REPORTAGE - Gwendal _
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00:00Si la loi était respectée, tout simplement, il n'y aurait pas de blessés.
00:05Ni parmi les gilets jaunes, ni parmi les forces de l'ordre.
00:10Je n'ai jamais fait la différence entre un blessé qu'il porte un gilet jaune,
00:16qu'il porte un képi bleu, c'est toujours un blessé de trop.
00:21Bonjour, je m'appelle Gwendal, j'ai 27 ans, j'ai été blessé à l'acte 10 à Rennes le 19 janvier 2019.
00:30Gwendal se rend pour la dixième fois à un rassemblement des gilets jaunes.
00:34Au cours de la manifestation, lui et ses amis forment un cordon de sécurité autour d'un blessé.
00:39D'après les témoignages, il est touché par un éclat de grenade, suivi d'un tir de LBD.
00:44Il restera mutilé à vie.
00:47La victime a été emportée, elle a été installée sur le brancard, ils sont partis.
00:51Et à partir de là, nous, on a commencé à remonter la rue.
00:54J'ai entendu un bruit derrière moi où j'ai tourné le visage.
00:58Il y a eu un flash, j'ai vu une masse grise.
01:01Il y a eu une explosion, un flash, écran noir.
01:04Et donc c'est là que je suis tombé au sol, main sur le visage.
01:06C'est la première fois que Gwendal accepte de témoigner à visage découvert.
01:10Il ne voulait pas médiatiser son cas,
01:13mais le besoin de dénoncer les violences policières était trop fort.
01:16Malgré une opération de trois heures au CHU de Rennes, l'interne n'a pas pu sauver son œil.
01:22La vie de Gwendal ne sera plus jamais la même,
01:24mais en dépit de sa blessure, il n'entend pas abandonner le combat.
01:28Plus les actes passent, plus la répression est dure.
01:31Personnellement, je ne regrette pas non plus d'être allé à l'acte X à Rennes.
01:34C'est le devoir citoyen qui fait qu'on a des choses,
01:40on revendique des choses, on ne nous écoute pas.
01:42Il y a des retraités, il y a des jeunes, il y a des chômeurs, des salariés.
01:46Il y a tout le monde dans un cortège de manifestation
01:49et ces gens-là ne viennent pas casser du flic comme ils essaient tous de le faire croire.
01:54Par respect pour les gilets jaunes qui sont décédés,
01:57tous les blessés, tous les mutilés, on ne peut plus laisser tomber.
02:01Ironie de l'histoire, le jeune homme envisageait une carrière dans la police.
02:05Désormais, cette orientation professionnelle est impossible.
02:09Pour le moment, la vie de Gwendal est ponctuée de soins.
02:12C'est sa compagne, Cassandra, qui s'occupe de lui au quotidien.
02:15Je ne suis pas énervé, je n'ai pas la haine, je ne comprends pas.
02:19À juste titre, il n'y avait aucune raison qu'on me balance
02:22soit une grenade de désencerclement, soit qu'on me tire un tir de LBD.
02:25La personne qui m'a fait ça, je ne lui donnerais pas le plaisir de m'abattre moralement.
02:30Après, je garde le sourire, etc.
02:32C'est vrai qu'il y a des moments où on prend conscience de la chose, où là, ça ne va pas.
02:37Je n'ai plus le droit de conduire pendant six mois.
02:41Le temps que je m'habitue, c'est la sécurité routière qui le demande.
02:44Le regard des gens aussi.
02:46Je n'ai plus vraiment envie de sortir.
02:48Et c'est assez compliqué parce que je n'ai pas non plus envie de rester enfermé.
02:52À l'époque des faits, Marie-Laure, la mère de Gwendal,
02:56avait interpellé les autorités au moyen d'une vidéo
02:58alors que son fils se trouvait en salle d'opération.
03:01Aujourd'hui, elle peine à réaliser que le jeune homme
03:04ne pourra jamais retrouver l'usage de son œil.
03:06Par rapport à ce qui est arrivé à mon fils, ce n'est même plus de la répression.
03:10C'est de la chasse.
03:12C'est du baltrap.
03:16Dans mes cauchemars les pires, j'ai l'impression d'entendre le type hurler poule quand il tire.
03:21On ne peut pas effacer ça.
03:23On ne peut pas.
03:24Pour Audrey, la sœur de Gwendal, il est important de témoigner
03:27pour ne pas oublier les blessés.
03:29J'ai pensé à toutes les autres victimes.
03:31J'ai pensé à Fiorina.
03:32On n'en entend pas parler.
03:34Et du coup, c'est vrai qu'on s'est dit qu'il fallait qu'on se batte pour lui,
03:38que ça serait peut-être dur pour lui les premiers temps,
03:40et qu'on soit là justement pour le guider.
03:42Et puis après, il mènera son combat de la façon dont il le souhaite.
03:47Mais difficile de se projeter dans l'avenir avec un handicap
03:50qu'il doit désormais apprivoiser,
03:52il a également porté plainte contre Ix et contre l'État pour agression.
03:55Le 2 février, l'acte XII entendait rendre hommage aux victimes des manifestations
03:59en pleine polémique de l'utilisation du LBD.
04:02Selon le collectif Désarmons-les, depuis le début du mouvement,
04:0620 personnes ont perdu un œil, 4 autres ont eu la main arrachée,
04:09et une femme de 80 ans a perdu la vie après avoir reçu une grenade
04:13en plein visage à Marseille.
04:15Quant à Gwendal, il veut dorénavant avancer,
04:18malgré une blessure qui fera peut-être un jour sa force.