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En 2022, l'hebdo Poher est sollicité par la fondation Merci pour accueillir des familles étrangères à Callac. Mais l'extrême droite réagit par slogans racistes et menaces de mort, poussant le maire à annuler. Harcelé, le journal dépose plainte, mais reçoit aussi des messages de soutien : "Les gens qui vous soutiennent sont bien plus nombreux que ceux qui vous menacent."






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Transcription
00:00Les bâtards comme toi, on leur fout un manche à balai dans le cul.
00:02Se dire qu'un esprit est assez fou pour écrire ce genre de trucs,
00:05c'est vraiment violent.
00:06On va te crever pourriture et te jeter dans la fosse avec tes *** tu aimes tant.
00:09Nous, c'est la liberté de la presse et son libre exercice qui nous intéresse.
00:12On décide à la rédaction de passe-terre et de médiatiser la chose.
00:15Les gens qui vous soutiennent sont bien plus nombreux que les cons qui vous menacent.
00:18À très bientôt, salopes.
00:23Bienvenue au POER.
00:24On est un hebdo d'information générale basé à Carré, en centre-Bretagne.
00:28Bon, on va rentrer.
00:30Donc, on est une rédaction des plus classiques, trois journalistes.
00:34Et puis, on a une vingtaine de correspondants un peu partout sur le territoire.
00:38Alors, en moyenne, on est au-dessus de 5000 exemplaires chaque semaine.
00:42On traite de l'actualité locale avec des fêtes, des tournois de foot,
00:46parce que c'est la vie des gens.
00:49Au printemps 2022, on reçoit un communiqué de presse d'une fondation
00:53pour faire un projet autour des réfugiés.
00:56Moi, j'avais interviewé la directrice de la fondation Merci,
00:58qui expliquait très calmement notamment que le projet prévoyait
01:01d'abord d'installer une famille de réfugiés et peut-être deux ou trois après.
01:05Il y a énormément de projets qui fonctionnent avec l'accueil de personnes réfugiées
01:09qui ont été des moteurs pour revitaliser un territoire.
01:11Début septembre, on a vu le comité des opposants changer
01:14avec l'arrivée de plusieurs personnes qui étaient plutôt des cadres de reconquête.
01:18Calac doit rester Calac, la Bretagne doit rester Bretonne,
01:22la France doit rester la France.
01:24Et donc, au final, nous demandons le retrait pur et simple du projet, son abandon.
01:30Et on a vu se mettre en place aussi un récit du petit village breton
01:33qui résistait aux flux migratoires.
01:36Donc avec des slogans non à l'africanisation de la Bretagne,
01:39plein de bullshits comme ça se mettent en place.
01:41En novembre, on a l'annonce d'une seconde manif.
01:44On voit des discours plus durs.
01:46Il s'agit de nous noyer sous un flux incontrôlé des migrés.
01:51On voit que c'est beaucoup plus tendu avec des jeunes dont certains cagoulaient
01:55qui nous pètent des fumigènes et puis des croix celtiques.
01:58On est chez nous ! On est chez nous !
02:02À la fin de manif, moi je veux prendre des photos et je me fais insulter.
02:07Pour les embêter, je leur réponds en breton
02:08parce qu'ils n'ont pas arrêté de brailler on est chez nous
02:10alors qu'on voyait que là il y avait des gens qui venaient quand même de très loin,
02:13beaucoup de Vendée, d'Occitanie, de région parisienne.
02:15Je regrette d'avoir dû prendre cette décision-là
02:18mais je pense que si je ne le faisais pas,
02:20je n'aurais pas été devant vous aujourd'hui.
02:21Le maire décide d'annuler le projet mi-janvier 2023.
02:24Mais entre-temps, nous, par la poste, on reçoit un courrier anonyme
02:29avec imprimé un article du site Résistance Républicaine
02:33et il traite le pouvoir de feuilles de choux immondes,
02:38de misérables torchons gauchistes.
02:40Alors on est très vite gauchistes pour eux.
02:42Comme par hasard, le lendemain, j'avais un premier mail de menace de mort.
02:45Alors c'est une partie des plaintes
02:48parce qu'il faut être organisé dans ces cas-là.
02:50Notamment, je vais te montrer l'email.
02:53« Va te faire niquer. Arrobage Chartier, tu vas crever. »
02:56Ils ont même fait une adresse spéciale.
02:58Le premier, c'était assez bref.
03:01« Les batards comme toi, on leur fout un manche à balai dans le cul.
03:05On va te crever pourriture et te jeter dans la fosse
03:08avec tes *** que tu aimes tant.
03:09À très bientôt salope. »
03:11Ça fait bizarre le matin de voir ce genre de truc.
03:15C'est vraiment violent.
03:16Se dire qu'un esprit est assez fou pour écrire ce genre de truc.
03:19Donc je porte plainte.
03:20Une semaine après, c'est un coup de téléphone.
03:23« Est-ce qu'il est là, Chartier ? Non. C'est pour quoi ? »
03:25« C'est pour lui mettre une balle dans la tête. »
03:28Deuxième plainte.
03:30Une dizaine de jours après, rebelote.
03:32Nouveau coup de téléphone.
03:33« On a mis une bombe dans la rédaction.
03:35Vous allez tous crever pourriture. »
03:37OK.
03:38Donc là, on perd une journée de travail, pratiquement.
03:41Et nous, on décide à la rédaction de passe-terre
03:43et de médiatiser la chose.
03:45On était quand même 600 sur la place de la mairie à Carré.
03:48Donc ça fait chaud au cœur.
03:50C'était un choix de moment.
03:51Même un monsieur qui est venu nous apporter une boîte de gâteaux,
03:54il avait marqué dessus « Les gens qui vous soutiennent
03:57sont bien plus nombreux que les cons qui vous menacent. »
03:58Donc voilà.
03:59Et ça s'est après plus ou moins calmé.
04:01Et dans cette période si particulière de mai et juin 2024,
04:05avec les élections européennes puis législatives,
04:07on a vu aussi toute une parole un peu chez certaines personnes se libérer.
04:12Et on a eu un individu qui s'est mis à coller des autocollants d'extrême-droite
04:17avec des slogans parfois menaçants,
04:19comme « En attendant l'épuration, faites votre liste de collabos. »
04:22Donc là aussi, c'est des nouvelles plaintes déposées.
04:29Pourquoi on a été pris pour cible ?
04:30Je ne sais pas forcément.
04:31Déjà, on a des gens qui n'aiment pas la presse
04:33et qui n'aiment pas les journalistes,
04:34qui nous prennent systématiquement pour des militants
04:36qui ne connaissent pas notre métier.
04:37Je n'ai pas à être de droite ou de gauche,
04:38j'ai à être journaliste et à rendre compte de l'actualité.
04:40C'est ça qui m'anime.
04:41J'avais aussi l'intuition que Calax
04:44c'était aussi une méthode mise en place par l'ultra-droite
04:46et que ça se reproduirait ailleurs.
04:48Et ça s'est reproduit très vite à Saint-Brévin,
04:50où là, le maire a démissionné après l'incendie de ses véhicules.
04:53On est face à des gens qui sont très obsédés, très monomaniaques.
04:56Ils voient des invasions partout,
04:58il y a un rejet de l'étranger,
05:00il y a des obsessions anti-islam aussi.
05:03On est vraiment dans des remugles d'extrême-droite et d'ultra-droite.
05:07Et quand on est confronté à ça, c'est quand même déroutant.
05:09C'est un peu lourd psychologiquement,
05:10quand on doit porter deux, trois fois plainte par semaine.
05:13Après, on sait qu'on va vivre avec ça longtemps.
05:15Donc non, ce n'est pas de la peur, parce qu'ils ne nous feront pas peur.
05:17Nous, c'est la liberté de la presse
05:19et son libre exercice qui nous intéresse.
05:21Donc on continue.

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