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Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Mardi 30 avril 2024 : le membre fondateur du groupe de rock Taxi-Girl, auteur et compositeur, Mirwais. Il vient de publier la première partie d’une autobiographie, "Taxi-Girl 1978-1981" aux Éditions Séguier.

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Musique
Transcription
00:00Bonjour Mirwais. Bonjour. Vous êtes le membre fondateur du groupe Taxi Girl, né à la fin des
00:05années 70, certes, mais vous êtes aussi d'abord un artiste et un musicien qui a su proposer de
00:10nouvelles sonorités, notamment celle de la musique électronique. Quand on parle de vous, Mirwais,
00:14on pense aussi évidemment à votre casquette de producteur d'album devenu légendaire et culte
00:19d'ailleurs pour Madonna. Compositeur aussi, les gens oublient, je suis producteur mais je compose.
00:24Voilà, notamment Music et American Life qui ont relancé la carrière de la Madone. Et comme vous
00:29aimez écrire, vous avez signé Les Tout-Puissants en 2022, votre premier roman. Aujourd'hui, vous
00:33nous offrez un condensé de vous-même et de ce qui vous définit avec un ouvrage qui s'intitule
00:37Taxi Girl 1978-1980 chez Séguier, où l'histoire en coulisse des quatre premières années de ce
00:44groupe considéré comme objet artistique par beaucoup d'artistes majeurs. Et comme le montre
00:50la photo en couverture, Laurence Sinclair, Daniel Dark, Stéphane Erard, Pierre Wolfsomm et vous-même
00:57étiez arrogant, fier, indomptable, déterminé à faire la musique que vous aimiez en vous fichant
01:04de tout. Vous écrivez d'ailleurs dans votre préambule « Nous avions tout pour nous et pourtant
01:10tout nous manquait ». Ça veut dire quoi ? Il nous manquait l'envie de réussir. C'est-à-dire en fait
01:17le tout, on peut considérer que si vous rentrez dans ce genre de métier et que vous n'avez pas
01:23l'envie de réussir, de succéder, comme on dit en anglais, tout nous manque. C'est ça en fait.
01:32C'est étonnant parce que vous racontez donc effectivement les quatre premières années,
01:37celles qui restent le plus en mémoire avec la réaction et la création du groupe. Et le chaos
01:43qui a suivi, notamment le décès de Pierre Wolfsomm, votre batteur, qui a succombé à une overdose
01:48d'héroïne au milieu du festival de votre tube « Cherchez le garçon ». Ce livre est le premier
01:54volet d'une trilogie, je le précise. La drogue était de mise, elle revient régulièrement dans
02:01cet ouvrage, elle est même au cœur de cet ouvrage. Finalement ce groupe, c'est aussi une photo d'une
02:05époque. Exactement, et il y a aussi l'aspect social et politique. Ce qui est drôle d'ailleurs, c'est
02:13que cette période 78, j'irais 77, 81, 82, n'est pas clairement identifiée sociologiquement, alors
02:21qu'en fait elle est très très intéressante, parce que c'est la jeunesse de beaucoup de choses.
02:23Ensuite dans le livre, en filigrane, je parle de la guerre d'Afghanistan, parce que je suis moitié
02:28afghan par mon père et j'ai vécu là-bas. Et on a changé de monde en fait, à ce moment-là. C'est-à-dire
02:33en 78, quand on a sorti en 1980, donc « Mannequin », notre premier single avec « Taxi Girl », guerre
02:41d'Afghanistan. Bon, moi je suis devenu réfugié politique à l'époque, je ne pouvais pas faire
02:44autrement. Ensuite, Reagan est arrivé. Parce qu'aujourd'hui, beaucoup de gens disent « Oui,
02:52il y a le monde d'avant, le monde digital ». C'est-à-dire là, il y a eu le même type de basculement
02:57qui était plus politique. Et donc cette période est très intéressante, pré-Reagan, pré-guerre
03:05d'Afghanistan. Vous précisez ça à chaque fois. Vous remettez dans le contexte effectivement tous
03:11ces conflits qui étaient déjà au centre effectivement du jeu, parce que c'est de ça qu'il s'agissait.
03:17Et de cette envie, finalement, que vous aviez dès l'âge de 12 ans de fonder un groupe, parce que
03:21justement, vous aviez besoin de sortir de ça. – J'avais besoin. Parce qu'en fait, mon histoire n'est pas
03:25très commune. J'ai vécu en Afghanistan. Je suis né en Suisse. Enfin, c'est compliqué. Ma mère était italienne.
03:31Et j'ai vécu jusqu'à l'âge de 6 ans en Afghanistan. Et après, mon père travaillait pour le gouvernement.
03:35Et il était nommé pour une mission. Et puis finalement, on n'est pas retourné en Afghanistan.
03:39Tant mieux, d'ailleurs. Mais on n'était que 4 de notre famille directe. Donc il fallait se retrouver une famille, quoi.
03:46C'est-à-dire que ce n'était pas suffisant. Et moi, j'ai flashé sur la musique. J'avais besoin.
03:51Parce qu'il y avait beaucoup... Bon, on avait des problèmes comme toutes les familles.
03:53Je n'ai pas envie de m'appeler... C'est pas non plus Cosette, l'histoire. C'est-à-dire qu'on avait des problèmes.
03:58Et il fallait que je trouve quelque chose. Et la guitare est arrivée et la musique.
04:03Est-ce que le fait d'écrire « Mirouez », ce livre, ne vous permet pas finalement de dégommer un peu la tristesse
04:10que vous avez gardée en vous pendant très longtemps ?
04:12La colère, justement. Justement, on en revient à la dépression. C'est que je pense que « Taxidermy » était une dépression.
04:20D'abord, une dépression de l'époque, que nous avons tournée contre nous. Et on a ressorti ça sous forme musicale.
04:26Et ensuite, c'est devenu dans la deuxième partie une pure dépression, parce qu'on s'est fait avoir...
04:32Alors, l'argent, tout ça, bien sûr, tout le monde se fait avoir une fois ou deux dans la vie. C'est pas le problème.
04:38C'est qu'il y a eu quelque chose de très intéressant. C'est qu'on a retourné notre colère contre nous-mêmes sous forme de répression.
04:44Mais là, parce qu'on s'est fait avoir. Sur un quatrième de coup, il y a marqué « On se laissait pas faire ».
04:52Et non, on s'est pas du tout laissé faire, ni politiquement, ni socialement, ni émotionnellement.
05:00Mais sur le plan de l'argent... Et l'argent n'est pas l'argent pour moi. C'est-à-dire que ça a été un circuit malsain pour nous,
05:09c'est-à-dire de se faire déposséder. Voilà. C'est ça. Moi, je parle de dépossession.

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