Les négociations entre Israël et le Hamas stagnent depuis de longs mois, avec des points de blocage sur la présence militaire israélienne à Gaza et la liste des otages. Alors que les familles espèrent une issue rapide, la guerre continue, exacerbant les tensions et les souffrances des civils.
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00:00Notre dossier ce matin autour des discussions en cours entre Israël et le Hamas.
00:04Israël veut récupérer ses otages, le Hamas veut un cessez-le-feu à Gaza.
00:08Les deux parties discutent 7 minutes pour comprendre ce qui bloque.
00:17Et avec nous pour en parler, Guillaume Ancel, ancien officier,
00:20auteur de Saint-Cyr, à l'école de la Grande Muette et consultant BFM TV.
00:24Et d'abord, Stéphane Amart, correspondant de BFM TV à Jérusalem.
00:28Stéphane, il y avait de l'espoir ces derniers jours.
00:31Hier, c'est la douche froide des deux côtés.
00:34On s'accuse de faire capoter les discussions, mais qu'est-ce qui s'est passé ?
00:39Oui, absolument.
00:40Il y a une semaine, on était certains d'être sur le point d'un dénouement,
00:44d'une libération des otages, d'un accord avec le Hamas.
00:48Effectivement, ces derniers jours, il y a beaucoup d'optimisme.
00:51Les négociateurs israéliens ont été rappelés pour consultation.
00:55Alors, il y a deux points de blocage principaux.
00:57D'abord, le premier point, c'est la présence ou non de Tzahal
01:00après un éventuel cessez-le-feu dans la bande de Gaza.
01:03L'armée israélienne veut rester dans la bande de Gaza, même en cas de cessez-le-feu.
01:07Elle a d'ailleurs installé des bases dans cette bande de Gaza,
01:10ce que le Hamas a refusé dans un premier temps, avant d'accepter,
01:13en tout cas selon Israël, et à nouveau de refuser.
01:16Ce serait l'un des points de blocage.
01:17Et le second point de blocage, c'est la liste des otages.
01:20Le Hamas se montre incapable de fournir une liste précise des otages.
01:24On reconnaît à demi-mot que certains des otages
01:27seraient peut-être détenus dans des familles,
01:30en tout cas ne parviennent pas à en retrouver la trace.
01:32Vous restez avec nous, évidemment, Stéphane Amar.
01:34Guillaume Ancel, elle ressemble à quoi, ces négociations ?
01:36On sait qu'il y avait des discussions au Qatar, en Égypte.
01:38Qu'est-ce qu'on sait de ces pourparlers ?
01:40Qui parle, d'ailleurs ?
01:41En fait, ce qui est ennuyeux, c'est qu'elles durent depuis décembre de l'année dernière.
01:45Donc, elles ont plus d'un an de durée.
01:47Et c'est vrai qu'il y a un côté désespérant dans ces négociations
01:52puisque chaque semaine, les familles des otages en Israël rêvent
01:55qu'on leur annonce enfin que les familles sont rendues.
01:57Je pense que les premiers qui en rêvent, bien sûr,
02:00c'est les Palestiniens qui habitent à Gaza.
02:02Je rappelle qu'ils sont bombardés tous les jours.
02:04Depuis septembre, il n'y a plus aucune cible militaire
02:06qui justifie de bombardement.
02:08Et pourtant, il y a des bombardements quotidiens.
02:10C'est pour ça, d'ailleurs, que le ministre de la Défense,
02:12Yoav Galant, a été limogé par Benyamin Netanyahou
02:15parce qu'il a été le premier à dire qu'il faut qu'on s'arrête.
02:18Sinon, on va être accusé de commettre des crimes de guerre
02:21et on bombarde sans cible militaire.
02:23Et puis surtout, il y a le côté « cette guerre continue, mais pour faire quoi ? »
02:27Alors, tout à l'heure, Stéphane faisait une description.
02:30C'est vrai que l'armée a installé des bases,
02:32mais ce n'est pas l'armée qui demande à rester à Gaza,
02:34c'est Benyamin Netanyahou.
02:36Et c'est un des points les plus durs de la négociation,
02:38c'est que la défense, l'armée israélienne,
02:40ça hâle, dit « mais nous, il ne faut surtout pas qu'on reste
02:43parce que c'est ingérable, cette situation.
02:45Il faut qu'on se retire de Gaza
02:47une fois qu'on estime qu'on a détruit
02:49les cibles militaires les plus importantes.
02:51C'est le cas depuis septembre dernier.
02:53Non, Netanyahou veut absolument conserver
02:55le contrôle de la bande de Gaza.
02:57Ce qui est beaucoup plus ennuyeux,
02:59c'est qu'en fait, le fait que la guerre continue
03:01lui permet de se maintenir au pouvoir.
03:03Parce qu'il sait que la société israélienne
03:05l'attend au tournant,
03:07d'abord sur ses innombrables procès,
03:09mais surtout pour expliquer l'échec du 7 octobre.
03:12Parce que le 7 octobre, l'attaque terroriste du Hamas
03:14qui va déclencher cette guerre,
03:16c'est d'abord un échec sécuritaire.
03:18Il avait fait de la politique sécuritaire
03:20un élément essentiel de son pouvoir.
03:22Donc Netanyahou a peur du moment
03:24où il va stopper la guerre
03:26et il attend le plus longtemps possible
03:28jusqu'à l'investiture de Donald Trump,
03:30le président américain,
03:32son ami et son principal soutien,
03:34qui lui a imposé de stopper la guerre.
03:36Mais lui estime qu'il faut le faire
03:38le plus tard possible.
03:40Et donc il le fera dans les quatre semaines qui viennent.
03:42On espérait que ce soit cette semaine, bien sûr.
03:44Malheureusement, il repousse encore l'échéance
03:46comme il nous y est habitué depuis plus d'un an.
03:48Les Israéliens le soutiennent toujours ?
03:50Les Israéliens soutiennent toujours Netanyahou ?
03:52Ou justement il a perdu en popularité ?
03:54Il faut bien faire la différence
03:56entre le chef de guerre
03:58que la société est obligée de soutenir.
04:00Parce que c'est difficile de demander des comptes
04:02à un chef de guerre quand la guerre a lieu.
04:04Et puis Benjamin Netanyahou
04:06qui a viré complètement à l'extrême droite
04:08et qui aujourd'hui a une politique
04:10qui pour moi, en tout cas par mes amis,
04:12n'est plus du tout soutenue.
04:14Et par conséquent, c'est sûr que quand la guerre va s'arrêter,
04:16là les comptes vont commencer
04:18à être rendus.
04:20Et ça va être très dur pour Benjamin Netanyahou
04:22sauf s'il peut montrer qu'avec le soutien
04:24de Donald Trump arrivé à la présidence
04:26des Etats-Unis, quelque part
04:28il s'estime intouchable.
04:30Stéphane Amart, on sait qu'il y a
04:32la population civile de Gaza qui attend ce cessez-le-feu
04:34et puis il y a côté israélien
04:36les familles des otages qui attendent des libérations.
04:38Est-ce qu'elles arrivent toujours
04:40à faire entendre leur voix en Israël
04:42dans ce contexte-là ?
04:44Oui, en tout cas, elles restent très mobilisées.
04:46Il y a très régulièrement des manifestations.
04:48Il y a des rencontres
04:50également entre les familles des otages
04:52et les dirigeants israéliens.
04:54Elles savent aussi, malheureusement,
04:56que dans une négociation, il y a deux parties.
04:58Il y a une volonté israélienne
05:00qui est très forte. Aujourd'hui, par exemple,
05:02le président de l'État, Herzog,
05:04a demandé une libération à tout prix.
05:06Mais il y a également, bien sûr, la partie palestinienne.
05:08Et pour le Hamas, c'est un petit peu aussi
05:10une question de survie,
05:12parce que le Hamas sait que sa dernière carte,
05:14ce sont les otages.
05:16Le mouvement a été largement battu,
05:18même terrassé militairement.
05:20Il y a encore des affrontements dans la bande
05:22de Gaza, notamment dans le nord,
05:24autour de Beit Hanoun, autour de Djébalia,
05:26qui sont encore des bastions
05:28du mouvement armé.
05:30Mais enfin, le mouvement est extrêmement isolé
05:32depuis que le Hezbollah a quitté
05:34la partie avec ses cessez-le-feu,
05:36depuis la chute de Bachar al-Assad,
05:38puisque c'est l'Iran,
05:40qui est aussi un des grands soutiens du Hamas,
05:42qui a pris un coup très sévère.
05:44Et donc, cette affaire des otages,
05:46le Hamas, d'une certaine manière,
05:48s'y accroche, veut en tirer le maximum.
05:50Et c'est également pour ça
05:52que les négociations s'éternisent.
05:54Guillaume Ancel, est-ce qu'on sait
05:56combien d'otages il reste ?
05:58On sait que c'est la clé,
06:00c'est la vie de ces otages.
06:02Officiellement, il resterait à peu près 90 otages
06:04aux mains des différents groupes,
06:06comme l'a rappelé Stéphane,
06:08et puis qu'évidemment, on ne va pas les laisser partir pour rien.
06:10Mais sur ces 90, compte tenu du fait
06:12qu'ils ont été bombardés consensueusement
06:14depuis plus d'un an maintenant,
06:16on estime qu'il en reste entre 20 et 30 vivants
06:18au maximum.
06:20Donc la négociation, elle porte aussi
06:22sur la possibilité pour les familles
06:24de récupérer au moins les corps.
06:26C'est extrêmement important pour les familles
06:28de pouvoir faire leur deuil.
06:30Mais c'est vrai que c'est assez consternant
06:32quand on entend Netanyahou afficher le fait
06:34qu'il n'y ait plus d'otages, alors qu'il les a fait bombarder
06:36depuis plus d'un an, et ce n'est pas la meilleure
06:38manière de libérer des otages.
06:40Il nous reste une minute, Guillaume Ancel, je voudrais vous entendre
06:42sur le fait qu'Israël a fini par conclure une trêve
06:44avec le Hezbollah. Alors OK, le Hezbollah n'a pas commis
06:46le 7 octobre. Néanmoins, comment expliquer
06:48qu'Israël ait pu s'accorder avec son ennemi du nord
06:50et pas avec son ennemi du sud ?
06:52C'est simplement le paramètre Netanyahou ?
06:54Oui, c'est le paramètre Netanyahou,
06:56parce qu'on voit bien que c'est là où il veut conserver
06:58cette guerre. En septembre, il avait la possibilité
07:00de conclure un accord
07:02avec le Hezbollah et avec le Hamas.
07:04Les Américains, les Égyptiens en étaient convaincus
07:06et ont stoppé la guerre. Et en fait, on voit bien que
07:08là, Netanyahou, contre l'avis
07:10de son ministre de la Défense, Yoav Galant,
07:12a voulu continuer la guerre à tout prix,
07:14avec des succès, parce que
07:16la chute en Syrie de Bachar el-Assad
07:18est un vrai succès pour la sécurité d'Israël,
07:20mais avec un échec considérable,
07:22ce sera expliqué les dizaines de milliers
07:24de morts qu'il a fait à Gaza,
07:26qui sont sans rapport avec la cible du Hamas.