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00:00D'ici matin, actus locaux, musique et bonne humeur.
00:04Il est très exactement 8h15, est-ce qu'on en fait assez face aux violences faites aux femmes,
00:09face aux violences conjugales, c'est la question que l'on vous pose ce matin ici.
00:12Car avec l'invité d'ici matin, Flora, on parle du rapport rendu public cette semaine
00:16par la préfecture du territoire de Belfort et le tribunal de Belfort sur le sujet.
00:20Oui, témoignez, on vous attend au standard pour réagir sur le sujet 03-84-22-82-82.
00:26Bonjour Jessica Van Der Scher.
00:28Bonjour.
00:28Vous êtes la procureure de la République de Belfort.
00:30Ce rapport est le fruit de votre travail mené main dans la main avec la préfecture.
00:35Comment est-ce que vous avez travaillé ?
00:37C'est un travail collaboratif de l'ensemble des acteurs du département,
00:40que ce soit les forces de sécurité intérieure, policiers et gendarmes,
00:44les associations, l'ensemble des services de l'État et du tribunal,
00:47que ce soit les procureurs, les délégués du procureur et les juges, bien entendu.
00:51Ce rapport, qu'est-ce qu'il faut en retenir ?
00:54Alors, je dirais, la bonne nouvelle en quelque sorte,
00:56c'est que nous observons une stagnation de la délinquance des violences conjugales.
01:01C'est-à-dire que les dernières années, vous aviez une augmentation.
01:04Et on rattrapait ce qu'on appelle le chiffre noir de la délinquance,
01:07c'est-à-dire que de nombreuses victimes n'osaient pas porter plainte
01:10et ne franchissaient jamais la porte d'un commissariat ou d'une gendarmerie.
01:13Et on observe cette année une stagnation et une légère baisse des violences conjugales,
01:17des plaintes qui ont été réceptionnées.
01:19Ce qui veut dire que les gens portent plainte,
01:21que les voisins appellent les gendarmes et les policiers
01:23lorsqu'il y a des cris, lorsqu'ils constatent des bleus chez une femme.
01:27Et ça, je dirais que c'est une bonne nouvelle,
01:30parce que les gens ne doivent plus avoir peur de venir déposer plainte
01:33pour qu'on puisse justement agir pour protéger les victimes et sanctionner les auteurs.
01:37À quoi est-ce qu'on la doit, du coup, cette amélioration ?
01:40Alors, il y a une campagne nationale de communication qui a été faite,
01:44à toutes les actions aussi qui sont mises en œuvre.
01:46Et je dirais que sur le département de Belfort, si vous venez porter plainte,
01:49nous avons les moyens de réagir très efficacement.
01:52Et bien souvent, le mis en cause est placé en garde à vue quasi immédiatement.
01:57Plus de faits rapportés, ça veut donc dire qu'il y a une certaine confiance établie
02:01qui permet aux victimes de se rapprocher des forces de l'ordre.
02:04Il y a eu des formations pour les agents ?
02:06Oui, alors nous avons fait des formations,
02:08et nous avons fait des formations aussi de l'ensemble des acteurs communs,
02:13c'est-à-dire les avocats, les forces de l'ordre, les associations,
02:17la pénitentiaire, les magistrats,
02:18pour que nous ayons tous aussi les mêmes indicateurs de danger
02:22par rapport à la victime ou par rapport à l'auteur.
02:25Et est-ce que vous garantissez aussi, en plus, depuis cette année,
02:30une protection des victimes ?
02:32Parce que ça, c'est important aussi,
02:33c'est ce qui fait craindre de franchir le pas d'en parler.
02:36Alors, nous avons plusieurs dispositifs qui sont mis en place
02:39justement pour mettre à l'abri les victimes.
02:41Je dirais que la première mesure importante,
02:44c'est de dire aussi que c'est la victime qui va rester dans le domicile conjugal,
02:47notamment quand il y a des enfants,
02:49parce que nous travaillons avec l'armée du salut
02:51et nous avons la possibilité d'extraire le conjoint violent
02:55et de le faire héberger à l'armée du salut avec un suivi psychologique.
02:58Donc c'est bien le conjoint victime et les enfants
03:01qui restent dans le domicile et qui ne sont pas obligés de partir.
03:04Pour les victimes qui souhaiteraient partir
03:06et qui n'ont pas les moyens,
03:08parce que des fois on a cette question financière aussi,
03:10il y a la caisse d'allocations familiales
03:12qui met en place une aide universelle d'urgence
03:14sous condition de ressources
03:15et les gens peuvent obtenir une somme
03:17qui leur permet de payer un loyer, un hôtel, quelque temps ailleurs.
03:21Nous avons aussi un transport qui est mis en place
03:23avec une association, l'UDPS,
03:25pour emmener les victimes à l'hôpital Nord-Franche-Comté,
03:28par exemple, pour faire un certificat médical,
03:30parce que ça peut aussi être compliqué de se déplacer
03:32si on n'a pas de moyens de locomotion.
03:34Voilà, donc nous avons quand même un ensemble de dispositifs
03:37très importants pour accompagner les victimes.
03:40Et c'est important de le rappeler,
03:41la confidentialité est absolue.
03:43Oui, la confidentialité est absolue, bien entendu.
03:45Nos auditeurs, nos téléspectateurs
03:47ont la parole tous les matins.
03:49Je vous propose de lire le témoignage de Jocelyne
03:51sur nos réseaux sociaux.
03:53On a demandé à nos auditeurs
03:55s'ils estimaient qu'on en faisait assez
03:57contre ces violences-là.
03:58Elle nous écrit
03:59« Malheureusement, pas assez.
04:00On ne prend pas les plaintes en considération assez souvent.
04:02Quand elles sont retenues,
04:04les peines du conjoint sont légères. »
04:06C'est vrai que beaucoup de gens disent ça.
04:09Ils ont l'impression que les peines sont légères.
04:11Qu'est-ce que vous répondez ?
04:12Je dirais aussi qu'en matière de violences conjugales,
04:15comme pour tous les autres délits ou les crimes,
04:17il y a aussi un principe de présomption d'innocence.
04:19Et nous, nous enquêtons avec les policiers et les gendarmes
04:22mais nous ne pouvons pas nous contenter de parole contre parole.
04:24Et donc il nous faut des témoignages, des SMS,
04:27des vidéos-surveillance.
04:29Et nous allons chercher.
04:30Les téléphones sont notamment une mine d'informations
04:32dans laquelle nous obtenons un certain nombre de preuves.
04:34Lorsque nous avons la conviction et la certitude
04:37qu'il y a bien eu des faits de violence
04:39que ce soit une violence physique avec des coups
04:41ou une violence psychologique
04:42parce que ce sont ces faits-là aussi qui sont réprimés,
04:45les insultes, les paroles dégradantes,
04:49fouiller dans le téléphone portable de son conjoint,
04:52interdire à son conjoint de rencontrer des gens,
04:54de sortir, de faire ce qu'il veut,
04:55ça ce sont ce qu'on appelle des violences psychologiques.
04:57Et donc quand nous avons la certitude
04:59qu'il y a bien eu une infraction commise,
05:01nous utilisons toute la palette de l'arsenal répressif.
05:05Lorsque les faits sont graves
05:06ou que l'auteur est un récidiviste,
05:08nous avons la comparution immédiate
05:10et il est jugé immédiatement après sa garde à vue
05:12et nous demandons aussi des peines d'emprisonnement.
05:14Lorsque nous sommes sur des faits de moindre gravité,
05:17parce que nous avons aussi ça dans les violences conjugales,
05:20une gifle, une bousculade ou les insultes simplement,
05:23nous utilisons de l'autre côté des stages
05:26qui permettent, avec pédagogie,
05:28d'amener les gens à se poser des questions
05:29sur comment je communique au sein de mon couple
05:31et comment je n'en arrive pas à cette explosion de violence.
05:34Jessica Van Der Scher, je vous propose d'écouter maintenant
05:36le témoignage de Valentin Belfortin de 19 ans.
05:38Il est étudiant en école de cinéma
05:40et il a participé hier au quiz-débat
05:42organisé par l'Info Jeune de Belfort
05:44sur les violences sexistes et sexuelles.
05:47Écoutez son témoignage.
05:48On ne normalise pas encore aujourd'hui
05:50le fait que ça peut arriver aussi à des hommes.
05:52J'ai subi un viol.
05:53J'avais 14 ans.
05:55Ça a été jusqu'en justice,
05:57parce qu'il n'y a pas eu que moi dans l'affaire.
05:58Le fait que ça aboutisse à quelque chose,
06:01on se dit qu'on n'a pas parlé pour rien.
06:03Par rapport à ça,
06:04est-ce qu'ils prennent vraiment le temps pour chaque
06:06d'aboutir à quelque chose ?
06:08Voilà, témoignage fort de Valentin.
06:10Jessica Van Der Scher,
06:12est-ce qu'on passe un peu à la trappe
06:14les violences faites aux hommes ?
06:15Non, absolument pas.
06:17J'ai toujours dit que les femmes
06:19pouvaient aussi être violentes.
06:21Il est vrai que nous avons une majorité d'auteurs
06:23qui sont des hommes,
06:24mais nous avons aussi, et de plus en plus,
06:26des femmes qui sont auteurs.
06:27Et nous les poursuivons de la même façon.
06:29Hier, j'ai animé un stage
06:31de communication conjugale
06:33avec des personnes qui étaient mises en cause
06:34pour des faits de violences conjugales.
06:36Et il y avait trois femmes parmi ce stage.
06:38Sur France Bleu, cette semaine,
06:40on a parlé de ce Belfortin de 18 ans,
06:41condamné à deux ans de prison ferme,
06:43reconnu coupable d'avoir frappé sa petite amie
06:45de 14 ans à plusieurs reprises.
06:47Ces violences, on l'oublie peut-être parfois,
06:48mais peuvent aussi concerner les jeunes,
06:50très jeunes, malheureusement.
06:51Et là, il y a tout un travail à faire.
06:53Alors là, nous allons faire tout un travail,
06:55notamment en 2025, avec la préfecture
06:57et avec l'ensemble des partenaires du département.
06:59Je dis toujours que le meilleur moyen
07:01de lutter contre la délinquance, c'est de la prévenir.
07:03Et le meilleur moyen de la prévenir,
07:05c'est de renforcer l'éducation.
07:06Et nous ambitionnons d'avoir un programme
07:08à déployer à destination des collégiens
07:11et des lycéens, comme ça s'est fait
07:12sur la prévention routière.
07:14Si nous avions exactement le même nombre
07:16d'actions de prévention des violences conjugales
07:18et des violences sexistes
07:20que nous avons d'actions pour lutter
07:21contre les morts sur la route,
07:22nous aurions un résultat plus important.
07:24Et vous avez un dispositif innovant
07:26et unique en France,
07:27qui est porté par Solidarité Femme,
07:29les couloirs de la violence amoureuse,
07:31qui est importé du Québec,
07:33qui a été déployé avec des Québécois
07:35l'année dernière.
07:36Et nous avons très rapidement
07:38reproduit le dispositif,
07:39trouvé les financements,
07:41monté les vidéos.
07:42Et ce nouveau projet,
07:44les couloirs de la violence amoureuse,
07:45va être diffusé dans les collèges
07:47l'année prochaine.
07:48Merci Jessica Van Der Scher.
07:49Vous êtes la procureure de la République de Belfort.
07:52Merci d'être intervenue dans nos studios ce matin.
07:54Bonne journée.
07:55Merci, bonne journée.