Regardez L'éco & You avec Martial You du 24 septembre 2024.
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00:00Martial You, question ce matin, quel avenir pour le Doliprane ?
00:04Il paraît que Sanofi va céder ce médicament, va-t-il perdre son pavillon français, c'est toute la question.
00:08Oui, parce que vous avez deux candidats en lice, deux fonds d'investissement qui ne sont pas des laboratoires pharmaceutiques.
00:14D'un côté un français, PAI, qui est présent au capital par exemple du propriétaire des magasins Grands Frais et qui a investi dans l'Aberry.
00:22Et puis de l'autre côté, vous avez un fonds américain, CDNR, qui a des parts, lui, dans Conforama en France.
00:28Rexel, c'est un fournisseur électrique, et Spie, une entreprise du bâtiment.
00:32Qu'est-ce qui est à vendre ?
00:33Alors, Sanofi met en vente l'entité santé grand public, qui comprend donc le Doliprane,
00:38mais aussi les compléments alimentaires ou les médicaments sans ordonnance.
00:41Ça représente 12% du chiffre d'affaires de Sanofi et 11 000 salariés dans le monde.
00:46La nouvelle entreprise s'appellera Hopla, et Hopla Sanofi en restera quand même actionnaire,
00:53aux côtés d'un des deux fonds qui va l'emporter, et sans doute aussi de la banque publique d'investissement, la BPI, qui représentera l'État.
01:01En fait, l'enjeu de ce dossier, c'est la souveraineté française en matière de médicaments.
01:05Absolument, et alors ce dossier, il est hautement symbolique et politiquement sensible,
01:09à cause de cette petite phrase que vous allez réentendre prononcée dans une usine Sanofi le 16 juin 2020.
01:15Tout le monde a vu durant cette crise que des médicaments qui paraissaient usuels n'étaient plus produits en France et en Europe.
01:21Et je souhaite d'ailleurs qu'avec Sanofi, nous continuions dans cet esprit de partenariat,
01:26reproduire, conditionner et distribuer du paracétamol en France.
01:31Voilà, donc c'est Emmanuel Macron, évidemment, vous l'avez reconnu.
01:34En juin 2020, on sort à peine du Covid.
01:37La France a manqué de vaccins tricolores, de masques bleu-blanc-rouge, de gel hydroalcoolique made in France.
01:43Donc on a besoin à ce moment-là de redorer un peu le blason du pays en matière d'industrie et de santé.
01:48Et Emmanuel Macron choisit donc un produit pour reconquérir notre souveraineté, le Doliprane.
01:54Le diable est sorti de sa boîte de comprimés.
01:55Le Doliprane, c'est français aujourd'hui ?
01:57Alors il faut le dire, oui, et en même temps le dire assez vite,
02:00parce que le pôle santé grand public, c'est du made in France en trompe-l'œil.
02:05Vous avez 13 sites de production dans le monde, dont deux usines seulement en France, à Lisieux et à Compiègne.
02:11Ça fait 40 ans qu'on a laissé la production du paracétamol partir en Inde ou en Chine,
02:16qui fournissent aujourd'hui 80% du marché.
02:18Donc la vente de Doliprane risque de désavouer Emmanuel Macron ?
02:21Alors c'est ce qui risque de compliquer en fait l'arbitrage final, quand on va retenir le candidat gagnant.
02:26Parce que dans un dossier industriel, c'est quand même assez rare que ce soit l'Elysée qui monte au créneau.
02:32Habituellement, c'est le ministre de l'Industrie ou éventuellement le Premier ministre.
02:35La préférence nationale, comme on dit, va avantager un des candidats ?
02:37Oui, au risque de prendre peut-être une décision symbolique, mais pas forcément rationnelle.
02:41PAI Partners, donc, est français, je vous l'ai dit,
02:44mais pour absorber Doliprane, il va sans doute devoir s'associer à deux autres fonds d'investissement venus de Singapour et des Émirats.
02:52Ce n'est plus tout à fait du 100% français.
02:54L'adversaire en face est, lui, c'est sûr, 100% américain.
02:57Alors ajoutez à ça l'État, pour ne pas dire l'Elysée, avec la Banque publique d'investissement,
03:02qui serait donc au capital pour interdire de possibles délocalisations, intervenir sur la stratégie.
03:07La gouvernance de la nouvelle entreprise s'annonce donc complexe.
03:10J'ai envie de vous dire que le futur propriétaire, quel qu'il soit, de Doliprane, doit se préparer à avoir quelques mots.
03:14Évidemment, j'attendais celle-là. Merci, Martial.