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Jérémie Beyou, " Jérém’ ", comme l’appellent ses proches, a reçu à bord le JDD pour évoquer ses ambitions, la violence des océans et la séparation avec sa famille durant le Vendée Globe.
Transcription
00:00On dit souvent qu'une fois qu'on est au caport, on rentre vers la maison et on a l'impression que la course est quasiment finie,
00:05mais néanmoins il reste quand même quasiment un mois de course.
00:16Je suis heureux, j'ai de la chance. J'ai de la chance d'avoir ce super beau bateau Charal 2 entre les mains,
00:21d'avoir eu du temps pour le préparer, d'avoir eu du temps pour le tester,
00:24d'avoir une équipe avec des super techniciens qui me peaufinent ça au millimètre.
00:27La chance d'avoir mon partenaire Charal qui me suit dans toutes mes aventures
00:30et la chance aussi d'avoir ma famille qui me soutient au quotidien.
00:33On a un super beau plateau, 40 bateaux au départ, 10 ou 15 bateaux qui sont archi prêts, archi compétitifs
00:39et qui peuvent prétendre à la victoire.
00:41Une super course qui se profite devant moi. Il faut en profiter.
00:48Il faut se constituer une équipe d'abord et driver une équipe pour préparer le bateau techniquement,
00:53le concevoir, le construire, puis le faire évoluer, optimiser.
00:56Donc c'est des techniciens, des ingénieurs.
00:58Mais c'est aussi toute la partie logistique, c'est aussi toute la partie administrative.
01:01Et donc forcément je ne peux pas faire ça tout seul.
01:03Donc voilà, il faut être capable de préparer ça en équipe, de donner des consignes au clair,
01:08de donner les ressources et le temps aux différents intervenants pour que le travail soit bien fait.
01:13Et puis tout d'un coup, il faut changer de casquette et passer dans la tête du sportif solitaire
01:17qui est un exercice quand même un petit peu égoïste.
01:19C'est jamais très simple de passer de l'un à l'autre dans une préparation de Vendée Globe.
01:23Mais jamais perdre de vue qu'à la fin c'est un bonhomme tout seul sur le bateau
01:27et qu'on fait tout ça, pour ça, en équipe, pour une seule personne et un seul bateau.
01:34La préparation physique c'est devenu quelque chose de classique et de quotidien.
01:37Dès que le bateau navigue, c'est-à-dire beaucoup,
01:40parce que j'ai fait quand même toutes les courses d'avant-saison et beaucoup d'entraînement sur l'eau,
01:44la prépa physique à terre est assez légère et c'est essentiellement la récup'.
01:47Par contre pendant toutes les périodes de chantier,
01:49effectivement c'est 3-4 jours de sport en salle ou en extérieur par semaine
01:53avec un coach qui me drive là-dedans.
01:55Donc je suis bien mais je ne suis pas non plus un monstre athlétique.
01:58L'idée c'est vraiment d'avoir un petit peu de masse et un petit peu de cardio
02:01pour pouvoir enchaîner les manœuvres qui peuvent être assez lourdes en termes de charge rapidement
02:05et surtout sans se blesser en fait.
02:06C'est vraiment la clé.
02:07Avoir une blessure musculaire pendant un Vendée Globe, ça serait vraiment trop bête.
02:11On peut tellement se faire mal par ailleurs en se cognant, en tombant,
02:14en attrapant des maladies de peau avec les frottements, avec le sel et tout
02:17que les blessures musculaires il faut vraiment les éviter.
02:19Donc la préparation physique elle est là aussi pour éviter ça.
02:21La prépa physique je pense que tout le monde s'y astreint.
02:24La prépa mentale c'est les choix personnels.
02:26Moi j'ai beaucoup travaillé avant le précédent Vendée,
02:28un petit peu moins sur celui-ci parce qu'il y a eu beaucoup plus de navigation
02:31et que je pense avoir moins besoin de m'y consacrer.
02:34Mais je travaille avec un préparateur mental que je peux appeler au besoin,
02:37alors pas en course mais dans la préparation avant le départ
02:40pour avoir des petites méthodes et avoir des discussions.
02:43C'est un sport de résistance et c'est 3 mois de compétition
02:45donc dans la tête il faut quand même être bien.
02:51C'est sûr que les impacts du bateau sur la mer sont violents.
02:53Le marin peut vite se faire désarçonner et puis se faire très mal.
02:57Dans la conception du bateau en fait nous on a essayé de faire un espace très réduit
03:00de manière à ne pas avoir beaucoup à bouger dans le bateau pour aller manœuvrer.
03:05Donc ça, ça évite de tomber de trop haut, de trop loin.
03:08Après oui il peut y avoir des protections, des genouillères, des casques
03:11mais c'est sûr que se balader en casque pendant 3 mois, jour et nuit, c'est un peu compliqué.
03:16Donc il faut avoir la lucidité de le mettre quand c'est vraiment très chaud.
03:19Et pour avoir la lucidité de le mettre, il faut être reposé.
03:21Donc vraiment pour moi, les deux clés de la sécurité à bord,
03:25c'est bien connaître son bateau et bien se connaître soi-même
03:27pour arriver à rester lucide et savoir à quel moment il faut se protéger.
03:35Ce qui freine, la vitesse d'un objet, c'est sa traînée en fait.
03:37Et donc pour un bateau, c'est la surface de la coque ou des différents appendices
03:41qui va frotter sur l'eau et qui vont freiner sa progression.
03:44Donc en fait, on essaie de mettre la coque au-dessus de l'eau
03:47pour éviter d'avoir le maximum de surface de frottement et de traînée.
03:50Et pour ça en fait, on vient mettre des petites ailes comme des petites ailes d'avion
03:54dessous le bateau et avec la vitesse en fait, les ailes vont porter
03:57et puis le bateau va se retrouver au-dessus de l'eau et il va pouvoir avancer plus vite.
04:00Donc effectivement, par moment, on va 2, quasiment 3 fois même plus vite que le vent
04:04et c'est absolument génial d'évoluer sur ces bateaux-là.
04:10C'est le parcours le plus simple. On part des Sables d'Olonne, on revient aux Sables d'Olonne.
04:13Mais c'est le plus compliqué parce qu'on traverse tous les océans de la planète.
04:16Donc d'abord, la descente de l'Atlantique, Atlantique Nord, passage du Poteau Noir
04:19avec les convergences intertropicales.
04:23Les phénomènes qui tournent dans un sens dans l'hémisphère Nord
04:25et dans l'autre sens dans l'hémisphère Sud. Et au milieu, c'est un peu le bazar.
04:28L'Atlantique Sud et après, on attaque le Grand Sud, on fait le tour de l'Antarctique.
04:32On traverse d'abord l'océan Indien et l'océan Pacifique.
04:35Ça sera l'été là-bas, mais comme on est très Sud, c'est assez violent en termes de force de vent.
04:39Le bout du tunnel, c'est le Cap Horn. Une fois qu'on le laisse à bas bord,
04:42on fait route vers la maison. On dit souvent qu'une fois qu'on est au Cap Horn,
04:45on rentre vers la maison et on a l'impression que la course est quasiment finie.
04:48Mais néanmoins, il reste quand même quasiment un mois de course.
04:51Après le Cap Horn, c'est encore très long et la remontée notamment de l'Atlantique Sud
04:55le long de l'Argentine et du Brésil est très compliquée en termes de météo.
04:58Ce qui fait que jusqu'au bout, tout peut ne pas être joué.
05:03Compliqué de dire, c'est vraiment les conditions météo qui font le temps de course.
05:07Ce que je sais, c'est qu'en 2016, j'ai mis 78 jours à la troisième place,
05:10Armège 74 à la première. Si on a les mêmes conditions,
05:13ça sera forcément plus proche des 70 que des 74.

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