Monsieur de Fontenelle a résisté toute sa vie à la passion et aux sentiments amoureux, jusqu’au jour où il fait la rencontre d'Isabella, qui lui fait découvrir ce qu’il a toujours ignoré : l’amour.
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Genre : Film complet en français, Histoire, France, Noblesse, Romance, Drame
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Court métrageTranscription
00:00:00Musique classique
00:00:09Huit heures !
00:00:13Votre bouillon !
00:00:15Il faut le boire bien chaud, sinon, ça vous fera aucun...
00:00:20...aucun bien.
00:00:22Musique classique
00:00:30C'est bon ! C'est bon ! Mathieu !
00:00:52C'est bon, c'est bon !
00:01:22J'ai des asperges que vous m'aviez commandées, elles sont très belles.
00:01:51Cueillez de ce matin.
00:02:09Et mes fraises ?
00:02:11Je t'ai déjà dit que ça me donnait des démangeaisons.
00:02:17Oh madame, vous voilà enfin.
00:02:19Que se passe-t-il ?
00:02:21Monsieur de Fontenelle s'est encore levé en pleine nuit pour aller regarder ses maudites étoiles.
00:02:24Et je l'ai trouvée endormie dans son cabinet.
00:02:27Franchement madame, je me demande ce qu'il espère.
00:02:30S'il croit que les habitants de la Lune vont lui faire signe de monter ?
00:02:33Il vous a donc convaincu que la Lune était habitée ?
00:02:35Non, pas la Lune, mais...
00:02:38Attendez, attendez.
00:02:40On s'y retrouve plus dans tous ces astres.
00:02:44En tout cas, moi je crois que les habitants du ciel en ont assez d'être regardés.
00:02:48Avec ces lunettes qu'on dirait des fusils.
00:02:51Monsieur de Fontenelle a beau être un grand savant, il y a des choses qu'à son âge on ne fait plus.
00:02:57Madame, il n'y a que vous, sa petite nièce, qui puissiez le raisonner.
00:03:02Dirais-je lui dire, il est la raison même.
00:03:04Au revoir, chère.
00:03:06Tout au plus pour être en contenir sa gourmandise.
00:03:15Oh, ma chère nièce.
00:03:17Ah, je vous souhaite le bonjour, mon oncle.
00:03:20Vous avez belle mine, je suis ravie.
00:03:25Eh oui.
00:03:27N'y aurait-il point du fromage ?
00:03:28Vous ne dîneriez point si vous prenez du fromage à 7 heures.
00:03:319 heures viennent qu'à poindre sonner.
00:03:33Je sais trop bien que vous n'en prendriez point qu'un seul morceau.
00:03:37Vous saurez témoin qu'après 95 ans, je suis condamné à mourir de faim dans ma propre maison.
00:03:43Et de vous passer par la cuisine.
00:03:44En effet.
00:03:45Et n'avez-vous point remarqué ce qui se préparait pour le dîner ?
00:03:48Des asperges, mon oncle.
00:03:50Dieu soit loué.
00:03:52C'est étrange comme manger des asperges semble pour vous une forme avancée du bonheur.
00:03:56Vous parlez du bonheur comme si j'en connaissais les secrets.
00:04:00N'est-ce pas la vérité ?
00:04:04Je crois en effet que les secrets du bonheur ne vous sont pas inconnus.
00:04:09Vous appelez secrets de simple précaution.
00:04:12Confie-moi en une.
00:04:13Mais la plus simple, il faut s'homénager en toutes circonstances.
00:04:19Oui, la mesure du bonheur qui nous a été donnée est assez petite, ma chère nièce.
00:04:31J'ai donc présent de ne rien perdre.
00:04:36Et est-ce dans vos précautions que de ne pas vous marier ?
00:04:40Veuillez m'excuser.
00:04:46Pertinente question.
00:04:50Dans les nœuds de l'hymen, à quoi bon m'engager ?
00:04:54Je suis un, cela doit suffire.
00:04:58Si j'étais deux, mon état serait pire.
00:05:02C'est bien assez de moi pour me faire enrager.
00:05:06Votre science des épigrammes vous tire de toutes les situations.
00:05:09Il n'empêche que vous savez vous faire adorer des femmes.
00:05:12Peut-être, mais on les épouse, et puis on les connaît.
00:05:17Le mariage est chose naturelle pourtant.
00:05:19On n'aime pas dans les pommes.
00:05:21Je dis, l'idée a bien dû vous venir, de vous marier.
00:05:25Quelquefois, oui, le matin.
00:05:40Voltaire aurait dit en roi de Prusse que vous étiez
00:05:43l'esprit le plus universel que le siècle de Louis XIV ait porté.
00:05:47Un compliment n'étant pas dans sa manière,
00:05:49j'en déduis qu'il a dû lui arriver quelque chose de fâcheur.
00:05:53Le froid peut-être.
00:05:57Je m'étonne toujours comme les séances à l'académie
00:06:00ne vous fatiguent pas davantage.
00:06:02Pourquoi voulez-vous ?
00:06:04Je n'y ai plus d'ennemis.
00:06:09C'est bon.
00:06:28On dirait que vous avez oublié ce que M. Boileau et la Bruyère
00:06:31ont dit de désagréable sur vous.
00:06:33Ne vous faites pas enfant.
00:06:34C'est un racine de l'oublier parmi mes adversaires.
00:06:37Je vous aurais pardonné et cela m'a fait beaucoup de bien.
00:06:41Non, aujourd'hui, je ne les blâme que d'être tous morts.
00:06:47Portez-vous toujours aussi aimablement, chers enfants.
00:06:58Moi, c'est monsieur que je trouve trop aimable.
00:07:02Il n'en veut à personne et se contente de tout.
00:07:05Je me demande parfois si ce sont là les manifestations d'une bonté immense
00:07:09ou de pas de bonté du tout.
00:07:15Des fois, j'ai peine à lui ôter la poussière.
00:07:20Il me fait peur.
00:07:23Je crois M. de Fontenelle encore plus impressionné que vous par son nom.
00:07:26Je comprends.
00:07:28Être le neveu du Grand Corneille, c'est une situation tout de même.
00:07:32Pour vous aussi, madame.
00:07:35Petite nièce du neveu de Corneille, c'est une place discrète.
00:08:03Mais, qu'est-ce que vous faites ?
00:08:05Monsieur en avait assez.
00:08:06Comment, il en avait assez ?
00:08:08Ah oui, il ne veut plus voir ce coffre.
00:08:10Soixante ans, à ce qui paraît.
00:08:12Mais il est plein.
00:08:13Pour sûr, madame, qu'il est plein.
00:08:15On sent bien quand on le porte.
00:08:17C'est tout ce que monsieur a point voulu lire qui est là-dedans.
00:08:19Mais qu'est-ce que tu racontes, Simon ?
00:08:21Ce sont les journaux de monsieur qui sont dans ce coffre.
00:08:23Je dis point non.
00:08:24Je dis qu'il n'a jamais voulu les lire.
00:08:26Qui vous a raconté ces sornettes ?
00:08:29C'est... c'est lui.
00:08:32Qui ça, lui ?
00:08:36Monsieur de Fontenelle.
00:08:38C'est amusant, mais cela ne tient pas debout.
00:08:40Pourquoi ne les aurait-il pas lus ?
00:08:42Monsieur aimerait pas qu'on répète ce qu'il nous a dit qu'à nous.
00:08:45Répète quand même, madame te le demande.
00:08:48Ben, il les a point lus parce qu'il se doutait qu'on disait pas du bien de lui là-dedans.
00:08:53Même qu'on l'attaquait.
00:09:00Après tout, cela est assez dans sa manière.
00:09:03Ne jamais aller au-devant de ce qui peut gratter votre humeur.
00:09:07C'est tout, lui, en effet.
00:09:09Débarras ! Allez !
00:09:11Et vous repasserez le ballet !
00:09:29C'est pas possible !
00:09:31C'est pas possible !
00:09:33C'est pas possible !
00:09:35C'est pas possible !
00:09:37C'est pas possible !
00:09:39C'est pas possible !
00:09:41C'est pas possible !
00:09:43C'est pas possible !
00:09:45C'est pas possible !
00:09:47C'est pas possible !
00:09:49C'est pas possible !
00:09:51C'est pas possible !
00:09:53C'est pas possible !
00:09:55C'est pas possible !
00:09:57C'est pas possible !
00:09:59C'est pas possible !
00:10:01C'est pas possible !
00:10:02C'est pas possible !
00:10:21Bravo !
00:10:23Voir !
00:10:24Merci, monsieur.
00:10:25Rester, c'est inutile.
00:10:26Non, laissez-moi.
00:10:27Je n'écoute pas.
00:10:28Rester ici.
00:10:29Excusez-moi.
00:10:30Vous l'avez effrayée ?
00:10:31Mais non, c'est une petite sauvage, voilà tout.
00:10:34Qui était-ce ?
00:10:36Nous vous attendions pour souper.
00:10:38Je ne dois plus souper.
00:10:40Et pourquoi donc ?
00:10:41Parait que mon âge exige la tempérance.
00:10:45La belle affaire.
00:10:46Qu'est-ce que l'âge quand la gloire le surpasse ?
00:10:48Elle est folle.
00:10:49Accepterez-vous néanmoins quelques fruits confits ?
00:10:52Venez par ici.
00:10:55Monsieur de Fontenelle vous a repéré
00:10:57comme étant le plus spirituel de l'Assemblée.
00:11:00Le plus spirituel du salon de madame Geoffray.
00:11:04C'est madame Geoffray.
00:11:06Monsieur de Fontenelle nous surpasse tous, Valière.
00:11:09Dites-lui plutôt quelle conversation était la vôtre pendant le souper.
00:11:12De quoi disputiez-vous ?
00:11:14Nous pensions qu'il est bien difficile pour une femme
00:11:17de déceler le sentiment sous une conduite galante.
00:11:21Monsieur de Valière soutenait que c'était un nouveau procès
00:11:24fait à la sincérité des hommes.
00:11:26Alors, qu'en pense le siècle passé ?
00:11:28Ma foi, je n'observe point les sentiments
00:11:31comme je le fais des planètes.
00:11:33Vous n'avez pas à observer
00:11:35ce qui vous est simplement donné de ressentir.
00:11:37Certes, mais il est présomptueux d'avancer
00:11:39que j'ai déjà ressenti quoi que ce soit.
00:11:42Voilà 80 ans que j'ai relégué
00:11:45le sentiment dans mes poésies.
00:11:48Et vous appelez ça avoir vécu ?
00:11:50De quoi avoir été empressé comme il convenait auprès des femmes.
00:11:54Mais l'amour...
00:11:57J'entends mal.
00:11:59Je parlais de l'amour.
00:12:01Lui et moi sommes des choses incompatibles.
00:12:04On dit pourtant que votre roman préféré
00:12:06n'est autre que la princesse de Claire.
00:12:11Le style en est insurpassable.
00:12:14Il en est plus vif.
00:12:16Il n'en est pas de plus simple,
00:12:18donc de plus grand.
00:12:20Mais la princesse, c'est une histoire d'amour.
00:12:23Qui n'a pas lieu.
00:12:24Quelle sagesse.
00:12:26Puisque vous soutenez que les sentiments vous sont étrangers,
00:12:29je suppose que ce sont les idées qui ont vos faveurs.
00:12:32Pas davantage. Défendre des théories signifie riposter,
00:12:35se plaindre, accuser, soupçonner.
00:12:38J'aime trop mon repos.
00:12:41Et puis, pourquoi polémiquer ?
00:12:46Tout est possible.
00:12:48Et tout le monde a raison.
00:12:50Allons, allons.
00:12:52Je sais certaines idées qui ne vous laissent pas indifférents.
00:12:55Si je vous disais
00:12:57que M. d'Alembert est venu nous lire hier
00:12:59son discours préliminaire à l'encyclopédie,
00:13:01et que le chevalier de Jaucourt
00:13:03nous a montré d'admirables planches dans les métiers.
00:13:06C'était d'un ennui mortel.
00:13:08Vous avez l'air encore bien vivant, il me semble.
00:13:11Mais enfin, que cherchez-vous avec cette encyclopédie ?
00:13:14À instruire les médiocres de choses qu'ils n'entendront point ?
00:13:17Qu'y a-t-il de plus ridicule
00:13:19que de parler de philosophie avec des ouvriers ?
00:13:22Le divertissement et le jeu, voilà ce que le peuple attend.
00:13:26Pareils propos vous feront attendre à la porte de l'académie, j'en réponds.
00:13:30Déjà qu'il vous faudra faire oublier vos ouvrages libertins.
00:13:33Et moi, j'entends bien être de l'académie.
00:13:36Mes ouvrages sont lestes, j'en conviens,
00:13:38mais décomposés et d'un aussi dur labeur, croyez-moi.
00:13:41Une simple page me prend...
00:13:43trois ou quatre heures.
00:13:45Vous finirez bien par attraper tout ce temps perdu.
00:13:48Mais je suis plus modeste que vous ne l'imaginez, monsieur.
00:13:51Je n'aurais pas osé vous le dire, monsieur.
00:13:54Toutes ces femmes qui se disputent le vieux Fontenelle
00:13:57dans l'espoir qu'il va mourir dans leur salon.
00:14:03Pauvre Valière, il se croit un esprit supérieur,
00:14:06mais la supériorité lui fait bien défaut.
00:14:08Et l'esprit lui manque.
00:14:10Venez, nous allons entendre la musique de près.
00:14:13Elle est bien assez insupportable de loin.
00:14:15Vous préférez la peinture?
00:14:17Oh, la peinture, les murs,
00:14:19s'entendent les dits par trop de portraits.
00:14:21La sculpture?
00:14:23Je laisse les statues me regarder.
00:14:26Les arts vous touchent donc si peu?
00:14:29Je n'arrive pas à faire entrer
00:14:31tant de choses dans mon existence.
00:14:36Plus tard, peut-être.
00:14:38Votre force est de vous placer hors d'atteinte dans toutes circonstances.
00:14:41Rien ne vous touche. Je vous admire.
00:14:45Bonsoir, cher Fontenelle.
00:14:47Pardon?
00:14:48Je vous souhaitais le bonsoir.
00:15:08Bonsoir.
00:15:38on l'a souvent constaté, plus de précision encore que ceux qui entendent normalement.
00:15:43Cela provient de ce que le pavillon est fort large.
00:15:46Ne dirait-on pas comme une corne d'abondance,
00:15:48qui, au lieu de déverser ses fruits, engrangerait les sujets et les verbes,
00:15:51par sa vaste embouchure, pour vous les faire entendre ?
00:15:54Voyons, monsieur, voulez-vous ajuster le cornet à votre oreille ?
00:15:58La plus petite des extrémités s'y glisse tout naturellement.
00:16:02Allez-y.
00:16:04Voilà.
00:16:05Alors, comment m'entendez-vous, monsieur de Fontenelle ?
00:16:08Trois fois.
00:16:10Ah oui, je suis confus, c'est parce que c'est naturel
00:16:12quand on s'adresse à quelqu'un d'enloué et défaillant.
00:16:16Alors, je n'en crois pas mes oreilles.
00:16:26Qu'est-ce que c'est que ça ?
00:16:27On nous a demandé de venir le chercher pour monsieur de Fontenelle.
00:16:30Et qui vous a demandé ?
00:16:32Ajuster, enlever.
00:16:35Ajuster, enlever.
00:16:37Voilà. L'appareil n'est-il point trop lourd, monsieur ?
00:16:40Monsieur !
00:16:42Madame Geoffrin vous envoie...
00:16:44Madame Geoffrin vous envoie quelque chose.
00:16:59Je lis beaucoup mieux.
00:17:02Ce portrait de votre ami Lefrenois,
00:17:04j'ai pu l'acquérir sans trop d'embarras auprès de ce qui lui reste de famille.
00:17:08Je l'ai fait dans l'intention de vous l'offrir.
00:17:10Persuadez que le visage de celui qui fut votre plus proche et si grand ami
00:17:14vous rappellerait ces longs moments que vous passiez ensemble à ne rien dire
00:17:18et pourtant à vous comprendre.
00:17:19Comme seuls savent s'entendre la discrétion et l'innocence.
00:17:26Voilà aujourd'hui, vingt ans qu'il est mort.
00:17:29Je m'en vais sur le champ remercier madame Geoffrin.
00:17:33Pourquoi ces moments que vous passiez à ne rien dire ?
00:17:37Monsieur Lefrenois était si peu bavard.
00:17:42Le portrait respire la ressemblance.
00:17:45Regardez, on dirait qu'il va se taire.
00:17:55La belle compagnie que voilà.
00:18:00Et tout ce monde vont m'accueillir ?
00:18:03Nous sommes toujours ravis de vous voir monsieur l'abbé.
00:18:06Très bien, très bien, très bien.
00:18:14Je parle de cette lettre marquée de la phare que le petit réservoir vient publier.
00:18:18Et bien ?
00:18:19Comment ça, et bien ?
00:18:21Que dit-elle cette lettre ?
00:18:23Vous vous moquez, on soutient partout qu'elle est de vous.
00:18:25Mais a-t-on vu l'écrire ?
00:18:27Je sens bien moi qu'elle est de votre plume.
00:18:29Parler avec une telle insolence n'appartient qu'à vous ou à Voltaire.
00:18:32Une lettre qui décrit l'embarras du seigneur au moment de la résurrection désigne son auteur.
00:18:37M'en direz-vous le nom à la fin ?
00:18:39Ayé, ayé, ayé.
00:18:41Je vois que sous couvert de montrer les choses de la science, au cas de l'écœur saint,
00:18:44n'entend de rien, il est bien aisé d'y jeter le tauble.
00:18:47Qu'est-il besoin d'expliquer, ce qui doit rester inexplicable ?
00:18:51Vous faites parfois son jeu à quelques navigateurs,
00:18:55mais qui interdirait qu'on écope.
00:19:01Prenez garde, on dit que ce sont vos ouvrages qu'ont affronté Voltaire.
00:19:06Laissez dire.
00:19:07Car vous ne pouvez accepter que votre œuvre apporte potion à cet impie.
00:19:11Que me reprochez-vous ? N'ai-je pas fait mes pâques ?
00:19:14Si, mais vous ne pouvez ignorer que Voltaire parle de Dieu comme s'il n'existait pas.
00:19:19Comme quoi ?
00:19:20Quelle malice que vous doivez me faire répéter cette chose comme s'il n'existait pas.
00:19:27Voltaire ne nie pas, il s'interroge.
00:19:31C'est votre histoire des oracles qui a fait le mal.
00:19:34J'ai peint dans mes oracles le spectacle de l'ignorance et de la sottise,
00:19:39exploité par la mauvaise foi.
00:19:41Certes, mais...
00:19:42Mais ce spectacle me semble promis un grand avenir.
00:19:46Justement, des esprits faibles et impurs ont pu en déduire que Dieu n'existait que parce que nous voulions y croire.
00:19:54Mon ami, l'ignorance se démontre moins par les choses qui sont
00:20:00et dont la raison nous est inconnue que par celles qui ne sont point
00:20:04et dont nous trouvons la raison.
00:20:07Car non seulement nous ne possédons pas les principes qui mènent au vrai,
00:20:12mais nous en avons d'autres qui s'accommodent très bien avec le faux.
00:20:21Monsieur l'abbé, restera-t-il à dîner ?
00:20:23Vêt-il ? Non, votre servante.
00:20:25Mais qui y est-il ?
00:20:26Le dîner !
00:20:27Eh bien ?
00:20:28Désirez-vous des asperges ?
00:20:30Oh, j'en raffole.
00:20:33J'en raffole.
00:20:34Moi aussi.
00:20:35Ça vaut beurre, hein, quel délire.
00:20:38Je préfère à l'huile.
00:20:39Au beurre, elle garde leur fermeté.
00:20:41Et à l'huile, le goût en sort davantage.
00:20:43Elles se digèrent toutes aussi bien au beurre.
00:20:45Ma nièce ne les apprécie qu'à l'huile.
00:20:47Bon, que dois-je faire ?
00:20:50Une moitié à l'huile, une moitié au beurre.
00:20:56Je connais bien votre manière, savez-vous.
00:20:58Jamais rien de véhément.
00:21:00Votre impertinence est des plus douces, à peine visibles,
00:21:03point d'éclat, point de taca.
00:21:05Ainsi se passent les idées les plus terribles, les plus terribles.
00:21:08Je ne professe point d'idée.
00:21:11Je constate et je souris.
00:21:14C'est bien suffisant.
00:21:15Vous, vous mêlez tout sans en avoir l'air.
00:21:17Voilà la vérité.
00:21:18Raisonnement, raisonnement, c'est votre unique défense.
00:21:21Moi, je maintiens qu'il est mauvais de raisonner sans cesse,
00:21:23que c'est le moyen le plus insidieux de s'écarter peu à peu
00:21:26du chemin qui nous a été tracé.
00:21:28Par qui ?
00:21:32Vous voyez, vous raisonnez encore.
00:21:34Ça, je me demande si toutes mes paillères seront jamais suffisantes
00:21:37pour votre salut.
00:21:40Essayez.
00:21:54Ansoise !
00:21:58Les asperges, toutes à l'huile.
00:22:08Non, non, déposez-moi à l'entrée du jardin.
00:22:27Enfin, vous voilà.
00:22:30Nous attendions vous pour souper.
00:22:32A-t-on des nouvelles de ce bon Abéchalon ?
00:22:34Il est à nouveau sur pied.
00:22:36Si l'on peut ainsi dire, de quelque chose de rond.
00:22:40Vous ne cessez de le redoyer.
00:22:41Je me demande ce qu'il vous a fait.
00:22:43Il m'a fait peur !
00:22:47Le voilà !
00:22:54Chère Fontenelle,
00:22:56je ne crois pas vous avoir plaisantée Isabelle.
00:22:58La fille de ma sœur du comte d'Elatorre.
00:23:00Elle est arrivée de Florence la semaine passée.
00:23:05Ah, des asperges !
00:23:14On dit, monsieur, que vous n'avez plus résisté à un mot cruel
00:23:16dont l'Abéchalon fut l'innocente victime.
00:23:18La cruauté n'est pas ma façon, monsieur,
00:23:20mais si cela est vrai,
00:23:21ce que j'ai dit semble avoir remis l'âme à l'âme.
00:23:24Monsieur le philosophe,
00:23:25il paraît que vous refusez de croire à l'amour.
00:23:28N'est-il ?
00:23:29N'est-il point vrai que l'amour existe ?
00:23:35J'avoue qu'à cette minute, je ne doute plus.
00:23:40On m'a dit une charmante plaisanterie.
00:23:42Qui vous concerne, chère Fontenelle ?
00:23:44Je ne sais pas.
00:23:45Je ne sais pas.
00:23:46Je ne sais pas.
00:23:47Je ne sais pas.
00:23:48Je ne sais pas.
00:23:49Je ne sais pas.
00:23:50Je ne sais pas.
00:23:51Je ne sais pas.
00:23:52Je ne sais pas.
00:23:54À quelqu'un qui souhaitait faire un passement d'argent,
00:23:56il a été déconseillé de le faire sur votre tête,
00:23:58sauf à fond perdu,
00:24:00car vous rajeunissez en vieillissant.
00:24:02L'autre jour,
00:24:03j'ai voulu faire déplacer à un meuble de famille
00:24:05un vieux secrétaire qui avait toutes les apparences du neuf.
00:24:08Eh bien, à peine l'a-t-on touché qu'il s'est effondré.
00:24:11Il était verrouillu.
00:24:15Vieillir me fait peur.
00:24:17Pour les femmes,
00:24:18la disgrâce des sens, c'est...
00:24:20une horrible chose !!!
00:24:22Ils se tisent.
00:24:24Pour éviter à nos sens de vieillir,
00:24:26il faut veiller à leur fonctionnement régulier,
00:24:29les entretenir en quelque sorte.
00:24:31À suivre vos conseils, on tomberait vite dans l'excès, il me semble.
00:24:34L'homme de qualité sait tempérer ses audaces.
00:24:38Je crains, mademoiselle,
00:24:40que nos discours vous ennuient.
00:24:42Les vôtres, vous voulez dire.
00:24:46Quand la beauté et la jeunesse s'accordent si magnifiquement,
00:24:49a-t-on envie d'entendre des propos desséchés ?
00:24:52A-t-on d'ailleurs envie d'entendre quoi que ce soit ?
00:24:55Les paroles retardent toujours les actes.
00:24:58Oh non, ce n'est pas possible.
00:25:00Grand-pense votre nièce ?
00:25:02Elle va vous le dire elle-même, baron Grimm.
00:25:05Je n'en suis pas encore à m'élasser des conseils que l'homme me donne.
00:25:08Ce qui n'empêche pas d'en faire le tri,
00:25:11de reconnaître la vérité dans ce qui est généreux, sensible, dévoué,
00:25:16en un mot, dans ce qui vient du cœur.
00:25:19Tous les êtres possèdent un cœur, me direz-vous.
00:25:22Eh bien, non.
00:25:23La science nous le cache encore,
00:25:25mais certains en sont réellement dépourvus.
00:25:28Vraiment ?
00:25:29J'en connais personnellement.
00:25:30Dans quelques contrées lointaines, je pense.
00:25:32Point du tout, ici même.
00:25:34Me direz-vous ?
00:25:35À quoi bon ? Il s'est déjà reconnu.
00:25:38Je suis résolu à faire, à l'Académie,
00:25:41une communication sur l'intelligence de l'asperge.
00:25:48C'est un légume particulièrement savoureux,
00:25:51mais aussi commode à manger.
00:25:54En somme, fait pour nous plaire,
00:25:57mais avec une discrétion qui en chante.
00:26:00Il suffit d'ailleurs de savoir comment on le mange.
00:26:03Une discrétion qui en chante.
00:26:05Il suffit d'ailleurs de savoir comment on pousse les asperges.
00:26:09Elles passent la tête
00:26:13pour d'abord voir si elles ne dérangent pas.
00:26:18Et puis alors,
00:26:20sachant attendue,
00:26:23elles viennent,
00:26:25toutes entières.
00:26:29Aucun autre légume
00:26:32ne recède cette élégance.
00:26:34À vrai dire, ça n'est pas précisément sur l'Académie
00:26:37et les asperges qu'on vous attendait.
00:26:39Sur quoi d'autre ?
00:26:40Eh bien, sur ce qu'affirme M. de Vallière.
00:26:43L'absence de cœur.
00:26:45Vous avez dû mal entendre.
00:26:46Comment cela ?
00:26:48M. de Vallière pense que cela n'existe pas
00:26:50parce que le cœur comme le cerveau
00:26:52sont des organes qui lui sont encore étrangers.
00:26:56J'ai cru comprendre que pour l'instant,
00:26:58il ne s'intéressait qu'à la partie comprise
00:27:00entre la hanche et le genou.
00:27:08Bénissons l'esprit, monsieur.
00:27:09C'est lui qui vous tuera.
00:27:12Alors ne songez plus à l'Académie.
00:27:14Vous voilà déjà immortel.
00:27:31S'il pleure, promet et jure
00:27:34Il peut changer l'amour
00:27:38Il peut changer l'amour
00:27:42C'est facile de dire qu'il meurt
00:27:45C'est facile de mentir
00:27:50Pour ne pas roussorer
00:27:54Qu'un dolce affaite oublie
00:27:58Qu'un mille-fois-dix n'en sait
00:28:02Rambo le panel d'amour
00:28:06Rambo le panel d'amour
00:28:10Il peut changer l'amour
00:28:14Il peut changer l'amour
00:28:18Il peut changer l'amour
00:28:40On dirait que la musique vous est soudainement supportable.
00:28:48On dirait que la musique vous est soudainement supportable.
00:29:19J'aimerais aussi fuir la peine
00:29:23D'un amour fini d'un chiotto
00:29:26Et m'exposer d'un refiotto
00:29:29A l'altrage et à la roussor
00:29:33A l'altrage et à la roussor
00:29:37A l'altrage et à la roussor
00:29:48Si il y a un torturel
00:29:51Qui ne voit pas son péril
00:29:54Pour fuir de son jardin
00:29:57Vole au tremblement du chasseur
00:30:00Vole au tremblement du chasseur
00:30:07Vole au tremblement du chasseur
00:30:33Venez, M. Leforger a promis de nous enseigner un nouveau jeu d'esprit.
00:30:36nouveau jeu d'esprit. Je préfère me retirer. Comme vous voudrez. Ma nièce ne
00:30:41possède-t-elle pas une voix merveilleuse ? Sans doute, mais comment on aurait-je
00:30:46profité ? C'est à vous. Je vois pas l'utilité de m'encombrer du bien
00:30:53d'autrui. Je veux dire, vous en avez réellement besoin ?
00:30:57Hélas, ma bonne amie, me voici parvenu à l'âge des accessoires.
00:31:06Monsieur ? Quelqu'un parle ?
00:31:22Moi, monsieur.
00:31:39Votre esprit m'a charmée, monsieur. Je comprends que ma tante tienne temps à
00:31:44votre présence. Avez-vous aimé les airs que j'ai chantés ?
00:31:48Votre voix et votre accent feraient aimer tous les airs du monde.
00:31:54Savez-vous que je connais vos entretiens sur la pluralité des mondes ?
00:31:58Ils sont très célèbres en Italie. Quelle chance a eu cette marquise d'être
00:32:03instruite par vous. Des Mercures, des Vénus, des Jupiter. Mais je vous mets en
00:32:10retard. Bonne soirée, messieurs.
00:32:17Nous sommes prêts, monsieur. Pardonnez-moi.
00:32:34Je vous pardonne d'avoir interrompu mon chemin, si vous acceptez que je me mette
00:32:40en travers du vôtre. Aurais-je droit à une leçon d'astronomie ?
00:32:45J'aime les sciences, vous savez. J'imagine que vos soirées passées à instruire la
00:32:49marquise étaient pareilles à celles-ci.
00:33:01Enfin, voyons, vous vous conduisez avec moi comme si j'avais dix ans de moins.
00:33:08Puisque je ne peux prétendre tenir la place de votre marquise, je me contenterai de la
00:33:13beauté de ce spectacle. Qui cela serait ?
00:33:18Les sceaux et les savants. Je crois qu'un jour viendra où l'homme visitera les planètes.
00:33:24Vous avez raison. Il n'aura pas la sagesse d'y renoncer et il ne pourra s'empêcher
00:33:30d'y mettre de l'orgueil, comme toujours.
00:33:35Vous étiez moins pessimiste avec la marquise.
00:33:38Marquise ? Imaginaire.
00:33:44Êtes-vous sérieux ?
00:33:47Je voulais raconter simplement les principes qui réjouissent l'univers, alors j'ai imaginé
00:33:53des conversations avec une marquise, le soir, dans le parc d'un château.
00:33:59Je rêvais d'un ouvrage ni trop sec, ni trop léger, mais il se peut bien qu'en cherchant
00:34:05un juste milieu qui convainque tout le monde, j'en ai trouvé un qui ne convienne à personne.
00:34:10Les justes milieux sont impossibles à tenir. On n'y prendra plus.
00:34:17C'est pourtant grâce à vous que les femmes prennent plaisir à la science. Beaucoup d'hommes
00:34:23ne vous le pardonneront jamais.
00:34:24Enfin, l'avoué que vous m'avez fait me dispense désormais de me montrer jalouse
00:34:31envers votre marquise.
00:34:33Je vous demande pardon.
00:34:34J'ai parlé de la jalousie.
00:34:37J'avoue ignorer ce que c'est.
00:34:41Je vous crois. Il n'y a que les femmes pour savoir.
00:34:44Allons, je ne suis pas tout à fait honnête.
00:34:50Pardon ?
00:34:52Cette marquise, je ne l'ai pas entièrement inventée.
00:34:57Je me suis inspiré d'une personne réelle.
00:35:00Qui ?
00:35:02Une dame de ma province, auprès de laquelle beaucoup pensaient que j'étais assidu.
00:35:11L'étiez-vous ?
00:35:13J'ai fait en sorte que mes manières fussent toujours honnêtes et obligeantes.
00:35:19Les jeunes gens n'entendent plus cela.
00:35:23Le seul intérêt des jeunes gens est de fuir les sentiments.
00:35:27Enfin, monsieur, fuir les sentiments. Quel étrange conseil.
00:35:36Quelle importance ? On reconnaît les bons conseils à ce qui ne sont jamais suivis
00:35:40et les mauvais à ce que tout le monde sait hâter de les précéder.
00:35:45Je ne vous ai que trop retardé, monsieur.
00:35:48Aurais-je prononcé quelques paroles pour vous déplaire ?
00:35:52La nuit est fraîche, soudainement.
00:35:55Elle est fort douce, au contraire.
00:35:58Je porte de grandes voix.
00:36:01Je m'en voudrais de notre point attentif à votre santé.
00:36:07Le troisième acte commence par une scène entre la marquise et du bois.
00:36:16Buvez !
00:36:20C'est brûlant.
00:36:22Vous vous souciez moins du chaud et du froid dans certaines maisons que je connais.
00:36:29Je dois écrire une lettre.
00:36:33Je dois écrire une lettre.
00:36:36Allez !
00:36:52C'est chaud.
00:37:02C'est chaud.
00:37:15Ah, mon pauvre ami, vous voilà dans un triste état.
00:37:18À cause de l'humidité de votre jardin.
00:37:21Comme dites-vous là.
00:37:23Que les faiblesses arrivent par où on ne les attend pas.
00:37:27Ma nièce m'a chargé de vous remettre cette lettre.
00:37:30Elle vous remercie d'être restée pour l'écouter chanter.
00:37:35Je crois avoir bien agi en exigeant qu'Isabelle s'installe chez moi.
00:37:38Elle ne pouvait rester à Florence plus longtemps.
00:37:41Sa mère n'aurait jamais trouvé sur place remède à son mal.
00:37:44De quel mal souffre-t-elle donc ?
00:37:46De quoi voulez-vous ?
00:37:48L'amour, mon ami.
00:37:50L'amour.
00:37:52Isabelle a connu il y a peu le revers d'une passion qu'elle croyait partagée.
00:37:56Elle a surpris celui qui lui avait juré sa flamme dans les bras d'une autre.
00:38:01Quand je dis dans les bras, j'espère que vous me comprenez.
00:38:04Ma soeur s'est alarmée.
00:38:06Car la santé d'Isabelle donnait des signes d'inquiétude après cette pénible déconvenue.
00:38:10On ne saurait compter le nombre de fois où Isabelle a été surprise en larmes.
00:38:14Sans parler de ce jour pas si lointain où elle a voulu se jeter dans la rivière.
00:38:19Enfin !
00:38:21J'ai arraché ma nièce à son tourment et la voilà guérie.
00:38:26Je vous vois fatigué, cher Fontenelle.
00:38:29Vous dites ?
00:38:31Ah oui.
00:38:33L'amour.
00:38:38Me pardonnerez-vous, messieurs, un comportement si sauf inexplicable,
00:38:42alors que vous me faisiez la faveur de votre immense savoir ?
00:38:47Il me faudra bien du courage pour apparaitre devant vous,
00:38:51alors même que je ne saurais me résigner à ne plus vous voir.
00:38:56Je vous en prie.
00:39:27Mademoiselle.
00:39:29Mademoiselle.
00:39:30Monsieur de Fontenelle m'a chargé de vous remettre ceci.
00:39:57Merci.
00:40:05Ah, monsieur de Fontenelle, je suis bien aise de vous revoir.
00:40:09Monsieur Diderot et monsieur d'Alembert disaient à l'instant que vous étiez leur maître.
00:40:13Ce n'est pas un mince privilège, madame, que d'être rené avant tout le monde.
00:40:18Fontenelle, vous avez retrouvé bonne mine.
00:40:21Ma nièce sera ravie de vous revoir.
00:40:23Au juste, madame.
00:40:26Cette jeunesse nous donne le vertige.
00:40:35Qu'il me soit permis de saluer l'esprit...
00:40:38Qu'il me soit permis de saluer l'esprit le plus libre et le plus avancé de notre temps.
00:40:42Monsieur d'Alembert, vous me faites trop d'honneur.
00:40:45Notre encyclopédie vous est cent fois redevable.
00:40:48Vous verrez que mon âge finira par me rapporter.
00:40:54Je ne suis pas un de ces hommes qui exhibe des certitudes.
00:40:59Mais je sais que c'est par la connaissance et le raisonnement que le monde sortira des ténèbres.
00:41:04Nos articles lui ouvriront les yeux.
00:41:06Et nos souscripteurs ne seront pas que des lecteurs, comprenez-vous.
00:41:09Ils transmettront, ils témoigneront.
00:41:14Ah, monsieur de Fontenelle.
00:41:17On me dit que vous ne ménagez point votre peine pour nous soutenir.
00:41:20Soyez-en mille fois remercié.
00:41:22Ce premier volume de votre encyclopédie me ravit, monsieur Diderot.
00:41:27C'est une vaste entreprise.
00:41:29Trop vaste, peut-être.
00:41:31En tout cas, elle vous apportera peu de satisfaction.
00:41:34Les hommes tels que vous sont faits pour les grandes aventures et la règle des 3D.
00:41:41J'ignore cette règle.
00:41:43Déconvenu, difficulté, découragement.
00:41:47Eh bien, j'en ajoute un quatrième, défini. Je veux le relever.
00:41:51Vous avez raison. Il était tombé assez bas ces derniers temps.
00:42:01Charmant tableau.
00:42:02Lequel soutient l'autre ?
00:42:04Diderot préférera toujours Fontenelle.
00:42:06Il vaut caresser un chat qu'un scorpion.
00:42:17Monsieur de Fontenelle.
00:42:19Vous me voyez confuse.
00:42:21Je veux vous assurer que l'idée que vous avez de moi n'est pas la bonne.
00:42:25Puisque je n'ai rien vu.
00:42:27Le jour où vous m'avez surprise,
00:42:30j'ai pensé à vous.
00:42:32Vous n'avez rien vu ?
00:42:34Le jour où vous m'avez surprise,
00:42:37mon mari m'avait insulté.
00:42:39Imaginez mon trouble.
00:42:41Comment elle pourrait, madame ?
00:42:43C'est parce qu'il m'avait infligé cet affront que je me suis vengée de lui.
00:42:46J'imagine que pareille vengeance vous coûte énormément.
00:42:51Personne n'est mort d'avoir été infidèle, n'est-ce pas ?
00:42:54Certains m'aiment en vie, madame.
00:42:57Mon mari m'a traité de catin.
00:43:00J'ai prouvé de l'affection et de la tendresse pour tous les hommes qui m'a été donnée de connaître.
00:43:05Dans ce cas, madame, ce n'est pas une insulte, c'est de la reconnaissance.
00:43:09Un peu de fraîcheur me fera du bien.
00:43:21Quelle situation, monsieur ?
00:43:23Comment cela ?
00:43:25Ce rendez-vous que vous m'avez fixé dans les plus grands secrets.
00:43:28À la suite d'une lettre de vous, et votre tante qui me l'a remise,
00:43:32croit encore que vous m'adressiez de simples remerciements.
00:43:37Je vous devais des excuses.
00:43:39J'ose à peine imaginer ce que vous avez pensé de moi après cette soirée.
00:43:43Mais ce que j'ai pensé dans l'instant n'a rien à voir avec ce que je crois désormais.
00:43:48Que voulez-vous dire ?
00:43:51Que sans l'évocation d'un sentiment qui vous tourmente plus qu'il ne faudrait,
00:43:56je n'aurais pas assisté à un départ qui ressemblait à une fuite.
00:44:04Vous savez donc ?
00:44:06Je suis moins forte que je le pense.
00:44:09Je crois oublier, je ne fais qu'enfuir.
00:44:12Il est vrai et je crois que ce sera là ma plus grande gloire.
00:44:16Par quelle force faut-il donc être habité ?
00:44:19Je ne vois rien de banal dans les mouvements du cœur,
00:44:22mais j'ai préféré m'en garder.
00:44:25Comme si nous avions les choix.
00:44:27Nous l'avons.
00:44:29Il ne faut jamais chercher qu'à simplifier sa vie.
00:44:33Pour ma part, j'ai voulu faire l'économie de l'histoire d'amour.
00:44:37Qui m'eût-je laissé pantalon ?
00:44:39Je me connais trop bien.
00:44:41Mais vous avez aimé monsieur.
00:44:43Il avait été en retour.
00:44:45Soutiendrez-vous le contraire ?
00:44:47C'est un sujet bien personnel pour qui déteste parler de soi.
00:44:51Ainsi donc, vous pourriez tout connaître de moi
00:44:54et ne rien me confier en retour.
00:44:57Qui mon existence intéressera-t-elle ?
00:45:01Moi.
00:45:06Pourquoi je m'en prie ?
00:45:09Je ne sais.
00:45:11Ou plutôt, pour la première fois,
00:45:15j'ai le sentiment d'être comprise.
00:45:18Nous nous connaissons peu, il est vrai,
00:45:20et pourtant,
00:45:22il me semble que nous avons déjà partagé un peu de notre vie.
00:45:28Vous ne voulez donc rien me dire ?
00:45:31Un jour.
00:45:33Quel jour ?
00:45:35Un prochain jour.
00:45:38Protégez-vous des secrets ?
00:45:43Vous êtes avec pareil raisonnement que moi.
00:45:46Vous êtes avec pareil raisonnement que ma petite nièce prétend que tout m'a réussi.
00:45:51Je crains que l'affliction qu'elle me porte
00:45:54me fasse voir de travers.
00:45:56En quoi aurait-elle tort ?
00:45:59Il suffit de regarder de quelle manière j'ai parcouru le chemin.
00:46:03Quand j'ai voulu embrasser la carrière d'avocat dans ma ville natale,
00:46:07j'ai perdu la seule affaire qui me fut confiée.
00:46:10Quelle importance ! Vous aviez la poésie.
00:46:13Je ne pouvais donner plus qu'elle ne m'a rendue.
00:46:16Je fémine aujourd'hui d'être détaché,
00:46:18mais je sais à quel point les détracteurs avaient raison.
00:46:21Mes ouvrages ne faisaient qu'imiter
00:46:23ce que l'on représentait de pire sur les théâtres.
00:46:27L'académie vous a pourtant accepté.
00:46:30Après quatre tentatives,
00:46:32ils auraient su que j'allais vivre vieux,
00:46:35qu'ils me faisaient attendre davantage.
00:46:38Vous êtes un grand savant.
00:46:40Sans la lecture de vos ouvrages,
00:46:42aurais-je du goût pour les sciences et aurais-je commis...
00:46:46Quoi donc ?
00:46:47Un petit traité.
00:46:50Un petit traité ?
00:46:52Deux remarques plutôt sous la réfraction de la lumière.
00:46:56Aurais-je l'honneur de les lire ?
00:46:58Accepteriez-vous en échange
00:47:00de m'enseigner l'observation des étoiles ?
00:47:03Je suis trop mal habile.
00:47:05L'observation des...
00:47:07L'observation des étoiles, oui.
00:47:09Je ne m'y entends guère enseigner quoi que ce soit.
00:47:11Isabelle !
00:47:13Allons, acceptez-vous.
00:47:15Quel entêtement !
00:47:16Isabelle !
00:47:17Soit, soit.
00:47:19Quelles étaient ces terres que vous chantiez ?
00:47:23La, la, la, la, la, la, la, la, la, la...
00:47:28C'est un air qu'on chante à Florence et qui parle d'amour.
00:47:32Isabelle !
00:47:40Qui sait à quel instant de la succession des générations animales nous en sommes ?
00:47:45Qui sait si ce bipède déformé qui n'a que quatre pieds de hauteur,
00:47:48qu'on appelle encore un homme,
00:47:50et qui ne tarderait pas à perdre ce nom en se déformant un peu davantage,
00:47:55n'est pas l'image d'une espèce qui passe.
00:47:57Diderot est merveilleux.
00:47:59C'est grâce à des hommes comme lui que le monde va s'ouvrir.
00:48:02Le monde ! Vous rendez-vous compte ?
00:48:04Qui puis-je ?
00:48:05Nous allons découvrir tant de choses nouvelles.
00:48:07Comme j'ai hâte et comme j'ai envie !
00:48:09Mon fils, les envies sont inutiles quand on peut tout avoir.
00:48:13Qui sait si tout ne tend pas à se réduire à un grand sédiment,
00:48:16inerte et immobile ?
00:48:18Qui sait quelle sera la durée de cette inertie ?
00:48:21Qui sait quelle race nouvelle
00:48:27peut résulter d'un ananas aussi grand de points sensibles et vivants ?
00:48:38Il sera plus aisé d'enseigner la mécanique que la tolérance.
00:48:42Sans doute.
00:48:44Il le faudra pourtant.
00:48:46C'est peut-être là notre véritable dessein.
00:48:49Certes.
00:48:50Mais l'homme est l'homme.
00:48:52Il avance et il recule.
00:48:55Vous ne le changerez pas aisément.
00:48:57Je ne suis pas pessimiste.
00:48:59Bessoire comme celui-là, moi non plus.
00:49:37Papa !
00:49:41Papa !
00:49:55Eh bien, qu'attend-on ?
00:49:57Françoise ?
00:49:59Il n'y a personne.
00:50:01Françoise !
00:50:02Qu'est-ce que vous avez à crier comme ça ?
00:50:04D'abord, que faites-vous debout ?
00:50:06Il est bien temps, il me semble.
00:50:08Cette heure n'a pas encore sonné.
00:50:10Ah, voilà à quoi j'ai besoin des cloches.
00:50:12Mon horloge à moi me dit qu'il est l'heure.
00:50:15L'heure de quoi ?
00:50:17Où allez-vous ?
00:50:36C'est bon, c'est bon.
00:51:06Je sais que quand on se comporte ainsi dans sa 95ème année,
00:51:31c'est que la déraison est à l'œuvre.
00:51:35Vous ne dites rien, bien sûr.
00:51:42Eh bien, mon oncle, que faites-vous là ?
00:51:47J'attends.
00:51:48Vous attendez ?
00:51:49Oui, une jeune personne qui doit me montrer certains traités qu'elle a commis.
00:51:57Et resterez-vous là jusqu'à son arrivée ?
00:52:00À vrai dire, elle ne viendrait que plus tard.
00:52:04Mais je tenais à m'assurer que tout était en place.
00:52:11J'attends.
00:52:12J'attends.
00:52:27Vous n'oserez jamais me dire qu'elle se plaint.
00:52:33Acceptez que juste de l'impunité que l'âge me confère,
00:52:37pour vous dire la vérité,
00:52:39votre étude est fort judicieuse,
00:52:41et le style à votre image pur et sensible.
00:52:45Pensez-vous, monsieur ?
00:52:48Mon souci de vivre selon des règles simplement vides
00:52:53a toujours pensé, comme je dis,
00:52:59je ne vois toutefois guère ce qu'il y aurait maintenant à vous apprendre
00:53:03sur l'observation des étoiles.
00:53:09Pardonnez-moi, monsieur, si je me suis mal faite entendre.
00:53:12En fait, ma tante ne possède pas des lunettes astronomiques.
00:53:16Et vous voudriez ?
00:53:18Venir étudier chez vous.
00:53:20Mais...
00:53:24la nuit ?
00:53:25Naturellement.
00:53:27Mais si cela est votre souhait,
00:53:29eh bien, je vais vous rendre votre excellente étude.
00:53:35Il y a d'autres choses dont vous m'avez promis de m'instruire.
00:53:40Je ne vois pas.
00:53:43Comment avez-vous si vous détachez de l'amour ?
00:53:48Alors, monsieur, souvenez-vous de votre promesse.
00:53:53Comprenez mon embarras.
00:53:55Qu'est-il d'embarrassant ?
00:53:57Rien.
00:53:58Eh bien ?
00:54:03On se dévoile toujours trop.
00:54:05Quel danger !
00:54:06Il ne faut pas raconter sa vie.
00:54:09Après, les gens vous demandent des comptes.
00:54:12Ils estiment que je les regarde.
00:54:17Alors ?
00:54:19Eh bien,
00:54:21dans ma dix-septième année, une jeune fille de quinze ans,
00:54:24une lointaine parente,
00:54:26était venue passer la belle saison chez nous.
00:54:29Un soir, quand nous nous promenions,
00:54:31j'ai osé lui donner un baiser.
00:54:35Dans son regard, j'ai vu
00:54:37une confiance qui m'a ému bien plus que le baiser lui-même.
00:54:44Cet instant de grâce n'a été gâché par aucune parole.
00:54:49C'est la seule fois de ma vie
00:54:51où j'ai ressenti quelque chose.
00:54:55N'avez-vous jamais revu cette jeune fille ?
00:54:59Je n'ai pas voulu.
00:55:02C'est pour cela que je ne l'ai jamais oubliée.
00:55:05Mais après ?
00:55:08Ce souvenir a suffi à me garder des ravages du cœur,
00:55:12à ne point fixer le mien.
00:55:15Ce qu'il me fallait, je l'ai trouvé.
00:55:19La sérénité de complicité aimable et bien vécue.
00:55:24Pour le reste,
00:55:27regardez le calendrier.
00:55:30Vous verrez qu'il faut dans l'amour bien du talent pour résister.
00:55:33En lieu et place de l'émerveillement perpétuel,
00:55:38vous trouverez l'exactitude et la régularité des jours.
00:55:43Un vertige.
00:55:46Il faut que la présomption domine
00:55:49pour répondre favorablement à la seule question qui vaille.
00:55:55M'aimerez-vous encore demain ?
00:56:03J'aimerais qu'il m'arrive quelque chose d'heureux.
00:56:07Pourquoi est-ce si difficile ?
00:56:10Ça ne doit pourtant pas demander à Dieu un effort bien considérable.
00:56:16Qu'espérez-vous ?
00:56:20Ce que vous avez refusé.
00:56:22Vous vous y êtes déjà brûlée.
00:56:25Mais comment une femme pourrait-elle voir autrement sa vie
00:56:28qu'accorder à celle de l'homme qui sera l'aimée ?
00:56:31T'en es fait une croyance assez répandue,
00:56:34en dépit des dégâts qu'elle cause.
00:56:37Vous parlez comme un impie.
00:56:39Ne mêlez pas Dieu à cela.
00:56:41Le diable, alors ?
00:56:42T'es souvent son homme d'affaires.
00:56:44Pour ne pas vous déplaire, il faudrait donc renoncer.
00:56:49Le cœur ne doit pas faillir.
00:56:52Souhaitez-vous cela pour moi ?
00:56:54Ne cherchez-vous point de conseil ?
00:56:57On ne se marie pas avec la solitude.
00:57:00N'est-ce point préférable un homme qui serait indigne de vous ?
00:57:04Vous possédez assez d'intelligence pour être jamais seule.
00:57:08N'avez-vous point envie de connaître cette chose exquise et rare qu'on nomme liberté
00:57:13et de jouir par la même de cette autre merveille qu'on appelle la paix ?
00:57:19Je dois partir.
00:57:24Regardez, le soir est déjà tombé.
00:57:27En effet.
00:57:31Bonsoir, monsieur de Fontenelle.
00:57:36N'aimez-vous point mon prénom ?
00:57:38Vous ne le prononcez jamais.
00:57:41Je l'apprivoie.
00:57:50Je voudrais ne point me rappeler votre conseil, monsieur,
00:57:53mais peut-être est-il déjà trop tard.
00:57:58Peut-être est-il déjà trop tard.
00:58:10Bonjour, Françoise.
00:58:11Comment est notre homme ce matin ?
00:58:13Comme hier, madame, et comme avant-hier.
00:58:15Il chantonne, se fait raser et poudrer une heure durant,
00:58:18exige des rubans à son habit,
00:58:20et ne ressent plus aucune douleur,
00:58:22prétend même que son ouïe ne l'a jamais fait souffrir.
00:58:25Voulez-vous mon avis ?
00:58:27Monsieur se moque de nous.
00:58:30Et le pire, c'est que son appétit a redoublé.
00:58:33Il redemande de tout.
00:58:35J'en suis à me demander si c'est un signe de bonne santé
00:58:38ou de quelques dérangements.
00:58:56Et je ne saurais vous dire à quelle heure il se coche.
00:58:59Pense-t-il seulement à dormir ?
00:59:01Sait-il encore où est sa chambre ?
00:59:25Je me demande s'il ne confond pas la nuit et le jour.
00:59:28Lui, qui ne s'est jamais agité de sa vie,
00:59:30on dirait que rien ne va assez vite.
00:59:32Mathieu et Simon se plaignent de ce qui les a transformés en courant d'air.
00:59:36Tout ça n'est pas bon, madame, je vous le dis.
00:59:55Les visites de la jeune Isabelle semblent avoir sur vous un effet souverain, mon oncle.
01:00:02Êtes-vous inquiète ?
01:00:04Non point. Mais vous qui avez toujours accueilli avec la même humeur tranquille,
01:00:08vous me disiez que vous étiez un peu inquiète.
01:00:11Je ne suis pas inquiète.
01:00:13Je ne suis pas inquiète.
01:00:15Je ne suis pas inquiète.
01:00:17Je ne suis pas inquiète.
01:00:19Je ne suis pas inquiète.
01:00:21Je ne suis pas inquiète.
01:00:23Vous avez toujours accueilli avec la même humeur tranquille les gens et les choses.
01:00:27Il semble que la jeune Isabelle puisse se flatter de provoquer le changement dans vos habitudes.
01:00:33Je suis attentif à ses travaux.
01:00:36Elle entend la science à merveille et pratique le raisonnement et la déduction comme peu de gens.
01:00:44Voudriez-vous que je fusse absent quand l'intelligence, la finesse,
01:00:48l'esprit et la beauté se sont donnés rendez-vous ?
01:00:53Je vous assure qu'il m'est plus agréable d'écouter et de regarder Isabelle
01:00:58que tous les académiciens réunis.
01:01:06L'autre jour chez la marquise de Villemin, une femme qui devait avoir dans les 40 ans,
01:01:12se mit à nous observer comme si elle s'inquiétait qu'Isabelle fût si jeune ou que je fût si vieux.
01:01:20Quelle tristesse que de se trouver entre deux âges.
01:01:25Vous avez changé, mon oncle.
01:01:28En bien ?
01:01:29C'est comme...
01:01:32Pardonnez-moi, j'allais dire une sottise.
01:01:35Allez, allez.
01:01:38C'est comme si, soudainement, vous vous découvriez un cœur.
01:01:50Allez-y.
01:02:12Je vous ai blessée, je suis impardonnable.
01:02:15Je suis confuse.
01:02:19Quelle étrange griserie.
01:02:21Cet air frais.
01:02:24Il est possible que cela porte un nom ?
01:02:27Ne le prononcez pas.
01:02:29Quand on me demande, eh bien monsieur, comment va votre encyclopédie ?
01:02:45J'ai l'impression qu'on me transperce le cœur.
01:02:48Voulez-vous la vérité ? Nous sommes persécutés par des coquins qui espèrent de nous la résignation.
01:02:53Et Voltaire qui nous conseille d'aller continuer en pays étranger.
01:02:56Mais quelle idée se fait-il donc du courage ?
01:02:58Oui, nous continuerons, mais à poursuivre nos ennemis.
01:03:02Et nous retournerons à notre profit la bêtise de nos censeurs.
01:03:06Il est heureux de vous entendre parler ainsi, monsieur Diderot.
01:03:09D'Alembert disait ici même l'autre soir que vous vous sentiez découragé.
01:03:14D'Alembert subit plus que moi les assauts des imbéciles.
01:03:17Mais il est vrai que le repos me tente.
01:03:21Je rêve parfois d'une vie tranquille au fond de ma province.
01:03:25Alors tout s'apaiserait.
01:03:28Et je pourrais voir dans les cœurs un peu d'innocence.
01:03:32Mais il faut être utile aux hommes.
01:03:36Et travailler.
01:03:38Je me demande pourtant si l'on ne fait pas autre chose que les amuser.
01:03:43Quelle différence y a-t-il entre le philosophe et le joueur de flûte ?
01:03:46On ne peut changer les hommes, monsieur.
01:03:48Et tantôt ils se tourneront vers votre philosophe,
01:03:51tantôt ils préféreront le joueur de flûte.
01:03:54Vous croirez entendre monsieur de Fontenelle ?
01:03:56Votre remarque me flatte, monsieur.
01:03:58Moi, je crois que les hommes sont faits de plusieurs petits récipients.
01:04:01Celui de la raison, celui de l'imagination, celui de l'esprit.
01:04:06Et qu'il y a aussi une grande marmite de pure bêtise.
01:04:10Ah !
01:04:12Voilà bien la preuve que tous les êtres ne se ressemblent pas.
01:04:15Et que pour certains d'entre eux, le destin n'est plus écouté dans la grande marmite.
01:04:20Et bien moi, j'avance que tous les êtres humains doivent être considérés de la même façon.
01:04:25Vous ne pouvez quand même pas prétendre qu'ici même, nous sommes tous pareils.
01:04:28Et laissez donc le seigneur seul juge de ce que nous sommes et de ce que nous valons.
01:04:35De qui parlez-vous ?
01:04:37Je suis surpris, monsieur, de ne pas vous avoir entendu blasphémer plus tôt.
01:04:42Et voulez-vous que je me rattrape ?
01:04:45Taisez-vous.
01:04:46Je vais vous dire ma manière de penser, monsieur.
01:04:50Ah ! Le châtiment est terrible.
01:04:54Je vais vous entendre en confession au plus tôt.
01:04:57En confession.
01:05:06On me dit, mademoiselle, que vos travaux sont du plus grand intérêt.
01:05:09Monsieur de Fontenelle m'est protégé.
01:05:11On me dit, mademoiselle, que vos travaux sont du plus grand intérêt.
01:05:15Monsieur de Fontenelle me prodigue des encouragements.
01:05:17Je voudrais y joindre les miens.
01:05:20Et je voudrais tout autant que vous ne refusiez pas que je vous entende chanter.
01:05:24Je ne peux, monsieur. Il n'y a personne pour tenir le clavecin.
01:05:28Si ?
01:05:30Moi ?
01:05:42Un simple corporel
01:05:45Qui ne voit pas son péril
01:05:48Pour fuir un coup d'artillerie
01:05:52Vole dans le tremblement du château
01:05:55Vole dans le tremblement du château
01:05:59Vole dans le tremblement du château
01:06:10J'aimerais plus fuir la peine
01:06:13D'un amour fini d'un coup d'artillerie
01:06:16Et m'exposer d'un refus
01:06:20A l'outrage et à l'engouement
01:06:23A l'outrage et à l'engouement
01:06:29A l'outrage et à l'engouement
01:07:00A l'outrage et à l'engouement
01:07:19Maëlle !
01:07:20À ce temps matinal !
01:07:21Je dois voir votre nièce
01:07:24Pour lui remettre ceci.
01:07:26Elle est sortie.
01:07:27Mais pourquoi avez-vous pris vous-même la peine de...
01:07:29Où est-elle ?
01:07:30Monsieur Diderot est venu la chercher.
01:07:33Voulez-vous me confier ce que vous avez là ?
01:07:35Je la peux attendre.
01:07:38A tantôt.
01:07:49Enfin !
01:07:50Monsieur le Fontenelle, puisque je vous dis que monsieur Diderot n'est pas là !
01:07:53Où est-il alors ?
01:07:54Ah, il est... Pour vous dire sincèrement, il est...
01:07:56Où est-ce qu'il est ?
01:07:57Le lieu, je l'ignore, monsieur, mais il est...
01:07:59Avec une personne.
01:08:00Et que font-ils ?
01:08:02L'avez-vous vue, cette personne ?
01:08:03Ah, celle-là, non, je ne l'ai pas encore vue.
01:08:05Mais enfin, vous avez bien une idée.
01:08:08Elle doit être jeune, non ?
01:08:10Jeune et belle.
01:08:13Elles sont toutes jeunes et belles, monsieur.
01:08:17Je vais l'attendre.
01:08:26Monsieur Fontenelle !
01:08:28Mais qui a-t-il ?
01:08:31Je n'ai que peu de choses à vous dire, monsieur.
01:08:34Ce que vous faites...
01:08:36Oui ?
01:08:39Ce que vous faites, c'est...
01:08:41C'est quoi ?
01:08:42C'est...
01:08:43C'est quoi ?
01:08:44C'est...
01:08:45C'est quoi ?
01:08:46C'est...
01:08:47C'est quoi ?
01:08:48C'est...
01:08:49C'est...
01:08:50C'est quoi ?
01:08:51C'est...
01:08:52C'est...
01:08:53C'est...
01:08:54C'est...
01:08:55Ce que vous faites est...
01:08:59Incomplet.
01:09:01De quoi parlez-vous, non ?
01:09:03De votre encyclopédie.
01:09:07Qu'a-t-elle d'incomplet ?
01:09:09Vous n'y traitez point des passions, du sentiment.
01:09:17Qu'avez-vous à rire ?
01:09:19C'est vous, monsieur de Fontenelle, qui parlez de sentiments.
01:09:21Ah, et puis faites comme vous voulez !
01:09:23Je ne m'apprendrai à donner des conseils.
01:09:25Eh bien, une colère du paisible Fontenelle, l'événement est unique.
01:09:28C'est un honneur.
01:09:29J'envis vos emportements.
01:09:31J'aimerais vous ressembler.
01:09:33Permettez que je vous revoie le compliment, mais vous n'êtes pas sérieux.
01:09:36Qu'est-ce donc que je possède qui vous manquerait ?
01:09:38Du courage.
01:10:24Qu'avez-vous ?
01:10:26Rien.
01:10:29Vous semblez vous ennuyer.
01:10:31Non, pas du tout.
01:10:36Je crois que j'abuse de votre bonté.
01:10:39Ces nuits d'éveil ne sont que d'appauvres d'intérêt pour un savant comme vous.
01:10:46Je vous en prie, je vous en prie.
01:10:50Vous ne dites rien ?
01:10:53Que pense M. Diderot de vos observations ?
01:10:57Ma tante vous a dit.
01:10:59Il m'a fait l'honneur de trouver de l'intérêt à ce que je fais.
01:11:07Est-ce-là ce qui vous contrarie ?
01:11:10Je ne suis pas un contrarié.
01:11:14Je ne suis pas un contrarié.
01:11:16C'est moi en effet qui devrais l'être.
01:11:18Hier n'êtes-vous pas partie alors que je chantais.
01:11:22Vous avez bien d'autres oreilles pour vous entendre.
01:11:26Vous êtes de méchants humeurs, tout cela par ma faute.
01:11:30Aurais-je dû refuser l'invitation de M. Diderot ?
01:11:33Il s'est montré aimable et fort un jouet.
01:11:36Je n'en doute point.
01:11:38Reprenez vos observations.
01:11:41Pensez-vous que je ne puis oublier certains conseils ?
01:11:45Si M. Diderot a charmé mon esprit,
01:11:48mon corps, lui, n'a pas failli.
01:11:50Il aura été retardé en route.
01:11:53Vous croyez donc que je ne vous dis pas la vérité ?
01:11:57Pour ceux que de bien connaître la vérité, je crois disposer d'une certaine avance.
01:12:02Je ne vous dis pas la vérité.
01:12:05Je ne vous dis pas la vérité.
01:12:07Pour ceux que de bien connaître la vérité, je crois disposer d'une certaine avance.
01:12:10Bien inutile, je vous rassure.
01:12:13Les mises en garde que je vous ai adressées sont aujourd'hui dérisoires.
01:12:19Qui avait-il des dérisoires ?
01:12:21À vouloir m'épargner erreurs et souffrances ?
01:12:26Ce soir, je ne vois que trop la vanité de mes propos.
01:12:31Pas d'impulsion du cœur, du raisonnement.
01:12:37Je me suis laissé entraîner à penser que ce qui m'avait si bien convenu,
01:12:41devait vous convenir aussi.
01:12:45Voilà les paroles d'un homme
01:12:47qui toute sa vie a peu changé de place
01:12:52et qui en a tenu si peu.
01:12:58J'ai promis à M. Diderot d'aller lui rendre visite chez lui.
01:13:03Mais...
01:13:07Je voudrais continuer à étudier auprès de vous.
01:13:10Vous aimeriez, mais vous ne le soyez point.
01:13:16Je vous comprends mal.
01:13:18Vous cherchez à me dire que vous voulez votre liberté.
01:13:22Vous me blessez, monsieur.
01:13:24Je crains de vous blesser aussi.
01:13:27Cela arrive quand on vise au juste.
01:13:30J'ai de l'amitié pour vous.
01:13:32J'ai pensé cette amitié partagée.
01:13:35Mais les parts étaient inégales.
01:13:37J'aurais dû le savoir.
01:13:39Vous entrez dans la vie quand je ne me décide pas à en sortir.
01:13:43Alors...
01:13:44Mon cœur est honnête, monsieur.
01:13:46Je serai toujours heureux d'avoir connaissance de vos travaux.
01:13:50Nous nous verrons chez votre tante,
01:13:52si toutefois vous y paraissez encore,
01:13:54ce dont je doute.
01:13:56Pourquoi cela ?
01:13:57Parce que votre tête, votre esprit, votre corps seront ailleurs.
01:14:01Ils y sont déjà.
01:14:03On ne peut pas changer les hommes.
01:14:05Vous-même l'avez reconnu.
01:14:08Il est si pénible de dire adieu.
01:14:11Je voudrais vous éviter cet embarras.
01:14:14Ce soir, on...
01:14:17Vous êtes là pour la dernière fois.
01:14:20Et je l'ai su avant vous.
01:14:24J'insisterai, pour vous voir revenir,
01:14:27que je forgerai votre compassion.
01:14:30Ce serait me renier.
01:14:34Monsieur Diderot s'est montré enjoué, dites-vous.
01:14:40Il sera donc libertin, quand vous le croirez galant.
01:14:44Vous serez ainsi rassuré en pensant que l'esprit l'emporte.
01:14:48Nous préférons toujours abdiquer dans le confort.
01:14:51C'est à cela qu'on reconnaît nos défaites ordinaires.
01:15:59Mais vous connaissez ce roman par cœur.
01:16:03Le mot est juste.
01:16:06Madame Geoffrin vous rend visite.
01:16:10Bonjour, ma bonne amie.
01:16:12Que se passe-t-il ?
01:16:13Je vais vous expliquer.
01:16:16Votre avis me sera précieux.
01:16:19C'est au sujet d'Isabelle.
01:16:21Depuis un an, à peine l'ai-je vu sortir au matin de la maison et rentrer fort tard.
01:16:25Ce sont bien tous les reproches qui peuvent m'être faits.
01:16:29Je ne me suis point alarmée, sachant comme elle se passionne pour les sciences.
01:16:33Mais je connais aujourd'hui les raisons de sa conduite.
01:16:37Eh bien, M. Diderot a fait se rencontrer ma nièce et l'un de ses libraires.
01:16:42Ce jeune homme est l'un de ceux qui continuent à soutenir l'encyclopédie,
01:16:45mais il part s'installer en Flandre, à Lille, et il a demandé Isabelle en mariage.
01:16:51Je ne sais que faire, mon bonne amie, vous qui lui fûtes si précieux,
01:16:55qu'il avait aidé à sortir de son tourment par l'étude de la philosophie.
01:16:59Vous devez me conseiller.
01:17:02Lille, très belle ville.
01:17:14Néanmoins, il ne se rebute à pointe encore,
01:17:17et il fait tout ce qu'il peut pour la faire changer de destin.
01:17:21Des années entières s'étant passées,
01:17:24le temps et l'absence ralentirent sa douleur et éteignirent sa passion.
01:17:30Madame de Clèves vécut d'une sorte qui ne laissa pas d'apparence qu'elle pût un jour revenir.
01:17:51Votre visite m'a enchanté.
01:17:55Je suis heureux de vous avoir à Lille, tout au service de la librairie.
01:18:02Je sais ce que je vous dois, monsieur,
01:18:04et je chercherai toujours de quelle façon vous exprimer ma reconnaissance.
01:18:08Je n'aurai plus à chercher longtemps, Madame de Clèves.
01:18:11Je suis heureuse de vous voir.
01:18:13Je sais ce que je dois, monsieur,
01:18:15et je chercherai toujours de quelle façon vous exprimer ma reconnaissance.
01:18:19Je n'aurai plus à chercher longtemps, je pense.
01:18:23Qu'est-ce que vous voulez dire?
01:18:25Mon âge a fini par me rattraper.
01:18:28Vous vous portez à merveille.
01:18:32J'étais venue dans l'espoir que vous me pardonneriez.
01:18:35Je n'ai pas remarqué d'offense.
01:18:38Je préférais vous entendre dire que je m'étais montrée ingrate.
01:18:42C'est parfait pour être toujours affligé.
01:18:48Travaillez-vous en ce moment?
01:18:50J'étudie notre langue française.
01:18:54C'est un sujet inépuisable.
01:18:57Je m'étonne toujours de ce que tant de choses puissent loger dans si peu de mots.
01:19:04Regardez, il n'en faut que deux pour dire que le temps n'est pas à notre disposition.
01:19:12C'est des mots?
01:19:13Trop tard.
01:19:22Au revoir, monsieur.
01:19:43Je ne chante plus, monsieur.
01:19:45Et pourtant, chaque fois que j'aimerais le faire, je pense à vous.
01:20:06Adieu, Isabelle.
01:20:12Rentrez. Il fait encore frais.
01:20:42Vous avez raison. Il n'y a rien à dire.
01:21:12Adieu, Isabelle.
01:21:43Ah, vous vous remettez. Vous vous êtes toujours remis de tout.
01:21:48C'est bien la preuve que la clémence divine est infinie.
01:21:53Tenez, l'autre jour, je visitais madame Grimaud.
01:21:55Savez-vous qu'elle a passé les cent ans et, comme dit-elle,
01:22:00monsieur l'abbé, je crois que la première fois qu'elle s'est réveillée,
01:22:03elle s'est réveillée, elle s'est réveillée,
01:22:05elle s'est réveillée, elle s'est réveillée,
01:22:07elle s'est réveillée, elle s'est réveillée,
01:22:09et comme dit-elle, monsieur l'abbé, je crois que la Providence m'a oublié.
01:22:16Que peut-on répondre à cela ?
01:22:21Chut.
01:22:27Alors, c'était mieux qu'hier ?
01:22:29J'ai autorisé l'abbé Chalon à le voir en lui recommandant de ne pas le fatiguer.
01:22:40Mes respects, monsieur de Frontenelle.
01:22:50Que ressentez-vous ?
01:22:53Je ressens une... une difficulté d'être.
01:22:58Mais vous êtes mieux qu'hier, n'est-ce pas ?
01:23:02Je vous demande combien de temps vous avez été ici ?
01:23:06Je vous demande comment cela va-t-il ?
01:23:12Comment cela va-t-il ?
01:23:15Cela ne va pas. Cela s'en va.
01:23:22Je me regrette.
01:23:35Je me regrette.
01:24:05Je me regrette.
01:24:35Je me regrette.
01:25:06Vous auriez 800 ans dans un mois.
01:25:09Je vous aurais écrit cette lettre,
01:25:11malgré que je me blesse aux souvenirs d'un temps
01:25:14que je ne savais pas si heureux.
01:25:17J'entends dire de vous
01:25:19que vous n'avez pas le temps.
01:25:22Vous n'avez pas le temps.
01:25:25Vous n'avez pas le temps.
01:25:28Vous n'avez pas le temps.
01:25:31Vous n'avez pas le temps.
01:25:33J'entends dire de vous
01:25:35qu'il était le meilleur des amis,
01:25:37mais il se livrait peu.
01:25:39Qu'il pouvait comprendre qu'un vœu très cher vous habitait,
01:25:42s'éloigner de ceux que vous vouliez paraître.
01:25:45Et si je pense à vous,
01:25:47c'est que me vient enfin la force
01:25:49de dire votre secrète espérance,
01:25:52que quelqu'un, un jour,
01:25:55en temps de battre,
01:25:57a encore oublié.