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« Je me suis très longtemps considérée comme une japonaise ». Dans son livre « L’impossible retour » publié aux @editionsalbinmichel, Amélie Nothomb revient sur les traces de son enfance au Japon. ✨

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Transcription
00:00Les choses du quotidien qui me foutent le cafard.
00:02Vous allez trouver ça ridicule, mais déjà quand je vois ma tête dans le miroir,
00:05je me dis, mon Dieu, je ne vais pas avoir mieux à leur proposer.
00:08Mes habits, je n'ai jamais d'idée le matin,
00:09ce qui fait que finalement, je mets toujours exactement la même chose.
00:12Je manque d'imagination.
00:13Donc, tous les jours, j'écris de 4h à 8h du matin chez moi.
00:16Ensuite, je me préveille une tenue décente, enfin, je vous laisse juger
00:21et je me rends cinq jours par semaine chez mon éditeur
00:24pour lire mon courrier et y répondre.
00:26C'est, on va dire, environ 5h par jour, ce qui est déjà colossal.
00:30Je suis en train d'écrire mon 110e livre et je n'en ai somme toute publié que 33,
00:35dont celui-ci.
00:36Pourquoi est-ce que j'ai tenu à le partager ?
00:38Parce que je pense que je ne suis pas la seule à adorer voyager
00:42et en même temps à vivre chaque voyage comme un véritable traumatisme
00:45dont je ne reviendrai pas vivante.
00:47Le Japon, c'est le pays que j'aime le plus au monde.
00:49Je me suis très longtemps considérée comme une japonaise.
00:51Jusqu'à l'âge de 21 ans, je disais à qui voulait l'entendre que j'étais japonaise.
00:56Je voyais bien que mon vis-à-vis me regardait avec perplexité,
00:58mais ça m'était complètement égale.
01:00À l'âge de 21 ans, je m'achète un aller simple pour Tokyo,
01:03bien décidée à y passer ma vie.
01:05Et c'est en voyant comment les Japonais travaillent
01:07et comment je suis incapable de travailler
01:09que j'ai compris que je ne serai jamais une véritable japonaise.
01:13Parmi les choses japonaises que j'aime infiniment au Japon,
01:16il est tout à fait normal de commencer tout échange par parler de la saison.
01:20Si vous faites ça avec votre meilleur ami français ou belge,
01:22on se dit mais c'est quoi ce débile mental ?
01:24J'ai remarqué que c'était le printemps, pourquoi il m'en parle ?
01:27Alors qu'au Japon, c'est une règle de politesse,
01:29on commence par commenter la saison et on le fait d'ailleurs de façon très subtile.
01:33Qu'est-ce qu'on a nous les Français que eux n'ont pas ?
01:35C'est qu'on est très direct.
01:36Par exemple, on a tout à fait le droit de dire je ne sais pas.
01:39Un Japonais ne peut pas, c'est impoli, il n'a pas le droit de dire je ne sais pas.
01:44Prenons une circonstance simple.
01:45Vous êtes dans la rue, vous êtes perdu, ce qui arrive tout le temps à Tokyo.
01:48Et vous dites, pardon monsieur,
01:49pouvez-vous m'indiquer le chemin pour aller au Shinjuku Gyoen ?
01:52Au lieu de vous dire je suis désolée, je ne sais pas,
01:54il va inventer une réponse de toute pièce parce que ça vaut mieux.
01:58Et vous, vous allez arriver absolument n'importe où.
02:00Voilà le genre de problème qu'on peut avoir au Japon.
02:02C'est charmant mais ça fait perdre un temps fou.
02:04Si j'avais eu des enfants, je ne sais pas du tout
02:07si j'aurais eu le courage de leur faire vivre une expatriation comme celle que j'ai vécue.
02:11Ce n'est déjà pas facile pour un adulte d'être un expatrié
02:14et de savoir que tous les 3 ans, tous les 4 ans, tous les 5 ans,
02:17on va tout perdre pour tout recommencer ailleurs.
02:20Mais pour un enfant qui ne l'a même pas décidé
02:21et quand on voit la place qu'occupe dans un enfant, par exemple,
02:25la maison, l'école, la meilleure amie, le chien.
02:28Moi je me souviens que quand j'étais enfant, je vivais ça comme la mort.
02:32Mais même par la suite, ça a été comme des répétitions de la mort.
02:35Quand on a quitté la Chine, quand on a quitté New York,
02:38quand on a quitté le Bangladesh.
02:40Il y a eu des épisodes de mon adolescence où j'ai failli mourir
02:43tellement c'était trop dur pour moi tout ça.
02:45Ce n'est peut-être pas un tort mais c'est assurément une prise de risque.
02:49Cela étant, les risques sont partout.
02:52Donc finalement, voilà un grand message d'optimisme.
02:55Ça peut se passer très mal partout donc allez-y, vivez !

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