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00:00Il est 7h45, est-ce que le procès des viols de Mazan vous a marqué ?
00:04Quelles vont être ses conséquences ? Est-ce qu'il peut faire changer les choses ?
00:09Appelez-nous au 0476 46 45 45 pour nous donner votre ressenti, votre avis, votre témoignage.
00:15On vous attend pour en parler.
00:16Et on commence par vous, au standard, Marie.
00:19Bonjour Marie, vous êtes la première.
00:21Bonjour.
00:22Bonjour, merci d'être avec nous ce matin.
00:24Vous, qu'est-ce que vous retenez de ce procès des viols de Mazan ? Est-ce qu'il vous a marqué ?
00:29Alors oui, il m'a marqué.
00:31Je suis bénévole dans une association sur Grenoble, l'association Tadé Ménage,
00:35qui vient en aide aux femmes victimes de violences.
00:38Donc c'est des choses auxquelles je suis confrontée régulièrement.
00:42Et ce procès, en fait, met en lumière ce à quoi on est confronté très régulièrement.
00:51Vous trouvez qu'il y aura un avant et un après ?
00:53Que les choses changent grâce à ce procès ?
00:56Qu'il y ait une libération de la parole, peut-être ?
00:58Je crois que ça met en lumière la force qu'on peut avoir et la force que peuvent avoir ces femmes.
01:10La force de Gisèle Pellicot est peut-être inspirante pour certaines femmes ?
01:15Voilà, tout à fait, complètement. Elle inspire.
01:20En tant que bénévole, je les vois, ces femmes, être fortes, mais dans leurs coins cachés, honteuses.
01:29Avec Gisèle Pellicot, elles vont pouvoir être fortes et pouvoir exprimer leurs paroles et ouvrir la parole.
01:37Merci pour ce témoignage, Marie, pour démarrer notre discussion.
01:41Et pour réagir et décrypter tout cela, on est en studio avec Maître Sylvia Rizzi.
01:45Bonjour. Merci d'être avec nous ce matin.
01:48Avocate grenobloise, membre du Conseil national des barreaux, en charge des violences faites aux femmes et des violences intrafamiliales.
01:55Le témoignage de Marie est intéressant. Elle dit que c'est inspirant pour un certain nombre de femmes.
02:01Est-ce que vous, qui le côtoyez aussi, vous avez le même sentiment ?
02:04Oui, bien sûr. On a le sentiment que Gisèle Pellicot, qui a été d'une force incroyable,
02:12va donner de la force à toutes ces femmes qui n'arrivent pas à parler, qui n'osent pas.
02:17Pourquoi ? Parce que la plupart du temps, elles sont paralysées par le sentiment de honte,
02:21et que Gisèle Pellicot est allée au-delà de ça, puisqu'elle a fait lever le huis clos,
02:26et que grâce à cela, on a pu avoir ce débat, qu'on aura peut-être de manière plus approfondie,
02:33sur le consentement, puisqu'il y avait les vidéos et qu'elle s'est exposée à la vue de tous.
02:39On va y venir, effectivement, à cette question du consentement.
02:41Je veux juste rester sur cette personnalité de Gisèle Pellicot, assez hors norme,
02:46qui à la fois est inspirant, et en même temps, ça peut être une pression énorme,
02:49peut-être derrière, pour les victimes, de se dire, il faut maintenant que ce ne soit pas à huis clos,
02:54que ce soit public, etc. Est-ce que ça ne met pas aussi une pression énorme sur les victimes à l'avenir ?
02:58Je ne pense pas. Sur mes 38 ans d'exercice professionnel, il y a eu très nombreuses victimes
03:05que j'ai pu accompagner, que ce soit dans les violences intrafamiliales ou particulièrement les violences sexuelles.
03:11Certaines ont choisi le huis clos, d'autres non, pour des raisons qui leur sont personnelles.
03:15L'essentiel, c'est d'être bien accompagné par les associations qui font un travail fabuleux à ce niveau-là,
03:22par les professionnels du droit que nous sommes, les avocats, les magistrats, les policiers.
03:27Et si cet accompagnement est bien fait, les femmes pourront parler et choisir en toute liberté
03:33le huis clos ou la publicité des débats.
03:36La personnalité de Gisèle Pellicot et sa force, elle est aussi saluée dans nos commentaires sur notre page Facebook.
03:41C'est ce qui ressort de plein de commentaires ce matin. On a Joël qui nous parle de la dignité,
03:46de l'énorme courage qui émane de la personne de Gisèle Pellicot.
03:50Joss aussi qui nous dit ça, que de courage, de dignité de la part de cette femme.
03:54Grâce à elle, une évolution va se produire, la peur a changé de camp.
03:59Et puis Sylvie qui nous dit, le procès de Mazan m'a marqué.
04:02Il va changer le regard de la société sur le viol conjugal et le viol par soumission chimique.
04:07Les femmes vont plus oser en parler et porter plainte.
04:10Alors est-ce que ce procès vous a marqué ? Est-ce qu'il peut faire changer les choses, la façon de les percevoir ?
04:17N'hésitez pas à nous appeler 04 76 46 45 45 pour nous donner votre avis de témoigné également. On vous attend.
04:24On est en studio avec maître Sylvia Rizzi, avocate grenoblaise spécialiste de ces questions.
04:29Vous avez commencé à en parler de la question du consentement et des conséquences juridiques peut-être.
04:33Qu'est-ce que ça peut avoir comme conséquences ?
04:36On évoque notamment des changements juridiques sur la notion de viol et de prise en compte du consentement.
04:42Oui, actuellement ce qui est en cours avec le climat politique que nous traversons,
04:47je ne sais pas si ces projets de loi parviendront un jour, c'est véritablement au vote.
04:52Mais sur l'introduction de la notion de consentement dans la définition du viol.
04:56Ce qui m'a marqué sur les commentaires que vous venez de donner à l'antenne,
05:02c'est notamment ce qu'on dit sur le viol conjugal par exemple.
05:05Et ça rejoint vraiment la notion de consentement, c'est-à-dire effectivement que dans notre société aujourd'hui,
05:11dans le viol conjugal il y avait presque une présomption de consentement
05:15qui a été effacée par la loi, mais c'est très récent, c'est les années 90.
05:21Et dans notre loi française, il faut démontrer qu'il y a eu violence, menaces, contraintes ou surprises
05:26pour que la notion de viol soit reconnue.
05:29C'est à la victime de démontrer qu'elle n'a pas été consentante, aujourd'hui ?
05:33Énorme débat chez les juristes, les avocats, les magistrats, etc.
05:37Oui, moi j'ai le sentiment, à travers les procédures,
05:42et je pense que Gisèle Pellicot qui a fait avec ses avocats preuve d'un courage et d'un travail extraordinaire,
05:48nous dirait exactement la même chose.
05:51C'est-à-dire que c'est à la victime de démontrer qu'il y a eu contraintes, menaces, surprises,
05:56et le refus d'introduire cette notion de consentement est contraire aux textes internationaux.
06:02C'est ma lecture de la convention d'Istanbul que la France a signée
06:05qui dit que l'on doit mettre en oeuvre dans nos lois des moyens concrets
06:08pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.
06:11Et je pense que le défaut de consentement devrait être introduit dans la loi et qui ne pose pas de problème.
06:17C'est le cas dans certains pays européens, il me semble, d'ailleurs en Suède, dans les pays nordiques, en Suède, en Belgique aussi.
06:22Une dizaine de pays ont ratifié, dans ceux qui ont ratifié la convention d'Istanbul,
06:26une dizaine de pays ont introduit la notion de défaut de consentement.
06:30J'adore l'expression de nos amis espagnols.
06:33C'est-à-dire ?
06:34Ils ne disent pas un nom c'est un nom, comme le disent beaucoup d'associations chez nous,
06:38solo si est si.
06:41Seul un oui est un oui.
06:43Exactement.
06:44Le consentement c'est le consentement.
06:46A tout moment des actes sexuels, c'est ce que les associations féministes nous disent très souvent.
06:54Il y a des tabous sans doute qui ont été levés aussi pendant ce procès,
06:58la question de la soumission chimique également.
07:00Alors on en a parlé un petit peu avec le GHB par exemple, la drogue du violeur,
07:03mais là c'est une échelle qui est autre quand même.
07:06Est-ce que ça vous avez le sentiment aussi que ça peut peut-être libérer la parole ce procès des viols de Mazin ?
07:11Sur cette question de la soumission chimique.
07:13Oui, je l'espère en tout cas.
07:15C'est vrai que là c'est un procès hors normes.
07:18Que la soumission chimique, on en entend finalement assez peu parler.
07:23Dans nos bureaux également, on en entend assez peu parler.
07:27Et les seuls cas dont j'ai pu avoir à connaître, c'est la soumission chimique,
07:32mais ça rejoint le procès de Mazin dans le cadre du mariage ou de la vie commune.
07:38Vous l'avez connu dans vos activités avec une cliente qui a été abusée par son mari.
07:43Exactement, avec un problème de soumission chimique.
07:47Donc oui, je crois que ça libérera la parole, on l'espère tous.
07:51Alors c'est visiblement ce qui est peut-être en train de se produire.
07:54En tout cas, je vous propose d'écouter Alice Santin-Janin, directrice de l'établissement Pluriel.
07:59C'est une organisation qui accompagne les victimes de violences conjugales.
08:02Elle raconte justement que depuis le début du procès des viols de Mazin,
08:05la parole s'est un peu libérée sur la soumission chimique.
08:09On a en effet, notamment en 39-19,
08:12quelques situations qui nous sont remontées par les écoutantes du 39-19
08:16concernant des femmes qui viennent aujourd'hui se questionner davantage
08:20par rapport à ce qu'elles peuvent vivre.
08:22Donc ça, c'est vrai que c'est vraiment des points pour nous d'avancer.
08:26Elle a des points d'avancer qui peuvent peut-être laisser espérer une libération de la parole.
08:30Du côté des hommes, qu'est-ce que ça peut aussi faire évoluer ?
08:33J'avoue que moi, pour ma part, ça a pu permettre des discussions avec des amis,
08:38avec des amis hommes et femmes.
08:40Il y a aussi pour moi la notion de culture du viol que j'ai compris grâce à ce procès.
08:46Disons que j'avais avant en tête des chiffres que très peu de femmes
08:51qui ont été agressées portent plainte ensuite.
08:53Mais là, ces 51 accusés de milieux totalement différents
08:58qui abusent d'une femme, etc.
08:59Moi, ça m'a fait prendre conscience de ça.
09:01Est-ce que vous pensez qu'il y a aussi un certain nombre d'hommes
09:04qui peuvent évoluer grâce à ce procès ?
09:06J'en suis persuadée.
09:08Autour de nous, que ce soit dans le milieu professionnel
09:11ou tout simplement dans notre milieu,
09:15on entend effectivement que ces débats font bouger les lignes,
09:18font réfléchir.
09:20Et puis, ça nous renvoie aussi à ce qu'on peut faire en matière de prévention
09:24sur ce qu'on appelle cette culture du viol,
09:26ou en tout cas, je dirais déjà la culture patriarcale,
09:29sur ce rapport d'égalité entre hommes et femmes
09:32et tout ce qu'on doit faire en termes d'éducation,
09:35parce que c'est bien de penser à la loi,
09:37c'est bien de penser à tout ce qu'on doit introduire dans la loi française,
09:39mais c'est bien d'agir en amont.
09:41Et je crois effectivement que ça ouvre tous ces champs de réflexion
09:44chez les hommes et je crois que c'est en train de bouger.
09:46Un grand chantier qui s'ouvre grâce à ce procès des viols de Mazan.
09:50Si ça peut déboucher sur ça, c'est tant mieux.
09:54Merci beaucoup Maître Sylvia Rizzi d'être venue en studio
09:57nous en parler ce matin.
09:59Je rappelle que vous êtes avocate, membre du Conseil national des barreaux.
10:02Et on remercie également Marie Austandard de nous avoir appelé au début d'émission.
10:06Merci à tous vos témoignages et notamment tous ceux qu'on a sur notre page Facebook.
10:10On aura l'occasion bien sûr encore d'échanger sur un autre sujet d'actualité demain.

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