• il y a 3 mois
Invité de l'émission "Tout le monde veut savoir", ce lundi 26 août sur BFMTV, Ibrahim Maalouf a affirmé être "scandalisé" après avoir été écarté du jury du festival de Deauville. La nouvelle directrice Aude Hesbert a estimé que la présence du trompettiste, accusé d'agression sexuelle sur mineure avant d'être relaxée en 2020, aurait créé un "malaise dans l'équipe".

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Transcription
00:00Bonsoir Ibrahim Malouf.
00:02Bonsoir.
00:04Merci beaucoup d'avoir accepté d'être l'invité de Tout le monde veut savoir.
00:08Vous êtes en direct du Liban, je le rappelle.
00:12Vous êtes musicien, trompettiste franco-libanais, vous jouez dans le monde entier.
00:16Mais si vous prenez la parole ce soir, c'est parce que vous deviez être membre du jury du Festival du Film Américain de Deauville
00:20avant que sa nouvelle directrice décide de vous écarter de ce jury.
00:24La raison avant c'est un malaise dans l'équipe entre guillemets
00:28en lien avec l'accusation d'agression sexuelle sur mineurs dont vous avez fait l'objet.
00:32Je rappelle que vous avez été relaxé par la justice, par les tribunaux, par la cour d'appel en l'espèce.
00:36C'était en 2020. Je salue également votre avocate Maître Fanny Collin.
00:40Bonsoir.
00:42Qui est en plateau avec nous ce soir.
00:44Avant de vous entendre Ibrahim Malouf et d'avoir votre première réaction puisque vous avez choisi BFM TV
00:48pour faire cette première interview.
00:50Un point sur les faits avec vous Boris Karlamoff.
00:52Est-ce que vous pouvez nous refaire un point sur l'accusation dont Ibrahim Malouf faisait l'objet
00:56et sur la relaxe dont il a bénéficié. C'était en 2020.
01:00Absolument. Comme vous le disait Benjamin, il a donc été relaxé le 8 juillet 2020
01:04par la cour d'appel de Paris.
01:06Deux ans auparavant, Ibrahim Malouf avait été condamné en première instance
01:10par le tribunal correctionnel de Créteil en décembre 2018
01:14à quatre mois de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende
01:18d'agression sexuelle sur une collégienne âgée de 14 ans au moment des faits.
01:22Des accusations qui remontent à 2013.
01:26Ce sont en réalité ses parents à cette collégienne qui ont signalé
01:30ses faits reprochés aux autorités puisqu'elle s'était confiée auparavant à son médecin.
01:34L'artiste avait été placé en garde à vue en 2017.
01:38La jeune fille avait déclaré que le musicien l'avait embrassé une première fois
01:42à la sortie d'un cinéma en 2013.
01:44Selon la plaignante, il l'aurait à nouveau embrassé deux jours plus tard
01:48cette fois-ci dans son studio d'enregistrement d'ivries sur scène
01:52puisqu'on va le rappeler, la plaignante à l'époque était en stage aux côtés de l'artiste.
01:56Il aurait, je cite les déclarations de la plaignante,
01:58« attrapé par le bassin mimant un acte sexuel.
02:02Je sentais son sexe derrière moi sur mes fesses ».
02:05Voilà les déclarations de la plaignante aux enquêteurs.
02:08Du côté de l'artiste, il avait assuré que cette séquence n'avait jamais existé.
02:12La cour d'appel de Paris a donc relaxé l'artiste en 2020
02:16et dans son arrêt que BFM TV a pu consulter aujourd'hui,
02:20elle pointe l'absence d'éléments pertinents, précis et concordants.
02:25Le baiser posé le 11 décembre 2013 est bien réel
02:28mais l'intention coupable fait défaut, faute d'éléments permettant d'affirmer
02:33avec certitude qu'il en aurait été l'initiateur,
02:36toujours selon cet arrêt de la cour d'appel de Paris.
02:38La preuve matérielle d'effet qui serait survenue le 12 ou le 13 décembre
02:42dans le sous-sol de ce studio n'est pas rapportée,
02:45ce qui ne signifie pas que la jeune fille a menti
02:48mais que sa vérité n'est pas partagée par la cour.
02:51Merci beaucoup Boris Karlamov.
02:53Pour repartir des faits, Ibrahim Mahalouf,
02:56est-ce que vous pouvez nous raconter la façon dont vos échanges
02:59avec le festival de Deauville se sont passés ?
03:01Vous étiez prévu pour être membre du jury du festival américain.
03:05Comment est-ce que ça s'est passé ?
03:07A quel moment et comment vous ont-ils notifié qu'ils ne souhaitaient plus
03:11que vous en fassiez partie ?
03:13D'abord, merci de me recevoir.
03:17Vous m'avez sollicité et j'ai accepté.
03:20Et en effet, j'ai accepté d'intervenir ici pour de nombreuses raisons.
03:24D'abord parce que BFM, comme beaucoup de médias aujourd'hui,
03:30met en avant la nécessaire utilisation du débat
03:35et du débat public pour échanger et pour essayer de trouver des solutions
03:40aux différents problèmes de société, que ce soit politique ou autre.
03:44Et moi, le débat, c'est quelque chose que je chéris
03:47et je trouve que c'est très très important.
03:49Mais il y a un problème.
03:51Je suis désolé, ce n'est pas pour être insultant ou méchant,
03:54mais la personne qui vient de faire une sorte de dérouler des faits
04:00vient de faire une énorme bêtise à l'instant même là où on est en train de parler.
04:04Ce n'est pas ça les faits.
04:06Et je suis désolé de vous le dire, ce n'est pas du tout ça les faits.
04:09Non mais attendez, ce n'est pas pour refaire le débat.
04:11Ce n'est pas pour refaire le débat.
04:13Non mais je vous rassure, ce n'est pas du tout pour refaire le débat.
04:15D'ailleurs, là, on est bien sûr que ce qui s'est passé avec vous
04:20et le festival de Deauville.
04:22Oui, mais non, puisque vous lui avez demandé de rappeler les faits.
04:26Les faits, ce n'est pas ça.
04:27Les faits, c'est que j'ai été déclaré innocent il y a maintenant plus de 4 ans
04:31après un combat judiciaire qui est celui du débat judiciaire.
04:35Et c'est ce qu'on a précisé il y a un instant.
04:37Oui, mais dans ce cas, quand vous demandez à votre journaliste
04:40ou spécialiste police-justice de rappeler les faits,
04:43ce n'est pas ça les faits.
04:44Les faits, c'est que Ibrahim Malouf a été innocenté il y a plus de 4 ans et demi presque
04:50et le festival de Deauville l'a quand même remercié
04:54et lui a demandé de sortir discrètement en faisant un chantage.
04:59Et Ibrahim Malouf, c'est la raison pour laquelle...
05:01Oui, mais je suis désolé parce que c'est important.
05:03Vous me demandez de répondre à cette interview et j'ai accepté.
05:06Vous devez me laisser finir.
05:08Je voulais finir, mais je précise que c'est exactement ce qu'on a dit
05:12et que l'idée de Boris Karlamov était de préciser pour ceux qui peut-être
05:15allument leur télévision et n'ont pas les subtilités de l'affaire,
05:19de se rafraîchir la mémoire.
05:21Oui, mais les subtilités, vous ne les aurez jamais.
05:22Non, parce que les subtilités, vous ne les aurez jamais.
05:27D'accord.
05:28Si vous vouliez avoir les subtilités, il fallait que vos journalistes soient présents
05:31le jour du procès parce que c'est le jour du procès que mon avocate
05:35ici présente, Fanny Colin, et moi-même et Jean-Pierre Versigny,
05:39qui était également le collaborateur de Fanny Colin,
05:42nous avons apporté toutes les preuves.
05:44Et vous imaginez bien qu'en un quart d'heure de discussion sur BFM,
05:48c'est impossible de vous montrer les preuves, de vous les expliquer,
05:52de faire quoi que ce soit.
05:53La démonstration du déroulé, ce pseudo déroulé dont vous avez fait état,
05:58n'avait pas lieu d'être.
06:00Et tous les détails un peu scabreux que vient de donner ce monsieur
06:04en disant qu'il lui a touché les fesses, il ne l'a pas touché,
06:06tout a été prouvé comme étant faux pendant le procès.
06:11Et si quelqu'un a le moindre doute, il faut aller au bureau de Fanny Colin
06:15qui est sur votre plateau, aller vérifier par eux-mêmes.
06:19Parce que ce que vous faites indirectement, c'est que vous renourrissez,
06:22vous remettez de l'huile sur le feu d'un débat qui n'a plus lieu d'être.
06:26Ibrahim Malouf, je ne peux pas dire les choses de la façon la plus claire qui soit.
06:29Il y avait des précisions, et notamment Boris Karlamov
06:32qui cite l'arrêt de la cour d'appel.
06:34Pour le reste, je l'ai répété à plusieurs reprises,
06:36vous avez été relaxé par la cour d'appel, vous avez été innocenté par la justice
06:41des faits qui vous étaient reprochés.
06:44Je ne peux pas le dire de la façon la plus claire qui soit
06:46parce que de fait, c'est une décision de justice.
06:48Donc, simplement, pour essayer encore une fois de vous entendre
06:51puisque c'était l'objet de cette interview,
06:53j'aimerais justement comprendre ce qui a conduit le festival de Deauville
06:57à vous demander de vous retirer du jury
06:59alors même que vous aviez été relaxé par la justice.
07:04C'est un mystère pour tout le monde.
07:06Je pense que c'est d'ailleurs la raison pour laquelle je suis scandalisé.
07:09Et tout le monde est scandalisé, sauf peut-être une petite minorité de personnes
07:13pour qui ça fait plaisir, parce que je représente, si vous voulez,
07:16un peu l'exemple type du gars qui énerve ceux qui veulent absolument
07:22que tous les hommes soient coupables.
07:24Moi, je suis désolé. Dans ma famille, il y a des personnes
07:26qui ont été elles-mêmes victimes de violences sexuelles, etc.
07:30Je suis un féministe, je me considère comme féministe,
07:33je me considère du côté des personnes qui combattent
07:35contre justement ces agressions, etc.
07:38Mais visiblement, il y a des gens qui veulent absolument
07:41que je sois quand même coupable.
07:42Donc, ces personnes-là ont dû faire pression.
07:44Je ne sais pas comment, je ne sais pas pourquoi,
07:46je n'étais pas dans leur bureau, je ne suis pas dans leur téléphone pour savoir.
07:49Et ils ont fait pression.
07:50Et malheureusement, la directrice Aude Esbert a cédé.
07:54Et c'est, je pense, une énorme bêtise, une énorme gourde,
07:58une bourde, pardon, une énorme bourde.
08:01Et je ne peux pas savoir pourquoi elle a fait ce choix.
08:05Mais moi, je ne peux pas ne pas me défendre,
08:07parce que vis-à-vis de ma réputation, vis-à-vis de ma femme, mes trois enfants,
08:11il y a un moment où ça suffit.
08:13C'est trop, c'est trop.
08:14Ça fait des années maintenant que malgré la décision de justice,
08:17j'accepte, si vous voulez, que régulièrement,
08:20on me tape un peu sur la joue droite,
08:23puis sur la joue gauche, puis sur la joue droite.
08:25C'est comme ça qu'on m'a appris à réagir.
08:26Moi, on m'a dit, si on te tape ici, tu tournes l'autre joue.
08:29C'est comme ça que j'ai été éduqué.
08:30Donc, j'accepte de jouer ce rôle.
08:31Je veux bien être infusible, si vous voulez, pour ce combat féministe
08:35qui est très important, qui est essentiel même,
08:37et auquel je participe activement.
08:40Mais il y a un moment où il ne faut pas non plus pousser mémé dans les orties.
08:43Je vous donne la parole dans un instant, Nicolas.
08:45Juste avant, Ibrahim Malouf, vous parlez de pression.
08:48Est-ce que vous avez une idée d'où peuvent venir ces pressions ?
08:51Est-ce que c'est d'autres membres du jury ?
08:53Vous avez évoqué, c'était sur vos réseaux sociaux,
08:56des intérêts mercantiles du festival de Deauville.
09:01Et j'ajoute, chose assez singulière,
09:03que le festival vous a dans un premier temps demandé
09:05si au fond tout cela pouvait se faire de façon discrète.
09:09Oui, vous imaginez.
09:11C'est quand même un chantage absolument terrible.
09:13C'est-à-dire qu'on vous dit, d'une part,
09:15si ça ne t'embête pas de fermer ta gueule, s'il te plaît, Ibrahim,
09:18et en plus, essaye de ne pas en parler.
09:20Moi, on me dit ça, je suis désolé, je suis libanais,
09:22j'ai du sang méditerranéen.
09:24Il y a un moment où moi qui monte sur scène devant 30, 40 ou 90 000 personnes,
09:28on me dit de me fermer ma gueule et de me taire.
09:30C'est justement là que c'est devenu quelque chose d'insupportable.
09:33Mais alors elles viennent d'où ces pressions, Ibrahim Malouf ?
09:35Elles viennent d'où ces pressions ?
09:37Je n'en sais rien.
09:38Mais ce que nous dit, en tout cas, la directrice,
09:40et ce que j'ai pu savoir via des emails,
09:42c'est qu'il y a, selon elle, selon la directrice,
09:46des financeurs, des sponsors, des financeurs, etc.,
09:51qui n'apprécieraient pas qu'il y ait peut-être des remous, des vagues, etc.,
09:56et donc ils préfèrent éviter ça.
09:58Mais dans ce cas-là, ça veut dire qu'il y a un problème de droit, en fait.
10:03Est-ce qu'on a le droit de faire ça ? Je ne sais pas.
10:05Je ne sais pas si on a le droit.
10:06Moi, je n'y crois pas.
10:07Je crois qu'on n'a pas le droit de faire des choses pareilles.
10:08Vous avez essayé de contacter d'autres membres du jury
10:11pour leur demander s'ils vous soutenaient
10:13ou si, au contraire, ils soutenaient la décision du Festival de Deauville
10:16de vous écarter ?
10:18Pas du tout.
10:20Je n'ai absolument contacté personne.
10:22Vous savez, l'expérience m'a appris qu'il n'y a qu'une seule personne
10:26qu'il faut appeler dans les cas difficiles comme ça,
10:29c'est son avocat.
10:31Et j'en ai pris, malheureusement.
10:34J'ai appris sur le tas.
10:36Je suis un musicien, je suis compositeur, je suis producteur,
10:39je passe ma vie à faire des albums, des concerts, je donne des cours, etc.
10:42Je vis dans un monde de bisounours.
10:44Le jour où cette histoire m'est tombée dessus,
10:46chose que je ne souhaite même pas à mes pires ennemis,
10:48je ne savais pas comment agir.
10:50Et d'ailleurs, une bonne partie des erreurs que j'ai pu faire
10:53vient du fait que je ne voulais même pas me défendre
10:56parce que pour moi, j'étais innocent à tout point de vue.
10:59Donc, je n'ai absolument pas fait
11:01ce qui normalement devrait être la bonne réaction,
11:03c'est-à-dire prendre un avocat, faire attention à ce qu'on dit.
11:05Moi, j'ai fait exactement le contraire.
11:07Je n'ai absolument pas fait attention à ce que je disais,
11:10j'ai simplement parlé avec mon cœur
11:12et j'ai oublié de faire le truc essentiel, c'est d'appeler mon avocat.
11:14Donc maintenant, j'ai appris de mes erreurs, si vous voulez,
11:16et maintenant, dès qu'il y a un problème, une question de ce genre,
11:19la première personne à qui j'en parle, c'est ma femme,
11:21la deuxième, c'est mon avocat.
11:23Fanny Collin, justement, avocate d'Ibrahim Malouf,
11:25est-ce que vous, vous avez eu des échanges avec les organisateurs
11:28pour essayer de voir un peu plus clair dans ce qui s'était passé ?
11:31Et j'ajoute, est-ce que des poursuites sont engagées
11:34contre le Festival de Deauville,
11:36contre des personnes qui auraient pu prendre cette décision
11:38d'écarter Ibrahim Malouf, votre client ?
11:40Alors, pour répondre à votre première question,
11:42les choses sont allées très vite,
11:44puisqu'en réalité, sans quasi aucun dialogue
11:46entre les organisateurs, la direction et Ibrahim Malouf,
11:49on lui a demandé, et je cite là la direction du Festival de Deauville,
11:53de se retirer en toute discrétion,
11:55ce qu'il a évidemment, Ibrahim Malouf, immédiatement refusé.
11:59Pourquoi ? D'abord parce qu'il n'est pas homme à baisser les yeux,
12:02et parce que, de nouveau, il faut le dire,
12:04il n'a rien à se reprocher.
12:05Je me permets de rebondir 30 secondes
12:07sur le débat initial qui s'est engagé.
12:10Ce qu'exprime ici Ibrahim Malouf, et je le rejoins,
12:13pour avoir participé à toute la procédure devant la Cour d'Appel
12:16et connaître cet arrêt,
12:18c'est que l'accusation telle que vous l'avez rappelée
12:20a été écartée par la Cour d'Appel,
12:22comme n'ayant jamais existé.
12:24C'est-à-dire que c'était le fruit de l'imagination de cette jeune fille,
12:27ce n'est pas moi qui le dis, c'est la Cour d'Appel de Paris.
12:30Ça c'est un premier point.
12:32Suite à notre refus, au refus d'Ibrahim Malouf
12:35de se retirer en toute discrétion,
12:37nous avons pris connaissance de sa mise à l'écart officielle
12:40par l'interview donnée par la directrice du Festival.
12:43Et effectivement, Ibrahim Malouf est un homme de principe,
12:46et là ici, au-delà de son cas personnel,
12:48il y a une question de principe
12:50puisque un cran supplémentaire a été franchi.
12:53Jusqu'ici, et c'était déjà grave et regrettable,
12:56c'était la présomption d'innocence qui était attaquée.
12:59Aujourd'hui, c'est l'innocence avérée qui l'est,
13:02et on ne peut pas laisser faire.
13:04Et donc, des poursuites ?
13:05Alors, des poursuites pénales, non,
13:07puisque la direction du Festival n'a pas commis d'infraction pénale,
13:10et nous, nous n'envoyons pas pour rien des gens devant un tribunal correctionnel.
13:14En revanche, une action judiciaire civile, oui,
13:17elle sera engagée,
13:19pour faire reconnaître par la justice française,
13:22que les décisions ont encore une valeur,
13:24j'aimerais qu'on le rappelle ici,
13:25que la décision de la directrice du Festival de Deauville
13:28constitue une faute.
13:30Donc ça, c'est au civil, mais pas au pénal.
13:33Ibrahim Malouf, sans du tout refaire ici le procès,
13:37puisque je le rappelle, votre avocat vient de le dire,
13:39vous avez été relaxé, innocenté par la justice.
13:43Vous entendez aussi les arguments
13:45qui sont employés par certains sur les réseaux sociaux,
13:50par le Festival de Deauville,
13:52qui, par exemple, cite l'arrêt de la cour d'appel,
13:55que je vais reciter une nouvelle fois,
13:57Ibrahim Malouf n'a pas adopté un positionnement adéquat
13:59à l'égard de la jeune fille de 14 ans,
14:01nécessairement suggestible,
14:02en échangeant avec elle des messages totalement inadaptés,
14:04attitude qu'il a lui-même qualifiée de nauséabonde,
14:06qui disent, oui, au fond, il y a eu relax,
14:08mais dans les affaires de violences sexistes et sexuelles,
14:11on ne peut pas se fier seulement à la justice,
14:14qui mettent en avant ce baiser avec une fille de 14 ans,
14:16qu'est-ce que vous leur dites à cela,
14:18qui, au fond, ne se contentent pas d'une décision de justice ?
14:25– Vous savez, mettre en doute la présomption d'innocence
14:27est une chose,
14:28mettre en doute l'innocence, c'en est une autre.
14:31Moi, je suis innocent,
14:34et je vais même vous dire un truc un peu marrant,
14:36et ça va peut-être faire rire un peu tout le monde,
14:37mais tant mieux,
14:38parce que peut-être qu'on a besoin d'en rire plus que d'en pleurer,
14:41je suis presque plus innocent que la plupart d'entre vous.
14:44Pourquoi ?
14:45Parce que, dans votre cas, Benjamin Duhamel,
14:48dans le cas de toutes les personnes qui sont autour de vous,
14:51personne n'a enquêté pour savoir si vous étiez un agresseur sexuel ou pas.
14:54Personne.
14:55Autrement dit, il y a une présomption d'innocence, vous concernant,
14:59mais j'ai le droit de la mettre en doute.
15:01Moi, dans mon cas, c'est différent.
15:03Les policiers, tout le monde, en fait, a enquêté,
15:07certains journalistes, mieux que d'autres,
15:10tout le monde a enquêté,
15:12et la conclusion, c'est que je ne le suis pas.
15:14Donc, si vous voulez, il y a un moment où,
15:17si on ne respecte pas l'innocence lorsqu'elle est prononcée,
15:20il y a une forme d'absurdité twitteresque, si j'ose dire,
15:24qui est en fait une sorte de symptôme de notre époque,
15:29de la décontextualisation,
15:31des mensonges à répétition sur les sites, sur Twitter, etc.
15:36Donc, vous me demandez de répondre,
15:38c'est-à-dire que vous me commencez votre question en me disant
15:40qu'on ne va pas rentrer dans le procès,
15:42et en même temps, vous me dites,
15:43mais en même temps, il y a écrit ça dans le rendu du jugement,
15:46est-ce que vous pouvez nous en parler ?
15:47Donc, en gros, vous me demandez de refaire le procès.
15:49– Non, Ibrahim Allaud, je reprends,
15:51sans esprit polémique, je reprends, par exemple,
15:53dans votre réaction sur les réseaux sociaux,
15:55vous avez cité Andréa Bescon en la ciblant,
15:59réalisatrice notamment du film…
16:01– En tout cas, en l'évoquant,
16:03elle-même a réagi sur les réseaux sociaux
16:08en mettant en avant cet extrait de l'arrêt de la cour d'appel.
16:11C'est pour cela que l'idée, ce n'est pas de refaire le procès,
16:14c'est juste de…
16:15– En fait, en sortant de son contexte,
16:18parce que les messages déplacés dont on parle,
16:20disons les choses maintenant très clairement,
16:23il faut entrer dans le détail, entrons-y,
16:25cette jeune fille a quasiment envoyé de nombreux messages
16:29à M. Ibrahim Malouf parce qu'elle voulait le revoir,
16:32avoir un cours de trompette, etc.
16:34Et Ibrahim Malouf, peut-être un peu vertement,
16:36un peu brutalement, lui a demandé de lui ficher la paix,
16:39disons les choses clairement.
16:40Et c'est de ces messages-là dont on parle,
16:42il n'y a jamais eu, soyons très clairs,
16:44jamais eu aucun message d'ordre sexuel, intime ou autre ou personnel
16:49échangé entre Ibrahim Malouf et cette jeune fille.
16:51Et ça, c'est également acté dans l'arrêt de la cour d'appel.
16:54Vous avez lu un extrait.
16:56– Ibrahim Malouf, cette décision du festival,
16:58elle s'inscrit dans un contexte, d'ailleurs vous l'évoquiez,
17:00de libération de la parole dans le monde de la culture,
17:03dans le monde du cinéma.
17:05Est-ce que vous avez le sentiment d'être une sorte de victime collatérale
17:08de ce mouvement de libération de la parole qui est nécessaire ?
17:12Est-ce que c'est votre sentiment ?
17:14– Moi, je déteste le mot victime.
17:16Je ne me considère pas du tout comme une victime.
17:18Je suis plutôt même quelqu'un d'assez privilégié finalement,
17:20parce que j'ai un métier extraordinaire,
17:22j'ai une femme extraordinaire, j'ai des enfants extraordinaires.
17:25Regardez, j'ai même la chance de pouvoir être reçu sur BFM
17:29à une heure de grande écoute, alors qu'il y a peut-être
17:31beaucoup de gens qui, à ma place, n'auraient jamais cette chance-là.
17:35Et d'ailleurs, si je m'exprime, en effet, comme le dit Maître Colin,
17:39je m'exprime pour moi, évidemment, pour me défendre,
17:41mais aussi parce que, vous savez, quand vous entrez dans ce monde-là,
17:45qui est quand même un monde un peu obscur pour ceux qui ne connaissent pas,
17:49d'ailleurs qui est assez fascinant, c'est pour ça que sur Netflix,
17:51les trois quarts des documentaires, c'est des documentaires de justice et de police,
17:54c'est que ça fascine les gens.
17:56On se rend compte qu'il y a beaucoup de choses qu'on ne comprend pas
17:59et on a envie de comprendre, alors on se prononce, etc.
18:03Moi, dans mon cas, si vous voulez, je veux bien être un fusible.
18:07Je refuse d'être une victime.
18:09Je veux bien être le fusible qui permet de régler un problème majeur
18:15qui est celui du droit.
18:16Ça, je veux bien.
18:18Maintenant, être une victime, non, certainement pas.
18:20Je ne suis pas une victime, je ne le serai jamais.
18:22Je suis quelqu'un qui a…
18:24Je suis né dans la guerre, je suis né sous les bombes,
18:26je ne sais pas pour me victimiser, mais c'est la réalité.
18:28J'ai été éduqué à la dure par un papa qui était quand même très sévère
18:31et ce n'est pas deux, trois tweets, si vous voulez,
18:34ou un festival de Deauville qui, d'un seul coup,
18:38parce qu'il est lunatique, décide de me virer,
18:40que ça va changer quelque chose, si vous voulez.
18:42Dans ma vie, je ne deviens pas une victime pour autant.
18:44Par contre, je tiens, si vous voulez, à avoir un discours clair,
18:48à avoir un discours limpide et systématiquement.
18:52Maitre Colin, sur le plateau, me reproche suffisamment
18:55d'aller sur les réseaux sociaux pour essayer de répondre à tout le monde
18:58parce que j'ai un peu cette envie d'absolument répondre à tout le monde
19:01pour que tout le monde soit convaincu par ce que je dis.
19:03Et je crois que je fais une erreur, en fait.
19:07Il y a un moment où l'innocence est prononcée,
19:09l'innocence est prononcée, passons à autre chose.
19:12Que vous n'aimiez pas ma tête, que vous n'aimiez pas ma musique,
19:14que vous pensiez que je sois un agresseur,
19:16je ne peux rien faire pour vous.
19:17Je trace, je continue ma vie, en fait.
19:20Une dernière question, Ibrahim Alouf.
19:21Qu'est-ce que vous avez envie de dire aux autres membres du jury ?
19:24Je rappelle que le festival ouvre vendredi.
19:26Il y a des acteurs, des metteurs en scène, des stars du cinéma, comme on dit.
19:30Qu'est-ce que vous avez envie de leur dire dans ce contexte ?
19:32Prenez la parole.
19:34Par solidarité, refusez d'être membre de ce jury.
19:38Qu'est-ce que vous leur dites ce soir ?
19:42D'abord, vous savez, moi je suis un grand idéaliste.
19:44Je ne sais pas pourquoi.
19:48Dans mon entourage, dans ma famille,
19:50il y en a qui se moquent un peu de moi parce que je le dis de temps en temps.
19:52J'ai presque espoir.
19:54Je nourris un peu cet espoir, presque.
19:56Que la directrice se dise, mais attendez.
19:59Mais qu'est-ce que j'ai fait ?
20:01Mais qu'est-ce que j'ai fait ?
20:03J'ai fait une énorme bêtise.
20:04Je n'aurais pas dû faire ça.
20:06Je suis allé contre le droit, contre la justice.
20:08Il y a un ordre des choses.
20:10La justice, c'est ça, ça, ça, ça.
20:12Je me suis précipité.
20:13Je n'aurais pas dû.
20:14Je suis un idéaliste.
20:16Je rêve presque d'un seul coup qu'elle m'envoie un courrier
20:20et me dise, écoutez, Brahim, mea culpa.
20:22On a fait une énorme bêtise.
20:23Non seulement je vous invite, mais venez avec votre trompette.
20:25Et voilà.
20:26Et on règle ce problème.
20:27Alors, ça ne va peut-être pas faire plaisir à quelques féministes,
20:29dont Andrea Bescon ou je ne sais qui.
20:31Je parle de ces féministes-là.
20:33Je ne parle pas de ma mère, ma soeur,
20:34qui sont de grandes féministes aussi,
20:35et des gens extraordinaires.
20:36Mais je parle de celles qui n'acceptent pas mon innocence.
20:39Alors, ça ne va peut-être pas leur faire plaisir.
20:41Mais voilà, je me dis qu'on ne sait jamais.
20:43Il faut savoir rêver.
20:44La musique, c'est ça.
20:45C'est du rêve.
20:46Et si je n'avais pas ce rêve,
20:48je vous assure que quand on passe dans la tempête
20:51dans laquelle je suis passé,
20:52on n'en sort pas indemne.
20:54Et pourtant, je suis là.
20:56Merci beaucoup, Ibrahim Malouf,
20:58d'avoir réservé vos premiers mots à ABFM TV ce soir.

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