• il y a 1 heure
Les chroniqueurs du Cercle débattent autour d'un film sortant en salles ou en diffusion sur CANAL+
https://www.canalplus.com/cinema/
Facebook : https://www.facebook.com/canalpluscinema/
Twitter : https://twitter.com/Canalplus
Instagram : https://www.instagram.com/canalplus/

Category

📺
TV
Transcription
00:00Maintenant, il est l'heure de recevoir notre invité.
00:03Ces douze longs métrages sont des variations,
00:05tantôt légères et tantôt graves, sur l'amour, la séduction, le couple
00:09et pourraient tous porter le titre du sixième d'entre eux, L'Art d'aimer.
00:13Son nouveau film Trois Amis avec India R, Camille Cotin et Sarah Forestier
00:16est en compétition au Festival de Venise.
00:18Bienvenue dans le cercle, Emmanuel Mouret.
00:25Bienvenue.
00:27On est très heureux de vous recevoir.
00:29Ça va? Oui, très bien, très heureux d'être là.
00:34Alors, vous avez dit un jour que vos films sont des autobiographies de vos rêveries.
00:39Et j'aimerais savoir, dans ces trois personnages fabuleux de femmes,
00:43laquelle la plus proche de vous?
00:46Et bien, alors, quand j'étais à Venise,
00:48il y a une spectatrice qui m'a fait un compliment,
00:51qui m'a fait très plaisir et qui est en même temps très simple.
00:54Elle est venue me dire ces trois amis, c'est exactement moi.
00:58Et tout ça pour dire que je crois beaucoup,
01:02si le cinéma représente le monde extérieur,
01:05je crois qu'il représente même davantage le monde intérieur.
01:08On n'a pas de mal, nous, en tant que spectateur, à se projeter dans plusieurs personnages.
01:12Et j'aime bien cette idée que les différents personnages d'un film
01:16composent différents aspects de notre personne.
01:18Donc, oui, je me projette dans les trois.
01:21On est pris dans des conflits intérieurs et les trois, on va dire, les exposent à leur façon.
01:26Vous avez apporté la première minute du film, on la regarde, on en parle après.
01:31Lyon est le décor principal de cette histoire.
01:35Il se passera des choses ici, d'autres là.
01:41Et là. Ainsi que là.
01:46Ici aussi, etc., etc., etc.
01:56Vous voyez cet homme? Eh bien, cet homme, ça n'est pas moi.
02:00Ça n'est pas moi, mais du tout.
02:03Il s'appelle Thomas. Il ne le sait pas, mais c'est un personnage important,
02:07bien qu'il ne soit pas le principal.
02:09D'ailleurs, le personnage principal n'est pas loin.
02:12Attendez un petit peu. Ah, le voilà.
02:15Enfin, la voilà.
02:18Regardez, il se présente, elle lui dit son nom.
02:22Joanne Belair, il répond Thomas Duval.
02:26Elle dit qu'elle enseigne l'anglais.
02:29Oh, je. Je resterai bien regarder son visage.
02:36Nous aussi, on a passé du temps à regarder India Air.
02:39Comment vous avez conçu ce plan d'introduction?
02:41Comment vous l'avez pensé?
02:43Il y a plusieurs choses, des choses qu'on découvre à travers le film.
02:46Et d'où provient cette voix?
02:50Mais ça me plaisait, je ne sais pas.
02:52J'avais une note quelque part de présenter
02:55grosso modo les décors avant qu'on y rentre.
02:58Je trouve qu'il y a quelque chose d'assez ludique.
03:00Et puis, j'ai un goût pour les voix off.
03:04Un goût qui fait que d'un côté, elle nous donne la main,
03:07puis d'un côté, elles excèdent l'image.
03:11Elle nous projette aussi dans des ailleurs.
03:14Puis le fait qu'on nous raconte, elle nous dit aussi que cette histoire
03:17est déjà passée, donc ça pose des questions.
03:19Voilà, mais vraiment par plaisir ludique.
03:23C'est un mot que j'aime bien.
03:25Moi, j'aime beaucoup la petite pointe d'acrimonie.
03:27Lui, c'est pas moi, c'est pas du tout le petit du tout.
03:32Il me fait beaucoup rire.
03:33Nous allons explorer maintenant le code génétique de votre film.
03:36Vous êtes prêts?
03:40Alors, il y a une petite fille dans votre film,
03:42mais votre petite fille, elle ne va pas voir des films de Pixar ou de Disney.
03:46Elle va voir des films avec Buster Keaton ou Max Linder.
03:50Est-ce que vous avez un film burlesque à nous conseiller?
03:55J'ai choisi les films burlesques parce que vraiment,
03:58c'est comme ça que je suis rentré dans le cinéma.
04:00Et je choisirais Buster Keaton.
04:04Même, on aurait pu citer Tati, Chaplin et tout ça.
04:07Mais Buster Keaton demeure incroyable et peut-être un film en particulier.
04:11Un film en particulier, je dirais le Cameraman.
04:14Et si j'insiste encore un dernier moment sur Buster Keaton,
04:17c'est qu'on connaît sa façon inouïe de tomber.
04:21Mais c'est cette leçon, c'est qu'il se relève toujours
04:24et sans, on va dire, sacrimonie.
04:27C'est quelqu'un qui se relève et qui continue ce chemin.
04:29Je trouve que presque déjà enfant, c'est une leçon de vie
04:33qui ne nous quitte jamais.
04:36Votre dialoguiste préféré au cinéma qui vous inspire?
04:39Ça, c'est une question très difficile.
04:41Enfant, c'était moi, je suis marseillais.
04:43On regardait à la télévision les films de Pagnol.
04:46Donc, évidemment, Pagnol est un cinéaste qui a énormément compté pour moi.
04:51À la fin de l'adolescence, c'était obligé.
04:54C'est le grand choc. Ça a été Éric Rohmer aussi.
04:57Cette façon d'entendre parler comme on entend parler autour de soi.
05:00Et ces dialogues deviennent plus naturalistes que les autres.
05:03Et on va dire, j'ai découvert après dans la foulée,
05:06Guitry, les dialogues de Lubitsch ou ceux de Mankiewicz,
05:10qui sont absolument incroyables.
05:11Donc, je citerai ces cinq.
05:13Vous en prenez tout un paquet.
05:15Mankiewicz, la voix off.
05:17Les trois femmes de la chaîne conjugale.
05:21Alors, dans vos films, vous analysez les émotions,
05:23les sentiments complexes de vos personnages.
05:25Est-ce qu'il y a un réalisateur, une réalisatrice qui a montré
05:28la complexité des sentiments de manière passionnante?
05:31Je pense même que c'est le rôle du cinéma
05:35que de montrer la complexité des sentiments.
05:37Tous les, entre guillemets, les grands films,
05:39les films qui m'ont fait aimer le cinéma,
05:42j'ai une cinéphilie assez classique,
05:44que ça soit en effet un western, un film sentimental,
05:47un film policier, vont vers cette complicité du sentiment.
05:51Donc, je ne pourrais pas citer un cinéaste,
05:53mais grosso modo, une histoire, on rentre dans la complexité.
05:56C'est toujours, comme aussi dans ce film,
05:59quelqu'un qui est porté vers ses engagements
06:01et d'un autre côté vers ses désirs.
06:03Quand on a un personnage qui est tiraillé par les engagements
06:06et par les désirs, eh bien, on rentre dans la complexité du cinéma.
06:09Et il y a quelque chose que j'avais entendu un jour dire
06:12Ettore Scola, lors d'un festival qui était très beau.
06:15Il disait partout, alors à la télévision,
06:18pardon, il dit à la télévision, à la radio, sur Internet,
06:20on nous dit ce qu'il faut penser.
06:22Il dit, pour moi, le cinéma, c'est un endroit où on rentre
06:25et ensemble, on peut douter.
06:27Et je trouve ça très beau parce que ça a à voir,
06:30à rentrer dans cette complexité du sentiment sans avoir à la juger.
06:35Alors, on l'a entendu, il y a un petit fantôme dans votre film
06:38qu'on aime beaucoup, on n'en révélera pas plus.
06:41Est-ce qu'il y a un fantôme de cinéma que vous aimez particulièrement ?
06:44Alors, je ne suis pas du tout un spécialiste des fantômes du cinéma.
06:47Je ne m'étais même jamais posé la question avant de faire ce film.
06:52Le cinéma permet quelque chose que la vie ne permet pas,
06:55c'est de revoir les personnes après leur disparition.
07:00Non, quand je pense fantôme au cinéma, je pense de suite à Madame Muir
07:02parce qu'il y a une relation, une histoire d'amour avec quelqu'un qui...
07:07Une histoire d'amour fou, quoi.
07:09Alors, notre rédacteur en chef a repéré sur le frigo de l'un de vos personnages
07:16un petit magnète de Jacques Perrin dans Les Demoiselles de Rochefort.
07:20Est-ce que Demi est important pour vous ?
07:22Est-ce qu'il y a un film en particulier que vous aimez ?
07:24Alors, la présence de ce magnète m'a complètement échappé,
07:28mais je suis très heureux qu'elle soit là.
07:30Je remercie le chef décorateur qui l'a disposé.
07:35Oui, Jacques Demi est un cinéaste qui compte beaucoup pour moi
07:40et qui, quelque part, montre que quelque part,
07:43pour être... que ce qui compte au cinéma, c'est le naturalisme des sentiments.
07:48Beaucoup plus que le naturalisme qu'on crée, qu'on parle de naturalisme.
07:53Donc, oui, c'est un cinéaste qui compte énormément,
07:56qui est complètement dans la complexité des sentiments, pour le coup.
08:00Et si j'avais envie de citer un film, peut-être je citerais Une Chambre en Ville
08:04parce qu'il est moins connu, parce que ce n'est pas Michel Legrand qui a fait le film,
08:07mais qui est un film, voilà, que j'aime.
08:09C'est un peu la phase B.
08:10Plus politique aussi.
08:11Et plus politique, tout à fait, plus sombre.
08:16Et qui, en effet, il y a toute une forme de thématique qui s'enchaîne
08:20et avec une certaine forme de rapidité dans les scènes,
08:24dans l'histoire, dans la construction,
08:27une sorte de mélodrame prodigieux et merveilleux.
08:32Est-ce qu'il y a une référence secrète que vous accepteriez de partager sur votre film ?
08:37Je pense qu'il n'y a pas de référence.
08:40Je pense qu'on fait des films parce qu'on aime des films,
08:43on a aimé des films et que je n'ai pas d'idées nouvelles.
08:48Donc, toutes les idées qui sont dans mes films viennent des cinéastes que j'aime
08:53et que je continue de voir.
08:55Donc, elles sont aussi secrètes à moi et en même temps très ouvertes.
08:58Donc, je pense qu'on est des artisans, les cinéastes.
09:03On fait un art folklorique, en plus, dans le sens où ça s'adresse aux gens, au peuple.
09:08Et donc, on reproduit,
09:12mais à travers ce qu'on est, à travers l'interprète que chaque cinéaste, on est.
09:16On reproduit, on tente de reproduire ce qu'on a aimé dans des constructions particulières.
09:22Et parfois, ça vous surprend, vous vous dites, ah tiens, en fait, il y avait un petit film là.
09:25Par exemple, la voix off d'un défunt.
09:29J'ai réalisé que c'était quasiment le cas dans Le ciel peut attendre,
09:33puisque le personnage principal est obligatoire.
09:36Et qui parle au diable, il demande son absolution au diable.
09:40Merci beaucoup, Emmanuel Mouret.
09:42C'est moi qui vous remercie.
09:42Votre film sort au cinéma, Les Trois Amis, le 6 novembre.
09:46Vous restez avec nous parce qu'il y a Philippe qui va nous amener sur le Ring.