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Deux grands quotidiens traditionnellement démocrates, le "Washington Post" et le "Los Angeles Times", ont décidé de ne soutenir aucun candidat. Que se cache-t-il derrière cette neutralité ? Est-ce pénalisant pour Kamala Harris ? La presse a-t-elle encore de l’influence sur une élection ? Décryptage avec le journaliste américain Michael Finnegan.

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00:00En ce jour d'élections aux Etats-Unis, votre invité média, Céline Bay Darcourt,
00:04est un journaliste américain qui va nous éclairer sur la couverture médiatique du
00:08duel Trump-Harris.
00:09Il a suivi six campagnes présidentielles avant d'être correspondant à Paris pour
00:13des journaux américains.
00:14Bonjour Michael Fingen.
00:15Bonjour.
00:16Merci d'être avec nous.
00:17Vous avez travaillé pendant plus de 20 ans au Los Angeles Times, journal pour lequel
00:20vous fournissez toujours des articles mais en indépendant.
00:23Vous écrivez aussi pour le Washington Post et votre profil est particulièrement intéressant
00:26parce que ces deux quotidiens ont décidé, à la surprise générale, de ne soutenir
00:31aucun des deux candidats.
00:32Alors qu'ils avaient appelé à voter démocrate lors des précédentes élections, ça a suscité
00:36beaucoup de réactions indignées de la part de journalistes mais aussi de lecteurs.
00:40Il y a le Washington Post qui est l'un des grands titres de la presse américaine qui
00:44a révélé le scandale du Watergate, le Post a perdu 10% de ses abonnés.
00:48Pourquoi ces deux médias ont-ils fait ce choix ?
00:51On ne sait pas.
00:53Ils disent parce qu'ils voulaient laisser les électeurs décider qui va le soutenir
01:00mais beaucoup de gens se demandent si ce n'était pas plutôt parce que c'est les propriétaires
01:07des deux journaux, ce sont des milliardaires, avec des entreprises qui ont beaucoup d'affaires
01:16devant le gouvernement.
01:17Jeff Bezos notamment pour le Washington Post.
01:20Exactement.
01:21Donc il y a eu la question de, est-ce qu'ils ont eu peur de Trump parce que sinon ça aurait
01:29été naturel pour tous les deux journaux de soutenir Harris normalement.
01:33C'est une tradition aux Etats-Unis pour un journal de prendre parti ?
01:37Oui.
01:38Il y a la salle de rédaction qui fait les reportages, l'actualité mais il y a aussi
01:44une page d'opinion normalement et c'est le propriétaire qui décide qui est là-dedans.
01:50Normalement il y a un conseil éditorial, ce sont des journalistes assez sérieux qui
01:59se débattent entre eux et décident qu'est-ce qui va être la voie du journal sur cette
02:04page d'opinion et normalement ils soutiennent un candidat.
02:08Mais là en 2024 ça n'a plus beaucoup d'importance.
02:14Pourquoi ? Ils s'en fichent les électeurs ?
02:17Les postes moins importants, c'est-à-dire conseillers municipaux par exemple, où les
02:29gens cherchent des opinions des gens qui savent de quoi ils parlent, ça n'a pas vraiment
02:36d'influence.
02:37Les gens savent déjà ce qu'ils vont faire sur la campagne électorale.
02:40En plus ils savent avec des journaux comme ça exactement ce que ça veut dire l'éditorial.
02:47Il n'y a pas d'étonnement là.
02:48Ça veut dire que ce n'est pas un coup dur pour Kamala Harris de ne pas avoir ces soutiens-là ?
02:52Non pas du tout, en fait c'est un peu le contraire, c'est l'ironie de ce coup des deux journaux.
03:00Ça a mis en valeur les peurs, selon le côté démocrate, qu'ont les chefs d'entreprise
03:11de Trump et d'une manière un peu autocratique de gouverner, c'est-à-dire s'ils ont fait
03:18ça par peur, est-ce que les gens doivent se taire avec un nouveau président qui a
03:26des tendances autoritaires ?
03:27Donc on comprend que les journaux américains n'ont plus vraiment d'influence sur les électeurs.
03:31L'influence elle est aujourd'hui sur les réseaux sociaux, sur TikTok notamment ?
03:35Exactement, le média s'est tellement fragmenté et il y a un côté d'âge aussi, c'est-à-dire
03:45au bout, je ne sais pas, les électeurs plus âgés, c'est beaucoup plus traditionnel leur
03:50source d'information, les réseaux sociaux, TikTok, etc., ça a énormément d'influence
03:57sur les électeurs plus jeunes et les gens sont de plus en plus dans leur monde médiatique
04:04et c'est soit démocrate, soit républicain et voilà.
04:09Donc Trump et Harris ont plutôt géré leur com sur leur propre réseau plutôt que d'aller
04:15dans les médias faire des interviews traditionnelles ?
04:18C'est tous les deux et en plus ça se mélange un petit peu.
04:22Par exemple pour Harris, dans les derniers jours de la campagne, elle essaie vraiment
04:29de tirer des républicains qui ont toujours été républicains mais qui n'aiment pas
04:36Trump et qui ne veulent pas le soutenir.
04:38Elle essaie de les convaincre qu'elle est acceptable en tant que présidente et donc
04:47elle a fait par exemple un entretien sur Fox News, le plus grand réseau ou chaîne d'accueil.
04:55Trop Trump !
04:56Oui, c'est très conservateur, un peu comme CNews en France et s'il y a un marché, on
05:03va voir.
05:04Mais voilà, elle essaie.
05:05Il y a aussi l'émergence des podcasts, ils ont joué un rôle très très fort j'ai l'impression
05:10dans cette campagne.
05:11Il y a qu'à mal à Harris qu'on a fait une dizaine, Donald Trump une vingtaine.
05:14Pourquoi ils aiment ce format-là ?
05:16Absolument, parce qu'il y en a qui ont de très grands publics.
05:20Kamala Harris par exemple, elle a fait le podcast Charlemagne the God, il y a des millions
05:27de lecteurs, surtout noirs mais pas seulement noirs.
05:30C'était une façon pour elle de parler directement avec une communauté qui n'est pas forcément
05:36très branchée dans la politique.
05:38Et Trump, il a passé trois heures sur le podcast de Joe Rogan qui est l'un des plus
05:44écoutés de jeunes hommes conservateurs en Amérique.
05:49Vous qui avez fait le parallèle avec CNews en France, on peut vraiment comparer Fox News
05:54et CNews ?
05:55Je crois, oui.
05:57C'est une formule très similaire, absolument.
06:02Parce que quoi ? Chaine d'opinion ?
06:03CNews, je ne suis pas expert, Fox News, je dirais même dans les reportages et actualités,
06:13ça c'est surtout la journée, il y a un côté assez conservateur quand même dans
06:19tous leurs choix éditoriaux, comment ils vont couvrir, ce qu'ils couvrent, etc.
06:25Mais le soir, c'est l'opinion très très conservateur et c'est très très vu.
06:32Il y a des millions de téléspectateurs.
06:35Alors on n'en est pas là encore avec CNews, ce n'est pas des millions de téléspectateurs
06:39mais c'est pour l'instant la première chaîne d'info de France, en tout cas, les chiffres
06:43du mois d'octobre sont tombés hier soir.
06:45Merci beaucoup d'être venu nous éclairer Michael Finnegan.
06:48En correspondant en France du Washington Post et du Los Angeles Times, merci beaucoup.

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