"Ici, les familles viennent chercher de la simplicité, des vacances comme tout le monde, en fait."
Confrontés à la maladie de leur fille Andréa, Élodie et Louis ont créé Les Bobos à la ferme, un lieu de vacances ouvert à tous et destiné à accueillir des proches aidants. Un lieu "de répit" qu’ils auraient "rêvé d’avoir" lorsque leur fille a été diagnostiquée.
Confrontés à la maladie de leur fille Andréa, Élodie et Louis ont créé Les Bobos à la ferme, un lieu de vacances ouvert à tous et destiné à accueillir des proches aidants. Un lieu "de répit" qu’ils auraient "rêvé d’avoir" lorsque leur fille a été diagnostiquée.
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00:00C'est un truc qui m'a beaucoup choqué, c'est que vous êtes dans l'hôpital,
00:03on vous explique un peu ce qui va se passer et puis tout d'un coup on vous dit
00:06vous n'avez plus besoin d'être à l'hôpital, vous pouvez partir.
00:08Et donc on est rentrés un peu peuneaux avec notre petite fille qui n'avait même pas un an
00:11et puis notre petite valise handicap dans notre appartement et là on était seuls.
00:14Et à partir de là, on a très vite compris qu'on allait être très seuls très longtemps.
00:19Hop, je vous invite.
00:21T'es tout le temps entre quatre murs quand t'es dans la maladie ou le handicap,
00:24la nature est plus accessible.
00:26Ici, c'est les Bobos à la Ferme, c'est un corps de ferme qu'on rénove depuis 2016.
00:33C'est un lieu touristique, un tiers lieu qui accueille le grand public
00:39et particulièrement les familles touchées par la maladie ou le handicap d'un proche.
00:44Ici, vous avez trois gîtes, donc là il y a notre longère, on vit sur place.
00:49On est arrivés ici parce qu'on vivait à Paris quand on a eu Andrea
00:55qui était notre premier enfant.
00:56Finalement, l'annonce du diagnostic et la perte de nos emplois
01:03nous a mis devant un non-choix qui était celui de quitter Paris
01:08parce qu'on ne pouvait plus payer nos loyers parisiens.
01:11Et donc, on s'est mis en quête d'un endroit où on pourrait habiter
01:16et dans lequel on pourrait créer nos nouvelles activités professionnelles.
01:20Parce que comme on nous a annoncé très tôt le pronostic vital engagé d'Andrea,
01:25on a souhaité rester auprès d'elle le plus longtemps possible.
01:27Et on a découvert les aidants, le répit, et donc on a décidé de proposer
01:33une offre de séjour de répit, de séjour adapté au sein de nos gîtes.
01:39Alors ?
01:46Quand on arrive aux urgences de l'hôpital Robert-Debré en janvier 2016
01:50et que la médecin urgentiste nous dit effectivement
01:54Madame, Monsieur, vous avez raison, il y a quelque chose qui ne va pas.
01:58Son périmètre crânien n'évolue pas.
01:59De manière très paradoxale, c'est un soulagement autant que c'est un effondrement
02:04parce qu'on est enfin entendu, écouté.
02:06C'est un truc qui m'a beaucoup choqué.
02:08C'est que vous êtes dans l'hôpital, on vous explique un peu ce qui va se passer.
02:11Et puis, tout d'un coup, on vous dit vous n'avez plus besoin d'être à l'hôpital.
02:14Vous pouvez partir.
02:15Donc, on vous donne le nécessaire, la petite mallette pour vous occuper
02:18de votre gamin avec les sondes d'azogastrique, les médicaments, les seringues et les machins.
02:23Puis on vous la donne.
02:24On vous dit Monsieur, dans un an, c'est à vous.
02:26Et donc, on est rentré un peu peuneau avec notre petite fille qui n'avait même pas un an.
02:30Et puis, notre petite valise handicap dans notre appartement.
02:32Et là, on était seul.
02:33Et à partir de là, on a très vite compris qu'on allait être très seul très longtemps
02:36et que si nous, on ne se mettait pas en quête de quelque chose de nouveau
02:39et d'un sens nouveau, il n'y a personne qui allait nous l'apporter.
02:42Et ça, je trouve que c'est quelque chose qui a été moteur
02:44dans le projet qu'on a mené aujourd'hui.
02:45Qu'est-ce qu'elles viennent chercher, les familles ici?
02:49Elles viennent chercher de la simplicité, des vacances comme tout le monde, en fait.
02:52Donc, nous, on met à disposition le lieu et puis derrière,
02:55elles s'en emparent et elles le vivent comme elles le souhaitent.
02:58Ici, chaque famille a la possibilité de venir nourrir les animaux de la basse cour.
03:06Le répit, c'est ce qui vous a manqué quand Andréa était là?
03:13De l'air, de respirer.
03:14J'étais tout le temps entre quatre murs quand c'est dans la maladie ou le handicap.
03:17La nature est plus accessible.
03:19On a passé beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps à l'hôpital
03:23et dans une chambre d'hôpital et à pas bouger, à pas sortir.
03:27Quand on est arrivé ici, Andréa était tout le temps dehors.
03:34On va aller se poser à la maison des parents.
03:35Je suis Céline Vachette-Young.
03:38Je suis la maman d'Augustin, qui a 20 ans,
03:41la maman de Louison, qui a 17 ans et qui est porteur de trisomie 21
03:48et la maman de Victoire, qui a 14 ans et qui est autiste.
03:54Comment est-ce que tu as connu les Beaux-Bois de Sam?
03:55Par Instagram.
03:56Et qu'est-ce que vous allez faire ce soir?
03:58Ce soir, on va se régaler avec notre grand.
04:02On va avoir un bon petit moment tous les trois et ça va être parfait.
04:08Un moment de répit, c'est ce que vous êtes venu chercher ici?
04:10Vraiment, et ça faisait combien de temps avant ce soir
04:12que vous n'avez pas été séparés de vos deux enfants handicapés?
04:1618 mois.
04:16Victoire s'est découvert une passion pour la cuisine.
04:19Là, on est en relayage jusque 21 heures.
04:23Mais on a bien dit à papa et maman que si le temps était un peu dépassé,
04:27il n'y avait pas de stress à avoir.
04:29Nous, on reste là.
04:31On prend soin des enfants et on sera là le temps que les parents le décident.
04:35Être relayeuse aux Beaux-Bois, c'est...
04:37Tu te laisses le mettre?
04:38Vas-y.
04:39Être relayeuse aux Beaux-Bois, c'est prendre le temps
04:44pour les enfants extraordinaires,
04:47pour que les aidants puissent avoir le répit dont ils ont droit.
04:51On peut être appelé sur des missions d'une heure,
04:53sur des missions de trois heures, sur des missions en soirée.
04:57Et en fait, on s'adapte vraiment aux besoins des familles.
05:00Nous, avant notre relayage, on appelle les familles
05:03et on prend contact déjà en premier lieu.
05:07Et ils nous expliquent vraiment le caractère de l'enfant,
05:10ses spécificités, ses besoins.
05:13Et nous, après, on réfléchit à des activités qui leur seront propres.
05:20Par exemple, Victoire n'aime pas particulièrement les chevaux.
05:24Louison adore les chevaux.
05:25Et dans ces cas-là, moi, je vais partir en équithérapie avec Louison.
05:29Et Morgane s'occupera d'un moment plus détente et bien-être pour Victoire.
05:34Tous ensemble.
05:37À la vôtre !
05:38Ça implique quoi d'être parent aidant ? Qu'est-ce que ça veut dire ?
05:43Ça implique d'aller chercher au plus profond de soi
05:46des ressources qu'on ne pensait pas avoir.
05:48Être dans des situations compliquées.
05:51On pense qu'on a touché le fond, que c'est trop difficile,
05:53qu'on n'aurait pas pu vivre ça.
05:55En fait, on va plus loin encore à chaque fois.
05:57C'est inracontable, mais c'est une vie extraordinaire aussi.
06:03On n'échangerait pas notre vie pour rien au monde.
06:05On aurait juste besoin d'avoir plus de soutien concret.
06:10Je pense qu'effectivement, il faut vraiment déployer tout un écosystème,
06:13toute une fédération, bien plus encore, je pense,
06:17de plein d'endroits pour pouvoir avoir des lieux de répit.
06:21Concrètement, nous, avoir une soirée comme ça par semaine,
06:24comme on a eu hier, mais mille fois.
06:27Et puis une fois par mois, souffler, pouvoir se retrouver.
06:31On va faire ça chacun notre tour, parce qu'aujourd'hui, c'est ce qu'on fait.
06:33Il y a des millions de personnes qui sont concernées.
06:36Et il n'y a pas de force ou de mobilisation nationale d'ampleur.
06:40Il y a encore beaucoup de blabla sur le sujet.
06:42C'est-à-dire qu'on balance de l'aidant, on ne sait plus savoir quoi faire.
06:45Mais derrière, en termes de budget, en termes de projet, en termes d'action,
06:48c'est quand même encore extrêmement pauvre.
06:49Il y a un manque de fédération ou en tout cas un manque de collectif sur ce sujet.
06:53Comme si toutes ces personnes qui étaient aidantes,
06:55elles le faisaient un peu caché dans leur maison
06:58et que finalement, on n'osait pas trop en parler, pas trop en dire.
07:02Mais le jour où ça va se savoir, le jour où les gens vont vouloir véritablement
07:05que cette problématique qui les concerne soit sur le devant de la scène,
07:09ça va faire du bruit.
07:11Et je pense que c'est ça qui manque aussi.
07:12C'est qu'aujourd'hui, on n'est pas capable de faire du bruit sur un sujet
07:15qui est quand même assez consensuel, sur lequel il y a une urgence sociale.
07:18Et je me demande toujours, mais comment c'est possible ?