"Ce qui me fait me sentir le plus handicapée, c'est l'environnement qui n'est pas adapté."
Depuis 2018, Virginie se déplace en fauteuil roulant. Vélos ou poubelles au milieu des trottoirs, commerces non adaptés, rues pavées…On l'a suivie sur un trajet jusqu'à la supérette, à une rue de chez elle. Un trajet du quotidien semé d'embûches. Se déplacer en fauteuil à Paris, ça ressemble à ça.
Depuis 2018, Virginie se déplace en fauteuil roulant. Vélos ou poubelles au milieu des trottoirs, commerces non adaptés, rues pavées…On l'a suivie sur un trajet jusqu'à la supérette, à une rue de chez elle. Un trajet du quotidien semé d'embûches. Se déplacer en fauteuil à Paris, ça ressemble à ça.
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00:00Voilà, le quotidien, c'est les crottes de chien sur le trottoir.
00:03Si je roule dedans, je vais directement dans mon appartement.
00:08Comment je fais pour nettoyer mes roues ?
00:10Je ne peux pas. Regarde, tu vas voir les trous.
00:12Attends, parce que pour monter les trottoirs,
00:18quand ils ne sont pas abaissés, c'est assez sport.
00:21Les poubelles, c'est un enfer aussi.
00:23Ouais, les poubelles, encore là, elles sont bien placées,
00:25mais une fois sur deux, j'ai besoin d'attendre qu'il y ait quelqu'un
00:30qui m'aide à les déplacer pour passer.
00:34À chaque sortie, j'ai toujours besoin de faire appel à quelqu'un,
00:38que ce soit pour rentrer dans un magasin,
00:41que ce soit pour pousser un vélo, une poubelle.
00:45Je ne sais pas, je peux rarement être autonome, en fait.
00:47C'est ça le plus difficile pour toi ?
00:48Ouais, franchement, c'est ça, parce qu'aujourd'hui,
00:51mon handicap, il est ce qu'il est, je suis en fauteuil, OK,
00:54mais finalement, ce qui me fait sentir le plus handicapée,
00:59c'est l'environnement qui n'est pas adapté.
01:03En avril 2018, j'étais partie six mois faire le tour de l'Amérique du Sud
01:08en sac à dos toute seule.
01:09J'ai fait un cours de surf qui s'est mal passé
01:11et depuis cette période-là, je suis tétraplégique incomplète.
01:15Ça signifie qu'en fait, ma moelle épinière a été touchée au niveau cervical.
01:19Mais j'ai une petite particularité, c'est que ma moelle épinière
01:23a été plus touchée sur l'hémicorps droit,
01:26ce qui fait que mon bras droit ne fonctionne pas.
01:27Alors, moi, mon itinéraire, donc là, quand je sors de chez moi,
01:32je vais... Attends, je vais me mettre là.
01:37Je vais à une rue d'ici
01:40pour pouvoir faire mes courses.
01:42Donc là, on voit quand même tous les revêtements
01:45qui sont un peu compliqués à franchir.
01:48Là, pour traverser,
01:50je ne peux pas traverser en face du passage piéton
01:53parce que le trottoir n'est pas abaissé.
01:55Donc, j'ai obligé de me mettre sur le côté
01:58et monter un peu, comme je peux.
02:04Pour traverser.
02:07Là, typiquement,
02:10on peut voir un salon d'esthétique
02:13dans lequel je suis allée une fois
02:15et qui n'est pas du tout adapté, qui n'a pas de rampe.
02:18Et la personne m'a demandé de ne plus revenir
02:20parce qu'elle ne pouvait pas m'accueillir.
02:21Là, pareil.
02:23Typiquement, les immeubles anciens,
02:26impossible d'y accéder
02:28parce qu'on a une petite marche.
02:30Mais même si je pouvais
02:31éventuellement passer cette petite marche,
02:33on a derrière une porte qui est très lourde
02:36avec laquelle...
02:37Avant laquelle, il faut taper un code.
02:39Donc moi, clairement, j'ai pas mal d'amis
02:41qui habitent dans ce type d'immeubles
02:42que je ne peux pas aller voir,
02:44à moins forcément qu'ils aient à descendre.
02:47Mais en autonomie, je ne peux pas y aller.
02:49Là, on voit que tous les commerces
02:51ont des petites marches.
02:53Partout, partout.
02:55Là, on arrive sur un revêtement en pavé,
03:00ce qui est extrêmement désagréable
03:01quand on est en fauteuil.
03:02Parce que là...
03:04Là, c'est les tremblements.
03:05Et par exemple, regarde, là,
03:07ça fait bouger mes pieds.
03:08Je suis obligée de m'arrêter,
03:10de remettre, de le replacer.
03:14Hop là.
03:15Et de repartir.
03:16Et là, malheureusement,
03:19on se rend compte
03:21qu'il y a...
03:27qu'il y a des marches.
03:30Donc, impossible.
03:33Il y a des heures de pointe pour les bus,
03:35même si j'aimerais quand même
03:37pouvoir me déplacer quand je veux.
03:39Mais si je peux éviter, j'évite.
03:41Là, j'arrive.
03:43Si je ne fais pas attention, par exemple,
03:45que je parle avec une amie avec qui je suis,
03:47je ne fais pas attention.
03:48Je vois le petit bonhomme vert.
03:50Je me lance.
03:51Et là, catastrophe,
03:53parce que là, je me fais vraiment très mal.
03:55Donc là, ce que je fais,
03:55je dois faire un détour.
03:57Sauf que là, c'est...
03:59Vraiment, la pente est forte
04:01et je dérape tout le temps.
04:05Le fauteuil, voilà.
04:06C'est hyper dangereux.
04:09Je vais essayer de traverser.
04:11Ce que je voulais dire aussi,
04:14j'aurais dû peut-être le faire
04:15devant un resto,
04:16c'est qu'admettons,
04:18je vais boire un verre
04:20dans un bar.
04:22Les toilettes ne sont pas adaptées.
04:24À Paris, la plupart du temps,
04:27les toilettes sont en sous-sol
04:28et sans ascenseur.
04:30Donc, impossible d'y aller.
04:31J'ai un moteur.
04:33Mais en fait, ce qui est épuisant,
04:35c'est de devoir constamment
04:37tout vérifier,
04:40avoir le regard partout
04:42et voilà, pour ne pas tomber,
04:44pour ne pas déraper sur la route.
04:47La chose qui nous faciliterait
04:49le plus la vie,
04:50c'est qu'on nous donne un coup de pouce
04:51au niveau de l'accès,
04:54du regard qu'on porte sur nous,
04:57qu'on réduise les incivilités
05:01dans la rue, que ce soit
05:03quand on garde son vélo,
05:04quand on sort sa poubelle,
05:05quand on promène son chien,
05:07quand on se garde sur des places
05:08handicapées sans avoir la carte.
05:10Ça, c'est hyper important
05:11et vraiment,
05:12on en voit beaucoup trop encore.
05:15Donc, en essayant d'être
05:17un minimum empathique,
05:19ça nous faciliterait vraiment,
05:20grandement la vie.