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Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Jeudi 7 novembre 2024 : la chanteuse et dernière compagne de Serge Gainsbourg, Bambou. Après des années de silence, elle publie son autobiographie "Pas à pas dans la nuit" aux éditions XO.

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Transcription
00:00Bonjour Bambou.
00:01Bonjour.
00:02Dès qu'on prononce votre prénom, immédiatement on pense à Serge Gainsbourg et à Lulu, votre
00:06fils né de cette union et histoire d'amour.
00:08Vous avez été effectivement la dernière compagne de Serge et vous êtes donc la mère
00:11de ce petit garçon né en 1986, qui est plus si petit, qui a bien grandi, qui lui a procuré
00:17tant de bonheur, au point d'ailleurs de lui faire oublier son personnage de Gainsbard
00:21et sa maladie.
00:22Gainsbourg vous aimait, vous estimait et vous lui avez vous-même donné beaucoup d'amour,
00:27presque autant que vous en avez manqué, enfant qu'à replacer à l'assistance publique
00:30dès l'âge de 6 mois.
00:32Le 2 mars 1991, Gainsbourg nous quittait, nous symbolise le public, les milliers de
00:38fans, les artistes et vous, Bambou et Lulu, c'était il y a 33 ans, depuis vous n'avez
00:43jamais souhaité occuper le devant de la scène ou raconter cette histoire.
00:47Mais aujourd'hui vous publiez pour la première fois votre autobiographie, Pas à Pas dans
00:50la nuit, aux éditions Ixo, c'est un cri du cœur, une mise à nu sincère, bouleversante,
00:58à titre posthume, vous lui offrez une sublime déclaration d'amour, il vous a sauvé,
01:06les deux hommes de votre vie vous ont sauvé, c'est Lulu et Serge Gainsbourg d'ailleurs,
01:10vous dédiez ce livre à Lulu d'ailleurs.
01:12Pourquoi sortir de ce silence aujourd'hui Bambou ?
01:15Parce que je pense que c'était le moment, je n'aurais pas été capable de sortir il
01:21y a 10 ans.
01:23Et en fait j'étais au téléphone avec Étienne Dao et on parlait et à un moment
01:30il m'a dit mais Bambou écrit, écrit et j'ai réfléchi pendant un mois, un mois
01:36et demi et c'était le bon moment, voilà, et je me suis dit j'ai envie de le faire.
01:43Pour comprendre à quel point la rencontre et la relation avec Serge Gainsbourg étaient
01:47fortes, puissantes, il faut effectivement en savoir plus sur cette personne si discrète
01:52que vous êtes, Bambou, vous êtes née enfant, dans un camp des migrés, dans le Lot-et-Garonne,
02:00à Saint-Livral.
02:01Et vous avez malheureusement été placée l'assistante publique dès vos six mois,
02:07vous démarrez d'ailleurs cet ouvrage avec des barreaux blancs, c'est ce qui va vous
02:11hanter tout au long de votre vie, c'est d'ailleurs un peu le fil rouge de cet ouvrage
02:15finalement, ces barreaux blancs correspondent tout simplement aux barreaux des lits des
02:19enfants de l'assistance publique.
02:22Oui, quand je suis retournée, quand ma mère nous a repris à l'âge de 13 ans, j'ai
02:29compris que je n'avais pas rêvé, ils étaient vraiment là, ces barreaux.
02:34La première chose que le couple d'accueil dit quand vous arrivez, c'est que le colis
02:39est là.
02:40Oui.
02:41Et vous écrivez des choses qui sont extrêmement difficiles, vous dites que pendant 13 années
02:46vous n'auront de cesse de vous voler, de vous salir et de vous détruire.
02:51Je les appelle les ténardiers, c'est vraiment causette, mais tous les enfants qui étaient
03:04placés dans le Morvan, il y a eu une émission sur FR3, les petits Paris, ces enfants de
03:13l'assistance publique placés dans le Morvan.
03:19Et les témoignages, ils racontent ce que je dis dans le livre, voire pire.
03:25Ces gens sont là, ils sont payés pour nous élever, mais ils ont des bonnes gratuites
03:39et ils vous traitent super mal.
03:43C'était un chantage avec la nourriture sans arrêt, j'avais jamais le droit de reprendre
03:51deux fois d'un plat, et ils n'étaient pas très affectueux, ils étaient racistes,
04:08j'étais vraiment leur esclave.
04:12Il est bouleversant ce livre, on se demande même comment vous avez fait pour rester en vie.
04:17Petite fille déjà à 9 ans, vous avez tenté de vous couper les veines, vous le racontez
04:20ça dans les moindres détails, parce que vous vouliez en finir, parce que vous vouliez
04:24ne plus souffrir.
04:25Je voulais que ça s'arrête, c'était… La mort est venue très rapidement dans mes
04:37pensées, à l'âge de 5 ans, j'entendais la Micheline qui passait, et je me disais
04:42avant de m'endormir qu'un jour j'allais me mettre sous les rails, parce que je n'en
04:47pouvais plus, et je savais que ces gens n'étaient pas mes parents, que je ne comprenais pas,
04:56il y avait trop de pourquoi, il n'y avait pas de réponse, jamais de réponse, que des
05:00coups, et la maltraitance sans arrêt, c'est quand vous êtes petit, de se sentir aussi
05:11seule, ce n'est pas facile.
05:14Pendant très longtemps, vous pensiez que vous n'aviez pas de mère, et vous avez
05:17découvert que vous aviez une mère, elle est venue vous rendre visite, vous avez découvert
05:21par la même occasion que vous aviez des sœurs qui habitaient non loin de chez vous, en tout
05:24cas non loin de là où cette famille d'accueil vous avait accueillie.
05:28J'ai un frère, je suis la sixième.
05:31Et vous dites qu'elle avait décidé d'en aimer que deux sur les six, et que vous ne
05:35faisiez pas partie des deux.
05:37Non, elle aimait sur la beauté, si vous n'étiez pas à son goût, elle ne vous aimait pas.
05:47Je sais qu'on parle de la rencontre avec Serge Gainsbourg, ça va révolutionner votre
05:52vie, on ne va pas se mentir, vous êtes mannequin à ce moment-là, vous allez dans une boîte,
05:56vous n'avez pas envie d'y aller, vous n'êtes pas apprêtée d'ailleurs, et votre façon
06:00de vous habiller est toujours systématique, juste corps, un petit peu, un grand talon,
06:06et voilà, vous dansez, le directeur de la boîte vient vous voir, il vous dit il y a
06:11Serge Gainsbourg là-bas qui souhaite…
06:13Je lui ordonne que vous alliez à sa table, et j'ai dit quoi, ce vieux con qui me donne
06:19des ordres, et je continue de danser, puis je retourne à ma table pour partir, et là
06:28je vois Serge avec son seau et sa bouteille de champagne qui vient en direction de ma
06:35table, il pose son seau et il me dit le vieux con vient à ta table espèce de boudin, et
06:40là j'ai éclaté de rire, et lui aussi, ça a commencé comme ça.
06:45Lulu a changé votre vie, il a aussi changé la sienne.
06:48Ah oui, complètement, il m'a dit qu'on n'était pas papa, on devenait papa, et
06:56qu'il était à un âge où il prenait beaucoup plus conscience, il pouvait s'occuper beaucoup
07:06plus d'un enfant que dix ans avant, ou vingt ans en arrière, et Lulu, avec Charlotte,
07:19c'était ses deux rayons de soleil.
07:20Il était très proche de lui, comme Lulu d'ailleurs a toujours eu un instinct incroyable
07:25avec son père.
07:26Oui.
07:27Quand il est décédé, vous vous demandiez comment vous alliez l'annoncer à Lulu ?
07:32Oui, mais je n'ai pas eu à le faire, Lulu l'a dit, papa est mort, voilà.
07:39Et il jouait du piano, il jouait des airs de son père déjà ?
07:41Oui, il jouait ce que son père lui jouait, il la retrouvait à l'oreille pendant que
07:47j'étais rue de Verneuil, toutes les petites chansons de son père.
07:52Lulu, ça a été justement ce qui vous a maintenu en vie.
07:55On dit souvent qu'on reproduit ce qu'on a vécu, enfin, mais vous au contraire, vous
08:03êtes allée totalement à l'inverse, vous lui avez donné tout l'amour qui vous a manqué.
08:07Oui.
08:08C'était important justement d'aller vous recueillir, d'être avec vous-même pour pouvoir
08:14lui consacrer votre vie ?
08:15Oui, et j'ai fait mieux que ça, j'ai été pardonner aux Ténardiers tout le mal qu'ils
08:26m'avaient fait en leur présentant Lulu, et ils n'ont pas compris.
08:31Mais moi, j'avais besoin de le faire pour que Lulu, lui, parte sur des bases où il
08:38n'y avait pas d'histoire derrière.
08:42Est-ce que vous avez pardonné à votre mère ?
08:45Oh, je lui en ai jamais voulu.
08:52C'est incroyable.
08:53Oui, avec son passif à la guerre et tout ça…
09:01La guerre du Vietnam, oui.
09:02Oui, j'ai pensé que tout le monde aurait pu péter les plombs comme elle.

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