C'EST MON MÉTIER. Son métier à lui, c'est luthier. Ils ne sont plus que 12 en France à fabriquer des luths et des guitares anciennes, et Alex-Théo est le plus jeune d'entre eux. On l'a rencontré dans son atelier au fin fond de la forêt de Brocéliande.
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00:00Oui, je suis passé. T'as eu peur ?
00:07Oui, grave. Ça me stresse.
00:10Voilà, tu vois, tout lentement, on vient sortir le moule.
00:18Ça y est, le bébé est né, comme on dit. Il vient de sortir.
00:22Et du coup, on va se retrouver comme ça, avec du coup la caisse et la table.
00:28Je m'appelle Alex Théo, j'ai 25 ans et je suis luthier.
00:39On est 12 luthiers en France à faire des luttes et des guitares anciennes.
00:43J'ai fait une Terminal S, comme je pense beaucoup de gens qui ont des trop mauvaises notes au lycée.
00:49Sauf que je ne savais pas du tout ce que je voulais faire au niveau professionnel.
00:52Et c'est vraiment grâce à mes parents et ma reine qui m'ont fait découvrir la musique ancienne, la lutherie, tout ce monde-là.
00:59Je suis un fils d'ingénieur, pour qui les études c'est important.
01:02Travailler de ses mains quand on est intelligent, pour lui, ce n'était pas forcément la chose à faire.
01:07Il vient d'une famille ouvrière espagnole immigrée.
01:10Et dans l'éducation qu'il a reçue, on lui a vraiment inculqué qu'il faut absolument faire des études supérieures
01:15les plus dures, les plus passives possibles, pour juste grimper l'échelle sociale.
01:19Je pense que sa génération aussi, ça se comprend complètement.
01:22Assez rapidement, il s'est aussi mis à me soutenir énormément.
01:24Quand il a vraiment vu que ce n'était pas, on va dire, une lubie d'adolescent.
01:28Mais que c'était vraiment mon projet.
01:30Aujourd'hui, il est très fier de moi, vraiment.
01:32Et il me le dit régulièrement.
01:36Je n'avais aucune expérience dans le travail manuel.
01:38Je ne savais même pas monter un meublika, c'est vraiment vous dire.
01:41Je me souviens encore très bien, quand je commençais à mettre les cordes
01:44et que je commençais à entendre les premières notes.
01:46Il y avait quelque chose d'assez magique là-dedans.
01:48Vraiment, je me souviens de l'association que j'avais,
01:50de voir qu'en partant finalement de planches de bois,
01:52on va dire, avec un oeil très amateur,
01:54en les assemblant, en travaillant dessus,
01:56on finit par avoir quelque chose qui fait de la musique,
01:58qui chante, quoi.
02:00Et c'est ça, vraiment, qui m'avait beaucoup ému.
02:02J'avais même beaucoup pleuré, quoi.
02:03Cette émotion-là, je la retrouve presque intacte,
02:05si j'ose dire,
02:07à chaque fois que je corde un instrument, en fait.
02:10Je suis en train de faire ce qu'on appelle une caisse.
02:12C'est une caisse de luttes.
02:14En l'occurrence, ça, c'est un lutte Renaissance.
02:17Qui est-ce qui te l'a commandé, ce lutte, du coup ?
02:19Ça, c'est un jeune musicien qui s'appelle Sylvain Royer.
02:22Et là, il voulait se faire plaisir.
02:23Il voulait son premier lutte de concert.
02:25Il voulait absolument un lutte en érable et en noyé bicolore.
02:27Ça coûte combien, un instrument comme ça ?
02:29Alors, moi, je pratique des tarifs qui sont très bas.
02:32On ne va pas se mentir.
02:33Parce que je suis quand même un jeune luttier.
02:35Je vais y passer sur papier 200 heures.
02:38Dans la réalité, un petit peu plus.
02:40Parce qu'il y a forcément, quand on fait des étapes,
02:42quelque chose qui n'est pas parfait, qui ne va pas, qu'on doit recommencer.
02:44Tu sculptes toi-même tout ce dessin-là, ou ce qu'on appelle ?
02:46Voilà, tout à fait.
02:47C'est ouf !
02:48Ça, c'est fait main.
02:49Et il faut compter à peu près 50 heures de travail,
02:52juste, seulement sur la rose.
02:55Il n'y a pas un instrument qui sonne de la même manière.
02:57Vraiment.
02:58C'est fou.
02:59C'est fou.
03:00C'est fou.
03:01C'est fou.
03:02C'est fou.
03:03C'est fou.
03:05Tout le bois est unique.
03:06Le bois qui est ici, ne se comporte pas de la même manière qu'il est ici.
03:08Tout notre travail en tant que luttier, c'est de réussir à s'adapter précisément au bois qu'on a dans les mains.
03:12Il y a peu de mots pour décrire ça.
03:13C'est vraiment l'expérience, ce qu'on sent...
03:16Ce qu'on sent quand on touche la table.
03:18On peut aussi essayer d'écouter les modes vibratoires de la table.
03:24On essaie de sentir si on sent un son qui est sec, qui est rond...
03:27C'est vivant, pour toi, un instrument ?
03:28Ah oui, complètement.
03:29Moi, je traite un instrument comme un être vivant.
03:32T'es musicien au départ, ou pas du tout ?
03:33du tout. Alors j'ai vraiment pas du tout un parcours de musicien. La seule pratique
03:36sérieuse on va dire musicale que j'ai c'est par le chant mais je suis pas du
03:40tout un instrumentiste quoi. J'adore la musique et en fait j'ai découvert que
03:44j'adorais aussi le travail du bois et le mélange des deux étant la luterie c'est
03:48vraiment c'est parfait quoi. C'est là où c'est le croisement juste entre ces
03:53deux mondes là et c'est là où je me sens à ma place. C'est ça qui est beau
03:56quand on a un métier passion comme moi c'est qu'on travaille jamais. On aime
03:59tellement ce qu'on fait que même si je gagnais au loto mes
04:04journées seraient identiques. Je passerais mon temps à l'atelier à faire des
04:07instruments parce que j'adore ça. Tant que mes mains sont capables de
04:10travailler je travaillerais et j'essaierais de faire le maximum d'instruments
04:14dans le temps apparti.