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Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour. Aujourd'hui, il est question du procès Pierre Palmade et cette question centrale : que dit le droit sur le statut de « l’enfant à naître » ?

Pour rappel, il y a près de deux ans, l'humoriste avait provoqué un accident qui a fait trois blessés graves d’une même famille : un homme de 38 ans, son fils de six ans et sa belle-sœur de 27 ans, qui a perdu après le choc le bébé qu’elle attendait.
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Transcription
00:00Europe 1 Soir, 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:04Et avant d'accueillir Catherine et Olivier d'Artigolles dans ce studio qui vont commenter l'actualité avec moi,
00:09j'invite Sophie Parricard, bonsoir.
00:12Bonsoir.
00:13Merci d'être en ligne avec nous sur Europe 1 en direct.
00:15Vous êtes professeure des universités en droit privé et sciences criminelles,
00:19spécialiste du droit de la famille et des personnes.
00:21Vous êtes membre de la chaire UNESCO Éthique, Science et Société.
00:25Le statut de l'enfant à naître est au cœur du procès Pierre Palmade.
00:30Je vous signale par la même occasion que les plaidoiries de la défense viennent d'avoir lieu,
00:34que les jurés sont partis en délibéré et que Pierre Palmade,
00:38qui s'est vu requérir 5 ans de prison, dont 2 fermes avec mandats de dépôt différés,
00:42sera donc présenté à un juge de la liberté et de la détention qui va donc statuer sur la peine de prison ferme.
00:51Je vous disais, Sophie Parricard, que le statut de l'enfant à naître est à nouveau au cœur de ce procès
00:56et se pose à nouveau cette question parce que ce n'est pas la première fois que dans un procès se pose cette question.
01:01Un bébé, et je vous pose la question, un bébé en parfaite santé dans le ventre de sa mère,
01:06n'est donc pas considéré comme une personne une fois qu'il ne vit plus ?
01:10C'est ça, c'est-à-dire qu'un enfant, tant qu'il n'est pas né vivant, n'est pas une personne pour le droit.
01:17Pourquoi ?
01:19Alors, ce n'est pas une personne pour le droit parce qu'il faut bien distinguer,
01:25qu'il y a une grande distinction en droit entre la personne et la chose.
01:30Et tout ce qui n'est pas une personne est une chose.
01:33Et la personne est toute personne humaine vivante.
01:37Donc toute personne humaine vivante est protégée par les valeurs du code pénal et notamment par l'incrimination d'homicide.
01:48Mais dès lors qu'un fœtus n'est pas né vivant, il ne fait pas partie de la catégorie des personnes humaines.
01:54C'est un fœtus au cœur des entrailles de sa mère et qui est protégé uniquement par le biais de sa mère.
02:00Donc cet enfant, si par exemple il vivait encore quand on l'a sorti du ventre de sa mère,
02:06puisque cette personne dans cet accident a eu une césarienne,
02:10si son cœur battait encore alors qu'on le sortait par la césarienne,
02:15il aurait été considéré comme une personne et non pas comme une chose.
02:18Tout à fait. Il suffit de n'être vivant pour être considéré comme une personne.
02:24Mais quand un fœtus est extrait par césarienne et n'a pas vécu, il n'est pas considéré comme une personne humaine.
02:31Et la jurisprudence a toujours été constante là-dessus ?
02:34La jurisprudence a toujours été constante sur ce point.
02:37La cour de cassation l'a réaffirmé à plusieurs reprises.
02:41Mais par exemple, dans un arrêt de la cour de cassation, l'enfant est né à respirer quelques secondes
02:48et donc le geste fatal, en l'espèce c'était d'un médecin, a pu être qualifié d'homicide involontaire.
02:57Mais on a déjà eu une espèce semblable à l'affaire Palmade,
03:01et la cour de cassation a été très claire puisque l'enfant n'était pas né vivant,
03:06il n'est pas considéré comme une personne humaine,
03:09et donc n'est pas susceptible d'être protégé par l'incrimination d'homicide.
03:13Question pour vous de Catherine Ney.
03:15Oui, il y a une loi qui a été votée en juillet 21 qui permet aux familles qui ont eu un enfant mort-né
03:22de pouvoir l'inscrire sur leur livret de famille et même lui donner un nom et une sépulture.
03:31C'est bien que la loi veut bien reconnaître que ce n'est pas seulement une chose.
03:36Alors c'est différent, c'est ce qu'on appelle une sorte de loi compassionnelle,
03:42c'est-à-dire que c'est une loi qui permet de prendre en charge la douleur des parents
03:47à travers l'acte d'enfant sans vie où effectivement on peut lui donner un nom, un prénom
03:52et même aujourd'hui une filiation, mais la loi prévoit que cela n'a pas d'effet juridique.
03:58C'est-à-dire que ça ne lui confère pas le statut de personne.
04:02Oui, c'est terrible à dire mais c'est une sorte de lot de consolation pour les parents.
04:06Oui, c'est un peu ça. C'est une loi compassionnelle qui prend en charge la douleur
04:10mais qui finalement n'a pas d'effet juridique.
04:13Et pour enlever aussi un poids aux enfants à venir de ne pas être des enfants de remplacement.
04:19Oui, c'est ça aussi. C'est une loi qui a un effet psychologique et on peut quand même le saluer
04:25mais qui n'a pas d'effet juridique.
04:27Sur le fait que l'enfant n'est pas considéré comme une personne dès lors qu'il est mort in utero,
04:36est-ce que ça a un lien avec deux choses qui sont l'IVG et l'IMG qui est l'interruption médicale de grossesse ?
04:44Ça a un lien bien sûr dans la mesure où l'IVG ne peut être mise en place
04:53que parce que l'enfant n'est pas considéré comme une personne.
04:57Mais c'est totalement quand même...
05:00Alors ça a un lien mais ça n'est pas causé par la législation sur l'IVG
05:04parce qu'on pourrait très bien prévoir que l'enfant sera une personne et prévoir des exceptions.
05:10Et donc que la femme puisse avorter dans des conditions prévues par la loi.
05:16Donc ça n'est pas vraiment la législation sur l'IVG qui empêche la qualification de personne humaine.
05:22D'accord, ça avait le mérite d'être précisé.
05:25Il est 19h25, je sais que vous devez nous quitter Sophie Parricard.
05:29Merci beaucoup d'avoir passé quelques minutes en direct pour nous éclaircir sur ce point de droit qui est fondamental dans cette affaire.
05:35Merci beaucoup à vous madame.
05:3719h25, on continue la suite des programmes avec Catherine et Olivier d'Artigolles.
05:41Tout va bien, on est sur Europe 1.

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