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00:00Et pour parler de la venue de la ministre de l'agriculture aujourd'hui dans le département à Simon Colbocq de ce qu'il faut en attendre
00:07notre invité à ce matin c'est un spécialiste à des questions agricoles.
00:10Bonjour Yann Carbeno, vous êtes le rédacteur en chef de l'Agri, c'est ce journal
00:15et je ne sais pas si vous vous en attendez grand chose vous de cette visite de la ministre aujourd'hui parce que dans votre dernier
00:19papier, la page 2 de votre éditorial, ça s'appelle
00:22la fin des agriculteurs, carrément on en est là, vous êtes pessimiste à ce point ?
00:26Je pense qu'il y a des raisons d'être pessimiste
00:29L'agriculture aujourd'hui dans le département et puis
00:31en partie sur le reste de la France connaît des heures compliquées avec notamment le changement climatique, les problèmes de marché aujourd'hui
00:37donc effectivement il va falloir trouver des solutions et
00:40l'agriculture on n'a pas l'impression qu'elle soit vraiment aidée en tout cas par les pouvoirs publics aujourd'hui pour ça donc ça peut poser question
00:45sur la pérennité de l'agriculture.
00:47On l'a entendu à 7h30, la détresse de certains vignerons dans le département
00:51vous qui les rencontrez, vous qui leur parlez quasiment tous les jours à ces agriculteurs
00:56vous le ressentez aussi ce sentiment d'abandon ?
00:58Complètement, c'est...
01:00alors c'est...
01:01j'allais dire c'est du désespoir, on n'en est pas là parce que les agriculteurs ont quand même une capacité à abondir toujours
01:06ils l'ont toujours fait mais c'est vrai que là
01:09ils ont l'impression d'être au fond du seau et puis vraiment avec cette idée d'avoir été effectivement abandonné comme vous disiez par
01:15la société aussi et puis par le comment dire, par le monde politique autour
01:18qui vient, qui parle et puis en fait il se passe rien, ça fait trois ans qu'on est en sécheresse
01:22et ils n'ont vu encore aucun coup de pelle
01:24pour amener de l'eau qui est une des solutions qui permettrait de passer cet épisode difficile.
01:28La campagne d'arrachage des vignes elle vient de commencer, on en parle là aussi sur France Bleu Roussillon ce matin
01:33je rappelle pour les auditeurs de quoi il s'agit très rapidement, les vignerons en difficulté peuvent
01:37arracher leurs vignes et toucher jusqu'à 4000 euros de primes par hectare
01:41alors c'est évidemment un crève-cœur pour eux mais ce qui est frappant c'est le nombre de vignerons qui se renseignent
01:47qui participent à toutes ces réunions, qui commencent à s'inscrire cette semaine
01:51le département selon les différentes projections pourrait perdre jusqu'à la moitié de ces vignes, c'est énorme, c'est une métamorphose qui pourrait
01:58se produire dans ces prochains mois.
02:00Alors ça va beaucoup faire bouger les paysages du département, on va voir ces temps-là dans des friches
02:04parce qu'une fois qu'on a arraché la vigne il n'y aura plus rien
02:07ensuite sur les 4000 euros c'est pas du net, s'il va falloir arracher donc il y a
02:11entre 1800 et 2000 euros à peu près l'hectare donc c'est pas une injection d'argent comme c'était forcément attendu.
02:18Est-ce que c'est aussi pour réplonger les dettes la plupart du temps ?
02:21Ça va faire un peu de trésor mais je suis pas sûr, je pense que dans l'idée du gouvernement c'était de
02:26faire une espèce de plan social en fait, de permettre aux gens
02:29qui ont besoin de partir à la retraite et d'arrêter, ça permettait de soustraire des volumes en fait, de partir dignement
02:35sauf que 4000 euros c'est pas assez et puis il n'y a pas de marché pour les terres et vous savez bien que les agriculteurs
02:40le système est fait ainsi qu'il faut qu'ils réalisent leur capital au moment où ils partent en retraite, c'est-à-dire qu'ils cèdent leur exploitation
02:45et aujourd'hui pour les vignes c'est 0 euros quand il n'y a pas d'eau, il n'y a pas de marché.
02:48Et si ça va si mal effectivement c'est à cause de ce manque d'eau, cette sécheresse, la baisse des ventes aussi de rouge depuis plusieurs années
02:54en France. Les conséquences donc des friches qui vont apparaître de plus en plus, ça a des conséquences aussi
03:01économiques, pas seulement sur le paysage parce que du vin en moins c'est des caves coopératives en moins, c'est tout un tas de toute une
03:07économie du vin qui risque de péréquilter.
03:09Absolument, alors là les projections c'est le chiffre d'affaires de la viticulture, le chiffre d'affaires direct c'est une centaine de millions d'euros dans le
03:15département.
03:16Si on enlève la moitié, allez on va calculer
03:18à la serpe pour le coup, c'est le cas de le dire, on va perdre donc
03:2250 millions d'euros, si vous multipliez par deux, deux et demi avec les emplois induits, on va perdre 100, 150 millions, peut-être 200 millions d'euros
03:28d'activités économiques sur l'ensemble du département. Ça va avoir un impact sur les marchands de tracteurs, sur les mécaniciens,
03:33sur les saisonniers, enfin voilà, sur tout ce que la viticulture irrigue et c'est la dernière activité économique souvent dans les territoires les plus
03:40reculés du département. Allez à Codiès par exemple, si vous enlevez la vigne
03:43il n'y aura plus grand-chose pour faire vivre les gens. Mais je crois que ce qu'il faut vraiment réaliser c'est que les
03:49vignerons ont perdu de l'argent depuis quatre ou cinq ans, cette année ils ont perdu 2500 euros à l'hectare, ils sont à l'os.
03:54Yann Carveno, le rédacteur en chef de la grille, est notre invité ce matin. Qu'on se rende compte Yann Carveno, c'est hallucinant ce dont on parle.
04:01Il y a quinze ans,
04:02les vins du Roussillon, le Guide Parker, la Bible commençait à les noter de mieux en mieux, en concurrençait presque les vins du Bordelais.
04:11L'agriculture, la viticulture avait vraiment le vent en poupe chez nous et là on est en train de parler, d'évoquer une possible disparition.
04:17C'est hallucinant le changement en quinze ans.
04:20Oui, le marché, alors c'est beaucoup un problème de temporalité je crois, la sécheresse nous saisit parce qu'elle est tellement longue, elle est tellement
04:26difficile que les agriculteurs qui ont l'habitude de
04:28s'adapter ne le peuvent pas, ça va trop vite là, il aurait fallu amener de l'eau. Sur le marché c'est pareil, le marché a évolué de
04:34manière très très rapide depuis cinq, six ans, avec effectivement
04:37comment dire
04:39des consommateurs qui délaissent les vins un peu puissants, les vins avec de l'alcool, sur le marché français, sur le marché européen. Il y a encore des
04:45opportunités sur les marchés à l'export, mais voilà, est-ce qu'on est en capacité d'aller vendre du vin en Corée, etc. C'est beaucoup plus complexe
04:51qu'au carrefour du coin. Et puis on voit bien qu'avec la Chine, notamment les relations se tendent, l'Union Européenne taxe les
04:57voitures électriques chinoises, en réponse il y a déjà des taxes en plus sur le cognac, peut-être demain aussi sur le vin français d'une façon
05:05générale. Et les Chinois ont réouvert le marché aux Australiens, donc ça fait moins de place parce qu'ils sont très très compétitifs.
05:09Alors on a parlé, si ces vignes effectivement disparaissent,
05:14encore une fois, jusqu'à la moitié du vignoble, c'est considérable, c'est nos paysages, effectivement, la carte postale qui va changer, l'économie,
05:20le risque d'incendie aussi, parce que ça c'est pas négligeable non plus.
05:23Absolument, si les vignes ne sont pas entretenues, s'il y a de l'herbe, on l'avait bien vu à Cerbère, et puis on l'a encore vu à Castelnoux,
05:27s'il y a de l'herbe dans les vignes, s'elles ne sont pas
05:30entretenues, ou si les vignes sont arrachées et qu'il y a des friches, effectivement ça brûle très très vite et ça va mobiliser plus de pompiers,
05:34plus de canadiens, et c'est un petit peu le discours de la profession agricole, en disant, il faut investir maintenant dans la vigne, dans l'agriculture,
05:40dans le maintien de l'agriculture aujourd'hui, en amenant de l'eau, pour faire des économies plus tard sur les services d'incendie.
05:44Et on est d'accord que quand on vigneron arrache,
05:47on ne plante rien à la place. Si la vigne ne pousse pas, il n'y a rien qui peut pousser.
05:52Vous savez, j'étais à Rivesalte encore la semaine dernière pour faire des photos, et j'ai été saisi de voir sur ma gauche un verger d'abricots complètement mort,
05:58une vigne à droite qui était encore verte, elle n'a pas beaucoup produit, mais elle est encore verte.
06:02En fait, s'il n'y a pas d'eau, quand c'est en sec, il n'y a que la vigne qui peut résister là.
06:06Alors, c'est une des propositions de, comment dire, de Ludovic Roux, notamment le président de la coopération viticole occitane,
06:11à Bruxelles, il défend l'idée d'une indemnité compensatoire d'un handicap naturel méditerranéen qui viendra aider les vignerons, justement,
06:18à, comment dire, à supporter le manque de rentabilité pour maintenir les vignes dans les petits villages, autour des petits villages, pour faire un cordon sanitaire,
06:24pour éviter que les incendies traversent les habitations.
06:26C'est une proposition qui a des chances d'aboutir ?
06:28Ça se discute aujourd'hui dans le cadre du groupe de haut niveau à Bruxelles, je n'en sais pas plus, on devrait avoir plus d'informations à la fin du mois de décembre.
06:35L'info du jour, Yann Carveno, c'est la venue de la ministre de l'Agriculture, Annie Gennevard, qui doit passer dans la vallée de la Glie, dans les Aspres,
06:43ensuite à Argelès, c'est son parcours pour cet après-midi dans le département, qu'est-ce qu'il faut attendre de cette visite, finalement ?
06:50Franchement, sincèrement, je n'en sais absolument rien, elle est arrivée depuis trois semaines,
06:53elle est dans les traces de ce qu'avait fait Marc Fesneau au mois d'avril, au mois de mai,
06:57donc je n'ai pas l'impression que ça ait beaucoup avancé depuis, et c'est un petit peu le problème,
07:02c'est qu'on est dans une situation de grande urgence, où il aurait fallu peut-être un peu bousculer les règles,
07:07et donc je ne sais pas si... Elle peut venir en annonçant qu'on va changer les règles, mais je n'en suis pas persuadé.
07:12C'est assez désespérant quand même la situation, les retenues collinaires, celle des Aspres par exemple, on en parle depuis des années,
07:17et là le projet est encore repoussé, la préfecture dit qu'il y a un souci au niveau de la communauté de communes des Aspres,
07:22la communauté de communes dit que non, c'est la préfecture, ça ne bouge pas, c'est désespérant.
07:26Absolument, mais c'est vraiment ce qui touche le plus, je pense, les agriculteurs aujourd'hui, et les éleveurs aussi,
07:31on l'a vu avec l'AFCO, avec la fièvre catarale cet été.
07:33Qui décime notamment les troupeaux de brebis.
07:35C'est ça, et c'est l'impression que... C'est l'impression d'abandon, et j'en parlais avec Jean Salire, des Jardins de Saint-Jacques, au téléphone,
07:41et il me disait, tu sais Yann, j'ai l'impression quand même que tout le monde regarde ce qui se passe dans le Roussillon,
07:46pour savoir ce qu'ils vont faire après, mais en fait ce qui se passe ici, personne n'y prête vraiment attention,
07:51on est pilote, mais pilote dans la fin de l'agriculture du département.
07:55Enfin, moi je le vois un peu comme ça, c'est très pessimiste, mais après je sais que mon agricole a les capacités à rebondir.
07:59Yann Carvelot, vous êtes donc le rédacteur en chef du journal La Grille, merci beaucoup,
08:04vous étiez l'invité de France Bleu Roussillon, ce matin, excellente journée à vous.
08:07Merci.

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