous n'avons qu'une vie,
43:18qu'une planète,
43:19qu'une santé.
43:20On réalise que nous entrons dans un monde de la sobriété,
43:24où au fond, le monde de l'abondance n'est plus possible,
43:27et où se pose la question essentielle des limites planétaires.
43:32Il me semble que la publicité,
43:35soit elle s'adapte à cette nouvelle condition,
43:38soit elle va susciter un rejet profond
43:41de la part des consommateurs et des citoyens.
43:43Je crois qu'elle est un tournant.
43:44...
43:5314 milliards de prospectus distribués chaque année en France.
43:57Plus de 700 000 tonnes de papier.
43:59Tout ça pour que près d'un Français sur deux
44:01les jette sans même les lire.
44:03Alors on fait quoi ?
44:05En septembre, Leclerc arrête définitivement les prospectus en boîte aux lettres.
44:09La publicité aujourd'hui,
44:12elle est antinomique avec la situation écologique,
44:15avec le développement durable,
44:17même avec la croissance verte dans une certaine mesure.
44:20Donc il y a un vrai problème philosophique à se poser
44:25sur l'existence même de la publicité et son utilité sociale.
44:28On fait encore de la pub aujourd'hui
44:30comme si on était dans les Trente Glorieuses de surconsommation accélérée.
44:37Je suis sûre que je contribue à l'augmentation de la température de la planète.
44:44Par exemple, qu'est-ce que tu penses précisément des pubs
44:48faites par Total
44:50où ils sont en train de se faire placer pour une entreprise éthique et écologique ?
44:53Est-ce que c'est une bonne chose ?
44:55Parce qu'avec la logique qu'on est en train d'utiliser,
44:57on pourrait dire que c'est une bonne chose
44:59puisqu'ils sont en train de sensibiliser les gens à la cause écologiste.
45:01Mais en même temps, ils font que de polluer.
45:03Donc qu'est-ce que tu penses de ce genre de procédé ?
45:05Mais il faut choisir.
45:07Tu as besoin d'essence.
45:09Et il y a quand même une énorme chance qui a été faite.
45:12On remplace l'essence par l'électricité.
45:15Face à ça,
45:16qu'est-ce que peut faire un marchand d'essence ?
45:19C'est un métier en danger
45:21puisque ça va être très difficile pour lui
45:23de remplacer le pétrole par l'électricité
45:26parce qu'il va falloir avoir des réseaux en permanence, etc.
45:30Et c'est des investissements.
45:32Mais il faut bien qu'il se mette au diapason
45:35parce que je trouve que ce que le monde a fait de mieux
45:38ces cinq dernières années pour l'écologie,
45:41c'est la voiture électrique.
45:43Et ça, c'est merci la pub.
45:45Je ne pense pas que ce soit le rôle de la pub
45:48parce qu'on sait que la publicité
45:50est là pour vendre quelque chose.
45:52Quand je vois ces grandes sociétés,
45:54elles ont quelque chose à tirer de ce virage vert.
45:57Et je ne peux pas m'empêcher
45:59de penser que c'est du greenwashing.
46:02C'est quand même la première source de pollution, le pétrole.
46:06Mais justement, la publicité
46:08est en train d'envahir tous nos écrans.
46:11Ne gardez pas vos voitures à pétrole,
46:13prenez des voitures électriques.
46:15Qu'est-ce qu'elle peut faire de mieux ?
46:17Et si elle n'était pas là pour accélérer les choses,
46:20il faudrait 10 ou 15 ans
46:22pour changer l'ensemble du parc automobile mondial.
46:25Tu choisis un très mauvais argument.
46:27Non, là, la publicité, je l'aime,
46:29elle fait bien son métier
46:31et elle nous aide à protéger la nature.
46:34Moi, je ne veux pas que mes petits-enfants
46:37leur laissent une planète dégueulasse.
46:39La seule chose qui compte dans ma vie,
46:42c'est de leur donner un monde plus propre
46:45en sortant que celui que j'ai trouvé en entrant.
46:48Et la publicité, il aura eu son affaire.
46:51Oh, t'es là, toi !
46:53Je l'adore.
46:58Ils sont trop mignons. On a de la chance.
47:00Qu'est-ce qu'on est bien sur cette route.
47:02Ils l'ont refaite, non ?
47:04Non. Ah, si.
47:06Ça va être une belle journée.
47:08Vous allez adorer la vie en électrique.
47:10La publicité peut être un vrai allié
47:12de la transition écologique.
47:14J'ai beaucoup de gens qui travaillent sur ces sujets-là,
47:17qui nous demandent des messages,
47:19qui nous demandent de travailler sur des nouveaux imaginaires
47:22dans lesquels on distille de nouveaux modes de consommation.
47:25Comment est-ce que, par l'image, par les mots,
47:28on arrive aussi à encourager des changements de comportement ?
47:31Vous prendriez lequel, vous ?
47:33Honnêtement ?
47:34Oui. Aucun des deux.
47:36Mais c'est à moins 70 %.
47:38Pour un vendeur, vous n'êtes pas...
47:40Pas du tout. Je suis dévendeur et je vous conseille le moins 100 %.
47:43Il y a un moins 100 %, le vôtre ?
47:45Il est très bien. Je peux ?
47:47Hésitez pas. Si vous avez besoin que je vous déconseille d'autres achats,
47:50ça soulagera les ressources de la planète.
47:52Et vos placards ?
47:54Parce que les dévendeurs n'existent pas...
47:56La publicité, je crois qu'elle doit réussir
47:59à produire un discours, certes enthousiasmant,
48:02qui n'est pas irréel,
48:04enthousiasmant sur un basculement de société.
48:07Cessez de voir le monde avec des lunettes noires.
48:11La pub, c'est porter des lunettes de couleur.
48:14Ah bon ? Très bien. Voilà.
48:16Vous qui faites de la publicité,
48:18puis vous qui, j'espère, en ferez demain,
48:20votre métier, c'est pas simplement de vendre des voitures
48:23et de vendre des pots de yaourt.
48:25Mon métier, c'est que Citroën soit encore vivant dans 50 ans, dans 100 ans,
48:29et que Danone soit encore vivant dans 100 ans, dans 50 ans,
48:32puisque 75% des marques qu'on a consommées au siècle dernier
48:35sont mortes avec le siècle.
48:3875% des marques que l'on consomme aujourd'hui,
48:41tous ensemble, vont mourir avec le siècle.
48:44Donc si la publicité n'est pas là pour sauver celle qui le mérite,
48:47parce que si un produit se vend, c'est parce qu'il est bon.
48:50Ce sont les produits qui font les succès des campagnes,
48:53et pas les campagnes qui font les succès des produits.
48:55Donc la publicité peut rendre les marques immortelles.
48:59Et quelle est la seule chose que les humains ont inventée
49:02qui soit immortelle ? L'âme.
49:05Donc, notre métier commun, que vous soyez consommateur,
49:08que vous soyez pustère, que vous soyez journaliste,
49:11notre métier commun, c'est de donner une âme aux marques
49:14et de les rendre éternelles.
49:20Si tu travailles encore, est-ce que c'est parce que la retraite t'angoisse ?
49:25Écoute, la retraite, je connais pas.
49:27Je veux pas connaître.
49:29Je sais que le jour où je dors en retraite, je meurs.
49:32Donc, vis-à-vis de la mort, moi j'ai une réponse de publicitaire.
49:36Je me dis que la mort, c'est une porte.
49:39On ouvre la porte.
49:41Et où y a rien, où y a quelque chose.
49:44Donc, je suis pas pressé d'y arriver,
49:47mais quand j'ouvrirai la porte, je dirai,
49:50et si jamais c'était la pub, là-haut ?
49:54Eh bien, merci beaucoup, Jacques.
49:57Oh, les 90 ans, ils sont là.
50:00Merci beaucoup.
50:02Merci, Jacques.
50:04C'est nul, c'est nul.
50:06Bon, alors, tous ensemble.
50:08Waouh, waouh, waouh, waouh, waouh, waouh, waouh, waouh.
50:11Alors, je vous donne maintenant 30 secondes d'antenne.
50:14Comment est-ce que vous les remplissez ?
50:16Vous faites ce que vous voulez.
50:24Hop.
50:38Voilà. Je vous ai offert ce qui, demain, sera le plus précieux.
50:4230 secondes de silence à la télévision.
50:53Sous-titrage ST' 501

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