• il y a 3 mois
L'écrivain Nathan Devers était ce vendredi 13 septembre invité de l’émission Punchline week-end sur CNEWS. D'après lui, les enfants ont du mal à parler des violences qu’ils subissent : «Les enfants battus ne peuvent le dénoncer que plus tard. (...) C’est difficile d’être parole contre parole avec un adulte rusé.»

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Transcription
00:00Oui, moi, j'étais en désaccord avec ce que vous disiez, Louis,
00:03enfin, pas que Louis, d'ailleurs, ce que vous disiez généralement,
00:05même si je comprends très bien.
00:07Mais parce que je suis d'accord avec vous pour dire
00:09qu'il ne faut pas instrumentaliser des faits divers,
00:11qu'il ne faut pas instrumentaliser des vidéos,
00:12tomber dans une sorte de psychose,
00:14faire du populisme pénal en disant que quelqu'un est un monstre.
00:17Je n'aime pas faire ça.
00:18Mais en revanche, je pense que ça pose une question
00:20qui est même une question politique.
00:22On parle beaucoup aujourd'hui de libérer la parole
00:23de gens qui sont victimes de violences.
00:25S'il y a bien un groupe social qui, quand il est victime de violences,
00:29ne peut pas libérer sa parole, c'est précisément les enfants.
00:33Moi, j'ai pu voir ça, non pas du tout dans mon cas,
00:35mais dans le cas de quelqu'un que je connais,
00:38des enfants qui sont battus aujourd'hui.
00:40Il y a des numéros verts, ils peuvent aller au commissariat, etc.
00:43Mais globalement, ils sont battus
00:46et jusqu'à la fin de leur enfance, ils le seront.
00:48Et ils pourront le dénoncer plus tard.
00:50Quand ils seront adultes, ils pourront dire
00:51j'ai été battu quand j'étais jeune.
00:53Et globalement, c'est pas seulement parce qu'il y a une forme
00:57d'inaction de l'État. L'État, d'ailleurs, agit.
01:00Mais c'est que si vous voulez, c'est extrêmement difficile
01:02quand vous êtes mineur, que vous êtes parole contre parole
01:04face à un adulte qui est rusé, qui est intelligent.
01:06Vous appelez la police le temps que la police arrive.
01:08Les parents, évidemment, arrivent.
01:09Ils sont très sympathiques. Ils ont l'air rationnels.
01:13Il y a une forme de solitude profonde,
01:15indépassable ou en tout cas pour l'instant indépassée,
01:18des enfants qui sont battus.
01:19J'ajouterais même une chose.
01:20Moi, très souvent, quand je marche dans la rue,
01:21je peux voir des parents avec leurs enfants
01:24et j'ai, comment dire, l'intime conviction
01:27que quand les parents avec les enfants
01:29se retrouvent dans leur appartement,
01:31il se passe des choses qu'on n'a pas envie de voir ou de savoir.
01:34Très souvent, on voit des comportements.
01:36Et je fais bien la distinction entre des parents
01:39qui seraient autoritaires, des parents qui pourraient avoir
01:41des méthodes d'éducation qui seraient comme ça très sévères
01:46et ceux qui se déchaîneraient sur leur enfant.
01:47Moi, je suis frappé de voir, rien que dans la ville de Paris,
01:50le nombre de parents qu'on voit dans la rue
01:52avoir des comportements hallucinants vis-à-vis de leur enfant
01:55où on sent bien que ce sont des gens qui déchaînent
01:57comme ça, leur pulsion de colère, de hurlement,
01:59de violence physique, de violence symbolique,
02:01complètement gratuite, complètement arbitraire,
02:03un peu monstrueuse.
02:04Et face à cela, il y a une solitude irrémédiable des enfants.
02:07Et je pense que ça pose une question politique.
02:09Si la scène n'était pas filmée, que l'enfant entre en disant
02:12« la maîtresse m'a tapé », bon, on dirait…
02:13Mais qu'elle l'a dit, d'ailleurs,
02:14elle n'a pas été entendue.

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